Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

Entre poussière et ruines


Par : Spyko
Genre : Action, Horreur
Statut : C'est compliqué



Chapitre 5


Publié le 29/08/2012 à 23:17:44 par Spyko

Chapitre 4 :

Le fou s'était élancé derrière lui. Et il courait vite.
A cinquante mètres, le gymnase, grand pavé gris aux fenêtres étroites sur le rez-de-chaussé et plus agréables au premier étage, s'offrait à lui. Une fois passé, il n'aurait qu'à tourner à l'angle, à parcourir quelques dizaines de mètres supplémentaires et il serait chez lui. Mais je ne peux pas amener ce dingue à la maison, se raisonna t-il.
Il n'y avait donc qu'une seule solution ; le semer dans le gymnase. Quelques voitures étaient garées devant, et le bâtiment accueillant plusieurs salles de tennis de table ou de squash, il nécessitait aussi une administration. Et ces gens étaient déjà arrivés. Mais dans quel état sont-ils... ? L'interrogation flotta dans son esprit, mais il décida de ne pas s'en soucier.
Il arrivait à hauteur de l'entrée.
Une rampe d'accès, qui commençait à dix mètre de la porte et montait progressivement, permettait d'y accéder. Elle était encadrée par des barrières simples, constituées d'une plaque de métal surplombée d'une rambarde.
David accéléra un peu plus, et, arrivé au niveau de la rampe, il fit un léger saut. Son pied se posa sur le bord de la zone d'accès, et il attrapa la rambarde lisse à deux mains, pour passer par-dessus. Il atterrit maladroitement, mais debout. Son poursuivant arriva bientôt, et l'étudiant décida de ne pas attendre de savoir si le fou pourrait ou non l'imiter.
Il se jeta sur la porte, enfonçant la barre disposée en travers pour l'ouvrir, et se précipita à l'intérieur. Le hall était une petite salle qui donnait sur plusieurs portes. Sur le mur de gauche, un panneau indiquait que la trousse en-dessous contenait un défibrillateur, mais il ne risquait pas d'en avoir besoin. Il tourna brusquement à droite, passa devant la porte d'un ascenseur destiné aux handicapés, et s'engagea dans des escaliers au marches étroites.
Dans son dos, la porte claqua en heurtant le mur avec force.
Les martèlements de pas du jeune homme se répercutaient dans les locaux presque vides. Arrivé en haut, il tourna à gauche, poussant une double porte, qui le mena dans un long couloir. Au fond, il atteindrait la salle de tennis de table, qui elle-même menait à un escalier de secours.
Une dame plutôt volumineuse passa la tête par la porte de l'un des bureaux, et fronça les sourcils en voyant l'étudiant foncer à travers le bâtiment. La double porte s'était rabattue dans son dos.

« Qu'est-ce que vous faites ? Appela t-elle d'un ton autoritaire. »
« L'escalier de secours est ouvert ? Souffla t-il en passant devant elle, sans même espérer une réponse. »
« Oui, bien sur, répondit-elle, interloquée, mais vous n'avez pas le droit de courir ici... »

Ses paroles se perdirent dans un cri de surprise lorsque les doubles portes se rouvrirent brutalement, laissant apparaître le fou furieux, le nez aplati, le visage ensanglanté. Ce même cri se mua très vite en hurlement de frayeur quand l'homme, oubliant sa proie qu'il ne parvenait pas à rattraper, se jeta sur la malheureuse dame.
David ignora à contrecœur les cris de son interlocutrice, préférant se consacrer à sa propre survie. Quitte à laisser une part de son humanité dans ce bureau. La porte suivante s'ouvrit sur une longue salle, parsemée de fenêtres assez larges mais fermées par des stores. Juste à droite, il vit quelques bancs, ainsi qu'un coffre verrouillé par un cadenas, renfermant probablement les équipements pour les joueurs.
Le détail sur lequel il se concentra, cependant, était la porte au fond de la salle, portant au-dessus le rectangle vert lumineux qui indiquait une sortie de secours. Le martèlement de ses pas se répercuta en écho contre les murs peu décorés. Dans son dos, les hurlements s'étaient éteints.
Les larmes montèrent aux yeux du jeune homme, qui se jeta sur la porte pour l'ouvrir. Dans son élan, il s'écrasa contre la barrière qui suivit, s'enfonçant le tube de métal dans le ventre et lui coupant le souffle.
D'un coup de pied, il referma la porte.
De là où il était, par-dessus la petite haie d'un voisin, il pouvait voir sa propre maison, cinquante mètres plus loin. La chambre de son frère de quinze ans, à l'étage, était allumée, de même que la fenêtre de la cuisine. David déglutit en regardant sa montre. A 7h37, son frère devrait normalement être en train de déjeuner ou de se laver, puis qu'il partait moins d'une demi-heure plus tard. Il repoussa ces pensées envahissantes, et descendit les marches en colimaçon aussi vite qu'il pouvait se le permettre sur ces étroits morceaux de ferraille.

Il toucha finalement la bande d'herbe et rejoignit le trottoir, puis la route. Il se retourna machinalement, faisant quelques pas à reculons, les yeux levés vers la porte qu'il venait de quitter. Personne n'était en vue.
Il soupira de soulagement, avant de partir en trottinant vers le portail de sa maison. Il fouilla les poches de son jean, jusqu'à effleurer ses clés, et les sortit. Une fois le portail ouvert, il s'engagea dans l'allée de gravier, et rejoignit la porte, qu'il ouvrit elle aussi.
La poignée pivota entre ses doigts, et il entra prudemment dans le hall, gardant à l'esprit que tout, quoiqu'il puisse penser, avait pu arriver. La porte de la cuisine, à gauche, s'ouvrit brusquement, et la silhouette ébouriffée et en chemise de nuit de sa mère en surgit, inquiète d'entendre quelqu'un entrer. Ses grands yeux noirs s'écarquillèrent en voyant son aîné devant elle.

