Le chevalier lapin
Par : Cérate
Genre : Nawak
Status : C'est compliqué
Note :
Chapitre 6
Chapitre 2 : le chevalier
Publié le 24/07/10 à 12:52:37 par Cérate
Le premier jour du mois d'août, l'armée du roi au grand complet se réunit sur le champ de
bataille. Il s'agissait en fait d'une longue étendue de terre qui longeait les falaises sur une
dizaine de lieues. Trop salées pour prétendre y cultiver quoi que ce soit, mais trop près des
falaises pour la sécurité des bêtes, les landes avaient plus ou moins été laissées à l'abandon :
la région ne manquait pas de terres fertiles. On avait finalement décidé de les réserver au
combat. Elles avaient en effet pour avantages notables de ne pas être trop loin de la capitale,
de disposer d'un grand cimetière à proximité, pour les morts alliés, et d'une falaise à pic pour
les ennemis. Les poissons étaient bien nourris, les pêcheurs du coin aussi, et personne ne
trouvait à s'en plaindre.
La cavalerie avait belle allure. Une forêt d'oriflammes flottait sous l'effet de la brise marine.
Les porte-drapeaux brandissaient fièrement les étendards de chaque grande famille. Il y en
avait des bleus, des rouges et des blancs, aux motifs soigneusement brodés pour l'occasion.
Les armures des nobles resplendissaient au soleil. Les trompettes brillaient, les tambours
flamboyaient, même la gueule noire des canons avait été nettoyée en ce jour festif. Les
chevaux, pas vraiment impressionnés par les plaques de cuir sur leur dos, tentaient de
brouter des touffes d'herbes rêches. Tout le monde était impatient de semer la mort dans les
rangs ennemis, de ramener des récits de bravoure, voire même une blessure légère pour
impressionner les dames. En attendant, on discutait avec la famille éloignée, profitant de
l'occasion. Et un joyeux brouhaha régnait sur le champ de bataille, comme à l'heure du salon
de thé chez les dames, mais en un peu moins protocolaire.
Devant eux, les paysans semblaient moins pressés d'en découdre. Ils étaient vêtus d'armures
de cuir fournies par le Roi, souvent d'une qualité bien inférieure à celle que portaient les
chevaux. Grossièrement formés au combat il y a quelques mois, ils espéraient surtout être de
retour à temps pour les moissons. Ou en tout cas, dans la mesure du possible, de pouvoir
tout simplement rentrer chez eux. En pas trop mauvais état.
Une moitié d'entre eux était munie de lances de noisetier et d'une dague gracieusement
fournie par Sa Majesté. À ramener après le combat, sous peine d'être accusé de vol. L'autre
moitié, placée derrière les lanciers, disposaient seulement d'arcs en bois d'ifs, et de six
flèches par personne, pas une de plus.
L'ensemble, une dizaine de milliers d'hommes, formait l'armée royale, réunie comme tous
les cinq ans pour combattre la Sorcière du Nord.
À deux jets de flèches de là, les monstres de la magicienne attendaient sans un bruit.
C'était une collection d'armures biscornues, aux contours flous. Telle l'eau sur le métal poli,
le regard glissait où qu'il porte, donnant aux silhouettes une substance qui n'existe que dans
les cauchemars. Une étrange lumière bleuâtre émanait d'eux, rappelant la lueur assourdie du
soleil qui traverse un glacier. Mise à part la taille, les soldats de la sorcière n'avaient rien de
semblable aux humains. En se concentrant, on parvenait à distinguer quelques détails :
certains heaumes étaient boursouflés, comme s'ils peinaient à contenir leurs occupants. On
voyait aussi des silhouettes sur quatre pattes, des membres en trop, ou des pieds se terminant
par des serres de rapace. Parfois tous ces attribues en même temps. Mais le plus étrange,
c'était leur immobilité : les gargouilles n'avaient pas bougé d'un pouce depuis qu'elles étaient
apparues, en attente d'un signal audible d'elles seules.
