<h1>Noelfic</h1>

Justice - Réécriture


Par : Mati07

Genre : Réaliste

Status : En cours

Note :


Chapitre 8

Publié le 30/05/17 à 07:38:06 par Mati07

Aujourd'hui encore, il est tôt lorsque j'arrive au QG de l'Ordre. J'ai eu le droit à quelques heures de sommeil à peine, qui ont suffi à me rendre en retard par rapport à l'horaire que je m'étais fixé. Encore endormi, j'ai un mal fou à mettre mon équipement. Lorsque tout est finalement à la bonne place, je sors du vestiaire et me dirige vers le bureau de Patriarche. Je remarque que la porte est légèrement entrouverte. Je m'approche à pas de loup avant lorsque j'entends la voix d'Ombre s'élever de l'intérieur de la pièce.

-Pourquoi lui avoir donné le sérum de la Vision d'Aigle, chef ? Il n'est encore qu'un débutant, et si j'ai bien compris, nos réserves de sérum sont pratiquement vides.
-C'est exact, lui répond la voix de Patriarche. En fait, celui que je lui ai donné hier est un des derniers de France.
-Mais pourquoi ?
-Je sens en Sabre quelque chose d'enfoui, mais d'exceptionnel. J'ai le sentiment qu'il saura aider l'Ordre plus que quiconque. J'ai foi en lui, tout comme j'ai eu foi en toi en te donnant ce don à quinze ans.
-Mais, chef, vous ne pouvez rien faire pour avec un peu plus de sérum ?
-Je ne suis pas censé en parler, Ombre. Sache juste que l'ingrédient principal est presque épuisé, et tous les chefs de l'Ordre à travers le monde se sont accordés sur le fait de laisser cet ingrédient se renouveler.

Un silence s'installe, et j'en profite pour frapper à la porte avant de la pousser. Ombre, assise face à Patriarche, se tourne vers moi. Le chef se lève et écarte les bras en signe de bienvenue.

-Sabre ! Tu es ponctuel. Je t'en prie, assieds-toi.
-Merci, Monsieur.

Je m’assoie aux côtés d'Ombre et attend les instructions du chef.

-Bien, commence-t-il. Dame Élise nous a envoyé les rapports de ses éclaireurs ainsi que le plan de l'usine. Une cinquantaine de gardes de la BAR en patrouille, ainsi que trois combattants d'élite surveillent le contremaître Lairn et vous attendent de pied ferme. Votre mission est de vous infiltrer dans l'usine de DGC, assassiner le contremaître et saboter les installations. Est-ce bien clair ?
-Oui, chef ! répond-on en chœur avec Ombre.
-Alors voici votre équipement, poursuit Patriarche en sortant deux appareils de son bureau. Ce sont des grappins, précise-t-il devant nos regards interrogateurs. Ils se fixent à côté de vos lames secrètes. Ils peuvent servir à vous hisser rapidement en haut d'un bâtiment, ou au contraire descendre en rappel. Et si vous êtes sûrs de vous – mais c'est très dangereux – vous pouvez les utiliser pour vous balancer entre les bâtiments.

Je ne peux pas m'empêcher de siffler en imaginant ça. Je me demande si le chef est capable de se balancer comme ça, comme un certain héros de comics. Je me tourne vers Ombre. Je me demande si elle pense à la même chose, mais c'est difficile à dire à cause de son visage impassible, et puis elle n'est pas du genre à imager des trucs comme ça. Pourtant, j'ai l'impression que les coins de ses lèvres se sont légèrement étirés. Le chef se racle la gorge, et je reporte mon attention sur lui tandis qu'il sort d'autres appareils en forme d'arbalète.

-Ceci, explique-t-il, se fixe sur vos lames secrètes. On appelle ça des « lames fantômes », elles tirent des fléchettes avec précision. N'oubliez pas de les récupérer sur vos victimes ou vous tomberez vite à court. Viens, Sabre, je vais te montrer comment tout attacher. Ombre, tu sais déjà comment faire.
-Oui, chef.

Je tend le bras pour que Patriarche attache les nouveaux appareils à ma lame secrète. Je ne peux m'empêcher de penser à ce qu'il vient de dire. Nos « victimes »... J'ai vraiment l'impression d'être un criminel, un terroriste. Ce qui n'est pas totalement faux. Mais je ne tue pas pour le plaisir, je ne suis pas un de ces psychopathes qu'on voit à la télé ! Tous ces morts servent à rendre justice, à sauver le peuple !
Mais est-ce bien le cas ?

-Tout va bien, Sabre ? me demande Patriarche.
-Oui, chef. C'est juste que je suis un peu nerveux.
-C'est normal. Mais ça ira mieux lorsque tu seras sur le terrain.

Eh bien, j'ai enfin réussi à dire un mensonge convaincant. Patriarche finit d'attacher mon équipement et se décale. Je jette un œil à Ombre, qui est déjà prête. Elle m'explique sur quels boutons appuyer pour activer chaque outil.

-Si vous êtes prêts, vous pouvez y aller, nous dit le chef. N'oubliez pas les plans.

Nous hochons la tête, prenons les plans, saluons et sortons de la pièce. Nous sommes surpris par l'air frais qui nous envahit dès que nous sortons du QG. Les feuilles des rares arbres se détachent et virevoltent au gré du vent. L'automne doré rougeoie pour embellir la mort de la nature. J'aimais l'automne, avant... Mais maintenant, je le hais.
Ombre me fait signe et je la suis tandis qu'elle saute sur le toit voisin. Je lui emboîte le pas et nous poursuivons ainsi jusqu'à arriver à l'usine, une demi-heure plus tard. Nous nous arrêtons sur le toit du bâtiment en face de l'entrée, puis Ombre sort le plan où sont gribouillées quelques indications.

