Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

L'achèvement d'une ère.


Par : Spyko
Genre : Action, Science-Fiction
Statut : Terminée



Chapitre 71 : Insensible.


Publié le 20/04/2012 à 10:46:40 par Spyko

« Les filles, commencez à quitter la salle, on vous rejoint en route! ordonnais-je dans mon oreillette entre deux respirations saccadées. »
« Ça c'est hors de question mon grand, on va pas partir d'ici sans vous. »
« J'te demande pas de partir sans nous, juste de prendre de l'avance! »

Je poussai Matt sur l'échelle, et il la grimpa aussi vite que le lui permettait sa combinaison alourdie par le liquide. Je m'engageai à sa suite immédiatement après, sans le moindre regard à la cuve éclatée. Nous jaillîmes de l'ouverture, et je ne pris même pas la peine de la refermer. Nous franchîmes la porte menant à l'extérieur du cylindre, et grimpâmes sur l'élévateur.
Il y eut une détonation, et une langue de feu jaillit par l'écoutille. Alors que nous montions vers la plate-forme centrale, le propulseurs se mit à grincer, et, très vite, des flammes commencèrent à lécher la paroi externe.

« Merde, s'exclama le jeune homme, balance moi cette combinaison avant qu'on crame avec. »

Je ne me fis pas prier, retirai le casque, puis ouvris la fermeture. Je me glissai hors de la combinaison puis, une fois de retour à l'air libre, la jetait sans précédent dans le vide. Elle s'écrasa sur le réacteur, où elle s'embrasa, minuscule lueur rougeâtre au milieu de l'incendie. Sans cette protection, la chaleur était écrasante, mais nous ne tarderions pas à quitter cet enfer.
Matt se débarrassa à son tour de son fardeau, et nous atteignîmes enfin la passerelle. Au pas de course, nous rejoignîmes la plate-forme centrale, où nous constatâmes de nos yeux les dégâts occasionnés par les débris. La console était traversée de part en part par un morceau d'acier, et plusieurs câbles gisaient au sol. Un nouveau craquement affreusement inquiétant nous décida à abandonner les restes du poste de contrôle, afin de nous engager sur la passerelle qui nous mènerait à la porte.
Alors que nous étions à mi-chemin, un ultime grincement métallique résonna. Bien malgré moi, je me retournai, fasciné par ce spectacle. Des lambeaux d'acier dégringolèrent un peu partout, et plusieurs boules de métal incandescentes ne tardèrent pas à s'écraser sur le pont, embarquant quelques une des tiges de soutien, ce qui fit très sensiblement tanguer l'assemblage.
Puis, tel un immeuble en train de s'effondrer, l'un des deux propulseurs se décrocha définitivement. La masse gigantesque traversa la salle circulaire. Matt ne s'était pas arrêté, et il se retourna pour m'appeler. Je progressai à reculons, incapable de décrocher les yeux de cette scène. Le mastodonte d'acier s'écrasa avec fracas, embarquant la console centrale dans sa chute. De nouveaux débris s'envolèrent et se dispersèrent.
Il continua à tomber, et, par-dessus le vide qui s'était formé au centre, je le vis frôler l'un des autres réacteurs endommagés. Il toucha violemment celui que nous avions tenté de réparer, l'enfonçant sur plus de la moitié. Ce dernier explosa de manière particulièrement violente, faisant jaillir des langues de flamme gigantesques. La déflagration perça la coque pourtant résistante du vaisseau, et l'air s'engouffra dans la salle.

« Alex, qu'est-ce que tu fous! »

La passerelle se brisa, et une partie disparut dans le vide, tandis que le reste se fracturait. Je fus projeté conter l'une des barrières de protection, et tentai de me remettre. Toute l'action se déroula en moins de trois secondes. Et, pendant ce laps de temps infiniment court, le propulseur continua à tomber. Il s'écrasa sur celui directement en dessous du réacteur dont les cuves fuyaient.
Cette fois ci, l'explosion ne fut pas seulement violente. Elle fut dévastatrice. L'onde de choc courut sur les murs en envoyant des morceaux entiers de coque voler contre les autres propulseurs, et le pont où je me trouvai fut littéralement balayé. Ce qui me sauva la vie fut le fait que j'avais suffisamment reculé. Je fus éjecté contre le mur situé au-dessus de la porte, et je sentis plusieurs douleurs au niveau de la cage thoracique.
Je m'écrasai sur le sol, juste à côté de Matt.

