14 heures 30 s'affiche à ma montre, je ne quitte pas le ciel des yeux qui, s'assombrit de minutes en minutes.

-Ce serait dommage qu'il pleuve, hein Jimmy? lui dis-je.

-Je maîtrise ne t'inquiètes pas." me répond t-il le sourire aux lèvres.

Erwan se lève et me tape sur l'épaule.

-Je vais pisser bougez pas d'ici!

-Comme si on avait le choix lance Jimmy.

Je dirige de nouveau mon regard vers le ciel, cette fois-ci de fines gouttes perlent sur le verre de la fenêtre.

Soudain une main me saisit. Je me dégage vivement et me retourne, Erwan se tient face à moi, rouge de panique.

-On bouge! Vite!

-Man, du calme... Tu nous fais quoi là?

-Attrapez vos sacs on se casse j'ai dis!

Jimmy rigole.
-Arrête tes conneries, on est dans un train où veux-tu qu'on aille?

Erwan saisit alors de la tête de Jimmy et la tire vers le couloir.

-Voilà où l'on va aller si on ne fait pas quelque chose!

-Putain...
Le visage de Jimmy se décompose alors que j'incline ma tête en arrière, pivotant à 180 degrés. Un frisson me parcourt subitement le dos.

-Les flics... échappé-je.

Je les vois distinctement, deux policiers accompagnés d'un chien ainsi qu'un contrôleur SNCF se tiennent au bout du couloir qui précéde le notre.

-Putain je reste pas là, nous lâche Erwan, pas avec ce qu'on transporte! Pas avec ça!

-Tu es sûr que... proposé-je.

-Oui du con! Le chien va le sentir! C'est certain! soufflé-t'il.

-Fou le dans les chiottes alors!

-Non! Tu vois bien qu'on est en wagon de tête elles sont trop loin! grince Jimmy.

Erwan tape sur sa cuisse et nous regarde, ses yeux sont noirs, noir de colère, mais aussi de peur.

-Je...ne... reste pas... ici! articule t-il.

Et, en une fraction de secondes la décision est prise, il faut quitter ce train, quelles qu'en soient les conséquences.

Je remonte mon sac sur mes épaules, observant d'un oeil mes amis et de l'autre notre problème imminent. Nous avons moins de cinq petites minutes.

Nous nous levons, doucement, sans bruit, personne ne prête attention à notre manoeuvre alors que nous prenons la direction du sas, nous rapprochant de ce fait un peu plus de la police mais aussi de la sortie.

Je regarde mes deux amis, leurs visages sont crispés. A ce moment Jimmy approche sa main du signal d'alarme.

Erwan inspire une bouffée d'air, je l'imite. Je sens une goutte glisser sur ma joue que j'essuie d'un revers de manche.

-Va-y. finit-il par dire.
Je ferme les yeux à l'instant où Jimmy tire sur la poignée.

Cramponnés nous entendons le train relâcher la pression dans un crissement effroyable.
La secousse est plus rude que ce à quoi je m'attendais et inévitablement nous basculons tout trois à terre.

Malgré le choc, je suis le premier debout, j'aide rapidement mes camarades à se relever. Je reste attentif au bruit du train qui tente tant bien que mal de s'arrêter.

Mon regard se tourne instinctivement vers le couloir alors qu'Erwan et Jimmy essayent d'ouvrir la porte.
Les flics n'ont pas le temps de me voir que j'assène un grand coup de pied pour ouvrir cette dernière.
Mon coeur bat à la limite de rompre, j'inspire un bon coup.

-TOI D'ABORD. hurlé-je à Jimmy.

Ce dernier hésite un instant puis se jette et tombe dans l'herbe.

-Va-y. dis-je à Erwan.

Il me regarde, le train n'est pas encore arrêté, il semble vouloir me dire quelque chose, mais sa main agrippe la mienne, un sourire.

-Inoubliable je te l'avais dis.

Impossible me dis-je alors que nous sautons ensemble.