Et puis, sans qu'on entende le moindre bruit, les monstres levèrent leurs épées, puis se mirent en marche, posément, vers l'armée du roi.
bataille. Il s'agissait en fait d'une longue étendue de terre qui longeait les falaises sur une
dizaine de lieues. Trop salées pour prétendre y cultiver quoi que ce soit, mais trop près des
falaises pour la sécurité des bêtes, les landes avaient plus ou moins été laissées à l'abandon :
la région ne manquait pas de terres fertiles. On avait finalement décidé de les réserver au
combat. Elles avaient en effet pour avantages notables de ne pas être trop loin de la capitale,
de disposer d'un grand cimetière à proximité, pour les morts alliés, et d'une falaise à pic pour
les ennemis. Les poissons étaient bien nourris, les pêcheurs du coin aussi, et personne ne
trouvait à s'en plaindre.
La cavalerie avait belle allure. Une forêt d'oriflammes flottait sous l'effet de la brise marine.
Les porte-drapeaux brandissaient fièrement les étendards de chaque grande famille. Il y en
avait des bleus, des rouges et des blancs, aux motifs soigneusement brodés pour l'occasion.
Les armures des nobles resplendissaient au soleil. Les trompettes brillaient, les tambours
flamboyaient, même la gueule noire des canons avait été nettoyée en ce jour festif. Les
chevaux, pas vraiment impressionnés par les plaques de cuir sur leur dos, tentaient de
brouter des touffes d'herbes rêches. Tout le monde était impatient de semer la mort dans les
rangs ennemis, de ramener des récits de bravoure, voire même une blessure légère pour
impressionner les dames. En attendant, on discutait avec la famille éloignée, profitant de
l'occasion. Et un joyeux brouhaha régnait sur le champ de bataille, comme à l'heure du salon
de thé chez les dames, mais en un peu moins protocolaire.
Devant eux, les paysans semblaient moins pressés d'en découdre. Ils étaient vêtus d'armures
de cuir fournies par le Roi, souvent d'une qualité bien inférieure à celle que portaient les
chevaux. Grossièrement formés au combat il y a quelques mois, ils espéraient surtout être de
retour à temps pour les moissons. Ou en tout cas, dans la mesure du possible, de pouvoir
tout simplement rentrer chez eux. En pas trop mauvais état.
Une moitié d'entre eux était munie de lances de noisetier et d'une dague gracieusement
fournie par Sa Majesté. À ramener après le combat, sous peine d'être accusé de vol. L'autre
moitié, placée derrière les lanciers, disposaient seulement d'arcs en bois d'ifs, et de six
flèches par personne, pas une de plus.
L'ensemble, une dizaine de milliers d'hommes, formait l'armée royale, réunie comme tous
les cinq ans pour combattre la Sorcière du Nord.
À deux jets de flèches de là, les monstres de la magicienne attendaient sans un bruit.
C'était une collection d'armures biscornues, aux contours flous. Telle l'eau sur le métal poli,
le regard glissait où qu'il porte, donnant aux silhouettes une substance qui n'existe que dans
les cauchemars. Une étrange lumière bleuâtre émanait d'eux, rappelant la lueur assourdie du
soleil qui traverse un glacier. Mise à part la taille, les soldats de la sorcière n'avaient rien de
semblable aux humains. En se concentrant, on parvenait à distinguer quelques détails :
certains heaumes étaient boursouflés, comme s'ils peinaient à contenir leurs occupants. On
voyait aussi des silhouettes sur quatre pattes, des membres en trop, ou des pieds se terminant
par des serres de rapace. Parfois tous ces attribues en même temps. Mais le plus étrange,
c'était leur immobilité : les gargouilles n'avaient pas bougé d'un pouce depuis qu'elles étaient
apparues, en attente d'un signal audible d'elles seules.
Et puis, sans qu'on entende le moindre bruit, les monstres levèrent leurs épées, puis se mirent en marche, posément, vers l'armée du roi.
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