Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

The Rain Song


Par : pooncha
Genre : Sentimental, Action
Statut : C'est compliqué



Chapitre 16 : Vox Populi.


Publié le 08/02/2011 à 23:07:05 par pooncha

-Qui a t-il de mieux que louper une journée de cours pour faire de la musique, rigole Jimmy, je veux dire regardez le ciel putain! Bleu! Sans nuage! Parfait!

Je regarde mon ami enthousiaste qui semble avoir retrouvé sa joie de vivre après quelques jours difficiles.

-Thomas, attrape ma basse s'il te plaît. m'adresse t-il.

-Yep! Je la pause à côté des miennes ma poule.

Nous sommes le vendredi 30 mai 2008, le concert à lieu ce soir dans notre établissement, raison pour laquelle nous nous affairons autour d'une scène. En effet sur autorisation du principal nous sommes chargés de tout installer: lumière, sono et matériel musical.
Malheureusement, Paul étant dans l'autre lycée de notre ville il ne peut être avec nous. Mais, c'est aussi un avantage conséquent, ce dernier nous ramène effectivement un public plus large. Nous avons la chance avec Jimmy et Erwan d'être dans le même bahut qui compte un collège, un lycée et une filière technique, soit si je comptabilise les éventuelles personnes que Paul et nos autres amis pourront ramener: environ 600 spectateurs. Assurément notre plus grand public et tout semble tourner au mieux pour que nous assurions le spectacle.

-Ca y est, crie Erwan, j'ai fait les branchements!

-1, 2. 1,2. dis-je au micro.

-Impeccable, tout fonctionne! Maintenant voyons voir ce que donne l'acoustique des instruments!

-Tu veux que je joue alors que la fin des cours est dans 5 minutes? Je mets pas l'ampli' plus fort que 2 je te préviens!

-On a l'autorisation arrête tes conneries. lâche Jimmy.

-J'sais pas trop...

-Fait pas ta tafiole, y aura surement ta collégienne. sourit Erwan.

- Toi, ta gueule!

-Et toi JOUE!

Enervé, j'attrape ma télécaster et branche le jack, j'approche l'ampi' et met le son au minimum en attendant que les lampes chauffent. Pour patienter je me balade sur la scène et engage quelques accordes, cette dernière se trouve derrière les poteaux de but d'un terrain de foot, pratique pour accrocher les éclairages et naturellement tournée vers les batîments de notre école, si caractéristique avec leur forme en "u".
Brusquement, alors que je fais sonner mes six cordes un énorme riff foudroie l'atmosphère! Je me retourne vers l'amplificateur et y trouve Jimmy plié en deux.

-Continue! rigole t-il.

-Putain j'ai eu salement peur abruti! Baisse le son!

-Ca va, ça va, on vérifiait juste si il fonctionnait correctement, me calme Erwan.

-Bon c'est pas tout, nous coupe Jimmy, maintenant que tout est en place on va se boire une petite bière.

-Et les instruments? demandé-je.

-J'ai les clés du local de sport c'est là qu'on les laissera. répond t-il.

-Bah nickel alors.

-Direction le café du commerce. esquisse Erwan en nous attrapant par les épaules.

Nous rangeons les instruments comme convenu, recouvrant par la même occasion tout le reste du matériel de quelques couvertures et prenons la direction du portail de sortie au son de la sonnerie de 17 heures.

-T'es sûr que ça risque rien pour le matos?

-Mais oui, détends-toi Thomas! Je t'ai jamais vu aussi nerveux.

-Non je suis cool j't'assure. Je fais attention c'est tout.

-Maniaque je dirais. ajoute Jimmy.

-Oh toi ça va!

-On charrie!

Et, alors que nous longeons la clôture j'aperçois Marion en train de discuter avec son copain à une cinquantaine de mètres de là.

-Les mecs, on change de trottoir s'il vous plaît?

-Pourquoi? demande Erwan interloqué.

-Regarde là-bas et bouge!

Mes deux lurons jettent un oeil à ce que j'indique d'un vague signe de tête.

