Je pourris dans ce trou depuis combien de temps ? J'ai au moins le confort d'avoir eu une cellule individuelle. Mais ils se moquent de moi. J'ai été piégé. Un coup de l'homme encapuchonné. Il était chez moi ce jour là. Ils étaient là jeudi, et samedi, ils m'ont détruit. Ils ont pris le peu d'espoir qui subsistait en moi. J'ai fini par basculer du mauvais côté de la balance, du moins, aux yeux de tous les autres. Mais mes yeux sont toujours ouverts. Je ne peux que me fier à moi-même à présent. Abandonné de tous.

Un gardien est venu m'annoncer mon transfert. Je quitte la prison. Je la quitte demain pour un hôpital psychiatrique. Je ne sais pas encore combien de temps j'y resterai. Ils disent que je vais devoir passer des tests. A quoi bon ? Je sais très bien que je ne reverrai plus jamais la lumière du jour en dehors de ces murs. Je suis cuit, fini. Une fois en prison, tous vos espoirs s'envolent. Toute votre personnalité se brise. Il ne reste que quelques fragments de vous qui s'entrechoqueront jusqu'à votre mort dans la plus grande indifférence du monde entier. En dehors de ces murs, le monde continue de tourner. Avec ou sans moi. Je ne suis plus qu'une simple poussière. Il ne me reste qu'une chose à faire. Prendre ma revanche sur l'homme encapuchonné. Les débusquer, et les dévoiler au grand jour. Et peut-être qu'à ce moment là... je serai gracié. Mais en attendant, j'en suis encore à bouffer dans des vieux plats en métal et la nourriture, sorte de bouillie mixture est à peine mangeable. A quoi bon nourrir les monstres ? Un monstre... Je sais que ça n'était pas de ma faute, il est mort de ma main mais l'homme encapuchonné avait troublé ma vision... Ca n'était pas moi. Je ne voulais pas !

- Samedi, en plein milieu de la fête, studio de Blue. -

" Et je vous dit que Fight Club c'est avant tout un film sur un homosexuel refoulé ! "

" Tu dis n'importe quoi Tom, il apparait clairement que le sujet traité est purement médical ! Tyler n'est pas son idéal masculin ! "

" C'est mon film de chevet donc fais pas chier. Tu peux pas test. Si je te dis que Jack est un homosexuel refoulé, c'est que c'est le cas "

L'histoire avec Anna semble définitivement enterrée. Ben et Tom se prennent le choux mutuellement alors que Red est parti se mêler à la foule. Il n'est pas le seul. Je sais que mon bien cher invité qu'est l'homme en noir, ou l'homme encapuchonné, s'est invité à la fête. Je peux le ressentir. Ce malaise, le même qui était déjà présent jeudi. La musique passait désormais en secondaire dans ma tête. Il n'y avait plus que ce sentiment d'insécurité dans ma propre maison, à nouveau. Le laisser attaquer en plein milieu de ma fête... je ne peux pas. Je dois le capturer.

Marchant au milieu de la foule, je regarde autour de moi. A part mes anciens camarades, je ne vois personne. Pas même Red. Red ?! L'homme encapuchonné, j'espère qu'il ne lui a rien fait ! Je retourne voir Ben et Tom rapidement.

"Les gars, vous avez vu Red ? "

"Bien sûr. Il est allé dans la buanderie chercher les packs de bière Bref... on en était où... Ah oui, on, Ben, je peux t'assurer que Tyler est bel est bien la représentation virile que Jack aurait voulu être ou avoir. Et donc... "

Je les laisse discuter en me dirigeant rapidement vers ma porte d'entrée. Effectivement, la porte d'à côté, celle de la buanderie, était ouverte. Je jette un oeil à l'escalier qui mène à l'étage inférieur. La lumière est complètement éteinte. Il lui aurait tendu un piège ? Non. Le coup classique. Faut que j'arrête d'être parano comme ça.

"Red ?"

Pas de réponse. Je commence à descendre à tâtons.

A y réfléchir, cet acte fut bien stupide. J'aurais simplement pu aller chercher de l'aide. Ne pas descendre seul. J'aurais du attendre du soutien. J'aurais du.

Mais je n'en fis rien. Une fois en bas, j'ai allumé la lumière de la "buanderie", qui ressemblait bien plus à une cave. J'y ai découvert Red. Red, baignant dans son sang rouge vif. A côté de lui, l'homme en noir. L'homme encapuchonné. A deux mètres de moi, se tenant debout, droit comme un roc, la tête baissée vers le corps chaud de mon frère, un couteau de boucher ensanglanté dans les mains, le poing serré autour. J'ai bien vite perdu mon sang froid. Me ruant vers l'assassin de Red, je le projette rapidement très violemment à terre. Son couteau frôle le sol. Il le frôle, simplement, puisque je le rattrape avant même qu'il n'ait le temps de faire son bruit si caractéristique en touchant le sol, brisant ainsi un silence morbide. Il n'en fut rien. Le couteau dans mes mains, je me suis mis à le poignarder. A poignarder l'homme en noir. Puis, pour lui trancher la gorge, j'ai retiré sa capuche. Et je l'ai vu. Son visage. Et en le voyant, j'ai compris que je n'étais pas de taille. J'ai compris qu'ils étaient trop puissants. La lutte était vaine. J'allais devoir les infiltrer au moment où ils s'y attendront le moins.

"BLUE ? NOM DE DIEU MAIS QU'EST CE QUE TU FOUS ?! "

Ils m'ont tiré du corps de Red. Mais ce n'était pas Red. Il y avait deux Red. Deux corps. Deux Red ! Je n'ai pas tué mon frère !

"JE N'AI PAS TUE MON FRERE !"

Et pourtant c'est bel et bien de son corps planté de toutes parts qu'ils ont du me tirer de force. J'ai fini en prison. Ils m'ont TOUS tourné le dos. Je suis seul. Mais pas totalement. C'est donc ça, ce qu'ils sont.

Des doppelgangers. Ce sont des putains de doppelgangers, à nouveau. Ils sont revenus.

"Passez-moi cette merde en salle d'interrogatoire, après ça, on le fout au trou. "

Ma vie vient de s'achever en moins d'une heure.