<h1>Noelfic</h1>

En Quarantaine


Par : Endless

Genre : Horreur

Status : C'est compliqué

Note :


Chapitre 8

Publié le 05/07/08 à 23:55:53 par Endless

CHAPITRE NEUVIEME - Alvéole du Dédale

Partie I

Une brèche ici mais comment...

- Eric comment t'as trouvé cette brèche dans une telle obscurité ? Et comment t'es certain de...
- J'en sais rien.
- Attends !? Tu sais même pas si c'est une sortie !?
- Je sais peut-être où nous sommes, c'est tout.
- Alors dis-moi bon Dieu de merde !!
- Baisse le ton gamin, c'est pour ton bien. C'est peut-être déjà foutu.

Je continuais en chuchotant et avec ce ton qui dénonçait mon énervement...

- Mais sois clair petite pute !!
- Tu montes, tu effleures les murs avec tes doigts et tu reviens au niveau du trou pour me dire si ça reste toujours du calcaire.
- Dans ton pronostic, il y a quelqu'un là haut ?
- Nan.

Facile de mentir pour parvenir à ses fins... De toute manière je n'avais pas le choix, mais j'avais un étrange pressentiment... Ici c'était différent, aucun facteur ne me permettait d'en être sur, et pourtant c'était flagrant... ICI C'EST DIFFERENT. Comme si l'air était cruel, comme si en passant dans mes poumons je sentais des toxines diaboliques entrer en interaction avec mon sang...

- Courte échelle ?
- Oui.
- Et comment tu vas monter toi ?
- Comment... Euh... On verra.
- Tu ne l'envisages même pas, c'est ça enculé ? Tu crois dur comme fer que je vais crever ?!
- Je n'ai aucune certitude sur notre position dans le souterrain, alors arrête de causer, je ne suis sur de rien.
- Tss... En tout cas vu que ces mots que nous échangeons sont peut-être les derniers, garde de moi l'image de quelqu'un qui t'aura détesté petite merde, quelqu'un qui... OUUCH !!
- Rien à battre de ce que tu penses de moi petite fiotte.

Il m'avait mis un coup de poing sous l'oreille gauche... Mais j'étais resté debout... En temps...

- Grr... Putain de sous-merde...

En temps normal, je n'aurais pas retenu mes pulsions, j'aurais déjà tenté de le dégommer... Mais il avait un couteau... Et sans lui je ne pourrais pas monter... Au plus profond de moi, la curiosité prenait toujours le dessus, même dans ce contexte ultra-mortifère... J'avais plusieurs ganglions étranges et douloureux dans le cou nés des indénombrables châtaignes qu'on m'avait porté durant toute cette consécution d'ignomies...

- Met ton pied...

J'allais trouver ses deux mains jointes avec mon pied gauche pour me hisser dans un trou très déterminé. Il n'avait pas été creusé par un prisonnier. C'était une sorte de carré aux bords très lisses où aurait pu reposer une trappe auparavant... Ce trou avait été creusé par les créateurs du souterrain, je n'étais donc pour l'instant pas sur la route d'une évasion...

- Bonne chance.

Je ne répondis pas à cette ordure... L'incarnation même de l'hypocrisie... A tous les coups il craignait simplement que je ne revienne pas le chercher si j'avais trouvé une sortie... Maintenant il m'amadouait... Mais quelle merde... J'étais désormais assis sur le sol de cet étage... les jambes pendaient encore dans le vide en direction d'Eric...Le cobaye d'Eric n'est jamais revenu d'ici... Et j'y étais, je ne sais où... Eric avait une idée de l'endroit où nous étions, une idée qui ne semblait pas rassurante... Je me levais délicatement tout en inspirant un grand coup... J'écarquillais les yeux, cette manie inutile qui nous donne malgré l'obscurité, l'impression de ne pas être totalement aveugle... Tâter le mur avec mon bras droit que je peux à peine bouger sera difficile... Je suis complètement vulnérable si on m'attaque latéralement à droite... J'ai les ongles de la main droite décollés, retournés, l'oreille droite en bouillie et le bras au bord de l'insensibilité... C'est de plus en plus terrible de trainer ce putain de corps... Et je ne dois pas faire de bruit, car il y a peut-être quelqu'un... Forcément... Qu'est ce qui pourrait attirer la peur ici hormis quelqu'un ? Quelque chose... Non, impossible... Je commençais par tâter le mur de gauche avec ma main gauche... Je tâterais le mur de droite avec ma main gauche aussi... je serais donc dos à l'inconnu... Dos à je ne sais quoi, je commençais donc par la facilité... C'était silencieux... mais si quelqu'un était présent... j'étais déjà repéré, c'était quasiment certain... UNE PLAQUE !! Il y avait une petite plaque... peut-être en Ardoise au niveau de mes épaules sur le mur de gauche... rien de gravé dedans... de la taille d'une plaque de rue environ... Peut-être y avait-on peint quelque chose... Je décidais à partir de cet endroit de faire le chemin retour en tâtant le mur de droite... Je n'avais pas atteint le bout de ce large couloir mais je me contentais pour l'instant de cette zone. C'est... Etrange... Immédiatement en posant mes mains sur ce mur... je sentis la froideur du fer... et en continuant... mes doigts n'arrêtaient pas de glisser sur cette matière, ce métal... Métal ou verre... Je n'en savais rien, mais il y avait quelque chose sur ce mur... Plus haut je venais de trouver que des lettres en fer avaient été collées sur le calcaire... Suite à une légère analyse tactile, la suite des lettres formait le nom de la ville "DARNOY"... On avait encore une fois mis le doigt sur un étrange décor qui ne me rassurait pas, mais pas du tout... Sous les lettres qui formaient "DARNOY", c'était du fer.. toujours du fer... lisse, mais entrecoupé de temps à autres... dans le fer étaient découpés de grands cadres, plus en profondeur... La matière n'était pas la même dans les cadres et à l'extérieur. Cela ne me disait strictement rien mais c'était une construction minutieuse réalisée avec des moyens...

