<h1>Noelfic</h1>

(tentative_pitoyable_numero_deux_de_pondre_une_suite_a_AE_)


Par : Pseudo supprimé

Genre : Inconnu

Status : C'est compliqué

Note :


Chapitre 5

Publié le 19/08/13 à 01:15:40 par Pseudo supprimé

Je n'étais pas encore complétement integré aux rangs de la Confédération, mais malgré cela, malgré le fait que je demeurais une sorte de prise de guerre, j'avais eu droit à quelques égards. Aucune menottes ne venait entraver mes poignets et mes chevilles tandis que je me tenais assis dans la soute d’un Transporteur désert. Installé dans ce corps de substitution, je peinais à trouver des repères. Lorsque l’escorte de soldat m’avait « accompagné » jusqu’au vaisseau, je me rendis compte de ce potentiel aberrant. L’erreur, non, la faute des nations organisées autour du pacte d’Atlanta résidait dans la négligence placide qui avait eut court vis-à-vis de la cybernétique et du développement des interfaces entre l’Homme et la Machine. Tout le contraire de ce qui animait l’empire naissant de la Confédération. Je compris dès lors sans aucun mal l’importance accordé à pouvoir récupérer des hommes de valeurs ou doués de connaissances divers. Et j'avais pu évaluer ce changement de camp, dans un premier temps si cruel et désagréable, se retourner en un avantage des plus notables. La pensée, douce à mon esprit, que tout ceci n’était que la transition nécessaire d’une évolution sociétale, un impératif d’évolution, progressait sans anicroche.

Plus le Transporteur avançait, dans les cieux calmes de l’Europe, plus ma curiosité et mon impatience de rencontrer cet être craint à travers le monde grandissait. Le Commandus Magnus Keller semblait donc me réserver donc une place à part dans ce vaste échiquier. Tant de rumeur circulaient sur sa propre personne ainsi que ces pratiques. Tant de propos qui devaient plus ou moins être fondés.

Je crois à ce moment avoir forcé mes idées à demeurer moins gênantes, me laissant la possibilité de me détendre, avant d’oublier provisoirement ce qui m’attendait.

La lumière ambiante m'avait surpris. Non pas qu’elle était forte, bien au contraire, le crépuscule tombait sur Paris. Les teintes flamboyantes et rosées giclaient sur les bâtiments et les surfaces encore dénudés s’offrant à mon regard, dévoilant des détails et des ambiances insoupçonnables.
La large place sur laquelle s’était posé sans douceur le Transporteur n’avait que peu de choses en commun avec son aspect quinze ans auparavant. Et bien que sa fonction de parvis à un vénérable monument semblait résister à l’assaut du temps, une technologie abondante se déroulait dans chaque recoin. Solitaire, l’antique cathédrale Notre Dame veillait sur l’île de la Cité, expurgé de laides façades haussmanniennes. La blancheur du calcaire contrastait avec l’éclat des éléments métalliques et la noirceur du carbone disséminé sur l’immense espace ouvert. De nombreux points d’accroches et de ravitaillement destinés aux transporteurs étaient disposés de façon ordonnée. Autour d’eux s’activaient une multitude d’hommes, presque tous des cyborgs. Leur ballet incessant et millimétré possédait une beauté propre, bien qu’au premier abord elle eut semblé inexistante.

Sans hâte, je me forçais à cesser de contempler davantage la scène s’y déroulant. Les soldats qui m'escortaient m'indiquèrent, sans mot dire, de sortir de la soute et de suivre un sous-officier qui s’était présenté sommairement. Sans trainer, nous nous engagions sous les voutes augustes de la cathédrale, où un spectacle bien plus impressionnant, bien plus insoupçonnable, nous attendait..

Le sol avait été profondément creusé, tant et si bien que la nef de la cathédrale apparaissait tel un gouffre béant ou surgissait des piliers de pierre prolongé de béton et de métal finement sculpté, supportant une voute obscurcie par des cendres guerrières. En entrant dans cet antre, ce lieu dédié à une entité que je pressentais dans la noble attitude de mes désormais semblables, je crois avoir détourner mon regard vers le chœur, où flottait une sphère orangée d’une dizaine de mètres de diamètres, flottant dans le vide. Un sensation vertigineuse m'assaillait de toute part, et ce fut d'un pas hésitant au démarrage que je me décidais à aller plus loin. De longs escaliers défilèrent rapidement sous nos pas, négligeant la lumière présomptueuse du soleil pour celle, plus intime, de flambeaux artificiels aux teintes bleutés. La descente s’éternisait, les détails se réduisaient à de simples lignes entremêlées qui s‘étalaient, jusqu’à se rejoindre et former de longs aplats verticaux, se fondant dans la masse des piliers.

