Kaileena, l'Impératrice des Papillons
Par : SyndroMantic
Genre : Fantastique , Horreur
Status : Terminée
Note :
Chapitre 13
La Chute (dernière suite)
Publié le 18/07/10 à 02:03:45 par SyndroMantic
[vidéo facultative, surtout à l'attention de ceux qui n'ont jamais joué à Prince of Persia - l'âme du guerrier]
Ensemble, nous retournâmes sur les plages de l'Île, afin de chercher quelque épave utile à notre survie. Le grand homme me portait dans ses bras tellement j'étais fatiguée. Mon corps était bercé au rythme de sa nonchalante marche. Il avait posé ma tête sur son épaule, la première fois que j'avais voulu me reposer. En rouvrant les yeux, je voyais la mer, plate et silencieuse. Plus encore que le sable où ses timides vagues s'échouaient. A se demander comment le précédent cataclysme avait pu venir d'elle... Aucun de nous deux n'avait rêvé. Il y avait quelques heures à peine de cela, tous ces rivages étaient recouverts, écrasés, piétinés par son terrible courroux. Ce phénomène était réellement arrivé. Ce crime n'était pas à nier. Cette bête jamais n'arrêterait. Je continuais de la regarder, un moment, depuis la frontière des songes. Masse d'encre sale et corrompue. Faux miroir du ciel tyrannique. Fenêtre-barrière sur l'horizon. Désert fatal de sables mouvants. Assiégeant... Limite... Prison. Tous les crachats du monde que je lui aurais adressés n'auraient fait que la rendre plus forte. Mes larmes aussi.
Plongée dans mes pensées, je partis naturellement dans un lourd sommeil, loin, très loin, à des millions de kilomètres peut-être, grâce à un rêve dont j'ignorais encore tout du sens. Il avait lieu sur le continent, dans une ville que je ne connaissais pas, et qui, pourtant, semblait liée à mon sort. Le crépuscule approchait. Une âme en détresse perdait haleine, quelque part. Le sol tremblait. Dans les ruelles on entendit aboyer, d'autant plus distinctement que les murs étaient fort étroits. Un vent de tous les diables y virevoltait, brisant chaque corps trouvé sur son passage. Pas un ne lui échappait, qu'il soit de terre, de chair ou de métal. Avant même que leurs débris puissent être identifiés, la noirceur d'un nuage mobile les engloutissait dans son ventre. Alors surgit de ces brumes un effroyable démon en armure, d'une hauteur et d'une carrure qui défiaient l'entendement. Sur son torse était dessinée une multitude de marques mystiques, blanches comme la lune sur la nuit.
Le monstre, solennel, patrouillait dans la ville basse, effectuant par instants de vertigineuses accélérations que l'oeil humain ne pouvait percevoir. Celui (le dernier, sûrement) qui le fuyait non plus : quelques mètres devant, un homme vêtu d'un manteau courait à toute vitesse parmi les dédales pour lui échapper. Son pas de course était incroyablement rapide, si bien qu'il arrivait néanmoins à tenir la même distance avec son poursuivant. Ce dernier agitait plusieurs tentacules à partir de son abdomen, essayant de le capturer. Sans succès. Il fallut attendre que la route du fuyard soit barrée par un chien errant, pour que l'écart entre eux se réduise. Les deux êtres échangèrent un regard. La créature de ténèbres les rejoignit. L'homme détala sur le champ. Le canidé voulut le suivre, mais la surprise de voir approcher l'autre colosse le déconcentra. Sa carcasse fut broyée au sol par une force démente. Rien ne pouvait entraver son chemin.
L'on ne put en dire autant de sa cible, qui se heurta bientôt à une impasse. La rue qu'il avait empruntée menait à une porte fermée à clé. Les impacts de son poing sur le bois se confondirent avec ses gémissements de terreur. Le démon apparut à l'embranchement précédent. Le pauvre hère se figea, sentant son approche. Les vibrations de l'air, les briques qui tombaient des murs, les filaments qui sortaient de toute part, le bruit de marteau sur les dalles, et pour finir cette abominable vision d'ocres et d'ombres, où que cherchent les yeux... Après quelques secondes, l'humain se résigna à faire face à son ennemi. Ses jambes tremblaient. De la sueur coulait sur son front. A peine visible sous sa capuche, l'expression de son visage montrait l'état de torpeur dans lequel il était. Son adversaire se tenait devant lui, faisant le double de sa taille. Juste avant que sa brume fulgurante ne le submerge, l'homme dégaina en un éclair deux épées de chaque côté de sa ceinture. Une lueur d'une seconde attesta dans son regard qu'il était déjà mort.
