Red Light Story
Par : King_Yugo
Genre : Sayks , Polar
Status : Terminée
Note :
Chapitre 17
Les Putes Furieuses
Publié le 04/07/11 à 18:57:46 par King_Yugo
- Au fait, il est quelle heure ?
Mon portable affiche toujours 12h12, ce qui prouve que soit je suis perdu dans une faille temporelle, soit que mon téléphone a un problème. Après quelques minutes de réflexions, j'opte pour la deuxième option et d'une claque sur l'arrière de mon crâne Mikael me fait comprendre que j'ai raison. C'est une vieille matraque qui semble dater des débuts des années 90. Je m'en sers comme arme de self-défense et accessoirement pour épater la galerie dans mes repas d'affaires, prétextant posséder l'unique protoype du Iphone 6 vintage édition.
- Il approche de minuit.
- T'es sérieux ?
- Regarde mec, c'est des vrais gangstas !
Il pointe du doigt trois blacks vêtus de casquette, de chaînes en faux argent et de vêtements amples, qui -effectivement- ressemblent à des gangstas. Mais pas de quoi en faire un plat non plus surtout que l'heure est passée plus vite qu'une formule 1 dans son stand. Je panique, perd mes moyens, mes bras s'agitent dans tous les sens sans que je parvienne à les contrôler. Sans connaître la raison de l'horreur qui secoue mon corps, mon acolyte se joint à moi et fait remuer ses membres comme un enfoiré possédé par une entité démoniaque, en hurlant. Par un don télékinesique quelconque, je lui ai transmit mon angoisse.
- J'ai complétement zappé Ruxanda ! Vite !
Une série d'images peu rassurante défile dans ma tête. Je vois d'abord deux pigeons aux yeux glaciaux, le bec serrés, les ailes angéliques. Ils se battent. Puis j'aperçois Moustache-Farine et l'Homme de l'Ombre, attendant patiemment de nos nouvelles, contorsionnés dans un coin du miteux Het Oerwoud. Et enfin, Ruxanda, fermant sa vitrine et baissant ses stores, habillée comme une personne normale, le visage encore tuméfié par la folie de son souteneur. Par contre, ce dernier tableau est réel. Elle se passe vraiment. Ce que je pensais être une vision à distance n'est rien d'autre que la réalité. Cœur à deux cent à l'heure, je force mon chauve à se planquer en le poussant violemment dans une ruelle coupe-gorge, m'éclaircit la gorge et me rend compte que j'ai oublié le flingue dans notre cage à poule. Tant pis, j'ai qu'à faire comme si j'avais vraiment quelque chose entre les jambes.
- Ruxanda. Qu'est-ce que tu fais ?
La prostituée regarde à droite et à gauche en se pinçant les lèvres, elle n'a pas envie d'être surprise avec moi. Les rues sont vides, mais ici les murs ont plus que des oreilles. Les fenêtres sont leurs yeux. J'ai la vessie pleine, le cerveau dans tous les sens et les chevilles douloureuses à force de marcher. Elle est plus moche que jamais. Elle fume une clope et lorsqu'elle la porte entre ses lèvres gonflés je remarque que ses mains sont sèches et cagneuses.
- Qu'est-ce que tu veux ?
Son accent de l'est est plutôt bandant : Avec un sac poubelle sur la tête, elle est quand même baisable. Elle pose la lanière de son sac en faux cuir sur son épaule gauche, range les clefs dans son jean puis se met à marcher rapidement. Je lui emboîte le pas. Ses fesses flasques sont boudinés par un jean clair de faible qualité.
- Tiens, j'ai ton fric. - Qu'est-ce que je peux faire pour toi ?
Elle jette un œil dans l'enveloppe et la fourre rapidement dans son sac. Son allure et de plus en plus difficile à suivre. Je me dis que cette technique est conne, mais qu'elle marche.
- Attends deux secondes je vais pisser.