J'estimais avoir suffisamment analysé l'endroit... je n'avais pas senti de présence particulièrement et je ne voulais pas en sentir de toute façon... Je retournais très vivement dans la direction du...

...

Quelque chose derrière, mais mon imagination me joue des tours ici... Où mes sens sont à leur plus grand désarroi... Voilà le trou...

- Attention j'arrive...

J'étais redescendu là où Eric m'avait attendu pendant moins de trois minutes.

- Eric ?

Le silence pendant dix secondes...

- Euh... Eric ? Fais pas le con. J'ai des trucs intéressants à te dire, t'es où ?

Putain MAIS MERDE !! C'EST QUOI CE SILENCE DE MERDE ? Où est-il ?..

- Si c'est une blague...

Cet étrange réflexe de me taire dû à ma nervosité qui était montée en flèche en moins de dix secondes... Pourquoi se taire ? Parce que au final... si Eric me joue un tour depuis le début... Et si comme dans sa propre cellule... Bordel... Non... Si il voulait simplement... Etablir la même situation que l'autre fois... Lui qui sait où je suis, moi qui ne sais pas où il est... Comme lorsqu'il m'a assommé et que j'ai entendu ces mots qui disaient que ce n'était pas totalement ma fin... Et si c'était maintenant ma fin ? Qu'il arrivait pour piétiner mon bras... pour me mettre des poings dans l'oreille qui me fait souffrir plus que tout... pour arracher mes ongles un par...

- Paul ?
- GYAAAAAAAAAAH !!
- QUOI ?
- ERIC ?!
- OUI C'EST MOI ! CA VA ?
- POURQUOI TU REPONDS PAS !?
- Chut... chut !! De quoi tu...
- Je t'appelle depuis tout à l'heure sale con !!
- J'ai rien entendu !
- Mais t'étais où ?
- Assis à quelques mètres d'ici.
- Putain le virus rend sourd je savais pas.
- Ta gueule, simplement que ta voix de pédé ne porte pas à plus de 2 mètres. Alors ?
- Il y a des trucs bizarres là haut. Je sais pas ce que c'est !!
- Où ?
- Sur les murs ! C'est un couloir de deux mètres de large, j'suis pas allé jusqu'au bout... Sur le mur de gauche il n'y a rien, à part une sorte de plaque en ardoise, mais à droite, le mur est entièrement recouvert de fer, de trucs bizarres, de cadres dans le fer, avec une inscription "Darnoy" au dessus.
- Oh putain. C'est bien ce que je pensais.
- Ce que tu pensais c'est quoi ? C'est quoi là haut ?
- C'est le côté le plus occulte du gouvernement.
- Le côté le plus occulte ?
- C'est ce que le gouvernement cachera pour toujours, du moins jusqu'à la fin de son existence... L'endroit qu'il ne laisserait découvrir à personne, pour rien au monde... On ne peut plus trouver aucune trace de cet endroit dans toutes les archives de Darnoy. Tout à été supprimé, même les nouveaux ministres ne sont pas tenus au courant de l'existence de ce lieu.
- C'est quoi ?
- La salle d'incinération.
- QUOI !?
- Abandonnée depuis bientôt un an. Cette salle existait avant la création du souterrain. C'est la première solution que le gouvernement avait trouvé...
- Solution ? De...
- Cuire les malades.

Je ravalais la salive... Je n'en croyais pas mes oreilles... Que...

- Vivants.
- Oh non...
- L'homme est indifférent, égoïste et mauvais. Et tu le sais.
- Nom de Dieu...
- Ca rappelle le génocide des Juifs en Europe il y a 70 ans... Ouais.
- Mais comment c'est possible...
- L'homme est mauvais... On a donc commencé par exterminer les malades en les brûlant dans des fours, ces trucs en métal que tu as touché. Les cendres sont toujours derrière cette salle.
- Le gouvernement s'est abaissé à cette inhumanité... C'est... paradoxal bordel...
- Oui, ils nous enferment pour notre inhumanité, mais ils ne sont pas dignes d'exister plus que nous... On a arrêté de faire cuire les malades quand on a appris que le virus parvenait parfois à survivre aux chaleurs extrêmes. La grande salle qui contient toutes les cendres des malades est donc contaminée à un point extrême. Je ne sais pas si c'est une bonne idée d'y aller, même pour nous contaminés...
- Elle... est où cette salle ?
- Juste derrière.
- Hein ?
- C'est des fours fabriqués spécialement dans un but d'extermination. On les appelle "fours à bascule". Ils sont placés sur un support, sur lequel ils peuvent donc basculer d'avant en arrière. Quand la combustion du corps est terminée, des personnes faisaient basculer le four en avant, les cendres tombaient alors dans la réserve à cendres juste derrière. Ensuite elles remettaient le four à sa position initiale. Et ainsi de suite.
- C'est simplement terrifiant... Combien de personnes ont subi cela ?
- J'en sais pas grand chose. Deux ou trois centaines de personnes.
- Putain. Quelle horreur, et personne n'est au courant ?
- T'inquiètes que le gouvernement n'a pas exterminé que des malades.
- QUOI !?
- Pour que ça reste secret, il a fallu aussi éliminer les risques de fuite d'information.
- Quelles pourritures... Je n'arrive pas à croire... qu'on ait osé... suivre ces putains de... Cette ville est pourrie...
- Ouais. Cette ville est une véritable horreur.