Lorsque le sol, un béton si lisse que leurs reflets semblaient y flotter, se brisa net sur la dernière marche de l’escalier suspendu, enfin, j'avais pu commencer le long travail d'acceptation qui m'avait été nécessaire pour pleinement renaitre. Ici, le silence régnait en maitre, et hormis quelques cliquetis mécaniques brisant la plénitude du lieu, rien n’indiquait qu’une forme de vie, absolue et puissante, s’y déployait.

On me fit signe de m’arrêter quelques instants, le long d’une colonne au piédestal perclu de motifs géométriques. Une simple procédure, pour permettre au « Maitre » de ce lieu de se préparer à le recevoir dignement.
- Un tel honneur est rare, avait ajouté l’officier en me souriant. Votre valeur doit être inestimable pour qu’il vous ait fait venir de si loin.
Pour toute réponse, je lui rendais cette marque de sympathie, silencieux. J'étais très gêné, ne sachant quoi répondre.
Un signe discret fit se mobiliser les quatre soldats qui m'entouraient. Je m'arrêtai au seuil d’une large porte, les regardai une dernière fois. Mon pas sans hâte frappa le sol, tandis que derrière moi, le lourd battant de métal se refermait dans une noble et puissante lenteur.

Javier avait fait cesser l’éclairage brutal de l’immense globe dans lequel il se trouvait. Le gigantesque trône d’acier où se tenait son corps luisant surplombait un vide qui semblait abyssal, tandis qu’une large passerelle donnait accès à l’unique porte de la salle sphérique.
Il avait rapidement consulté le passé de ce Gregor, ne retenant uniquement que quelques informations pouvant se révéler utile pour l’entretien qui s’annonçait. En réalité, l’initiative du sauvetage et du rapatriement de cet ancien ennemi était seulement dû à Diogène. Le Commandus Magnus avait approuvé l’idée de se servir d’un élément fraichement intégré, à la périphérie d’une Conversion, pour le constituer comme éventuel trait d’union entre la Confédération et Atlanta. Si cette solution aboutissait, elle constituerait une issue pacifique au front asiatique et lui permettrait de constituer de nouvelles réserves d’Hommes. Une simple pause dans le processus irréversible de l’avènement d’une nouvelle ère à ses yeux.

Lorsque la porte s’ouvrit et se referma peu de temps après, Javier pouvait distinguer sans mal un homme à la carrure impressionnante mais dont l’attitude hésitait entre crainte mal habileté. Son regard se portait sur lui aussi, rempli d’une curiosité froide qui semblait propre à tous les cyborgs. C’était devenu une constante, une empreinte psychologique qui n’avait aucune raison d’être, et qui pourtant, demeurait.