Au contraire, elle augmente l'allure et je ne peux pas la retenir, de même que ma vessie au bord de l'explosion. Je m'engouffre dans une ruelle coupe-gorge, urine et remonte mon pantalon. Évidemment, la dernière goutte laisse une trace sur mon pantalon beige. Je rattrape Ruxanda, dont la paillasse blonde virevolte avec le vent. En face, sur l'autre rive, j'aperçois Mikael qui nous suit à la trace, tout en gardant sa distance, fumant un pétard sous la brume naissante. Je suis un peu rassuré, même si la présence de mon acolyte – au-delà des valeurs de l'amitié qui me sont chères – ne sera d'aucune utilité en cas de pépins. Enfin, si, il pourra appeler ma mère, pour lui apprendre la mauvaise nouvelle. Et encore, je doute qu'il est les couilles pour ça. Je prends de la vitesse et talonne Ruxanda. La suivre n'est pas si facile. Malgré ses talons, sa carrure de crevettes séropositive et les pavés, elle gambade comme une gazelle en pleine savane, la grâce en moins.
- On fait quoi là ? On va où ?
- Je ne serais plus pute, bientôt. Je vais partir. C'est la dernière fois que tu me vois et je ne sais pas qui tu es ni pourquoi tu me files ce fric, mais je m'en fous d'accord ? Tu sais je travaille pour les Albanais. Toi vouloir problème avec les Albanais ?
J'exigeai une réponse, mais on dirait que je n'ai pas posé la bonne question. Je me demande si elle me tend un traquenard, j'ai l'impression de parler à un disque rayé et ce n'est pas agréable. J'aimerais la faire scratcher comme un vrai DJ mais ce n'est pas possible. J'ai déjà quelques infos. Je les note dans un calepin mental : « Je vais partir bientôt ». C'est une information importante pour les souteneurs. Incapable de comprendre pourquoi elle m'autorise à la suivre. Peut-être que je luis fais tellement pitié qu'elle a décidé de me prendre sous son aile pour m'éduquer à la dure. Je dois me répeter.
- Tu vas où ?
- Si tu tiens à le savoir, continue à faire le toutou.
Malice malsaine dans ses yeux de chienne. Je tourne la tête, croisant les doigts pour que mon chauve soit toujours à bonne distance, c'est mon repère, mon port d'attache. Je ne suis qu'un radeau au milieu d'un océan en proie au déluge. Heureusement, il est là, marchant capuché à quelques centimètre de la rive, derrière le rideau des bagnoles. De la fumée s'élève au-dessus de sa silhouette, formant ainsi une aura rassurante parmi les mauvaises ondes qui assombrissent de le Red Light District. Je soupire, putain que c'est bon de ne pas être seul dans ces moments de galère ! On déboule dans un coin totalement inconnu d'Amsterdam, ou même l'odeur est différente. Je voudrais engager la conversation mais c'est impossible : Elle porte un casque ventouse sur les oreilles, techno hardcore pour les tympans. Mais je panique et mes gestes incontrôlés commence à la gaver sérieusement, ça se voit dans ses yeux de hyènes. Elle baisse son casque et me fusille du regard.
- Suis moi, si t'as les couilles, petit français. Mais dépêche toi, personne doit nous voir.
Elle m'a dit ça sur un ton de défi, presque provocatrice. Pas l'intention de reculer. Dans ma tête, deux options : Soit elle m'aime bien et projette de coucher avec moi sans exiger des tarifs abracadabrantesques, soit elle va se débarrasser de moi. Peu importe, cette tambouille est trop mathématique pour moi, je m'en remets donc à ma bonne étoile. Elle seule pourra me guider, et me sortir du pétrin. Je suis cependant à dix mille années lumière de me rendre compte des choses telles qu'elles sont vraiment. La réalité n'a plus aucune importance depuis bien longtemps. Derrière, pas de Mikael, pas de chauve, pas d'acolyte, rien, moi, elle, mon coeur qui cogne comme une baffe de sumo. Juste deux murs de briques rouges parallèles, menaçant à chaque seconde de brutalement dévier leur trajectoire afin de se rejoindre. On arrive dans une impasse constituée par deux maisons abandonnées et infestées par des mauvaises herbes. De magnifiques graffitis décorent les façades meurtries par des années de squats, peintures et témoignages de plusieurs générations de drogués, de hippies, de marginaux, d'artistes et de trous du cul en tout genre. Des arbres calcinées jalonnent la cour, jadis flamboyante ou au contraire, apocalyptique. Ça pourrait être un ancien asile psychiatrique comme un bordel de luxe. En tout cas, c'est n'est pas un luxueux bordel qui s'offre à moi et Ruxanda s'arrête devant une planche de bois disposée à l'horizontal pour palier un trou dans le mur. Elle retire son casque, éteint sa musique, passe la main dans sa tignasse-paillasson et se tourne vers moi, l'air vicieuse.