Eric était plongé dans cette saloperie d'horreur depuis des années... Il était si indifférent à tout cela maintenant... Il avait suivi le cycle classique de la réaction humaine face à l'horreur. Premièrement le dégout, la peur, le choc. Ensuite vient l'indifférence, et finalement cette horreur vous possède vous aussi... C'est aussi ainsi que les plus grands totalitarismes sont arrivés au pouvoir... J'étais rassuré d'en être encore au premier stade...

- Et... Il y a une sortie par là ?
- Oui, même si elle doit être bouchée à l'heure actuelle...
- Hein ?
- Réfléchis du con. Qui dit four dit fumée, qui dit fumée dit cheminée.
- Ah !!
- Il doit y avoir plusieurs cheminées. Je pense que c'est dans la salle des cendres qu'il y en a le plus. Mais comme je te l'ai dit... on en sait plus sur le virus aujourd'hui, avoir laissé ces cheminées ouvertes est un énorme risque de contamination pour Darnoy...
- C'est foutu quoi...
- Ne sois pas défaitiste. Bien sur que non.
- Bah explique !
- Tant qu'il y a un obstacle, le virus ne passe pas... Ca peut aussi bien être un bout de carton qu'un énorme bout de bois... Mais pourquoi le gouvernement aurait renforcé la fermeture de ces cheminées, si de simples matériaux peu couteux auraient permis de contenir simplement le virus. Ca m'étonnerait qu'il ait envisagé que des malades prennent cet endroit pour sortie... Donc je suppose que nous pouvons, si nous atteignons les cheminées, détruire ces obstacles facilement... Le soucis c'est d'atteindre les cheminées... Elles sont sans doute en hauteur.
- Et la salle des cendres est si grande que ça ?
- Bah j'dois t'avouer que j'y suis jamais allé.
- Et comment on y va dans cette salle ?
- C'est là que ça se complique. Enfin surtout pour nous deux, qui n'avons pas trop confiance l'un en l'autre.
- Je sens venir le truc.
- Il n'y a pas d'autre accès à la salle des cendres que les fours...
- Tu veux qu'on aille dans les fours ?

Chaque mot qu'il disait... et chaque blanc dans ses phrases... n'en était pas un... Plus j'en apprend et plus ce silence est significatif... Plus il joue un rôle prépondérant dans la mise en scène répugnante qui se construit dans ma tête... Et tout autour de moi... Plus j'en apprend, plus j'ai envie de me casser d'ici...

- Bien sur qu'il faut qu'on aille dans les fours...

...

- Et comment on va faire pour être tous les deux dans la salle des cendres si il faut forcément quelqu'un à l'extérieur du four pour faire basculer celui-ci vers l'avant ?
- C'est le problème...
- Et t'as la solution ?
- Nan.
- Ok. On fait quoi ?
- Ta gueule, essaye pas d'ajouter un côté comique à notre situation. Ta vie t'importe si peu ?
- Ferme-là...
- J'en sais rien de comment on va faire... Commençons par le commencement comme disait mon sympathique collègue d'antan...
- Oui ?
- On va monter tous les deux là haut, enfin si on y arrive. Une fois là haut, silence radio, rappelle toi que mon premier éclaireur n'est jamais revenu alors que cet endroit est maintenant un cul de sac.
- Les fours sont encore en état de marche ?
- Je... j'en sais rien.

D'accord... Jouer le Torero avec la mort... Eric avait agrippé mon pied, il me faisait la courte-échelle.

- Déjà ?
- Ta gueule, monte.

Il ne voulait pas me laisser le temps de réfléchir; une fois parvenu en haut, j'attrapais son bras... Je n'arriverais jamais à le hisser jusqu'à moi... je vais me viander...

- Lâche ! Lâche ! J'vais me péter la... Lâche !!

Il lâcha mon bras suite à une énorme force qu'il venait d'exercer dessus. Je ne sais trop comment, je l'avais senti monter.

- Comment t'as fait ?
- Chut... J'ai juste attrapé le rebord et je me suis hissé... après avoir pris un peu de hauteur en attrapant ton bras... On y est. J'observe, ensuite on réfléchit, et on passe à l'action ok ? Tout ça dans le silence le plus normal ok ?

J'affirmais de la tête mais il ne me voyait pas de toute façon...

- Ok...

J'étais étonné d'avoir encore ce genre de réflexe qui fonctionne avec la vue... Nous y étions tous les deux, à l'endroit "le plus occulté" par le gouvernement... Là ou l'autre type n'était pas revenu, dans ce cul de sac où quelques centaines de personnes ont perdu leur vie... Cette petite entreprise industrielle de la mort.


Partie II

Eric venait de passer devant moi et j'entendais sa main glisser contre les parois des fours à droite... Il avançait lentement et je percevais le doute en lui, il n'était pas rassuré quant à la disparition de son cobaye... Moi je ne bougeais pas, je craignais... je ne sais quoi... Eric revenait vers moi et je sentis la chaleur de sa respiration au contact de mon oreille gauche...

- C'est bien les fours.
- Ok, on fait quoi ?

Le silence combla le doute qui empêchait Eric de parler spontanément.

- Je vais trouver le moyen d'ouvrir un four. T'es toujours consentant ?
- Dois-je vraiment répondre ?
- Alors aide moi... Essaye d'en ouvrir un autre.
- Ok...
- J'avais vu des prototypes de ces merdes, les poignets d'ouverture sont en haut il me semble. Je crois pas qu'il y ait un système de sécurité particulier.