D’un geste discret, il me fit signe d'approcher. Je m'exécutai d'une démarche froide, teintée de sonorités mécaniques. Sentiment étrange de voir se corps devenu insensible qui chuintait au rythme des pas, froide cadence qui trouva un aboutissement au pied du trône de métal. Aucun de nous deux ne baissa les yeux. Un respect mutuel se forgeait consciemment dans cet échange, alors même qu’aucun mot ne s’était échangé.
- Capitaine Mac Mordan ?
Je tressaillai. Le haut officier avait été sûr de l’effet que cette dénomination aurait sur l’ancien américain que j'avais été. D'instinct, je me redressais, imposant un mouvement digne cette stature devenue lourde, fixant avec davantage d’intensité le vénérable chef militaire.
Une ombre traversa le regard de Javier, qui esquissa un mouvement de tête et se leva avec douceur. Une lourde cape le couvrait, ne dévoilant que quelques détails de son anatomie artificielle. Ses lourdes jambes le maintenaient encore quelques centimètres plus haut. Subitement, je me sentai davantage écrasé par la prestance et la puissance qui se dégageait de cet être.
- Peut-être vous aura-t-on dit qui j’étais ? Poursuivit Javier d’un ton ironique.
- Disons que … De là où je viens, votre réputation n’était pas des plus flatteuse, Commandus Magnus.
Je souriais également, à présent. Un sourire lui aussi ironique, mais empli d’un respect sincère.
- Je vois que vous ne manquez pas de tranchant, Mac Mordan. C’est une qualité qui malheureusement disparait souvent au cours des Conversions.
Il détourna son regard un court instant, avant de le planter, dard cruel et salvateur.
- Quelque chose me dit que ceci ne risque pas de vous arriver. J’espère ne pas me tromper.
- Je l’espère aussi, Commandus Magnus.
- Trêves de bavardages, Mac Mordan. Je ne fais pas venir toutes les nouvelles recrues au sein de La Mecanica. Cessons ces enfantillages et venons-en aux faits.
Un sifflement suraigu transperça mes pensées, et je m'écroulai, tentant en vain de me boucher les oreilles.
- C’est inutile, Gregor. Il n’y a aucuns sons dans cette pièce. Même ma voix n’est pas réelle.
- Mais … Mais alors qu'est-ce ?
- Croyiez-vous sincèrement que je vous ferais confiance si rapidement ? Vous, un ancien atlantiste encore non converti. Certes, j’ai demandé à ce que vos grades d’officiers soient conservés, car il semblerait que votre situation et certaine parties de votre vies aient attiré l’attention de La Machine Mère. Je vous considère avec respect.
- Alors, pourquoi ne pas me tuer ?
- Je ne fais que vous sonder, Mac Mordan. C’est un traitement pénible, je le sais. Permettez-moi seulement de pouvoir apprendre à vous connaitre.
Le sifflement persista de longue secondes. Je soufflais rapidement, luttant contre l’irrésistible envie de me fracasser le crâne contre le sol. Comme s’il m’avait entendu, Javier répondit aussitôt.
- Ne vous inquiétez pas, tout est bientôt terminé.
Au moment précis où mon encéphale semblait être sur le point d‘exploser, la sphère où nous nous trouvions se transforma en un vide absolu, grisâtre, ou tous deux, nous flottions.
Javier ne cessait de me détailler, une expression de doute incrustant son visage gangréné de métal. Le bruit, quant à lui, avait totalement cessé.
Devant le silence du Commandus Magnus, j'hésitais à parler.
Javier fut plus rapide.

Il savait à quoi s’attendre, mais la brutalité des images qui lui sautaient au visage le surprenait encore. Il calcula pendant de longues secondes la marche à suivre, s’interrogeant sur la nécessité de faire ou non de Mac Mordan un des futurs piliers de son administration. Bien qu’il fût encore jeune, Gregor était un homme de mérite à ne nombreux niveaux : c’est un bon tacticien, un pilote de chasse chevronné, un officier conscient de sa charge. Hormis les événements des semaines précédents son arrivée à Paris, Gregor gérait parfaitement les situations à risques et faisait preuve d’un sang-froid remarquable. Un atout considérable pour les situations que l’Ordo Magister risquait de traverser dans les mois qui se profilaient à l’horizon.