-Ne me dis pas que tu as peur de lui?

-C'est pas ça du con! Je veux pas les croiser.

-Range ton égo et sors tes couilles jeune coq! m'empoigne Erwan.

-Je veux pas bordel. chuchoté-je alors que nous nous approchons dangereusement.

-Too late. glisse Jimmy.

Et, nous passons à côté d'eux, je sens le regard de Marion tourné vers moi alors qu'Erwan la salue.

-Et bah voilà, c'était pas si difficile!

-Je crois que je deviens parano' désolé les mecs.

-Allons, allons, pense à ce soir!

Mais, alors que nous nous éloignons, j'entends des paroles qui semblent m'être adressées, je me retourne et voit le copain de Marion s'approcher vivement de moi, suivi de près par cette dernière.

-Ouais, c'est à toi que je parle!

Je regarde ce type m'arriver dessus, il semble particulièrement énervé.

-Je peux faire quelque chose pour toi?

-Pourquoi tu dragues ma copine espèce de connard?!

-Clément, arrête! intervient Marion.

-Tu fais fausse route mec, elle fait ce qu'elle veut, j'y suis pour rien.

-T'approche pas d'elle, okey? m'ordonne t-il.

-Ouais c'est ça, allez, lâche-moi. lui indiqué-je en me retournant.

-T'as pas bien compris je crois!

Je dévisage le type et souris.

-Dis-donc, t'es nerveux bonhomme. déclare Jimmy.

-Toi, ta gueule!

-Non, toi tu la fermes, lui commande Erwan en l'attrapant par le col et le plaquant sur la capot d'une voiture, tu vas aller passer tes hormones de collégien ailleurs! C'est compris?

Le pauvre garçon manque de s'étouffer et murmure un faible "oui" avant de décamper.

-C'était quoi ce délire?

-On vient de se séparer, articule Marion, désolée pour l'accrochage, je dois y aller.

Je regarde ses longs cheveux blonds s'éloigner et me retourne effaré vers mes amis.

-Et bah ça alors...

Jimmy éclate de rire.

-Mec, j'ai bien cru qu'il allait chier dans son froc tellement tu lui as fait peur.

-J'avoue.

-Ca s'appelle le respect des aînés. déclare Erwan.

-Tu parles, je l'aurais fumé si t'étais pas intervenu!

-En même temps il avait quinze ans, grand maximum, rigolé-je, je sais même pas ce qu'il lui a pris sérieusement.

-Peu importe, je crois que ça fait les affaires de tous.

-T'entends quoi par là?

-Et bien toi tu as la voix libre, Erwan a regonflé son égo et moi je me suis bien marré!

-Vous êtes vraiment cons.

-C'est pour ça que tu nous aimes!

Et nous voilà repartis pour notre bière d'avant show. La règle est de boire une pinte, pas plus, juste histoire de se détendre avant d'attaquer.
Paul finit par nous rejoindre sous les coups de 19 heures et c'est tous les quatre que nous partons en direction de l'arène.
Déjà, les gens commencent à arriver, profitant des divers stands mis à leur disposition. En observant tout ce monde, je sens le stress monter de plus en plus.

-Les mecs, je pars faire un tour, je reviens tout à l'heure.

-Okey, évite de revenir en retard. me suggère Erwan.

-J'y penserai t'inquiètes.

Je décide de m'isoler un peu afin de me concentrer sur le concert, et quoi de mieux pour cela que de fumer un joint. Peut-être que la bible l'interdit et encore je n'ai jamais vérifié, mais l'histoire du rock, elle, n'a pas l'air de s'y opposer.
Aussi, je coupe rapidement à travers le gymnase, sors sur des terrains de handball et enjambe une clôture, me retrouvant ainsi dans une rue déserte. Je m'adosse à un muret et sors ma boite de fer.
J'appose mes lèvres sur le papier et en brûle la tige, mes écouteurs en place. Amer refuge vient à moi. Durant quelques instants je m'envole loin du reste, lâche façon d'affronter la réalité, je le conçois.
Et, pendant que je somnole les yeux mi-clos un vibrement me tire de mes songes.