Etrange... Dans ce cas là il aurait été simple pour une victime en train de cuire de sortir... Il y a forcément un verrouillage des portes de four... Ma main gauche parcourait le mur métallique et bientôt je sentis une fameuse poignée, une longue boucle que je devais tirer vers moi pour ouvrir la porte de ce...

- Gnnnnnhhh...

Impossible d'ouvrir quoi que ce soit... Les portes étaient verrouillées par je ne sais quoi... Je commençais déjà à me projeter quelques minutes en avant... M'engouffrer... dans un four... où je ne voyais rien... entièrement cloitré dans une surface minuscule... A la place de dizaines de personnes qui avaient dû se débattre... vivre la pire souffrance imaginable... sentir leur peau se coller aux parois du four brûlant... et tout en se débattant, la décollant... Griffer les parois du four jusqu'à s'en arracher les ongles... Et n'avoir pu terminer sa vie sur les belles pensées qu'on aimerait garder après la mort... Dans ce cas là, on ne garde aucune pensée... On est tué, torturé, fini... Et j'allais me mettre à leur place... J'avançais maintenant vers Eric.

- J'ai trouvé la poignet... mais ils sont fermés...
- J'arrive pas non plus. Ils doivent juste être vieux, faut forcer.

C'était tendu et je ne sais pas pourquoi... Il y avait une réelle crainte dans notre attitude, j'étais nerveux, peut-être parce que je me sentais proche de la sortie, proche de ma fin, ou proche... de quelque chose... Le décor dans lequel nous évoluions actuellement était funeste... Atypique... Mais nous ne le voyions pas.
J'attrapais encore une fois la poignet d'un four, et appuyant mon pied contre le mur, je tirais de toutes mes forces...

- Urrrghh...

SPLING !

- OUCH... Aille...

Je...

...

- T'as réussi ?
- T'as entendu ?
- Hein ?
- Oui le four est ouvert mais...
- Quoi ?
- Attention à derrière toi.
- Pourquoi ?
- Un... bruit bizarre...

...

Silencieux... mais tellement... inquiétant... J'avais senti une présence et... on dirait qu'elle avait... profité du bruit du four pour se... pour s'animer dans l'obscurité...

- T'en es...
- Chut.

Je m'approchais silencieusement d'Eric pour lui chuchoter à l'oreille...

- J'ai l'impression qu'il y a quelqu'un... et qu'il bouge pendant... qu'on fait du bruit. Alors faisons vite.
- Alors dépêche... Dépêche d'aller dans le four putain... C'est pas le moment d'être pétrifié si proche du but...

Je retournais calmement vers le four pour m'y glisser mais j'avais la crainte de me retrouver en contact avec une carcasse carbonisée ou une quelconque autre horreur... La porte était bien ouverte et en forçant dessus je m'étais écorché les épaules par terre lorsqu'elle s'était ouverte. En tâtant, je situais l'entrée du four... Eric n'avait pas menti, c'était bien un renfoncement... J'entendais ses pas s'approcher de moi pour passer le plus rapidement possible à la manoeuvre... Je pénétrais dans cet infâme cercueil... Dans ce sarcophage des Enfers... Il était bien vide, et immédiatement cette sensation d'être condamné vint me prendre aux tripes... Il y avait des traits gravés à l'intérieur du four... souvent rassemblés... Ainsi que des sortes de petits...

- BLURGH !
- Ca va ?
- URGH !! Oui... C'est rien...

C'était des... PUTAINS D'ONGLES DE MORTS !.. Et ces gravures... c'était les griffures du supplice... Du désespoir face à l'acharnement diabolique de la douleur... Les signatures du martyr... Ils avaient gratté, gratté, GRATTE !! Pour fuir la vie... Et j'étais à leur place...

SPLING !

- Que... Eric !?
- J'ai refermé la porte...

J'entendais en effet sa voix atténuée à travers la porte du four intensifiant cette insupportable impression d'isolation... Je n'étais plus en contact avec rien... Enfermé dans un casier chauffant... Et dans le silence désormais...

- E... Eric !!
- Quoi ?
- Comment tu vas me rejoindre toi bordel !?
- J'en sais rien imbécile !! Je trouverais bien un...
- Moyen ?
- Attends, encore un bruit.
- Alors fais moi sortir !
- C'est bizarre ça...

Derrière la porte du four, il y avait Eric et il y avait autre chose... qui se déplaçait dans le noir et qui se moquait de nous depuis un moment... Et Eric était seul contre lui... Je poussais de toutes mes forces contre la porte du four mais je compris vite qu'on ne pouvait l'ouvrir que de l'extérieur.

- OUVRE MOI !! C'EST LE MOMENT !!
- Je...
- MAIS T'ATTENDS QUOI ?! SI IL TE TUE MOI JE MEURS ICI !? ME LAISSE PAS ERIC !
- ...
- Attends... est-ce qu'il y a réellement une "sortie" derrière ces fours, est-ce que tu me mènes pas en bateau depuis le début ?

Et c'est maintenant que... J'avais tout compris. La situation s'était inversée... Ce n'était plus Eric qui était en position d'infériorité... Ce n'est plus lui qui est abandonné dans un trou et qui supplie pour qu'on le fasse sortir... C'EST MOI ! JE SUIS PIEGE !! JE VEUX PAS MOURIR DANS UN FOUR !!

- ERIIIIIIIIIIIIIIIIIIC !!! FAIS MOI SORTIR !!! JE T'EN SUPPLIE !!!

SPLANG !!!

- Que... !?

SPLANG ! PAF ! OUCH !

- ERIC !?

