Note de la fic : :noel: :noel: :noel:

O Algérie


Par : maxarus
Genre : Réaliste, Action
Statut : C'est compliqué



Chapitre 1 : Vieille France de '68


Publié le 25/02/2011 à 22:49:22 par maxarus

Une feuille...
Une simple feuille...
Tranquille, traçant sa route dans les cieux, une vie paisible et sage faites de rêve et d'insouciance . Fière, elle navigue dans le vent, louvoyant entre les courants .
Mais alors que cette vie de roi commençait si bien, il fallait que le traître Eole punisse le pauvre végétal , et bientôt coupé de son essence de vie, la feuille reine chute tel un corps lourd, tentant de se rattraper en faisant quelques belles pirouettes, mais rien n'y fait, cette vie devient éphémère et bientôt ce qui était un empire redevient une misérable feuille.
Elle tombe, et elle meure, finissant sa chute sur quelques pavés .
Les mêmes pavés que de nombreux français ont foulés, les pavés du quartier latin...

Paris, 12 mai 1968, Boulevard Saint-Michel .

Ça y est, il est encore sorti, qu'est ce qu'il va faire maintenant ? Ça fait quatre ans qu'il est revenu, de là-bas, l'ancienne colonie française qui était l'Algérie . Il était soldat, il en a vu des conflits dans sa vie, il en a vu des moments douloureux, des choses qu'il ne doit pas dire, pourtant sa tête n'est pas pleine de ses images traumatisante, non... il est indifférent, il a appris à se vider, à ne plus y penser, son cerveau a attaqué sa mémoire, a brouillé certains souvenirs pour le protéger, le protéger de lui-même . De toute cette merde...
De toute cette merde qu'on fait les fellagas à ces amis...
De toute cette merde que ses propres camarades ont remué...
Ces massacres, ces pillages, ces viols...
Quel merde la guerre quand même...
Il aimerait bien le tenir celui qui parlait de « guerre sainte » de « croisade » pour lui coller son neuf Mm. dans la bouche .
Mais il ne peut pas, il n'en a plus la force, il ne veut plus se battre . Il sort de son petit appartement, il referme derrière lui doucement . Puis il descend et sort dans la rue .
La rue est déserte mais des gens scandent au loin quelques paroles :
« Sous les pavés la plage ! », « Il est interdit d'interdire ! », « La vie est ailleurs ! », mais tout cela n'intéresse plus trop l'homme fatigué, il marche le long du trottoir, le nez dans son long manteau beige et son chapeau noir sur la tête lui donnant un petit air de détective privé, il avance en faisant de grands pas lourds et lents .
Soudain deux gendarmes au loin lui font de grands signes, il sont de l'autre côté de la rue totalement déserte .
D'après ce que peut voir l'ancien soldat, les deux gendarmes enfourchent leur vélo pour aller tout droit vers lui, le vétéran n'en a que faire et continue sa route sur son trottoir .
Mais les gendarmes rapides et nerveux se plantent devant lui .
-On peut savoir ou tu va l'ami ?
-On est dans un pays libre non ? Réponds le vétéran d'une voix rauque, je vais à une réunion ça vous va ?
Le gendarme arque un sourcil, l'air surpris .
-Ce n'est pas la politesse qui t'étouffe toi ! Affirme t'il d'un air vaguement sérieux .
-Et ça ? Ça doit m'apprendre la politesse ? Reprend l'ancien soldat en ouvrant la partie gauche de son manteau .
Aussitôt les deux gendarmes se mettent au garde-à-vous .
Sur la poitrine de l'homme est agrafée une croix de guerre qui brille sous les rayons du soleil . Alors les gendarmes déglutissent avec peine, et toujours au garde-à-vous, ils n'esquissent pas le moindre geste pour retenir leurs vélos tombés à terre, l'homme fatigué soupire puis reprend :
-La prochaine fois que vous voulez emmerder des gens, assurez vous qu'ils ne sont pas des anciens de l'Algérie, ça serait dommage pour vos matricules, allez repos .

Les deux pauvres gendarmes ramassent leurs vélos puis un des deux bredouille :
-Excusez nous pour le dérangement monsieur... dit-il en cherchant la fin de sa phrase .
-Mon adjudant suffira, j'ai à faire maintenant . Raille le vétéran .
Il continue donc sa route, s'arrête devant un troquet, prend une grande inspiration puis ouvre la porte .
Le brouhaha qui résonne s'arrête immédiatement . Une place est faite au silence alors que l?ancien soldat est à l'intérieur .
-On peut vous aidez monsieur ? Demande l'homme derrière le comptoir .
-C'est bien ici la réunion des anciens combattants d'Algérie ?
-On vous a bien renseigné, asseyez vous on va vous servir quelque chose . Réponds l'homme avec entrain .
Le décoré de guerre fit un vague «merci» entre ses lèvres et alors qu'il se dirige vers une table , un homme au milieu d'une des bandes se lève et l'interpelle :
-Venez donc avec nous, on est ici pour discuter ! Dit-il avec un signe de la main .
Il s'assoit donc parmi les quelques personnes à table, on lui demande ce qu'il veut prendre, il prend une bière, les autres discutent déjà moins fort depuis son arrivée, mais après quelques minutes à faire connaissance, la joie de vivre reprend le dessus et les rires fusent de nouveau .
-Et sinon tu nous a toujours pas dis dans quel régiment t'étais ? Demande un des anciens en allumant une cigarette .
-Moi ? J'étais dans le 52ème régiment d'infanterie de ligne, appelé sur le front de force comme la majorité des p'tits gars qui sont partis là-bas, j'avais 20 ans qu'en je suis parti... soupire t'il .
-T'est allé dans des coins chauds ? Demande intrigué un des hommes à sa gauche .
-Plutôt oui, j'ai fais le sud-est pendant un moment, le désert ne m'a pas réussi, le nord non plus, à chaque fois que j'allais quelque part il fallait que ça donne . Il esquisse un sourire les yeux pointés vers son verre vide, il soupire lentement puis reprend :
-Je me rappelle surtout de quelques gars que j'aimais bien, je sais pas ce qu'ils sont devenus aujourd'hui, mais je sais même pas si je serais content de les revoir .
-C'était quand ta première fois ?
-Je sais plus vraiment, on devait prendre un village qui était passé côté F.L.N enfin bon c'est un peu brouillé dans mon esprit...


Commentaires