20 Mai 2008. 8h30 AM.

-Thomas?

J'ouvre difficilement un oeil et me tourne en direction de la porte, ma mère se tient dans l'entrebâillement de cette dernière et m'observe.

-Thomas?

Hum? grommelé-je.

-J'ai appelé le lycée pour ton absence d'aujourd'hui, elle hésite un instant, repose toi, je pars travailler...

-D'accord... glissé-je.

-Tu sais, elle marque une pause, je ne vais pas revenir sur ce qui s'est passé hier soir, je crois que tu as compris par toi même.

Je sens un élan de tristesse dans sa voix.

-Je suis désolé.

-Tu n'as pas à l'être. Je suis ta mère c'est normal que je m'inquiète...

-Je ne le referai jamais je te promets, c'était une erreur. enchaîné je.

Elle sourit puis m'embrasse et sort de ma chambre.
Je profite d'être réveillé pour contempler les rayons du soleil qui filtrent légèrement à travers mes volets, je me tourne sur le côté et entreprends de me rendormir.
Mais une musique sous mon oreiller me réveille bien vite, j'attrape aussitôt mon portable.

-Ouais? décroché-je.

-Tu payes le petit déj'?

-T'es pas en cours Erwan?

-ON est pas en cours! répond t-il enthousiaste.

-Hein?

-Vient ouvrir!

-Okey je lève mon cul mais j'espère que ça en vaut la peine.

-Yes! lâche t-il avant de raccrocher.

Je descends les escaliers vers le rez de chaussé, habillé d'un unique caleçon et d'un tee shirt.
Je me dirige vers la porte d'entrée et ouvre cette dernière, dehors le soleil rayonne, le ciel est bleu, c'est un superbe début de mâtinée de mai.

Et, devant moi se tiennent trois personnes:
A droite, appuyé au mur j'observe Jimmy un casque campé sur ses oreilles, le tout recouvert de la capuche de sa veste bleu. A son air il semble ne pas avoir beaucoup dormi, il tient sa basse de sa main gauche et, fume une cigarette dont la fumée est démultipliée par la fraîcheur du matin.

Face à moi assis sur les marches du perron, Erwan les bras appuyés sur ses genoux repliés me souris derrière ses lunettes de soleil.

Enfin près de lui je distingue la silhouette de Paul assis sur la vieille rambarde métallique. Ses baguettes tapant un rythme sur ses cuisses.


-Hey! me lancent t-ils.

-Surpris? lance Erwan satisfait.

-Plutôt oui...

-Jimmy nous a dit. place Paul toujours en équilibre sur l'axe métallique.

Tous me regarde, comme attendant une réaction particulière.

-Ouais... rétorqué-je faiblement.

-Du coup ça nous a donné un prétexte pour sécher les cours et passer la journée à composer. réagit Erwan.

-Et vos parents?

-T'occupes. assure Jimmy.

Je souris et sens le poids installé dans mon estomac disparaître un instant.

-Rentrez. dis-je.

-On va piller le frigo'! chantonne Erwan.

-Calmos, je vous fais un café mais pas le breakfast english les mecs!

Ainsi, mes quatre amis pénètrent dans la cuisine et nous nous installons autour de la table.

-Café pour tous? demandé-je.

-Bien sûr..

-Hum.

-Bah pareil. termine Erwan.

-C'est une bonne occasion pour parler du concert qui approche. place Paul.

-C'est toujours vendredi 30? le questionné-je.

-Ouais, comme vous le savez on fera quatre chansons...

Erwan rigole:
-Y a un groupe avant nous, ils font uniquement des reprises, c'est pas exceptionnel. Et bien sûr il y aura d'autres artistes: les collégiens quoi. Mais nous on passe en dernier, c'est l'essentiel.

Depuis le début de cette année de terminal j'ai formé ce groupe, c'est l'une des choses dont je suis le plus fier, toutefois il est difficile dans notre petite ville de pouvoir se produire régulièrement. Alors, nous répétons beaucoup et à l'occasion allons dans une salle par-ci, par là.
Mais, en cette dernière année de lycée, le nouveau directeur a eu la brillante idée de créer une sorte de kermesse. Des ventes de gâteaux, crêpes et autres sont organisées, mieux encore tous les élèves peuvent participer à un spectacle. Naturellement, nous avons sauté sur l'occasion et c'est ainsi que nous serons les derniers à monter sur scène afin de montrer ce que nous valons.