- Toi pas en croire tes yeux. Plein de filles, rien que pour toi.
Cette information me fait blêmir, Mikael n'est plus là, enfin, pas dans mon champ de vision. Elle tape trois coups de poings et à l'intérieur on entend des talons se rapprocher de la porte improvisée. Une voix rauque pose une question albanaise. Question albanaise, réponse albanaise :
- Olympe.
Cliquetis automatique, ouverture des portes à la Star Trek. Un travesti noir dont le sexe volumineux forme un reflet sous son legging rose. La pièce est immense, le plafond en verrière est soutenue par d'épaisses voûtes probablement gothique ou un truc dans le même genre. Ça pue le moisi dans cette pièce de merde, visiblement réaménagé en salle de conférence. Face à moi, cinq rangées de chaises occupées uniquement par des putes. Maintenant je sais que je suis dans un cauchemar, c'est obligé. Je perçois également une estrade et une pancarte « Free Hoes » malhabilement accrochée entre deux piquets en bois. A ma gauche, dans l'ombre, une masse solide est dissimulée par une couverture au fond de la pièce. A ma droite, des sacs poubelles et d'autres trucs dégueulasse, je pense que c'est la d'où vient l'odeur. Les putes se lèvent d'une même impulsion et se tournent face à moi. Si c'était un rêve, elles s'agenouilleraient et me suceraient une par une mais c'est un cauchemar. Leurs yeux sont des balles de fusil à pompe, je n'ai pas de pare-balle mental. Le plomb s'enfoncent dans ma peau, perce mes organes, je meurs, mon esprit quitte mon corps. Elles sont probablement toute originaire de pays comme l'Albanie, la Bulgarie ou encore la Roumanie. Exploitées, violées, frappées, volées, menacées, sous-payées, elle se rejoignent dans cette salle de façon officieuses, ça se voit. Elles n'ont pas l'air très joyeuse. Elles ont plutôt l'air épuisé, comme toute personne après une longue journée de travail. Après avoir demandé à l'une des filles de s'occuper de mon cas, Ruxanda monte sur l'estrade et commence à gueuler dans un langage agressif. Sa voix fait autorité, toutes les putes l'écoutent y comprit celle qui m'a attaché et bâillonné à une chaise métallique sur l'estrade, face à ces lionnes enragées. Elle me donne des petites claques sur le coin de la gueule tandis que les guerrières répètent les mots de Ruxanda en levant leurs poings fermés. Combien de chance y'avait-il pour que je tombe dans la cabine de cette dégénérée ? Je me le demande franchement. En plus, j'ai bien l'impression qu'elle s'inspire d'Hitler et cette pensée me glace le dos. La même portée de voix, la même rage, les mêmes gestes. Manque la moustache. Plus que jamais les filles répondent en chœur à ses appels, bras levés vers le ciel, je prêterai une couille pour comprendre la moitié de son charabia. Mikael doit être dans les parages, il faut qu'il le soit, sinon je suis cuitas les bananas. Notre communication visuelle a été interrompue, mais rien n'est perdu. J'y crois, putain, tout commence à devenir flou, c'est bientôt terminé. Concert d'applaudissements, Ruxanda salue respectueusement ses adeptes quand soudain l'une d'entre elles se lève, index pointé vers moi. Ruxanda répond sur un ton qui m'apparaît comme désinvolte, oui, je crois que c'est le mot, et l'assemblée éclate de rire. Le travelot black garde sévèrement la porte, sa perruque blonde ne fait pas autorité, aux antipodes de la Kalachnikov qui pendouille sous son épaule. Je sors mon calepin mental au cas où j'aurais l'occasion de revoir les macros qui me tiennent par les bourses: « Une armée de putes furieuse ». Vu l'heure qu'il est, les albanais doivent déjà être à ma recherche. Du moins, j'ose l'espérer. Ou pas. En fait quoiqu'il arrive, je suis dans la merde jusqu'au cou.
