Note de la fic : :noel: :noel: :noel:

Cet été.


Par : Deck
Genre : Sentimental, Réaliste
Statut : C'est compliqué



Chapitre 15


Publié le 24/04/2013 à 23:43:53 par Deck

Le marathon bat son plein, les positions sont en train de se prendre, et le problème est que je ne connais pas la longueur de la course. Ca ne doit pas être très long, vu que c'est organisé par le camping, mais tout de même, je cours dans l'inconnu le plus total, ne sachant pas s'il faut que je mette la gomme ou si je peux rester safe en courant tranquillement pour l'instant. Je jette un coup d'oeil derrière moi juste avant un tournant, plus de trace de Lucie. Je me concentre sur ce qu'il y a devant moi et bien décidé à me placer convenablement, j'accélère le rythme, j'ai encore largement de quoi. Je ne suis pas spécialement sportif, loin de là, mais je m'entretiens de temps à autre. J'ai fait de la musculation chez moi pendant un an à coup d'haltères et de pompes et j'ai couru pas mal au Parc avant d'arrêter y'a quelques mois. Disons que ça se ressent encore malgré le temps. Je vois environ 5 personnes dans la nouvelle ligne droite, une rue peu empruntée qui rejoint la plage un peu plus à gauche. D'un pas assuré, je rejoins un couple qui court à un bon rythme devant moi et je leurs demande:

" Excusez-moi, vous savez quelle est la longueur du marathon ? " A l'homme de me répondre:

" Oui, c'est très rapide, c'est du 6 kilomètres, et on ré-atterrit à l'entrée.
- Merci, bonne course. "

Bon, 6 kilomètres, c'est raisonnable et je me sens toujours en pleine forme. Le soleil se fait quand même très présent et me chauffe sans ménagement la tête et la nuque. Ma fierté personnelle, et non en l'honneur de la famille comme le voudrait mon père, se réveille de plus en plus, j'ai envie de gagner cette course ou au moins d'arriver dans le top 5. D'un souffle maîtrisé, je double sans peine le couple et je rattrape rapidement les quelques concurrents à une vingtaine de mètres. 6 kilomètres, c'est rien, ça passe vite, il est pas question que je m'économise. Alors j'enclenche la vitesse au-dessus et c'est avec des enjambées longues et rapides que je file les autres. Je zieute l'heure sur mon portable: 15h et des poussières. Je commence à suer réellement, je regrette de ne pas avoir de casquette. Mon portable se met à vibrer dans ma poche, alors que je dépasse prestement un quadragénaire essoufflé. Étonné, je vérifie et je vois que Lucie m'a envoyé un message. Toujours en mouvement, je lis " Alex, t'es super loin ou quoi ? J'ai lâché mes parents, attends-moi. " Arf... Malgré moi, je ralentis fortement ma course, j'en suis presque à marcher et c'est redépassé plusieurs personnes que j'attends d'apercevoir Lucie. Au bout de 2 minutes, toujours rien, alors qu'on doit bien être à 2 ou 3 kilomètres de course. Je prends mon mal en patience, même si le top 10 me paraît déjà de plus en plus improbable, mais si je l'attends pas, ça risque de l'énerver, m'enfin c'est une fille quoi.

Finalement, je la vois arriver, juste après que j'ai tourné à droite. Elle est toute en sueur, en train de souffler. Son débardeur presque trempé laisse entrevoir son soutien-gorge blanc et une des bretelles de son débardeur est en train de glisser de son épaule, bientôt nue. Ca valait presque l'attente, tiens, je me dis, avec une légère demi-molle en approche. Elle arrive à mon niveau et:

" Merci Alex... Désolé... J'ai essayé de lâcher mes parents bien avant mais ils ont insisté, puis finalement ils m'ont laissé filer... ", dit-elle en reprenant son souffle à chaque fois.

" C'est pas grave ", lui dis-je avec un léger sourire, " On peut encore rattraper du monde et faire un joli score. On y va ?
- Ouais, c'est parti. "

Je n'y croyais plus vraiment pour être franc, les premiers devant être déjà aux 3/4 de la course mais bon. Sous mon impulsion, nous prenons un très bon rythme et en quelques minutes de course rapide, nous rattrapons tous le beau monde qui m'avait dépassé tout à l'heure, alors qu'un couple est sur le bord de la route en train de se reposer. Sur le chemin, Lucie et moi discutons de temps à autre, lorsque Lucie me lance:

" Alex, je... J'ai été évasive la dernière fois, et quand on était à la plage, je... C'est gênant, j'en suis pas du tout fière mais si tu veux, je veux bien te dire pourquoi j'ai quitté le lycée plus tôt et... pourquoi j'ai pleuré. J'ai plus grand monde à qui parler, et toi, tu es là, tu es sincère et j'ai confiance en toi, donc c'est comme tu le sens. "

Touché par son petit discours, je lui réponds:

" Va-y si tu veux, je t'écoute et quoique tu dises, je vais pas te jeter la pierre ou critiquer. On a tous nos hauts et nos bas, nos secrets, même les moins avouables. Je veux bien en savoir plus en tout cas.
- Merci, c'est gentil, je suis contente de te connaître ", me dit-elle avec un regard craquant et un petit sourire.
" Je vais pas trop entrer dans les détails, mais... J'ai eu une vie assez peu enviable depuis mes 14 ans. J'ai... fait pas mal de soirées, je suis souvent sorti pendant plusieurs nuits jusqu'au matin, j'ai touché un peu à tout et tout ça a fait que j'ai eu... pas mal d'expériences, je... J'ai beaucoup couché... " finit-elle sans le vouloir, " ... avec pas mal de mecs jusqu'à cette année, je sais, je suis une salope, on me l'a souvent dit et... "