J'en avais presque oublié la présence à l'extérieur ! Ca y est, elle avait attaqué Eric... C'était un face-à-face aveugle comme toujours... Mais je n'étais qu'un spectateur !! Impuissant, aveugle, peut-être AVEUGLE de mon avenir... L'issue de ce combat... pouvait déterminer l'achèvement de ma courte vie... Et j'étais enfermé dans un putain de...

...ting... tinG... tiNG... TING...

Ces bruits s'était rapprochés... D'abord lointains ils avaient fini par arriver juste au dessus de ma position... Ils s'ajoutaient à cet espèce de brouhaha combatif que j'entendais légèrement à l'extérieur... Mes mains tremblaient... et ces "ting" me rappelaient terriblement quelque chose...

- ERIC !!!! FAIS MOI SORTIR !!! JE VAIS T'AIDER A DEFONCER CE TYPE !!!

Le combat continuait... Je ne...

- AAAAAAAAAAH !!!!! HEIN ?

Quelqu'un... qui me regarde...

- MAIS NON !

Pas quelqu'un qui me regarde... Je me... reconnais plus... c'est mon reflet bordel !! JE VOIS... JE VOIS !! JE ME VOIS DANS LA VITRE DU FOUR !! JE...

- Comment...

... C'est possible ? Rouge... Je vois... rouge... orange ou rouge... UNE COULEUR !! JE VOIS UNE COULEUR ! Elle éclaire le four et... c'est à cause de cela que je me...

Oh non.

Non...

... Je délire ...

- GRILLE PAIN !!! TING ! TING ! TING ! LES BRUITS DU GRILLE-PAIN !!!

Ces fours sont bel et bien en état de marche et je suis en train de cuire... Je suis en train de cuire et je sue... Mon front est trempé... C'est mon âme qui parle car mon corps est tourmenté. Je panique. Ma tête... se cogne contre les parois pour l'instant tièdes de ce four... Et une véritable lumière rougeâtre... s'étend sur mes bras brillants... Je bouge tellement... J'aper...

- UUUUUUURGH !! UUUURGH !!!!!! URGH !!! NAN !! NAN !! NAN !! NAN !! PAS COMME CA !! SORTIR !! SORTIR !! MAMAN ! SORTIR ! MAMAN !

Mes côtes... humides... baignent dans le vomi... A travers... la vitre du four... légèrement obstruée par mes sucs... une bande lumineuse... s'étend dans le souterrain...

PING ! PING ! PING ! PING ! PING !

- Aille ! Aille ! Aille ! Aille ! AILLE ! AILLE ! AILLE ! J'AI CHAUD !!

Mes poings cognent cette... vitre... Les pointes de mon poing... au niveau des articulations métacarpo... phalangiennes... sont ensanglantées... par mon acharnement à vouloir briser cette vitre... Et mon sang se mélange à mes sucs... coulant sur cette vitre avec harmonie. J'aperçois... les murs bruts du souterrain... ainsi que pour la première fois... Eric... Grâce à la lumière des fours... Celle de ma cuisson...

JE MEURS DE CHAUD...

Eric est grand et maigre... Courbé... Bossu... Il a une tonsure... J'ai chaud. Un crâne pointu et des cheveux noirs... Il tombe...

- AAAAAAAAAAAARGH AAAAAAHEHEHEH...

Mes coudes... se brûlent quand ils touchent les parois du four... Et je commence à vivre la souffrance que je n'avais qu'imaginé comme la calamité la plus indescriptible par quelqu'un d'aussi faible que nous... je commençais à mourir... A envier toutes mes approches de la mort vécues auparavant... CAR J'ETAIS EN TRAIN DE VIVRE LE PIRE...

- NAAAAAAAAAN...

Je pleurs... Mais mes larmes ont du mal à couler... Et je gesticule... Car ma peau brule... De contact avec...
Eric est en jean... Il fait plus d'1m80... Il se relève, ses mouvements manquent de grâce... Il est violent... Son ennemi est énorme... Une... boule... en caleçon... Une boule noirâtre... Elle semble ELLE-MÊME CARBONISEE !!!!!!!!!! SORTIR !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

- GYAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHH !!! AAAAAIILLLE !!!! MAMAAAAAAAAAAN !!!

Mes yeux me piquent... Je cligne des yeux en permanence... je n'ai ni larmes ni salive... Je sèche comme une feuille... qui meurt... Et j'ai mal... J'ai mal et chaud... Je ne fais que ravaler ma "salive"... Non ravaler tout court... J'ai encore des hauts-le-coeur... Et pourtant je n'ai plus rien à vomir... JE SOUFFRE !! AILLE MON DOS !! AILLE MON BRAS !! MES GENOUX !!

- AAAAAAAAAAAAAAHHH !!!

Ca brûle... Ca brûle vraiment... JE VEUX MOURIR TOUT DE SUITE !! TOUT DE SUITE !! PAS ALLER PLUS LOIN !!! NON S'IL VOUS PLAIT !!! SEIGNEUR EPARGNEZ MOI !!!!

- aaaaaaaaaaaaargh...
- Eric... Nan... Meurs pas...

- gyaaaaargh...
- Gros fils de...
- NAAAAAAAAAAAAAAAN !!!

ting... tinG... tiNG... TING ! TING !

- ...
- CA....... VA....... PAUL..... !? MERDE..... ! MERDE...... !

CHLANG !

Hein ? Je vole ?

- Ghhhh... OOOOOOOOOUCH !!!!!! AAAAAAAAAAARGH !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
- paul... tu m'entends ?

...