"Pardon pour tout à l'heure.
Bonne chance pour ce soir.
<3 =)"

Je souris et écrase la fraise restante, puis je pars retrouver mes amis. Ces derniers discutent avec le groupe qui nous précède.

-On vous laisse utiliser la sono comme convenu mais pour les guitares vous utilisez votre matos.

-Ca marche, on vous aidera à mettre votre batterie à la place de la nôtre de toute façon.

-C'est sympa, ajoute Erwan, tiens revoilà Thomas.

Jimmy me fixe un instant et se tourne vers les autres.

-Ce con vient de se défoncer en juif.

-Pas du tout. me défendé-je.

-Mec, t'as les yeux rouges!

-Mais non!

-Les mecs?! Il a l'air gelé ou pas?

Les réponses sont unanimes, je décide donc d'aller me passer un coup d'eau sur le visage afin de paraître plus frais. A mon retour tout est sur le point de commencer.
La plupart des personnes sont installées, que cela soit debout pour les plus jeunes où assis pour la grande majorité des parents. Le principal quant à lui entame sur scène un petit discours, disant à quel point il est fier de pouvoir leur offrir cette soirée. Enfin les applaudissements clôturent cette introduction et une bande de collégiennes et collégiens entament une démo de tecktonick à laquelle j'assiste hilare.
Sous les coups de 21 heures 30, c'est au tour de nos copains musiciens de monter sur scène. Une dernière cigarette ensemble, quelques poignets de mains s'échangent accompagnés d'encouragements.
Je profite de ce dernier répit afin d'observer qui se trouve dans le public: diverses connaissances, quelques copines et copains, pas mal de parents qui semblent s'emmerder fermement. Mais les mecs sur scène balancent des reprises impeccables et tout semble se passer pour le mieux.
Finalement, aux alentours de 22 heures 10 nous sommes appelés. Une décharge d'adrénaline me parcoure le corps. Mes mains tremblent. Mon coeur bat à une vitesse infernale. Etrange mélange des drogues et du stress.
Une fois la batterie de Paul mise en place nous montons sur les planches et les projecteurs s'allument brusquement. Quelques sifflements fusent, auxquels Erwan coupe court.

-Bonsoir à toutes et à tous, nous sommes Colors.

Il se tourne en ma direction en guise de signal. Je fixe nerveusement la masse noire de monde face à moi et tourne le potard au maximum, j'essuie ma main gauche le long de mon jean et me rapproche du centre. Mes camarades retiennent leur souffle alors que je cherche le courage nécessaire pour entamer notre premier morceau.
Je ravale ma salive, ferme les yeux un instant et fait brutalement descendre le médiator vers le bas.
Je relève ma main et suspends le temps. En équilibre sur la résonance de la note, je dicte la reprise.
Je baisse la tête et entame le début de "Jumping Jack Flash" avec la puissance qu'il se doit.
Erwan et moi nous plaçons le plus près du public, côte à côte, comme deux rivaux poussant l'autre à repousser ses limites. Et, c'est dos à dos que nous partons sur le solo, alors qu'en retrait Jimmy et Paul pausent la base du morceau. J'ai à peine le temps de courir à ma pédale d'effets pour rattraper la mesure de justesse. J'accélère un instant, exploitant la gamme à son maximum. Un rapide coup d'oeil à mon ami batteur, penché sur ses fûts, il comprend et change le rythme qui annonce la fin imminente du morceau.
Erwan lâche un dernier râle dans le micro et je retombe sur mes talons, restant quelques dixièmes de seconde en suspens. Je regarde les gens du public, c'est à peine si j'arrive à entendre les applaudissements qui nous encouragent tellement mes oreilles bourdonnent.

A cet instant je baisse au minimum le son de l'amplificateur et change ma guitare au profit de mon agressive télécaster. Erwan, quant à lui, reprend son souffle aux côtés de Jimmy alors que je m'approche du micro.