Mais il avait d'abord un Destin. Comme d'autres constructions avoisinantes, la porte dans le dos du fuyard explosa sous la pression de débris, juste assez lourde pour ne pas effondrer complètement l'arche de pierre. Ahuri par cette aubaine, l'homme lança de sa main gauche la première arme qu'il pouvait, puis fit volte-face avant que sa sortie ne soit condamnée. Le monstre fut transpercé par la lame en plein milieu de sa poitrine, reculant d'un pas. Sa cible bondit au travers de l'ouverture, et disparut derrière de nouveaux éboulis. Son attaque n'avait cependant pas eu le moindre effet. Même, le corps de cette créature ingéra son épée toute entière, comme s'il pouvait s'en nourrir. Une fois l'absorption terminée, elle poussa un rugissement et éclata d'un coup de pied les blocs qui le séparaient de sa proie. Des clapotis retentirent.
Elle n'avait pas pu l'empêcher d'atteindre sa destination. Certains éclats venaient d'atterrir dans les eaux du port, où le fugitif s'était remis à courir. Le Temps pressait. Il allait être trop tard. Le colosse hâta sa marche sur les quais, ses tentacules plus agitées que jamais. Un navire avait largué les amarres, non loin. Trop peu le faisaient à cette heure pour qu'il s'agisse d'une coïncidence. L'homme se dirigea instantanément vers lui. Il ne restait plus que quelques mètres. Une voix résonna alors dans toute la zone, grave et rauque. Elle parlait d'une loi, impossible à transgresser et pourtant si fragile. Elle parlait de paradoxes, elle parlait d'équilibre. Elle parlait de mort. Elle parlait trop pour envoyer à temps ses fils, sur l'humain qui tête plongeante rejoignait les eaux. Il avait fallu qu'il sache nager. Le colosse interrompit son geste. Sa cible remonta à la surface, les cheveux plaqués sur ses yeux. Le souffle court, il se rendit à la force de ses bras vers la grande embarcation, où des marins s'attelaient à lui tendre un cordage pour qu'il grimpe à bord. Encore une fois, l'être se déplaça avec beaucoup de vitesse et d'agilité le long de cette corde, semblable à un arachnide. Il se hissa parmi ses nouveaux compagnons, alors que celui qui devait être le capitaine venait à sa rencontre. Les deux hommes échangèrent une poignée de main. Les torches sur le bateau éclairaient mieux la chevelure du nouvel arrivant. Il était brun.
Ensuite, les timoniers mirent les voiles.
C'était terminé. Il ne pouvait plus rien faire. Il ne pouvait plus avancer. Impossible de faire un pas de plus. Lui ne savait pas nager. Ces vagues le repoussaient inconditionnellement. Il s'en méfiait plus que tout. Loin dans l'océan, j'avais déjà failli y laisser ma vie. J'avais déjà été prisonnière de cette Eau. Cette même Eau qui m'avait inondée, partout dans mon corps, jusqu'à me contraindre à me terrer dans le terrier d'un prédateur. Cette même Eau qui m'avait jetée dans les limbes, la peur et la souffrance. L'Eau était, et reste le mal. L'Eau serre les corps dans les vêtements. L'Eau gêne le mouvement. L'Eau refroidit la chair. L'Eau apporte la maladie. L'Eau salit, corrompt, pervertit le sol. L'Eau affaiblit les fondations. L'Eau fait tomber les rochers. L'Eau noie les vivants. L'Eau rend dépendant. L'Eau fait souffrir, même et surtout dans son absence. L'Eau obsède. L'Eau écrase. L'Eau est notre cauchemar.