Mon portable affiche toujours 12h12, ce qui prouve que soit je suis perdu dans une faille temporelle, soit que mon téléphone a un problème. Après quelques minutes de réflexions, j'opte pour la deuxième option et d'une claque sur l'arrière de mon crâne Mikael me fait comprendre que j'ai raison. C'est une vieille matraque qui semble dater des débuts des années 90. Je m'en sers comme arme de self-défense et accessoirement pour épater la galerie dans mes repas d'affaires, prétextant posséder l'unique protoype du Iphone 6 vintage édition.
- Il approche de minuit.
- T'es sérieux ?
- Regarde mec, c'est des vrais gangstas !
Il pointe du doigt trois blacks vêtus de casquette, de chaînes en faux argent et de vêtements amples, qui -effectivement- ressemblent à des gangstas. Mais pas de quoi en faire un plat non plus surtout que l'heure est passée plus vite qu'une formule 1 dans son stand. Je panique, perd mes moyens, mes bras s'agitent dans tous les sens sans que je parvienne à les contrôler. Sans connaître la raison de l'horreur qui secoue mon corps, mon acolyte se joint à moi et fait remuer ses membres comme un enfoiré possédé par une entité démoniaque, en hurlant. Par un don télékinesique quelconque, je lui ai transmit mon angoisse.
- J'ai complétement zappé Ruxanda ! Vite !
Une série d'images peu rassurante défile dans ma tête. Je vois d'abord deux pigeons aux yeux glaciaux, le bec serrés, les ailes angéliques. Ils se battent. Puis j'aperçois Moustache-Farine et l'Homme de l'Ombre, attendant patiemment de nos nouvelles, contorsionnés dans un coin du miteux Het Oerwoud. Et enfin, Ruxanda, fermant sa vitrine et baissant ses stores, habillée comme une personne normale, le visage encore tuméfié par la folie de son souteneur. Par contre, ce dernier tableau est réel. Elle se passe vraiment. Ce que je pensais être une vision à distance n'est rien d'autre que la réalité. Cœur à deux cent à l'heure, je force mon chauve à se planquer en le poussant violemment dans une ruelle coupe-gorge, m'éclaircit la gorge et me rend compte que j'ai oublié le flingue dans notre cage à poule. Tant pis, j'ai qu'à faire comme si j'avais vraiment quelque chose entre les jambes.
- Ruxanda. Qu'est-ce que tu fais ?
La prostituée regarde à droite et à gauche en se pinçant les lèvres, elle n'a pas envie d'être surprise avec moi. Les rues sont vides, mais ici les murs ont plus que des oreilles. Les fenêtres sont leurs yeux. J'ai la vessie pleine, le cerveau dans tous les sens et les chevilles douloureuses à force de marcher. Elle est plus moche que jamais. Elle fume une clope et lorsqu'elle la porte entre ses lèvres gonflés je remarque que ses mains sont sèches et cagneuses.
- Qu'est-ce que tu veux ?
Son accent de l'est est plutôt bandant : Avec un sac poubelle sur la tête, elle est quand même baisable. Elle pose la lanière de son sac en faux cuir sur son épaule gauche, range les clefs dans son jean puis se met à marcher rapidement. Je lui emboîte le pas. Ses fesses flasques sont boudinés par un jean clair de faible qualité.
- Tiens, j'ai ton fric. - Qu'est-ce que je peux faire pour toi ?
Elle jette un œil dans l'enveloppe et la fourre rapidement dans son sac. Son allure et de plus en plus difficile à suivre. Je me dis que cette technique est conne, mais qu'elle marche.
- Attends deux secondes je vais pisser.