- Gregor, commença-t-il. Maintenant, je comprends mieux le pourquoi de tout cela. Toute cette mise en scène. Ces longues journées à réprimer vos plus cruels penchants. Ces longues heures à supporter les brimades et les jérémiades de vos supérieurs. Tous ces souvenirs qui pourrissent votre conscience, Gregor, je peux vous les ôter. Faire de vous un Homme neuf.
- Si tout était si facile, Commandus Magnus.
Une pointe d’amertume me serrait le coeur. Mon œil organique s'humectait, les larmes affluant.
- Maintenant que vous savez, pourquoi ne pas m’exécuter tant que vous pouvez ?
- Vous ne méritez plus de mourir. Votre vie ne se résume qu’à un test, et à présent, c’est à moi de faire cesser cet état de fait. C’est à moi de prendre soin de mes hommes, et je veux que vous deveniez un de mes hommes. Ce n’est pas un souhait, Mac Mordan, c’est un ordre.
Javier avait douze ans de plus. Son physique ne se résumant plus essentiellement qu’en une mécanique parfaite, seule sa voix traduisait des accents paternalistes et protecteurs, qui me touchaient au plus profond.
Vingt huit longues années de souffrance, de manques en tous genres, de frustrations, de larmes et de sang pouvaient-elles trouver un achèvement si rapide ? Non, c’était illusoire. Y croire ne serait qu’un échec. Mais cela pouvait pourtant me soulager. J'avais tant envie d'y croire, de boire ses paroles. Certes, son attitude inflexible et le port noble de sa tête le rendait terriblement indifférent. Mais au fond de moi, je devinais une sensation bien éloigné avec tout ce qu’il avait connu auparavant.
Le Commandus Magnus n’était pas reconnu pour mentir. Il avait accompli des actes terribles, anéanti des villes entières d’un simple mot, mis fin à la vie de centaine de million d’individus. Et pourtant, un honneur et une dignité immense émanait de sa personne.
A cet instant, je cru comprendre quoi faire ce qu’il devait faire. Je posais un genoux à terre, en silence, et laissais sa nuque à découvert, face au Commandus.
Javier, qui avait esquissé quelques pas sur la passerelle, se retourna. Un profond silence sourdait.
- Vous comprenez très vite, capitaine. Mais l’heure n’est pas encore venu pour cela.
Je redressais la tête, gardant cette attitude de soumission qui me semblai si importante.
- Mac Mordan, vous êtes loin d’être quelqu’un d’ordinaire. Vous ne rouillerez pas dans une unité miteuse, rassurez-vous.
- Que me proposez-vous, Commandus Magnus ?
- Un poste d’aide de camp. MON aide de camp.
- En échange de quoi ?
La confiance n'atténuait que légèrement la tension qui m'animait. Consciemment ou non, je savais que, quelque soit la décision et le choix qui me serrait fait, celui du Commandus compterait au final
- Conserver une relative liberté. C’est une chose qu’on n’autorise que très rarement à d’anciens ennemis.
- Ai-je le choix ?
- Pourquoi ne l’auriez-vous pas ?
Javier se retourna, me laissant perplexe.
- Vous êtes très important à mes yeux, Mac Mordan. Trop important pour que j’annihile tout ce qui vous compose. Même si je courre un gros risque à faire cela.
- Quel risque ?
- Votre frère, Mac Mordan. Votre frère est ici.
Un brusque vertige terrassa ma conscience, une poignée de seconde; je battais la paupière qui demeurait, avant de vider à mon nouveau mon esprit, ne laissant la colère s'échapper.
- Je sais que vous ne le portez pas dans votre cœur. Et que vous avez besoin de réglez de vieux contentieux.
- Vous voulez dire que …
- Il a changé de nom. Il a tiré un trait sur sa vie passée. Pour des raisons que vous connaitrez en temps voulu, il a été rapatrié sur Paris.
- Un temps pour chaque chose, n’est-ce-pas ?
- Parfaitement, Mac Mordan.
Nous nous fixions. Deux militaires, deux officiers, deux hommes avant tout qui soudain voyaient leur rapport se dessiner sans concession. Doucement, je penchais à nouveau ma tête, sûr de mon geste
- Je remets ma vie entre vos mains, Commandus Magnus.
Javier sourit.
Je fermai les yeux, et attendis. Sans un mot, Javier positionna la pince qui avait remplacé sa main droite sur l’unique fiche disposée sur ma nuque.
- Gregor Mac Mordan, à compter de ce jour, vous entrez au service de l’Ordo Magister et de la Confédération. Vous servirez le Magister quoi qu’il en coute, y compris au péril de votre vie.
- Oui, Commandus Magnus.
- Gregor Mac Mordan, au nom du Magister Kris, je vous fais lieutenant de classe spéciale de l’Ordo Magister. Puisiez-vous accéder à l’Esprit de la Machine, dans la Force et l’Honneur.
La pince chuinta, et mes pensées se vrillèrent. L'image que me renvoyait la réalité se dédoubla légèrement, un court instant, tandis qu'un puissant flot de donné mêlé d'un sentiment de plénitude envahissait son corps. Rien ne changeait, et pourtant, la nécessité de servir la Confédération m'apparut tout à coup comme la plus grande des évidences. Mon passé, sans s’effacer, éloignait ses cruels épines. Enfin, j'accédais à ce bonheur simple, maitrisé, qui mettait mon esprit hors du des tourments.
Le Commandus retira sa pince, et d'un geste fraternelle m'aida à me redresser.
- Bienvenu parmi nous, lieutenant Mac Mordan.

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