Là-bas, le navire quittait le port, une nouvelle destination au gouvernail.
La créature le regarda disparaître dans la nuit, immobile. Bientôt... Dans presque quatre semaines, il pourrait agir...
Ensemble, nous retournâmes sur les plages de l'Île, afin de chercher quelque épave utile à notre survie. Le grand homme me portait dans ses bras tellement j'étais fatiguée. Mon corps était bercé au rythme de sa nonchalante marche. Il avait posé ma tête sur son épaule, la première fois que j'avais voulu me reposer. En rouvrant les yeux, je voyais la mer, plate et silencieuse. Plus encore que le sable où ses timides vagues s'échouaient. A se demander comment le précédent cataclysme avait pu venir d'elle... Aucun de nous deux n'avait rêvé. Il y avait quelques heures à peine de cela, tous ces rivages étaient recouverts, écrasés, piétinés par son terrible courroux. Ce phénomène était réellement arrivé. Ce crime n'était pas à nier. Cette bête jamais n'arrêterait. Je continuais de la regarder, un moment, depuis la frontière des songes. Masse d'encre sale et corrompue. Faux miroir du ciel tyrannique. Fenêtre-barrière sur l'horizon. Désert fatal de sables mouvants. Assiégeant... Limite... Prison. Tous les crachats du monde que je lui aurais adressés n'auraient fait que la rendre plus forte. Mes larmes aussi.
Plongée dans mes pensées, je partis naturellement dans un lourd sommeil, loin, très loin, à des millions de kilomètres peut-être, grâce à un rêve dont j'ignorais encore tout du sens. Il avait lieu sur le continent, dans une ville que je ne connaissais pas, et qui, pourtant, semblait liée à mon sort. Le crépuscule approchait. Une âme en détresse perdait haleine, quelque part. Le sol tremblait. Dans les ruelles on entendit aboyer, d'autant plus distinctement que les murs étaient fort étroits. Un vent de tous les diables y virevoltait, brisant chaque corps trouvé sur son passage. Pas un ne lui échappait, qu'il soit de terre, de chair ou de métal. Avant même que leurs débris puissent être identifiés, la noirceur d'un nuage mobile les engloutissait dans son ventre. Alors surgit de ces brumes un effroyable démon en armure, d'une hauteur et d'une carrure qui défiaient l'entendement. Sur son torse était dessinée une multitude de marques mystiques, blanches comme la lune sur la nuit.
Le monstre, solennel, patrouillait dans la ville basse, effectuant par instants de vertigineuses accélérations que l'oeil humain ne pouvait percevoir. Celui (le dernier, sûrement) qui le fuyait non plus : quelques mètres devant, un homme vêtu d'un manteau courait à toute vitesse parmi les dédales pour lui échapper. Son pas de course était incroyablement rapide, si bien qu'il arrivait néanmoins à tenir la même distance avec son poursuivant. Ce dernier agitait plusieurs tentacules à partir de son abdomen, essayant de le capturer. Sans succès. Il fallut attendre que la route du fuyard soit barrée par un chien errant, pour que l'écart entre eux se réduise. Les deux êtres échangèrent un regard. La créature de ténèbres les rejoignit. L'homme détala sur le champ. Le canidé voulut le suivre, mais la surprise de voir approcher l'autre colosse le déconcentra. Sa carcasse fut broyée au sol par une force démente. Rien ne pouvait entraver son chemin.
L'on ne put en dire autant de sa cible, qui se heurta bientôt à une impasse. La rue qu'il avait empruntée menait à une porte fermée à clé. Les impacts de son poing sur le bois se confondirent avec ses gémissements de terreur. Le démon apparut à l'embranchement précédent. Le pauvre hère se figea, sentant son approche. Les vibrations de l'air, les briques qui tombaient des murs, les filaments qui sortaient de toute part, le bruit de marteau sur les dalles, et pour finir cette abominable vision d'ocres et d'ombres, où que cherchent les yeux... Après quelques secondes, l'humain se résigna à faire face à son ennemi. Ses jambes tremblaient. De la sueur coulait sur son front. A peine visible sous sa capuche, l'expression de son visage montrait l'état de torpeur dans lequel il était. Son adversaire se tenait devant lui, faisant le double de sa taille. Juste avant que sa brume fulgurante ne le submerge, l'homme dégaina en un éclair deux épées de chaque côté de sa ceinture. Une lueur d'une seconde attesta dans son regard qu'il était déjà mort.
