Je venais à peine de quitter de la classe que Paul m'attrapa l'épaule.

- T'avais quand même pas oublié notre rendez-vous l'autiste ?
- Pas vraiment. C'est surtout ton odeur que je parviens pas à oublier.
- Enfoiré, je vais te fermer ta gueule une bonne fois pour toute.

Il lève son poing pour me frapper, mais se souvient qu'il est dans la classe. Il me regarde froidement.

- On se retrouve près de la piscine !
- Tu sais nager maintenant ?
- Tu perds rien pour attendre. T'as intérêt à venir.
- Je viendrais.
- Je te donne cinq minutes !
- Ça te suffira pour trouver le chemin où tu veux que je t'accompagne ?
- Tu vas faire moins le malin dans quelques instants.

Paul me laisse. Je souffle un coup. Je sens que ça va encore dégénérer cette histoire. Et dire que tout a commencé à cause d'un baiser.

- Jack ?
- Oui.
- On peut se voir

Je ne sais pas quoi répondre. Que répondre ! Je me sens encore mal à l'aise. Je me retourne.

- Désolé Justine. Mais j'ai un rendez-vous ce soir.
- Un rendez-vous ?
- Oui, le genre de truc que tu peux pas rater même si t'en as envie.
- Ah. Bon, je voudrais quand même...
- Oui, moi aussi je voudrais. Y a plein de chose que je veux et qu'y arrive jamais. Je crois plus au Père Noël ! On a pas tout ce qu'on veux même en étant gentil. Je suis désolé. Moi aussi je voudrais, mais je peux pas.

Elle me lance un regard plein de tristesse. Un regard qui me fend la coeur et qui me décerne le titre de salaud suprême. J'ai envie de me cacher sous terre pour fuir ce regard. Mais je peux pas me cacher. Elle me fixe intensément.

- Je sais que t'es un mec bien.
- Peut-être pas autant que tu crois.
- Je te rends ta veste. Tu l'as oublié hier.
- Merci.

Faut que je dise quelque chose. Je peux pas en rester là. Je dois réussir, je dois me lancer. Mais je me sens coincé. Et Paul qui est en train de m'attendre dehors.

- Justine. Je suis pas...
- Écoute, je...

On se regarde comme deux idiots. Et ce regard, ce regard pour qui je serais prêt à tout.

Je me penche vers Justine et l'embrasse. Ses lèvres ! Je voudrais vivre cet instant éternellement. Je voudrais que tout s'arrête là, sur ce baiser. Un final magnifique.

Surprise au début, elle se laisse faire. Et le baiser dure. Cette fois je me sens bien. J'ai l'impression de sentir tous mes sens de façon intensive. Ce baiser est magique. Dire que pendant des années, je me suis refusé de vivre ça ! Quel crétin j'étais !

- Oh ! Désolé de vous déranger en pleine conversation. Mais on va être en retard Jack.

Édouard vient de faire irruption dans la pièce. Un sourire énorme sur sa tête. Il est heureux de voir que tout marche pour le mieux.

- Je te l'avais dit. C'est la fête aujourd'hui. Mais faut pas oublier l'heure.
- Bonjour.
- Hello, jolie demoiselle. Désolé de vous emprunter votre cavalier, mais j'en ai besoin aussi.
- On se parle demain Justine.
- Oui. Bonne soirée.

Je n'ai pas le temps de répondre. Édouard m'entraîne dehors.

- Content pour toi vieux !
- Moi aussi, mais...
- Commence pas. Ce soir, je sors le sirop de menthe à l'internat pour fêter ça. Mais d'abord les choses sérieuses.
- Oui.

Devant la piscine Paul discute avec un des gros bras de la dernière fois. Il nous voit arriver et nous jette un regard mauvais.

- Deux contre deux ? Demande Paul.
- Non. Je viens pour m'assurer que tu vas te battre à la loyale cette fois-ci. Réplique Édouard.
- T'as peur ?
- Non !

Paul fait un signe à son gorille pour lui dire de pas intervenir.

- Ça va aller. Me souffle Édouard.

J'esquisse un sourire.

Paul se rue vers moi. J'évite et me mets sur son côté. Il se retourne et me frappe au menton. J'essaye de répliquer mais je n'y parviens pas. Je vois Édouard se ronger les doigts. Je lui ai fais promettre de ne pas intervenir tant que le duel serait loyal.

Je me prend de nouveau un coup de poing dans le ventre. Je tombe à terre et me relève aussitôt. Je serre les poings et écrase une belle droite sur le nez de Paul.

- C'est moins facile que la dernière fois ?
- Fais pas le malin Jack.

Il tente de me frapper de nouveau. J'en profite pour lui décocher un coup dans l'entrejambe. Il tombe sur les genoux et grimace. Je le regarde.

- Si tu étais à ma place, tu me frapperais n'est ce pas Paul ? Frapper un type à terre, moi je trouve ça trop facile !

Paul se relève. Je lui assène un nouveau coup sur la joue. Il retombe.

- T'abandonne maintenant ?
- Aide moi Grégoire.

L'ami de Paul s'élance vers moi. Édouard lance son pied en avant et le Grégoire chute.

- On a dit loyal Paul. Murmure Édouard.
- Merci pour le coup de main Éd.
De rien.

Grégoire se relève. Je serre les poings mais il se sauve.

- Je pense que c'est bon pour aujourd'hui ?
- J'aurais ta peau !
- On verra ça.

Je tourne le dos et m'en vais. Suivi par Édouard. En moi même, je me dis que cette journée : en fin de compte, elle est très sympa. Je me sens libéré de poids qui me pesait depuis un moment.


J'ai temporairement réglé mes comptes avec Paul. Mais je me doute qu'il n'en restera pas là. J'ai embrassé Justine, mais il va falloir que j'assure à présent. Et pour Pierre, je ne sais pas quoi faire...

Je regarde Édouard, et je me dis qu'à deux : on a la classe quand même.




















- Elle embrasse bien ?
- Ta gueule Ed !
- Je disais ça comme ça.
- Passe moi le sirop de menthe.
- Donc elle embrasse bien ?
- Ta gueule Ed !