-Donc je récapitule, continu Erwan, on commence par Jumping Jack Flash, ça me semble le meilleur des choix. Ensuite, j'avais pensé à notre composition un brin psyche' mais on doit vraiment l'améliorer. Puis "Lonely Road", une fois encore faut absolument la boucler d'ici vendredi! Enfin, et c'est un peu le mystère, on devrait créer un nouveau morceau pour conclure en beauté.

-Perso' ça me va, enchaîne Paul, c'est surement la dernière fois qu'on jouera... Autant tout donner.

-Pas faux. esquisse Jimmy.

-Alors au boulot. les coupé-je.

Notre café terminé nous grimpons dans ma chambre qui, régulièrement se transforme en studio.
Une batterie électronique dans un coin, une sono pour le chant, un bon petit ampli' basse et enfin mon amplificateur à lampes.

-Permettez Messieurs que j'enfile un jean.

-Fais donc! rigole Paul déjà derrière ses fûts.

L'Avantage de ma chambre c'est que cette dernière est au dernière étage et assez bien insonorisée, de plus sa taille me donne un super espace à exploiter, chose que je fais pour le groupe.
De surcroît, étant de nature maniaque tout est extrêmement bien rangé, ce qui nous permet de travailler dans les meilleures conditions.

-Watch it. souffle Erwan dans le micro.

Jimmy caresse les quatre cordes de sa basse et place la ligne directrice du morceau.

-Watch it. reprend Erwan.

Je branche mon jack, allume l'ampli' et tourne le potard au maximum. Le son prend quelques instants à monter.
Je colle Stacy contre mon ventre et applique mes doigts de façon à former un accord.

Tous trois nous attendons le signal d'Erwan.

-WATCH IT!

Je rabats vivement ma main et déchire l'atmosphère d'un coup de poignet. Le premier accord fend l'air et amplie la pièce immédiatement.
J'entame énergiquement le premier riff, rapidement rejoint par Paul qui bat la mesure de toutes ces forces, enfin Jimmy nous rattrape et l'unité du groupe ce forme. Le son est fort, la musique est lourde, en un instant nous flottons au dessus du reste et mes problèmes disparaissent.

Erwan domine l'ensemble que nous formons et dépose sa voix sur le morceau. C'est tel une vive explosion, pendant ce temps je regarde Paul, ce dernier me fait un signe, instinctivement je comprends que nous sommes sur la même longueur d'onde.

Le morceau continu encore et encore, nous montons, montons, la fin approche et j'applique mon pied sur ma pédale wah wah afin d'enclencher l'effet désiré. Le solo commence, je me rabats sur ma guitare et entame ce dernier, mes doigts courent rapidement sur le manche, accompagnés de mon pied qui appuie et relâche la pression afin de modéliser le son.
Je vois Jimmy qui hoche de la tête et j'essaye d'aller plus loin. Cette fois le rythme change, nous entamons le break final, Paul tape du plus fort qu'il peux, Erwan hurle, un dernier coup d'oeil au groupe, atterrissage imminent, je plie sur mes genoux, regarde paul et saute levant ma guitare par la même occasion, cette dernière rabattue lâche un dernier souffle.

-YEAH!

Nous nous regardons et rigolons.

-Ca fait du bien, non? me demande Erwan.

-C'est certain. opiné-je.

-Bon! Je vais m'en fumer une qui m'accompagne?

J'abdique et le suis, nous nous retrouvons seul sur ma terrasse.
Il inspire un coup et engage la conversation.

-Je sais que c'est peut-être pas le meilleur moment mais...

-Oui? l'Interrogé-je.

-Tu sais on parlait de fille l'autre jour et...

-Va-y accouche.

-Et bien j'ai le numéro d'une amie de ma soeur.

-Putain tu fais chier! Je t'avais dis que c'était mort! Merde elle a que 13 ans!

-Bientôt 14 je te signale! rigole t-il.

-Non mais cherche pas. J'ai 17 ans...

-Oui, oui, 17 ans star du rock et toujours puceau. me coupe t-il.

-J'ai pas envie. Insiste pas.

Il me met alors un petit coup de poing dans l'épaule et enchaîne.

-Espèce de gland, t'as vu ce que t'as fait hier soir. Alors prend toujours ça...

Il me tend un petite feuille de papier bleu dont je m'empare. Dans le coin droite de celle-ci se trouve une petite abeille qui fait "bzzz", à gauche un numéro est écrit, sans nom.

-Je ne m'en servirai pas.

Erwan se lève d'un coup et part en direction de la porte.

-Au fait Thomas, une dernière chose.

-Hum?

-Marion.

-Quoi? demandé-je sceptique.

-Elle s'appelle Marion.