« Dav' ? Qu'est-ce que tu fais ici ? Tu as raté ton train ? »

La question prit le jeune homme totalement au dépourvu, alors qu'il venait d'échapper à la mort à plusieurs reprises. Le fait que sa mère ne soit même pas au courant avait quelque chose de dérangeant.

« Ben... commença t-il, sans trop savoir quoi dire, tu... t'es pas au courant de... »
« Où est passé ton sac ? Le coupa t-elle instantanément, sans même prêter attention à ses propos. Tu te l'es fait voler ? »

David recula d'un pas, essayant de trouver le meilleur moyen de tout expliquer, sans qu'elle le prenne pour un fou. Ce qui était un combat perdu d'avance. En avouant que des gens devenaient cinglés dans la rue, tuaient tous ceux qui leur passait sous la main, et que c'était l'un d'eux qui lui avait arraché son sac, il se risquait surtout à une variante du traditionnel « Tu es sûr que tu vas bien mon chéri ? » qu'elle lui réservait lorsqu'il avait le regard un peu éteint.
Il tenta alors de se réfugier derrière une ultime barrière en changeant de sujet.

« Et Mathias, il est pas encore levé ? »
« Il est resté au lit, il ne va pas très bien aujourd'hui. Mais ne changes pas de- »
« Qu'est-ce qu'il a ? s'exclama le jeune homme, sentant un étau lui enserrer la gorge. »
« Il toussait beaucoup en se levant, et il a commencé à saigner du nez. »

David vacilla, comme s'il venait de prendre un coup de poing en plein visage. Son estomac se contracta et les larmes, qui avaient séché dans sa course folle, remontèrent bien vite à ses yeux. Sa mère recula d'un pas, et le jeune homme vit qu'elle esquissait un geste pour attraper le téléphone, sur la commode de l'entrée. Ce simple mouvement ouvrit davantage la plaie que ses paroles avaient causé, et il se contenta de secouer lentement la tête, ne trouvant pas les mots pour rassurer sa mère.
A peine éclairée par la lumière du hall, une silhouette apparut, hésitante, en haut de l'escalier.
L'étudiant leva les yeux vers elle, et y reconnut le visage chargé d’acné de son frangin. Le garçon s'était appuyé à l'angle du mur, et posa un pied tremblant sur le première marche.
Le grincement du bois détourna l'attention de leur mère, qui se tourna vers lui. Elle ouvrit la bouche pour sermonner son plus jeune fils, qui aurait du rester couché.
Le second pied de l'adolescent se posa aux côtés du premier. Et il fléchit les genoux.
David comprit brutalement ce qu'il se passait, et commença à s'élancer en avant, pour tirer sa mère hors de portée. Le hurlement de prévention qu'il voulut pousser s'étrangla dans sa gorge, alors que son frère bondissait du haut de l'escalier.
Il s'écrasa de tout son poids sur les épaules de celle qui avait consacré une partie de son existence à l'élever, la plaquant contre le meuble où se trouvait toujours le téléphone. Son dos émit un craquement désagréable en heurtant le bois, et elle se plia complètement en arrière, sa tête allant heurter le mur.
Mathias roula au sol, se releva en vitesse et fondit à nouveau sur sa proie. David ne put cette fois ci pas retenir son cri, et se jeta vers les deux derniers membres de sa famille.

« Maman ! »

Son frère venait de la jeter au sol, et ses mains se refermèrent sur sa gorge. L'un de ses pieds battit l'air et, avec une force surprenante, il projeta le jeune homme contre la porte d'entrée, toujours ouverte. Il trébucha sur le tapis, qui s'était légèrement plié à son passage, et manqua de s'étaler dans l'allée. Il ne se rattrapa que de justesse à l'un des piliers qui ornaient l'entrée, et mit quelques secondes à se remettre du choc.
Ces quelques secondes furent fatales à leur mère.
Ses jambes tressautèrent, puis la mâchoire du garçon se referma sur la chair tendre de sa gorge, et en arracha un large lambeau. Cette vision suffit à achever la faible résistance mentale que le jeune homme avait tenté d'ériger face à tous ces événements. Ne prenant même pas la peine de refermer la porte, il s'élança à toute jambes dans l'allée, franchit le portail et tourna à droite, vers un passage entre les maison, qui formait un coude sur la droite.
Il sauta par-dessus la petite barrière, mais son pied en accrocha la barre, et il s'étala de tout son long dans la ruelle. Le jeune homme se releva instantanément, ignorant ses paumes écorchées, et suivit le mur dans le passage. Il continua encore sur quelques mètres, avant de se retrouver devant un nouveau virage sur la gauche, qui ramenait à une autre petite place.
David percuta le mur de plein fouet, les yeux brouillés, et s'immobilisa.
Il se laissa lentement glisser le long de la paroi.
A cet endroit, il pouvait se faire encercler par des fou furieux venus d'en face ou de sa droite. Il pouvait se faire égorger par ces êtres, qu'il n'aurait jamais entendu arriver. Il pouvait achever sa vie ici, comme tant d'autre personnes aujourd'hui.
Et il s'en fichait.
Les larmes coulèrent sur ses joues, sans qu'il cherche à les retenir.


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