Je m'allongeai et la chaleur de mon corps frêle fit pardonner mon acte à la Terre, qui me confia sa chaleur. Cette chaleur physique renforça mon coeur qui était en chaleur, même s'il était refroidi de la non-réciprocité qui m'avait tant fait souffrir de ne pas avoir pu goûter, dans le passé, au bonheur que forme l'Amour.
Me voilà allongé dans cette tombe, la tombe, ma tombe, me gavant de la naïveté que cuisine mon naïf espoir. Peut être étais-je un peu fou ? En tout cas, ce matin en me réveillant j'avais la conviction pure et dure que si l'Amour tuait alors il fallait que je prépare le lit où j'attendrai pour mourir de bonheur.
Donc me voilà enfin allongé dans ma bulle, espérant sauver mon coeur et mon âme de la tristesse infinie d'être une chaussure sans paire, ne pouvant marcher dans le bonheur.
Oui, tel est pour moi le but de ma vie. Trouver la chaussure qui m'était jumelle. Mon âme cherche sa soeur et mon coeur veut s'épanouir. Dans ce passé j'avais réussi à m'évanouir dans l'art, donnant des ailes à mon esprit qui parcourait milles paysages mais je me leurrais. Même si l'art est la plus belle des choses, je préférais essayer de vivre les sentiments plutôt que de les peindre du pinceau de la Vérité.
Je cherchai ma vérité, et ne me noyait que dans des mensonges. Les séismes qui avaient ravagé mon coeur baignaient mon âme de larmes.

Une des branches du vieux chêne était prise dans le cadre obscur de ma tombe et je finis par la contempler. Les multiples feuilles, qui la parsemaient, tanguaient nonchalamment vers les racines de son père, lui même enfant de la Nature. Quand l'automne viendra à son tour, la branche de ce vieux chaîne laissera tomber ses feuilles une par une, d'un abandon du Destin de sa condition d'arbre. Ces feuilles voleront alors en un voyage libertin, éphémère, pour finir par se semer.
Existe-t-il un arbre ou plutôt l'Arbre, de l'Amour ? Je ne pense pas car malheureusement si c'était le cas, l'amour serait utilisé par l'Homme pour faire un business sans rancoeur, et ainsi le bonheur n'existerai plus car l'Amour aurait été qu'un banal article de vente, insipide et fade.

Non, ça y est j'ai trouvé ! Je vais rester allongé dans ma tombe d'une pensée plus vraisemblable. Je vais attendre mon automne...
J'attendrai patiemment cette saison qui ne sera faite que pour moi où les arbres abandonneront leurs feuilles de bonheur et où je pourrai croquer dans les nombreux fruits qui ne seront de saison que lors de Mon automne.
Je me regorgerai d'amour, et mon bonheur fera bon tour. Mon coeur nagera sans se noyer, et mon âme pourra enfin faire mes lacets avec sa soeur. Je pourrai enfin avancer et m'épanouir ! Ainsi j'aurai accompli le but de ma vie, qui par cette folle saison de mon imagination, n'en aura plus.

Plus de but ?

Le doute me prend. Si je n'aurai plus de but, il ne me sera plus nécessaire de vivre, il faudra donc mourir... Mais je ne veux pas mourir !! J'aime trop la vie même si elle donne un but utopique. Utopique, oui. Autant qu'il le reste alors car il n'y a aucune raison de vivre pour un but qui va nous faire mourir.

Je perd le fil. Je perd le sens. La vie a-t-elle vraiment un sens ? Je tâcherai de trouver les réponses à ces questions sans réponses dans ma tombe ridicule.

Je pense juste, juste un peu fou.




Nes'07