La rage me submergea quand je vis l'assassin de ma bien-aimée.
Son visage était propre et intact, ses vêtements aussi.

Il passa sa main dans ses cheveux, et avança sa chaise vers moi...
Dans un élan de haine, je me débattis pour l'attraper, mais rien n'y fit, je ne pouvais plus bouger mes jambes.
Il était hors d'atteinte, mais je ne le quittai pas des yeux.

Il me dévisagea alors quelques instants d'un air navré, puis commença à me parler très posément :

- Ecoute... Je ne voudrais surtout pas qu'on reste en mauvais terme tous les deux, Alex.... Quand toi et heu...
- Chloé !!! Hurlai-je fou de colère.
- ...ouais. Voilà...
Il marqua une pause, puis continua :
- Essaie de comprendre, je ne l'ai pas tué.

Qu'est-ce que ça signifiait ? Pourquoi cherchait-il à s'innocenter ?

Un petit silence parcourut la chambre. Je me pris à le couvrir d'invectives :

-TU TE FOUS DE MOI ?! ESPECE DE CONNARD !!! Tu sais quoi ?! IIs vont te choper ! À tout moment des flics peuvent repasser pour me poser des questions... Ils vont venir et tu vas aller en taule connard !
- Euh... Alex...
- Tu sais ce qui arrive aux types comme toi en prison ? Tu le sais hein ?!
- ...Je ne vais pas aller en prison.
- C'est ça, ouais ! On va t'arrêter, t'es un homme mort... Qui c'est qui voulait m'encul** avec un tube à essai ?! Là-bas, tu vas prendre cher...
Il perdit patience :
- ...putain mais ferme-la Alex ! Concentre-toi !
- Je...
- Personne ne viendra me chercher, tu m'entends ? Personne ! C'est toi qui m'as fait venir ici, maintenant réfléchis pourquoi.
- ...
Il reprit son calme et poursuivit :
- Je me souviens de cette tirade... Le « tube à essai ». J'en ai parlé à Damien et Matthieu... Tu n'étais pas avec nous ce soir-là, comment saurais-tu ça ?
- Heu... Tu l'as dis à un autre moment ! Je le sais... Répondis-je, en bredouillant.

J'hésitai un moment, et il continua :

- Tu ne nous as pas seulement entendu, tu nous as vu, mais tu n'étais pas là. Tu le sais aussi bien que moi...

Je ne voyais toujours pas où il voulait en venir :

- Tu me traites de schizophrène ? Je ne suis pas fou... Pas comme toi ! Je ne fais pas des plans et je ne tue pas des gens !

Etienne sourit à mes mots, et me répondit :

- Parce que tu trouves que je suis du genre à inventer des plans ? Tu me connais Alex...
Qui est le petit génie entre nous deux ? Toutes ces histoires, ça vient de toi !
- Bordel...

- Nous tous, tout ce qu'il y a autour de nous... Tout cela vient de toi... conclut-il.


...


Il avait terminé.

Je réfléchis un moment...
Et je finis par comprendre.


...



Je détournai mes yeux d'Etienne, et posai mon regard sur mes autres invités...


C'était Damien, Emilie et Matthieu. Ils se tenaient à ses côtés.

Je me mis à leur parler une dernière fois :
- Damien, tu es une personne que je connais à peine, mais tu représentais une menace pour moi... Tu étais hors de contrôle...

...dans ce monde plein de périls, il existe des gens sur qui l'on peut compter. Je parle des personnes qui marchent à vos côtés et vous soutiennent, même dans les pires difficultés. Je parle là d'un vrai ami... Et c'est ce que tu représentes pour moi Matthieu...

Emilie... Tu es l'archétype de la fille populaire que tout le monde veut connaître, celle que tous les garçons souhaitent fréquenter... Tu fus l'objet de mes fantasmes... mais tu n'es pas celle qui me faut. Finalement, tu m'as fait comprendre ce que je désire et ce dont j'ai réellement besoin...

Enfin, Etienne... Je t'ai haï, ce n'est que maintenant que je comprends pourquoi... Tout ce temps où j'ai eu peur de prendre des décisions, d'agir en appréhendant la façon dont les gens me verraient. J'avais peur de l'échec, d'être rejeté... Tu me faisais prendre conscience de ma faiblesse et avec toi ne venait que le chaos, mais tu m'as aussi ramené à la réalité, seul toi le pouvait, et je t'en remercie.

...Et Chloé ?

Pourquoi n'était-elle pas là en ce moment ?
Elle avait bel et bien disparu parce que je ne pouvais pas plus l'imaginer.
Son charme, son caractère m'attiraient mais elle demeurait un mystère pour moi. Je ne pouvais la récréer entièrement, dans sa complexité... sa perfection... et ses imperfections... Mais je ne pouvais vivre sans elle. Il ne me restait qu'un seul moyen... Courir à sa recherche comme je l'avais si souvent fait, contre vents et marrées... Je devais le faire.

- Tu ne restes pas ? Me dit Etienne.
- Non... Quelqu'un m'attend.
Tout le monde est là, face à moi, et me regarde.

Qui pouvait me retenir ?

Qui depuis le début choisit où je pose mes pas ?
Qui me rend fou ?
Me cingle de coups de fouet et m'acclame dans la victoire lorsque je triomphe de l'impossible ?
Qui envoie des monstres pour me tuer et me chante en même temps que je ne mourrai jamais ?
Qui m'apprend ce qui est vérité et à rire du mensonge ?
Qui décide pourquoi je vis et pour quoi je risque la mort ?
Qui m'enchaîne ?
Et qui détient la clé pour me libérer ?


C'est moi.

J'ai toutes les armes en moi.

...Et je vais me battre.




...





- Mon dieu ! Chambre 404, le patient est en phase de réveil !
- Quoi ?
- Appelez le docteur... Vite !!!