Un frisson parcourut le dos de Mathias. Il pointa son arme vers la tête de l'individu, et posa son doigt sur la détente, prêt à faire feu.
Flairant sa présence, l'autre se retourna lentement, et planta son regard glacial dans celui du gendarme.

Instinctivement, Mathias baissa son arme. Il n'en croyait pas ses yeux. C'était impossible.

Son regard s'assombrit puis il murmura entre ses dents :

- Toi...

Charlie se fendit d'un sourire dément. Il inclina la tête lentement sur le côté, et tel le diable tout droit sortit de l'enfer, murmura :

- Surpris de me voir Mathias...

- Comment tu peux encore être en vie ?, lui répondit Mathias, encore sous le choc.

- Peu importe. L'essentiel, c'est que je sois là. En face de toi.

La voix de Charlie résonna dans la pièce. Brisant le silence de plomb qui s'installa entre les deux hommes, il reprit aussitôt la parole :

- Tu sais, j'ai toujours su que je finirais un jour par te retrouver et te faire payer Mathias...

- C'était un accident Charlie, et tu le sais.

Le visage de Charlie changea soudainement d'expression. Ses traits se déformèrent sous la colère et la haine.

- Ta gueule ! Fermes ta gueule ! Tu as essayé de me tuer...

Mathias garda le silence. Un douloureux passé refit surface dans sa mémoire.

Un tout autre temps. Un temps où lui et Charlie, alors au lycée, étaient les meilleurs amis du monde. Un temps où ils avaient effectués un nombre incroyable de conneries. Un temps où ils s'étaient tous les deux lancés un business. Le deal de cocaïne. Un temps où ils avaient déconné, tout simplement.

Mathias ferma les yeux. Charlie siffla entre ses dents :

- Ça y est, ça te reviens maintenant ?

Les flashbacks continuèrent à s'emparer de l'esprit de Mathias. Des souvenirs bannis à tout jamais de sa mémoire refaisaient surface, un à un.

Un soir où ils sont tous les deux bourrés et shootés à la coke.

Une dispute.

Le ton qui monte.

Mathias qui s'empare d'un couteau...

Du sang...

Secouant la tête, le jeune gendarme fit tous les efforts du monde pour ne pas se remémorer ce douloureux épisode.

- C'était un accident, je te le jure..., supplia presque Mathias.

- Tu m'as laissé crever comme une merde, et je t'ai plus jamais revu, fils de pute. Bien plus tard, j'ai appris que tu t'étais engagé chez les poulets, pendant que moi, je continuais mon petit business. Ironique non ? Mais aujourd'hui, enfin, l'heure de la vengeance à sonné.

Une profonde colère s'empara de Mathias.

- Comment as-tu pu t'en prendre à Valentin..., grogna t-il.

- Je savais que si je m'attaquais à lui, tu viendrais à moi... C'est ta faute si le gosse s'est retrouvé dans cette situation.

Mathias leva son arme, et visa la tête de Charlie.

- On va faire simple. Si Valentin est mort, je te bute.

Un court silence s'abattit dans la pièce. Charlie sourit une nouvelle fois, et répondit :

- Il est vivant... du moins pour l'instant. Je te propose qu'on règle ça comme des hommes. Comme au bon vieux temps.

Charlie sortit un deuxième couteau de sa veste, et le lança aux pieds de Mathias. Le gendarme contempla l'arme blanche. La lame resplendissait sous la lumière pâle émise par les néons. Il rangea son revolver dans sa ceinture, et se pencha pour ramasser le couteau, puis il serra le manche de toutes ses forces. De toute façon, son revolver était vide.

Charlie arbora un sourire satisfait, et murmura :

- Parfait.

- Tu ne me laisses pas le choix. Finissons-en une fois pour toutes, grogna Mathias.

Après s'être affrontés du regard et s'être toisés pendant plusieurs secondes, les deux hommes se lancèrent l'un contre l'autre dans un cri de rage.