Elle avait du mal à aller plus loin. Nous continuons à courir à une très bonne allure et en pleine discussion, nous dépassions de plus en plus de monde. Il devait rester 2 kilomètres, la première place était sûrement grillée. Lucie termina:

" Et cette année, j'ai continué les mêmes trucs, autant te dire que les cours c'était du n'importe quoi, je me couchais parfois à 6h pour me lever à 7h, enfin voilà. Il y a trois mois, j'ai... J'ai été enceinte. Mes parents, qui ne savaient rien, m'ont presque foutu dehors, mais finalement ils m'ont aidé. J'ai avorté quelques semaines avant les vacances, d'où mon arrêt de cours prématuré. Mes parents ont décidé qu'on allait déménager et là, on est ici pour quelques semaines, le temps de trouver où s'installer. Une étape, quoi... "

Elle n'osait plus me regarder dans les yeux, et c'est en fixant le sol qu'elle continuait à courir à côté de moi. J'étais assez déboussolé par ces révélations mais ça expliquait pas mal de choses. Elle avait l'air très encline à aller vite, sexuellement parlant. La dernière fois, on avait juste discuté à la plage que deux jours après elle m'invitait chez elle... Je lui demande:

" Et pour la dispute... ?
- Mon père a remis ça sur la table, il m'a giflé car on devait tout recommencer à zéro. Des photos avaient circulé dans mon lycée, c'était remonté un peu partout dans la ville, et mon père avait très honte de la situation, il était haut placé dans son entreprise. Je suis partie et tu m'es tombé dessus. Voilà, tu sais tout, en résumé. "

Silencieux, je continue à courir, elle à mes côtés, toujours honteuse de ce que je voyais. Je lui pris alors la main, elle relève la tête puis me fixe, et je lui retourne un sourire confiant et chaleureux. Un petit sourire timide se dessine sur ses lèvres et je termine:

" Allez, on continue, n'y pense plus, c'est pas important. Merci de m'en avoir parlé.
- Merci de m'avoir écouté. "

Elle semblait encore un peu bouleversée. J'imagine qu'en parler lui avait remémorer une période importante de sa vie, pas très joyeuse. Pour l'instant cela dit, j'étais bien décidé à me défoncer, Lucie à mes côtés. Je lui dis:

" Allez Lucie, il doit rester à peine un kilomètre. On donne tout ce qu'on a ! "
Elle acquiesça et en quelques secondes, nous courions à toute allure à travers la route, suivant les concurrents plus loin et les indications le long des routes. En quelques minutes, nous avions dépassé, en pleine remontée, un bon nombre de coureurs essoufflés ou tout simplement trop lent. Nous devions être au niveaux des 10 premiers. Je continuais à accélérer le pas, courant de toutes mes tripes en ne faisant presque plus attention à mon souffle, Lucie commençait, elle, à respirer fortement et avait l'air de mal tenir le rythme. Je lui disais courage tous les 20 mètres, en lui tenant toujours la main, alors que d'autres coureurs étaient visibles devant. Nous les dépassons à toute vitesse, étonnement c'était en majorité des vieux, la cinquantaine, en tête de course. L'expérience, sûrement. La ligne d'arrivée nous fit soudain face, après un dernier virage.

" Maintenant, Lucie, allez ! ", je crie.

De mon côté, j'en pouvais plus non plus, j'avais un point de côté de plus en plus douloureux et il devait rester 300 mètres, l'entrée du camping était visible, et la tête de marathon en était toute proche. La banderole de l'arrivée était toujours fixée donc personne n'avait franchi la ligne. Je courais comme un dératé en traînant Lucie, totalement morte, je voulais gagner, ma fierté était atteinte et mon amour-propre voulait sa victoire. Mais la chose était vaine, nous rattrapions enfin le groupe de vieux que le premier, franchit la ligne et fit tomber la banderole. On entendit Gégé et quelques autres personnes l'applaudir dans des acclamations. Un deuxième vieux, la soixantaine au moins franchi la ligne, il devait rester 15 mètres entre l'arrivée et les autres coureurs, et 20 mètres entre les vieux et nous. En haletant carrément, le souffle aigu, je me projette en avant, Lucie à bout de bras, dans mon état. Je sens que mon corps est sur le point de lâcher, ma tête explose presque à cause du soleil, du manque de souffle et de la fatigue. Le dernier effort final est harassant. Nous dépassons le groupe à 5 3 ou 4 mètres de l'arrivée et dans un élan, je propulse Lucie en tête, et elle franchit la ligne d'arrivée avant moi. Heureux, je franchis aussi la ligne, ma tête est bouillante.

Je m'arrête, et je n'arrive plus à respirer. Je lève ma tête au ciel, la langue sortie, la bouche grande ouverte, aucun souffle n'arrive à rentrer, je sens un amalgame de salive bloquer ma gorge. Soudain je tombe, j'heurte un caillou sur le chemin. Noir.


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