- Argh... Oui...
- PAUL TU M'ENTENDS ?
- Oui...
- PAUL REPONDS MOI !
- Oui je t'entends E-RIC...
- QUOI ?
- JE T'ENTENDS...
- J'ai eu peur !! CA VA ?!
- Je meurs...
- ALLO PAUL !!
- OU ES-TU ?...
- Encore là haut !! Toi tu es dans la salle des cendres !! Je vais trouver un moyen de venir t'aider !! L'autre type avait démarré les fours, t'as pas trop cramé ? J'ai fait basculer le four le plus vite possible, j'avais pas le choix !!
- Si... Brulé... Et mes côtes... sont détruites... pendant la chute... Mal aux poignets... Vais pas m'en sortir...
- J'ai pas très bien entendu mais ça m'a pas l'air très positif. JE ME DEPÊCHE !!

Du sable...

- Pourquoi... sable ?
- PARDON !?
- Pourquoi du sable !?
- JE T'AI DIT QUE T'ES DANS LA SALLE DES CENDRES !

Salle des cendres... Encore... dans l'obscurité... Et l'odeur... J'en peux plus... J'ai mal... Mal... Aille... Mes côtes...

- ARGH...
- TIENS BON !

Eric... ne voulait... apparemment... pas me faire crever... dans le... four... Mais il ne pourra pas... me rejoindre...

A côté de moi... des côtes... de quelqu'un... mais en tout cas des côtes... Peut-être celles... du cobaye d'Eric... Il avait dû y passer... Il avait dû cuire lui aussi... Pour ça... qu'il est pas revenu... Et maintenant... j'étais sans doute allongé près de lui... sur les cendres de centaines de victimes...

Je suis un... légume... brûlé au... troisième degré... Jamais je ne me relèverais...


Partie III

Il fait noir... pas la moindre source de lumière... J'aurais crû... voir... les cheminées en surbrillance... un minimum de lumière qui serait rentré de ces grands tuyaux... Mais non... J'étais simplement dans une alvéole du dédale... de ce labyrinthe qui me rendait cinglé, qui prenait le dessus sur moi tandis que mon bras puait le pourri... J'avais eu le temps de l'apercevoir quand la lumière des fours m'éclairait... Il était violet... Même sans le virus, j'aurais radicalement raccourci ma vie dans cet endroit... Je ne peux rien faire d'autre que...

- GYAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH !!!!!!!!!
- Paul !!
- NAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN !!!
- J'arrive dans peu de temps.

D'après ce que j'entends... Les fours sont à un peu plus de deux mètres au dessus de moi... sur le mur de gauche... Ca y est, on m'achève... Et je côtoie un espèce de taré, je n'arrive même pas à cerner ce qu'il pense, ce qu'il est... parfois il me met le couteau sous la gorge... Parfois je lis qu'il a fait mourir des innocents de ses expériences immondes... Et parfois il me sauve... Mais sous mon point de vue... Eric fait partie du tableau... Son caractère est impitoyablement démoniaque... Mais je n'ai personne d'autre... Mes mains se crispent et griffent... les cendres comme du sable sur une plage... lorsque l'on brule sous les rayons de soleil les plus intenses, que le bruit des vagues vient nous bercer... que l'on dort... Pas dans le noir, pas non plus sur des cendres, pas enfermé, pas dans la puanteur, pas mutilé, pas dans la puanteur...
Les brulures me... m'empêchent... me font...

- AAAAAAAAARGH...

Et Eric... comment viendrait-il ? J'ai soif... Ma gorge me brûle... Chaque mouvement respiratoire me détruit...

- Eric...

Même plus... assez de force... pour qu'il m'entende...

- ERIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIC !
- Quoi ? Je suis en train de réfléchir à un moyen pour...
- OU SONT... LES CHEMINEES ?
- Sans doute au dessus de toi, mais tu ne les vois pas, c'est sans doute normal !
- ERIC... Réfléchis ! Impossible... que tu... me rejoignes...
- J'ai pas tout compris. Mais ne parle plus, repose toi, tu perds tes forces.

Parler ou non... Au final si je parle je m'épuise... Si je ne parle pas je m'endort... Mais ce sommeil me fait si peur... C'est un sommeil que je ne veux pas... Un sommeil malsain... Peut-être le dernier, peut-être l'éternité... La mort me guète mais j'ai continué à me battre depuis que l'on m'a enfermé ici... J'ai peut-être... encore les moyens...

- De l'eau...
- Hein ?
- De l'eau...
- Tiens bon, on en aura bientôt !!

Mon cul... C'est... pas...



«Paul... Réponds... J'ai trouvé l'endroit... contrôle des fours... deux systèmes... démarrage et bascule... peuvent fonctionner simultanément... Paul... Toujours là ?... HE PAUL ! »

- HEIN ?
- Ouf ! Tu m'as fait peur putain ! T'as entendu ce que je viens de dire ?
- Euh...
- Quand on enclenche le démarrage des fours, le système de bascule est déverrouillé !
- Ah...
- Faut que tu trouves la force de te relever ! Je vais tout enclencher et si tu parviens de là ou t'es à faire basculer le four, je m'y mettrais et je te rejoindrais !
- Ok... pas con...
- Prend ton temps, j'te laisse cinq minutes pour que tu te relèves.

C'est quasiment... impossible... Mais je préfère pas lui dire... Je vais tenter le tout pour le tout... Me hisser sur mes jambes... avec les côtes cassées... Je me mis sur le ventre en roulant dans les cendres... ce fut déjà extrêmement douloureux...

- AAA... ATCHOUM ! Putain... de cendres...

J'allais tenter de me mettre sur les genoux... mais redresser mon buste me semblait impossible. En poussant sur mon bras gauche... Je parvins à me mettre sur les genoux, cependant c'était mon bras qui faisait tout le travail...