-Pour tout ce qui nous paraît insurmontable dans la vie... Voici "We are all".

Jimmy me fait un clin d'oeil et vient me taper sur l'épaule.

-C'est maintenant où jamais mon frère.

Je lui rends un sourire et me rapproche du bord de la scène. Erwan attrape le micro à deux mains et cache son visage de ses longues mèches blondes, laissant uniquement paraître ses deux yeux bleus brûlants.

"YEAH!"

Le morceau est parfaitement rôdé, c'est nouveau pour nous et ça décuple carrément le plaisir et l'intensité avec laquelle nous le jouons. J'exploite maintenant de plus en plus l'espace que nous offre la scène, jouant avec Erwan, tentant peu à peu de me rapprocher du public qui semble se lâcher plus qu'auparavant.
C'est alors que sur la fin du morceau j'aperçois Marion sur la gauche. Elle se déhanche avec grâce et finesse et m'adresse un sourire. Pendant un instant, je perds mes moyens mais mes amis récupère ma maladresse dans un break final plus qu'orgasmique.

-WE-ARE-ALL-ALL-ALL-ALL-ALL! scande Erwan, bientôt rejoint par les spectateurs.

-ALL-ALL-ALL-ALL! viens-je me joindre à lui.

Paul. Jimmy. Erwan. Thomas. Et des centaines de gens. Tous ensemble nous achevons le morceau d'un seul et même cri.

-ALL!

Salut du public. Je prends une bouffée d'air et marche joyeusement vers ma troisième guitare afin de faire notre dernier morceau. Cette fois uniquement acoustique.
Paul quitte sa batterie et s'assoit avec une guitare sur le devant de la scène. Jimmy s'équipe lui aussi d'une folk tandis qu'Erwan se plante sur un tabouret avec le micro.

Il est difficile d'expliquer le sentiment qui me parcoure le corps alors que je croise mes jambes et fait face assis à tout ce monde. La peur a fait place à une divine excitation.

-Nous sommes Colors et c'est le dernier morceau que vous entendrez de nous, entame Erwan, merci à tous... merci. Voici "Run away".

C'est à Jimmy qu'il revient de commencer le morceau, rejoint par Paul puis moi même. Il n'est plus question d'écouter la musique mais de la ressentir.

-Little drops of rain, fall dow on the window, chante doucement Erwan qui, nous regarde un instant et poursuit, she's just in a cage, at the top of the stairs.
Only regrets, request and sadness...


C'est la dernière chose que nous avons composé ensemble, les accords sont de Jimmy et les paroles de moi. Le fait de parler d'une fille évoque bien entendu Julie, et, c'est non sans émotion que je l'interprète ce soir.

-And she said, come and save me! And she said Come and save me!

Je voudrais que cet instant ne s'arrête jamais, seule notre musique résonne dans l'espace, peut-être une impression mais il semble que tout le monde se soit tut.
Je fixe une lumière au loin et inspire l'air chaud annonciateur d'un été plein de promesses.

-The girl has stopped to cry, and now she's laughing.

Thinking her fear has finally disappeared.

Listening the wind, wisper, her old child dream! monte d'un ton Erwan auquel répondent en coeur dix-huit cordes.

-At the last the girl walks... In a cotton field.

Hey! She's got a smile and some long brown hair.

Her green eyes flashing! Flashing! In the air!

Le rythme prend un peu plus de puissance et j'entame en un instant le solo final, totale improvisation, qui semble sonner à merveille. Je ne décolle pas les yeux de mon manche et profite de ce dernier soupir.
Comme une vague, une émotion déchirante dans la nuit. Comme un cri, une force qui ne faiblit pas, inlassablement.
Une fin, une dernière montée qui laisse un sentiment intact et palpable malgré le dernier souffle imminent. Et, dans un murmure alors que je me relève et prend le micro tendu par Erwan, quelques mots viennent se perdre dans le vent.

-And she said.. You were my love.


Commentaires