« Je pensais pas que tu rappliquerais aussi vite, mais c'est pas trop mal. »
« Ouais... Merde, ça fait mal... »
« C'est pas le moment de faire la chochotte, ils vont tous péter un par un, et je veux pas être là quand ça se produira. »

La déflagration avait encore plus sérieusement amoché la coque que celle causée par la précédente, et on aurait dit qu'un morceau de plusieurs centaines de mètres avait été complètement arraché, laissant une vue magnifique sur les nuages et, à mon grand désespoir, sur une partie de la ''reine''. Alors que je jetai un dernier regard, je vis qu'un tentacule venait de se glisser dans l'ouverture. Le grondement des propulseurs aux limites de l'explosion emplissait toute la salle.
Nous vîmes que les filles s'étaient arrêtées un peu plus loin, à l'affut. L'inquiétude qui peignait leur visage se mua en soulagement lorsqu'elles nous virent débouler, Matt me soutenant légèrement. Une douleur aigüe me transperçait la cage thoracique, et il était clair que j'avais une, voire plusieurs côtes fracturées. J'espérai qu'elles n'avaient pas percé le poumon, ce qui aurait été encore plus désagréable et douloureux.
Bah, je respirais difficilement, mais au moins, j'avais l'air d'être plus ou moins intact. Je parvins à empêcher Jess de me serrer dans ses bras et de me broyer un peu plus la cage thoracique, et nous nous mîmes en route pour mettre autant de distance que possible entre nous et l'arrière du vaisseau. Nous fûmes en revanche contraints d'y aller au trot, courir plus vite étant affreusement douloureux, d'autant plus que cela me forçait à augmenter mon rythme respiratoire.

« Qu'est-ce que vous avez foutus là-dedans? s'enquit Steph'. »
« Pas grand chose, sifflais-je péniblement, c'est ça le problème. Ouah, la vache... »
« Ralentis un peu, intervint Matt en me tapotant l'épaule, ça va pas t'aider. »
« Vu l'état dans lequel on a laissé ces trucs, je veux pas être encore dans le coin dans les prochaines minutes.... »

Une nouvelle explosion secoua le vaisseau et fit apparaître des crevasses dans les murs. La créature qui nous avait immobilisée hurla, et je me surpris à penser au tentacule qu'elle avait glissé dans la salle, qui avait probablement grillé à l'heure qu'il était.

« Disons plutôt les prochaines secondes... »
« Ok, on accélère, mais évite de te plaindre alors. »
« T'en fais pas pour ça... Bordel... »

Nous prîmes un tournant, nous arrachant enfin à l'interminable ligne droite menant au noyau, et qui me donnait l'impression d'être plus vulnérable en cas de déflagration. Les murs étaient craquelés, et par endroit, le plafond pendait légèrement dans le vide. Bientôt nous atteignîmes une zone beaucoup plus large. Je n'avais plus besoin d'aide pour marcher, bien que cela me soit particulièrement douloureux à chaque inspiration, et Matt continuai donc désespérément d'appeler la passerelle.
Une brève idée me traversa l'esprit, qui consistait à rejoindre un poste de communication pour ordonner à tous les survivants de rejoindre les capsules de sauvetage, mais je la repoussai. Ils étaient condamnés, et tenter de les prévenir nous tuerait également. Ils étaient tous condamnés...

*Exactement. C'est ce que j'essaie de te dire depuis le début. C'est terminé, tout est terminé. Tu n'as plus qu'à les tuer, eux aussi. Voudrais-tu risquer d'infecter l'autre vaisseau en t'échappant avec tes amis?*

Non... Nous n'étions pas infectés, aucun de nous ne pouvait se transformer, c'était impossible! On avait plus qu'à fuir, rejoindre le vaisseau du Quebec, et quitter la planète avant que la reine ne change de cible. Nous n'étions pas infectés...