Mais il avait d'abord un Destin. Comme d'autres constructions avoisinantes, la porte dans le dos du fuyard explosa sous la pression de débris, juste assez lourde pour ne pas effondrer complètement l'arche de pierre. Ahuri par cette aubaine, l'homme lança de sa main gauche la première arme qu'il pouvait, puis fit volte-face avant que sa sortie ne soit condamnée. Le monstre fut transpercé par la lame en plein milieu de sa poitrine, reculant d'un pas. Sa cible bondit au travers de l'ouverture, et disparut derrière de nouveaux éboulis. Son attaque n'avait cependant pas eu le moindre effet. Même, le corps de cette créature ingéra son épée toute entière, comme s'il pouvait s'en nourrir. Une fois l'absorption terminée, elle poussa un rugissement et éclata d'un coup de pied les blocs qui le séparaient de sa proie. Des clapotis retentirent.
Elle n'avait pas pu l'empêcher d'atteindre sa destination. Certains éclats venaient d'atterrir dans les eaux du port, où le fugitif s'était remis à courir. Le Temps pressait. Il allait être trop tard. Le colosse hâta sa marche sur les quais, ses tentacules plus agitées que jamais. Un navire avait largué les amarres, non loin. Trop peu le faisaient à cette heure pour qu'il s'agisse d'une coïncidence. L'homme se dirigea instantanément vers lui. Il ne restait plus que quelques mètres. Une voix résonna alors dans toute la zone, grave et rauque. Elle parlait d'une loi, impossible à transgresser et pourtant si fragile. Elle parlait de paradoxes, elle parlait d'équilibre. Elle parlait de mort. Elle parlait trop pour envoyer à temps ses fils, sur l'humain qui tête plongeante rejoignait les eaux. Il avait fallu qu'il sache nager. Le colosse interrompit son geste. Sa cible remonta à la surface, les cheveux plaqués sur ses yeux. Le souffle court, il se rendit à la force de ses bras vers la grande embarcation, où des marins s'attelaient à lui tendre un cordage pour qu'il grimpe à bord. Encore une fois, l'être se déplaça avec beaucoup de vitesse et d'agilité le long de cette corde, semblable à un arachnide. Il se hissa parmi ses nouveaux compagnons, alors que celui qui devait être le capitaine venait à sa rencontre. Les deux hommes échangèrent une poignée de main. Les torches sur le bateau éclairaient mieux la chevelure du nouvel arrivant. Il était brun.
Ensuite, les timoniers mirent les voiles.
C'était terminé. Il ne pouvait plus rien faire. Il ne pouvait plus avancer. Impossible de faire un pas de plus. Lui ne savait pas nager. Ces vagues le repoussaient inconditionnellement. Il s'en méfiait plus que tout. Loin dans l'océan, j'avais déjà failli y laisser ma vie. J'avais déjà été prisonnière de cette Eau. Cette même Eau qui m'avait inondée, partout dans mon corps, jusqu'à me contraindre à me terrer dans le terrier d'un prédateur. Cette même Eau qui m'avait jetée dans les limbes, la peur et la souffrance. L'Eau était, et reste le mal. L'Eau serre les corps dans les vêtements. L'Eau gêne le mouvement. L'Eau refroidit la chair. L'Eau apporte la maladie. L'Eau salit, corrompt, pervertit le sol. L'Eau affaiblit les fondations. L'Eau fait tomber les rochers. L'Eau noie les vivants. L'Eau rend dépendant. L'Eau fait souffrir, même et surtout dans son absence. L'Eau obsède. L'Eau écrase. L'Eau est notre cauchemar.
Là-bas, le navire quittait le port, une nouvelle destination au gouvernail.
La créature le regarda disparaître dans la nuit, immobile. Bientôt... Dans presque quatre semaines, il pourrait agir...
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