Au contraire, elle augmente l'allure et je ne peux pas la retenir, de même que ma vessie au bord de l'explosion. Je m'engouffre dans une ruelle coupe-gorge, urine et remonte mon pantalon. Évidemment, la dernière goutte laisse une trace sur mon pantalon beige. Je rattrape Ruxanda, dont la paillasse blonde virevolte avec le vent. En face, sur l'autre rive, j'aperçois Mikael qui nous suit à la trace, tout en gardant sa distance, fumant un pétard sous la brume naissante. Je suis un peu rassuré, même si la présence de mon acolyte – au-delà des valeurs de l'amitié qui me sont chères – ne sera d'aucune utilité en cas de pépins. Enfin, si, il pourra appeler ma mère, pour lui apprendre la mauvaise nouvelle. Et encore, je doute qu'il est les couilles pour ça. Je prends de la vitesse et talonne Ruxanda. La suivre n'est pas si facile. Malgré ses talons, sa carrure de crevettes séropositive et les pavés, elle gambade comme une gazelle en pleine savane, la grâce en moins.
- On fait quoi là ? On va où ?
- Je ne serais plus pute, bientôt. Je vais partir. C'est la dernière fois que tu me vois et je ne sais pas qui tu es ni pourquoi tu me files ce fric, mais je m'en fous d'accord ? Tu sais je travaille pour les Albanais. Toi vouloir problème avec les Albanais ?
J'exigeai une réponse, mais on dirait que je n'ai pas posé la bonne question. Je me demande si elle me tend un traquenard, j'ai l'impression de parler à un disque rayé et ce n'est pas agréable. J'aimerais la faire scratcher comme un vrai DJ mais ce n'est pas possible. J'ai déjà quelques infos. Je les note dans un calepin mental : « Je vais partir bientôt ». C'est une information importante pour les souteneurs. Incapable de comprendre pourquoi elle m'autorise à la suivre. Peut-être que je luis fais tellement pitié qu'elle a décidé de me prendre sous son aile pour m'éduquer à la dure. Je dois me répeter.
- Tu vas où ?
- Si tu tiens à le savoir, continue à faire le toutou.
Malice malsaine dans ses yeux de chienne. Je tourne la tête, croisant les doigts pour que mon chauve soit toujours à bonne distance, c'est mon repère, mon port d'attache. Je ne suis qu'un radeau au milieu d'un océan en proie au déluge. Heureusement, il est là, marchant capuché à quelques centimètre de la rive, derrière le rideau des bagnoles. De la fumée s'élève au-dessus de sa silhouette, formant ainsi une aura rassurante parmi les mauvaises ondes qui assombrissent de le Red Light District. Je soupire, putain que c'est bon de ne pas être seul dans ces moments de galère ! On déboule dans un coin totalement inconnu d'Amsterdam, ou même l'odeur est différente. Je voudrais engager la conversation mais c'est impossible : Elle porte un casque ventouse sur les oreilles, techno hardcore pour les tympans. Mais je panique et mes gestes incontrôlés commence à la gaver sérieusement, ça se voit dans ses yeux de hyènes. Elle baisse son casque et me fusille du regard.
- Suis moi, si t'as les couilles, petit français. Mais dépêche toi, personne doit nous voir.
Elle m'a dit ça sur un ton de défi, presque provocatrice. Pas l'intention de reculer. Dans ma tête, deux options : Soit elle m'aime bien et projette de coucher avec moi sans exiger des tarifs abracadabrantesques, soit elle va se débarrasser de moi. Peu importe, cette tambouille est trop mathématique pour moi, je m'en remets donc à ma bonne étoile. Elle seule pourra me guider, et me sortir du pétrin. Je suis cependant à dix mille années lumière de me rendre compte des choses telles qu'elles sont vraiment. La réalité n'a plus aucune importance depuis bien longtemps. Derrière, pas de Mikael, pas de chauve, pas d'acolyte, rien, moi, elle, mon coeur qui cogne comme une baffe de sumo. Juste deux murs de briques rouges parallèles, menaçant à chaque seconde de brutalement dévier leur trajectoire afin de se rejoindre. On arrive dans une impasse constituée par deux maisons abandonnées et infestées par des mauvaises herbes. De magnifiques graffitis décorent les façades meurtries par des années de squats, peintures et témoignages de plusieurs générations de drogués, de hippies, de marginaux, d'artistes et de trous du cul en tout genre. Des arbres calcinées jalonnent la cour, jadis flamboyante ou au contraire, apocalyptique. Ça pourrait être un ancien asile psychiatrique comme un bordel de luxe. En tout cas, c'est n'est pas un luxueux bordel qui s'offre à moi et Ruxanda s'arrête devant une planche de bois disposée à l'horizontal pour palier un trou dans le mur. Elle retire son casque, éteint sa musique, passe la main dans sa tignasse-paillasson et se tourne vers moi, l'air vicieuse.
