Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

Les quelques nouvelles ratés d'une âme en Pain


Par : Pain
Genre : Réaliste
Statut : C'est compliqué



Chapitre 18 : Ébréché


Publié le 27/07/2014 à 11:30:43 par Pain

"Gratte."
Et il gratta, de ses longs ongles, sur ce bois brute.
"Gratte."
Et il suivit cette ordre obsessionnel, incapable de réagir, entièrement absorbé par son rêve.
"Gratte."

Mais la porte finit par s'ouvrir, dévoilant une grande personne, avec son grand sourire, et ses grandes mains.
"Bébé ?"
Ces mains s'accaparant mon corps, dans ce noir d'encre.
"Bébé ? Que fais-tu encore ?"
Ces mains m'arrachant, encore une fois.
"Bébé, il va falloir apprendre à dormir tout seul."
Et ces grandes mains m'amenant entre deux corps chauds, rapidement rendormis.
Mais je me dois de gratter.
"Gratte."
Les mains écartés, pour atteindre les deux.

Et le soleil, le soleil qui cache le noir d'encre. J'exècre le soleil, je le hais, je ne peux pas gratter avec le soleil, alors je regarde mes ongles pousser. Et le soleil passe, comme le temps. Il passe pour s'en revenir, mais entre temps, je peux gratter, et gratter encore. De ce bois qui se fendille, de cette peau nue qui m'appelle.
Et quand vient l'heure du réveille, quand vient l'heure diurne, je regarde mes ongles pousser. J'attends.
Un jour, un homme en blouse blanche me regarda intensément, il me sourit, il était méchant, ses bonbons me mangeaient, ses tapes sur la tête me grandissaient. Et l'un des corps chauds pleura, ces larmes firent pousser mes ongles, et mouillèrent le mur.

"Bébé !"
Je gratte ces jarrets.
Et puis ces grandes mains me portent vers le deuxième corps chaud.
Et quand le sommeil les reprant, je gratte, avec plus de force, pour les marquer, je gratte.

Mais mes ongles ne sont pas assez longs, ils irritent, ils rougissent la peau, mais le rêve est obsessionnel.
Alors j'attends, sous le soleil, sous la pluie, sous la neige, sous un parapluie, sous un auvent, sous un porche, sous un château, sous un poteau, sous un tableau, sous un nuage, sur un nuage, à coté d'une montagne, sous un arc-en-ciel, sur une bassine, à coté d'un moucheron. J'attends que mes ongles poussent.

"Bébé ?
La porte finit toujours par s'ouvrir, et ces mains s'accaparent toujours mon être. Mais c'est un mal pour un bien.
"Je gratte.
_Comment ? Répète bébé."
Mais le silence lui fait éco, pas une parole de plus. Et je l'entends chuchoté au deuxième corps chaud :
"Il parle si rarement."
Et le sommeil vient, et mes ongles me démangent, et je gratte, je gratte, je gratte, doucement, doucement. Bientôt.
Alors je le répète,
"Je gratte, je gratte, je gratte, je gratte."
J'en fais une chanson, une hymne, mon hymne. J'en fait mon oriflamme, que je brandis dans l'exercice de mes fonctions, je gratte.

Et le soleil revient, éclairant ces peaux légèrement rougis.
Et un autre homme en blouse, il était méchant, avec ces jeux drôles, avec ses bonbons que je mangeait, avec ces sièges en cuir, parfaits pour gratter.
"Votre fils est bien autiste madame. Mon collègue ne s'est pas trompé."
Et de nouveau un des corps chaud pleura, c'était lassant. Gratter
"Pourquoi a-t-il des ongles aussi long ? Demanda le spécialiste.
_Il refuse que l'on les lui coupe, il hurle et mort si on y touche."
Et je gratte, je gratte en regardant la bassine sur la tête du médecin. Non c'est un oiseau, il est beau, il vole, s'échappe par le mur. Gratter.
"Et bien, il existe des instituts spécialisés monsieur, bien sûr qu'il ira à l'école, mais une école où le personnel est formé. Rassurez vous."
Gratter.
"Faites bien attention, il peut s'auto mutiler avec tout et n'importe quoi, il faut toujours garder un oeil sur lui, même si il n'a pas l'air excité."
Gratter.

Et les jours passent, je gratte ce petit bout de cuir, arraché aux banquettes. Je gratte.
Je gratte ce petit bout de cuir.
Et je sais, que mon obsession va etre assouvie, pas ce soir, pas demain. Bientôt.

La porte finit toujours par s'ouvrir, dévoilant une grande personne, avec son grand sourire, et ses grandes mains.
"Bébé ?"
Ces mains s'accaparant mon corps, dans ce noir d'encre.
"Bébé ? Que fais-tu encore ?"
Ces mains m'arrachant, encore une fois.
"Bébé, il va falloir apprendre à dormir tout seul."
Et ces grandes mains m'amenant entre deux corps chauds, rapidement rendormis.
Mais je me doit de gratter.
"Gratte."
Les mains écarté, pour atteindre les deux, je gratte légèrement, puis enfonce mes ongles ébréchées dans cette chaire tendre, j'entends les gargouillis mais je gratte fort, et le sang gicle, de ces gorges ouvertes. Et je gratte, encore, et même quand ces corps chauds ont cessé de l'être je gratte encore. Et même quand ils deviennent rigides, je gratte, et même quand le soleil perce, je gratte, je gratte, je gratte, je gratte. J'en fais une chanson, une hymne, mon hymne. J'en fait mon oriflamme, que je brandis dans l'exercice de mes fonctions, je gratte, je gratte, je gratte, je gratte.


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