*Tu n'as aucun moyen de le vérifier! Comment peux-tu en être aussi sûr!?*

Et si... Si jamais.... Si jamais c'était vrai... C'était un risque trop grand. Je ne pouvais pas me permettre d'emmener des futurs nécromorphs avec moi. Il n'y avait qu'une chose à faire pour cela, et ils me remercieraient. Je leur épargnerais des souffrances inutiles, et ils ne représenteraient plus de danger pour les autres rescapés de cette planète. L'idée paraissait incroyablement séduisante. Après tout, je n'avais qu'à prendre mon arme, tendre le bras et-
L'un des murs explosa littéralement. Je vis Jess tomber à genoux pour éviter un lambeaux de métal qui volait dans sa direction, et je manquai moi-même de me faire faucher. Matt et Steph avaient continué à courir et s'arrêtèrent à quelques mètres de la porte. Un tentacule venait de briser la paroi. Il s'agitait furieusement, frappant tout autour de nous, et je dus me jeter à plat ventre pour l'éviter, ce qui me donna l'impression qu'on m'enfonçait un poignard entre les côtes.
Mes deux coéquipiers encore sur leur jambes avaient l'air d'hésiter.

« Dégagez! On vous rejoins, tirez vous! »
« Alex... »
« Faites ce que je vous dit, on arrive dès qu'on s'est débarrassé de ce truc! »

Ils reculèrent jusqu'à toucher la porte, l'ouvrirent et disparurent derrière, toujours fixés sur nous. Elle se ferma, me laissant seul avec ma copine et l'appendice. Je me relevai difficilement, tandis que la chose éclatai le plafond afin de rejoindre la jeune femme. Je lui attrapai le bras pour l'aider à se relever, et nous hâtâmes le pas. Le récent choc venait de réduire à néant ma capacité à courir pendant les prochaines minutes, le temps que la douleur cesse.
Jess me tira brusquement le bras, m'obligeant à me stopper. Je tournai la tête, cherchant dans son regard la raison de cet arrêt. Je n'y vit rien. A part de la souffrance. Elle ouvrit la bouche pour me parler, mais elle n'émit qu'un gargouillis inintelligible, tandis que du sang commençai à couler sur ses lèvres, inondant son menton avant de dégouliner sur le sol.
Un gémissement de douleur étranglé monta de sa gorge en même temps qu'un craquement d'os répugnant. Je vis un fin aiguillon qui sortait de son abdomen et s'y agitait, traçant un sanglant chemin dans sa peau, ses organes et sa combinaison. Le tentacule se retira, et le dard disparut. Il fendit l'air et manqua de m'empaler. Je vidai mon chargeur à l'endroit d'où émergeait la pointe osseuse, et il se rétracta.
Le tentacule enfonça une dernière paroi métallique avant de disparaître là d'où il venait. Je pivotai, le regard vide, vers la jeune femme qui agonisait au sol. Plus aucune émotion. J'aurais aimé pleurer. Sentir les larmes sur mes joues, la sensation que j'aurais ressenti dans l'estomac. Mais je ne pouvais pas. Je n'y arrivais pas. Depuis le meurtre de Max, toute capacité émotive semblait s'être évanouie, petit à petit.
Je n'étais plus qu'une coquille vide habitée par le monolithe. Seuls subsistaient les restes de ce que j'avais été. Une infime partie. Qui résistait. Je repoussai aussi violemment que possible la conscience qui tentait de prendre un contrôle total. Je me concentrai de toutes mes forces, dans le seul but de rester sain d'esprit, ne serait-ce que le temps de quitter cet endroit. La force qui m'oppressait se volatilisa, comme une corde qui cède brusquement.
J'avais posé le canon de mon pistolet sur le front de Jessica, qui continuait à gémir doucement, baignant dans ses fluides. Je me demandai, l'espace d'une seconde, si c'était moi ou le monolithe qui m'avais amené à faire ce geste. Néanmoins, la réponse m'importait peu. Que cette idée ait été envoyée par une conscience maléfique ou par le peu de raison qu'il me restait, elle demeurait la seule solution adéquate.

« Alex! Est-ce que ça va? s'inquiéta Matt. »
« Moi oui... Où est-ce que vous êtes? »
« On s'est arrêté plus loin. Qu'est-ce qu'il s'est passé? »
« Je vous expliquerais tout plus tard. C'est terminé. On se tire d'ici dès que possible. »

Je coupai la communication, échangeant un dernier regard avec la jeune femme. Ses yeux avaient commencé à dériver vers le plafond, glissant sur l'acier sans la moindre émotion. Je pressai la détente, elle eut un dernier sursaut, et son regard devint vitreux. A genoux à côté du cadavre, trempant dans son sang, je relevai la tête vers l'endroit d'où était arrivé le tentacule.
Ni tristesse, ni colère, ni désespoir. Rien.
Je me relevai et, sans le moindre regard sur le corps, je me mis à marcher vers la porte. Tout du moins, ce qu'il restait de moi, se mit à marcher.


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