- Toi pas en croire tes yeux. Plein de filles, rien que pour toi.
Cette information me fait blêmir, Mikael n'est plus là, enfin, pas dans mon champ de vision. Elle tape trois coups de poings et à l'intérieur on entend des talons se rapprocher de la porte improvisée. Une voix rauque pose une question albanaise. Question albanaise, réponse albanaise :
- Olympe.
Cliquetis automatique, ouverture des portes à la Star Trek. Un travesti noir dont le sexe volumineux forme un reflet sous son legging rose. La pièce est immense, le plafond en verrière est soutenue par d'épaisses voûtes probablement gothique ou un truc dans le même genre. Ça pue le moisi dans cette pièce de merde, visiblement réaménagé en salle de conférence. Face à moi, cinq rangées de chaises occupées uniquement par des putes. Maintenant je sais que je suis dans un cauchemar, c'est obligé. Je perçois également une estrade et une pancarte « Free Hoes » malhabilement accrochée entre deux piquets en bois. A ma gauche, dans l'ombre, une masse solide est dissimulée par une couverture au fond de la pièce. A ma droite, des sacs poubelles et d'autres trucs dégueulasse, je pense que c'est la d'où vient l'odeur. Les putes se lèvent d'une même impulsion et se tournent face à moi. Si c'était un rêve, elles s'agenouilleraient et me suceraient une par une mais c'est un cauchemar. Leurs yeux sont des balles de fusil à pompe, je n'ai pas de pare-balle mental. Le plomb s'enfoncent dans ma peau, perce mes organes, je meurs, mon esprit quitte mon corps. Elles sont probablement toute originaire de pays comme l'Albanie, la Bulgarie ou encore la Roumanie. Exploitées, violées, frappées, volées, menacées, sous-payées, elle se rejoignent dans cette salle de façon officieuses, ça se voit. Elles n'ont pas l'air très joyeuse. Elles ont plutôt l'air épuisé, comme toute personne après une longue journée de travail. Après avoir demandé à l'une des filles de s'occuper de mon cas, Ruxanda monte sur l'estrade et commence à gueuler dans un langage agressif. Sa voix fait autorité, toutes les putes l'écoutent y comprit celle qui m'a attaché et bâillonné à une chaise métallique sur l'estrade, face à ces lionnes enragées. Elle me donne des petites claques sur le coin de la gueule tandis que les guerrières répètent les mots de Ruxanda en levant leurs poings fermés. Combien de chance y'avait-il pour que je tombe dans la cabine de cette dégénérée ? Je me le demande franchement. En plus, j'ai bien l'impression qu'elle s'inspire d'Hitler et cette pensée me glace le dos. La même portée de voix, la même rage, les mêmes gestes. Manque la moustache. Plus que jamais les filles répondent en chœur à ses appels, bras levés vers le ciel, je prêterai une couille pour comprendre la moitié de son charabia. Mikael doit être dans les parages, il faut qu'il le soit, sinon je suis cuitas les bananas. Notre communication visuelle a été interrompue, mais rien n'est perdu. J'y crois, putain, tout commence à devenir flou, c'est bientôt terminé. Concert d'applaudissements, Ruxanda salue respectueusement ses adeptes quand soudain l'une d'entre elles se lève, index pointé vers moi. Ruxanda répond sur un ton qui m'apparaît comme désinvolte, oui, je crois que c'est le mot, et l'assemblée éclate de rire. Le travelot black garde sévèrement la porte, sa perruque blonde ne fait pas autorité, aux antipodes de la Kalachnikov qui pendouille sous son épaule. Je sors mon calepin mental au cas où j'aurais l'occasion de revoir les macros qui me tiennent par les bourses: « Une armée de putes furieuse ». Vu l'heure qu'il est, les albanais doivent déjà être à ma recherche. Du moins, j'ose l'espérer. Ou pas. En fait quoiqu'il arrive, je suis dans la merde jusqu'au cou.
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