Je me réveillai et constatai que je n'étais pas dans mon lit. Évidemment. Tout me revint en mémoire, les bisous, l'alcool, la musique, le lit... Et Starla qui dormait encore dans mes bras dans une quiétude apaisante. Son souffle doux s'écrasait et se dissipait sur ma poitrine.
Sa tête reposait sur mon bras gauche, tandis qu'elle me tenait encore par la taille, maintenant nos corps serrés l'un contre l'autre.
Je regardais l'heure, il était 8h 30 et le soleil se levait déjà. Heureusement que nous n'avions cours qu'à partir de dix heures... Je regardais une dernière fois Starla. Elle était encore plus belle endormie. Comme un ange. Un ange dans ma vie. Je me sentais idiot. Je regrette même la manière dont je me suis avancé. Et pour cause.
J'approchais ma tête pour lui faire un bisou sur ses lèvres quand elle ouvrit les yeux, cria et me jeta hors de son lit !

"Who the heck are you motherfucker ? What have you done to me ?!
- Euh non, attends... wait, I'm Vincent, you have invited yesterday to show me some music and you wanted me to sleep here... With you.
- Oh putain...
- Il ne s'est rien passé dans ce lit si ça peut te rassurer...
- Je suis désolé, dès que je bois une goutte d'alcool je deviens incontrôlable, tu ne dois pas prendre compte de ce que j'ai fait... Mais qu'ai-je fait au juste ?
- Oh euh rien... Tu as juste dansé comme une folle en hurlant sur du Nirvana...
- Ne me mens pas...
- ...Tu m'as aussi embrassé à plusieurs reprises et invité à dormir dans ton lit... Tu m'as presque foutu à poil avant de t'endormir...
- Eh merde..."

Elle lança un regard noir à un livre dans son armoire, comme si elle voulait le brûler. Mais je pense plutôt qu'elle regardait dans le vide. Curieuse sensation que de ne rien voir, à l'exception de nos pensées qui prennent vie...

"Vincent, je suis désolé, il ne s'est rien passé.
- T'inquiètes pas je comprends."

Elle se leva et se rendit compte qu'elle était presque à poil et me demanda poliment et d'une air assez énervée de sortir, ce que je fis après avoir rassemblé mes affaires qui traînaient.

Elle sortit quelques secondes après en débardeur noir avec un jean et tout en enfilant des Converses elle me dit d'aller me prendre ce que je voulais pour petit-déjeuner. Je me servis rapidement un jus de pomme et nous partîmes de chez elle sans un mot.
L'ambiance entre nous était froide et me mettait mal à l'aise. Elle ne me regardait pas et avançait sans se soucier de moi. Mais je ne voulais pas. Ok on ne serait jamais ensemble mais on pouvait rester bons amis...

"J'ai vu que tu jouais de la guitare... Tu te débrouilles bien ? J'ai vu qu'il manquait deux cordes...
- C'est une basse idiot", dit-elle d'un air amusée mais aussi agacée. "C'est le doum-doum-doum que tu entends dans la musique.
- Ah..."

Nous arrivâmes jusqu'au lycée où nous nous séparâmes. Moi d'un côté pour rejoindre mes potes, elle pour s'isoler et écouter de la musique. Je ne raconterai rien à ces amis.

S'ensuit une journée, puis une semaine de cours. J'avais un peu mal pris le fait que rien ne se passe au final, j'avais tellement aimé cet instant. Je passerai donc sous silence cette période de vide. Pour revenir à l'objet principal de cette histoire...


Je n'avais pas beaucoup reparlé à Starla. Elle m'en voulait toujours je crois. Et c'était idiot, c'est elle qui m'avait invité à aller chez elle, elle qui s'était saoulé, elle qui m'avait embrassé et invité dans son lit...
J'avais continué à écouter du rock. Je me formais seul. J'adorais les Smashing Pumpkins, Pixies et Pearl Jam entre autre.
Et un jour, alors que je me baladais seul en ville, en écoutant de la musique dans le mp4 dans lequel j'avais investi (un Cowon S9 que je recommande fortement), je passai devant un magasin de musique.
Je passais souvent dans cette rue avant. Mais j'ignorais l'existence de ce magasin. Si j'avais été curieux, tout aurait pu commencer des années plus tôt...

Je rangeai alors hâtivement mon mp4 dans ma poche après avoir enroulé les écouteurs autour de la machine et pénétrai dans le magasin. Il n'y avait personne derrière le comptoir. Moi, seul avec des dizaines de guitare...
Je ne bougeais pas, comme enchanté par le calme envoûtant de cet endroit, cet endroit qui devait normalement résonner de tout son mélodieux, superbe mais aussi hargneux et émouvants...
Un vendeur débarqua du fond du magasin. Il portait une chemise, un jean et des chaussures usagés, ainsi qu'une barbe et des lunettes. À cause de son âge, une légère calvitie commençait à apparaître sur le haut de son crâne.

"Que puis-je pour vous jeune homme ?
- Euh... Je ne sais pas. Je fais quoi ?
- Mmh... Je vois ce que tu veux dire."

Il alla décrocher une guitare sèche, une guitare folk, s'assit sur un tabouret et commença à en jouer. J'étais plus qu'émerveillé, je ne bougeai pas d'un pouce, ressentant la musique contaminer mon âme par chaque pore de ma peau.

"Attendez je reviens."

Je sortis en courant du magasin, courus jusque chez moi, ouvrit la porte, fit peur à ma mère qui pensait qu'un voleur s'introduisait chez nous, montai dans ma chambre à l'étage, pris toutes mes économies pour une valeur de 250 € cachés dans 1984 de Georges Orwell, retournai au magasin et demandai à acheter la guitare.
Le vendeur se frotta les mains. Non pas par bonheur d'avoir arnaqué un jeune mais pour avoir permis à quelqu'un de se lancer dans quelque chose d'énorme. La passion de toute une vie.