- T'y arrives ?
- Deux... secondes...

Allez... putain de muscles du dos... Aidez moi... Je me mis désormais en position accroupie, mes semelles étaient de nouveau au sol... ou aux cendres... Je n'avais plus qu'à forcer sur mes mollets... au moins je serais debout... J'ai pas nécessairement besoin de me redresser le tronc...

- Aaaaaaaah..... Aaaaille... ARGH... C'est... c'est bon... j'suis debout.
- Alors approche de ma voix ! Essaye de trouver de prises sur les fours.
- Ok...

Euh... des prises... Non...

- Pas de prises...
- Comment ça ?

C'était juste des trous au niveau de ma tête, de la largeur d'un corps... Des fins de toboggans creusées dans la pierre... Les fours en position de bascule devaient suivre la trajectoire de ce "toboggan" qui faisait descendre les cendres jusqu'à ma position... Mais Eric était tout proche... Les fours devaient être à 50 centimètres devant moi...
Je tendais mon bras gauche en avant, l'aventurant dans ces trous qui devaient m'amener aux fours. Mes doigts touchèrent une fois de plus le métal, cette fois chaud des fours d'extermination... Ils n'avaient pas encore entièrement refroidi de cette dernière cuisson qui aurait pu me tuer... Moi... je regardais par terre, tel le pire bossu du monde... De toute façon je ne voyais rien... Je ne pouvais pas relever ma tête... J'étais devenu réellement handicapé... Le toucher était de toute façon le seul sens nécessaire à cette opération...

- Non... pas de prises... juste le métal... des fours...
- C'est à dire ?
- Bah... je sens les fours... mais... putain... Pas de prises quoi...
- Du calme Paul, du calme, on va y arriver...
- Ah voilà j'ai une prise...
- Sérieux ?
- Mais me fais pas répéter, t'as vu l'état dans lequel je suis bordel ?
- Excuse moi. On fait un test, je démarre tout, je déverrouille le système de bascule et t'essayes de le faire basculer ok ?
- Vas-y.
- Je reviens.

ting... tinG... tiNG... TING ! TING !

- Voilà, tout est ok, fait basculer maintenant !
- GYAAAAAAAAH !

J'utilisais tout ce qu'il restait des forces de mon bras gauche pour appuyer sur ce four... Le faire basculer...

CHLAAAANG !

- YES ! YES !!
- Content ?
- Bah ouais mais toi aussi nan ? C'est aussi pour que tu sortes que je viens. Je retourne éteindre tout.

ting... ting... TING... TING ! TING !

Faux-jeton... Bref, je ferais le nécessaire une fois le moment venu...

- Bon cette fois je vais tout redémarrer et je me fous dedans, ensuite go tu fais basculer le four ok ?
- Ouais, dépêche toi.

Je sens le putain de doute dans sa voix... Il pense même pas ce qu'il dit ce fils de pute... Ca me fout la rage ça... PUTAIN ! Il mérite rien de plus que les autres, lui il faisait déjà l'enculé avant d'arriver ici... Moi non !! Ce connard... j'en peux plus de cette sous merde et son caractère de dégénéré mental... Si j'ai bien compris... le... putain de fonctionnement de ces fours... Ca marchera...

ting... ting... TING... TING ! TING !

- Allez go !! Je m'enferme !
- D'accord.
- Putain, quelle galère de fermer la porte du four de l'intérieur...

CLANG !

- Voilà, fais moi basculer maintenant ! Dépêche !

La légère lumière du début de cuisson des fours vint agréablement caresser mes joues crasseuses... Cela me força à relever légèrement mon visage pour qu'il puisse apprécier entièrement cette douce chaleur... Je suis heureux... C'est comme un putain de feu de bois... Un peu de chaleur... mais pas trop comme tout à l'heure... ahahah... Justement dosé de là où je suis... J'avais réussi à redresser légèrement mon visage... Je pouvais donc encore voir devant moi en forçant sur ma nuque...

La petite lumière rougeâtre du four éclairait la salle des cendres. C'était une petite salle rectangulaire d'environ trois mètres carrés, il y avait en effet une sorte de cheminée au plafond, à quatre bons mètres, et un minuscule trou dans le sol qui semblait mener quelque part... Aucune lumière ne s'échappait de ce trou, un homme très maigre aurait pu y ramper... Mais lorsqu'une si douce lumière éclaire une salle... on veut simplement y rester... Ne pas s'engouffrer dans une nouvelle source de ténèbres... Ce petit trou était en fait le contraste obscur à l'ambiance chaude de cette salle...

- Magne toi mec !!

Je voyais maintenant avec précision le visage d'Eric... Des joues très maigres, un menton pointu couvert de poils, des petits yeux cernés, marrons, vifs et apeurés, une bouche légèrement en avant, un nez assez imposant, légèrement busqué à la manière de Dante... Quelle vieille gueule... Lui aussi me découvrait...

- Je t'imaginais pas comme ça !
- Moi non plus mais on n'est pas là pour ça !! Fait basculer !!
- Tu m'imaginais comment ?
- Mais arrête de sourire comment un zouave !! Fait basculer ce four !!
- Un zouave... D'accord.
- PAUL !

Il commençait à comprendre... Et ses yeux pétillaient de plus en plus... Je vivais cette étrange évolution des émotions lorsqu'on apprend qu'on est trahi.

- PAUL ! BASCULE ! BASCULE !
- Quoi ? J'entends pas ! Tiens bon ! J'arrive ! Ahahah !
- PAUUUUUUUUL !

AHAHAHAHAH ! Eric qui pleure... Incroyable, la honte de sa vie, il supplie un adolescent... Ce mec que je voyais avec une certaine fascination jusqu'à maintenant...

- AHAHAH ! Quelle fiotte ! Souris au lieu de chialer ! Si on discutait un peu ?
- PAUUUUUUUUUUUUUUUUUUL !!! AIDE MOI !!!
- Arrête de gueuler...
- POURQUOI TU FAIS CA ? S'IL TE PLAIT ! IL COMMENCE A FAIRE CHAUD !
- On se raconte des blagues ?
- Ecoute... Paul... Ou... Ouvre... Enfin bascule le four...

Comme il est nerveux... Assez drôle ça...

- PAUL ! TU... TU DOIS ÊTRE EN TRAIN DE... DE...
- Tu bégayes vieux fou.
- C'EST TOI QUI DEVIENT FOU ! C'EST UNE CRISE DE VIOLENCE ! PREND LE DESSUS SUR LA CRISE ! NE ME LAISSE PAS DANS CE PUTAIN DE FOUR PAUL !
- Crise de violence... Ahahah... Mais au moins ça me fait du bien...
- PAUL ! PRENDS LE DESSUS ! TU VAS LE REGRETTER APRES !!
- Ta face de rat me dégoute, c'est pas en te regardant que ma putain de crise comme tu dis vas s'arrêter.
- PAUUUUUL ! JE T'EN SUPPLIE !
- AHAHAHAHAHAH !
- PAUUUUUUUUL ! CA COMMENCE A FAIRE MAL !!! Bon... Ok... J'me... me... me... me... calme... o-ok ? S-s-s'il te plait... P-p-paul...
- T'es nerveux hein, tu payes pour toutes les horreurs que t'as fait vermine !!

Il commence à bouger, bientôt ce tas de merde va être agressif, c'est mon pronostic.

- Paul... tu... tu l'as subi toi aussi... Je t'ai... sauvé de la cuisson... Comment... comment tu peux...
- Bah écoute vieille merde... Je sais pas comment...
- MAIS... PAUL ! SI TU FAIS... AILLE CA BRÛLE !
- AHAHAH !
- SI TU FAIS CA... TU N'OSERAS PLUS JAMAIS AVANCER... TU LE REGRETTERAS !
- Mais ta gueule...
- ARRÊTE DE SOURIRE... S'IL TE PLAIT...

Je sens son désarroi, il y a quelque chose de comique... J'imagine d'ici 30 minutes... Il sera réduit en miettes... Incroyablement génial ! Et moi je survis ! Au final je suis le seul survivant de tous ceux que j'ai connu ici... Génial, quelle fierté...

- Paul... UUUURGH... Me laisse pas... J'ai... aiiiiille...
- Chaud ? Putain... J'ai une sacré envie de...
- AAAAAAAAAAAAAH...

J'ai envie de tout casser bordel... TAPER ! MÊME DANS LE VIDE ! AHAHAH !!

PAF ! PAF ! PAF !

Putain de murs de merde ! AHAH !! PUTAIN DE MURS DE MERDE !!

- GYAAAAAAAAAAAAAAAAAH !!!!! AIDE MOI !!!!!!!!!!!
- MURS DE MERDE !!

PING ! PING ! PING !

- MURS DE ... ARGH...
- NAAAAAAAAAAAAAAAAAN ! AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH !!

Aille... Aille... Je viens de me... Oh putain... quelque chose de complètement déboité... J'aurais pas dû... qu'est ce que j'ai fait ? Qui crie ? Je... dois me relever... Mais je me suis complètement... explosé un muscle... quelque chose de plus en bougeant... Pourquoi vouloir bouger ? Je suis...

La salle des cendres.

- DIEU... DIEU DU... NON !
- Rgh... Aaaaaaaaaaaaaargh.... Kh... kh... kh... argh...
- MERDE ! ERIC ! ERIC ! TIENS BON ! CA FAIT COMBIEN DE TEMPS QUE T'ES...

Faut que je me relève... Vite... Il est en train de cuire... Putain... trouver la force de se relever... Voilà sur les genoux... ensuite accroupi... VITE !! ET ME LEVER...

- AAAAAAAARGH... J'ARRIVE... JE ME LEVE...
- gh... euuuuugh... gh...

BON DIEU ! Je n'arrive pas à me lever... Je n'arrive pas... Non... NON ! J'Y ARRIVE PAS ! QU'EST CE QUI S'EST PASSE ?! Ca devait fonctionner ! Je dois juste faire basculer le four ! Il est encore temps ! Encore possible !! Encore possible !!

- Eric !! J'arrive ! Tiens bon !

Chhhhhhhhh...

- Eric... Argh... NE MEURS PAS ! JE PEUX ENCORE T'AIDER !

Mais non... JE PEUX PLUS ME LEVER !

- ERIC REPONDS MOI PUTAIN ! REPONDS BORDEL ! REPONDS ! REPONDS ! VITE REPONDS !!

... chhhhhh...

- ERIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIC !!

il est encore temps. Je peux encore le... Je peux plus me lever mais il y a toujours... Il n'y a pas... Je ne peux plus... me lever mais je peux... rien faire... Je...

- Eric ?..

Je... J'échoue... Non j'échoue pas je... je vais le sauver...

- Eric ?

Eric ne réponds plus mais... Il est juste... Dans les pommes... Il va s'en remettre... Il cuit mais... Cela ira juste en... s'aggravant... Eric ne s'en remettra pas... Il ne s'en remettra jamais... ERIC EST MORT ! JE L'AI TUE ! J'AI TUE ERIC !

- J'AI... J'AI... NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON !!

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