-Bon, commence-t-elle. Le contremaître se trouve au premier étage, surveillé par l'unité d'élite et une quinzaine de gardes de la BAR, lit-elle.
-Quinze seulement ?
-Le reste surveille les ouvriers au rez-de-chaussée et au deuxième étage, explique-t-elle tandis que son doigt parcourt les annotations. Sabre, tu vas devoir être prudent.
-Juste moi ? je demande avec un sourire légèrement crispé par le stress.
-Tu n'as donc rien appris de ta blessure d'hier ?
-Oh, si. Je ne sais pas juger la profondeur d'une blessure.

Elle soupire avant de relever son foulard sur son nez.

-Bon, je vais passer par une des entrées dans la rue. Je devrais réussir à faire diversion. Toi, passe par les toits.
-Euh, Ombre, je commence alors qu'elle est en train de se lever. Comment je fais si j'ai une de mes... « crise » ?
-Planque-toi et enfonce ton poing dans ta bouche. Et mord dedans aussi fort que tu peux, pourvu que tu ne fasses pas de bruit.
-Super...

Ombre descend du toit avec dextérité, tandis que je traverse la rue par un des câbles fixés entre les toits des maisons et de l'usine. Je relève mon foulard devant mon visage en prenant garde de ne pas glisser. Je saute du câble pour atterrir avec souplesse sur le toit de l'usine, à côté d'une vitre. Je jette un coup d’œil à l'intérieur : j'aperçois cinq gardes, l'un d'eux disparaît dans un coin du couloir en T, et deux d'entre eux entrent dans une pièce, à gauche. Les deux restants sont assis sur des caisses, juste en dessous de la fenêtre. Le hasard fait bien les choses.
J'ouvre discrètement la fenêtre, sort ma lame secrète, et plonge sur le garde de droite tout en plantant ma lame dans la jugulaire de l'autre. Les deux tombent en même temps que moi, et je tranche la gorge du second garde. Bien, au moins je n'ai pas fait trop de bruit. Je me cache derrière les caisses et tend l'oreille : un des gardes qui sont entrés dans la pièce revient dans le couloir. Enfin j'espère qu'il est seul. Ça va être l'occasion de tester la lame fantôme. J'appuie sur le bouton et l'arbalète se déploie automatiquement, et la fléchette est immédiatement armée. Je n'ai plus qu'à viser et tirer. Je jette un œil par-dessus les caisses et attend le bon moment.
Le garde sort de la pièce – il est bien seul – et promène son regard sur le couloir jusqu'à se poser sur le corps de ses ex-collègues, devant les caisses derrière lesquelles je me cache. Il écarquille les yeux. C'est le moment. Je sors de mon couvert, tend le bras et vise sa tête. J'enclenche l'arme. En un déclic silencieux, la fléchette part se loger entre les yeux du garde, qui tombe raide mort dans l'encadrement de la porte. Je suis surpris de la résistance de la fléchette : elle a traversé le casque pour s'enfoncer profondément entre ses yeux.

-Qu'est-ce que c'est que ce bordel ? s'écrie une voix à l'intérieur de la pièce.

Et merde. Je sors vite de ma cachette et me mets à couvert à côté de l'entrée. J'entends les pas de l'autre approcher.

-Ethan, qu'est-ce qui t'arrive ?

Son ombre dépasse la porte. Aussitôt, je me lève devant lui, plante ma lame dans sa gorge, et ramène son corps encore convulsant près de celui de son collègue. Je me remets à couvert et jette un œil dans la pièce : rien d'intéressant hormis des caisses d'outils, des établis et des machines collées aux murs. Je continue donc dans le couloir, sans oublier de reprendre la fléchette pour ma lame fantôme, que je recharge immédiatement. J'arrive dans le croisement du couloir et tend l'oreille mais je n'entends pas le bruit des bottes du dernier garde. Je décide de bifurquer à gauche, toujours accroupi. J'arrive devant une porte, que j'ouvre sans difficultés, en sans bruit, bien heureusement.
De toute manière, je ne pense pas que cela se serait entendu dans le vacarme qui m'inonde. Je me trouve sur une passerelle au-dessus d'une vaste salle qui occupe le rez-de-chaussée et une bonne partie du premier étage. D'énormes machines et tapis roulants font un bruit d'enfer en vibrant dans tous les sens, des éclairs de lumière surgissent par endroits, et le tout forme un système si vaste que je n'en distingue ni le début, ni la fin, ni les DGC fabriqués. Au fond de la pièce, à ma gauche, se trouvent deux grandes cuves reliées au reste de la machinerie. Je reporte mon attention sur mon étage : une passerelle identique à ma droite m'indique où menait l'autre côté du couloir. Les deux passerelles conduisent à une petite salle surplombant la large pièce. Devant moi se trouve une simple porte en bois, idem pour l'autre passerelle. Au-dessus de ces portes, un panneau où est écrit « Salle des machines ». J'avance et colle l'oreille contre la porte. Malgré le grondement qui vient d'en bas, je crois percevoir des voix à l'intérieur. Je crois que la confrontation va être inévitable. Je regarde ma lame secrète... Et si j'essayais mes nouveaux outils dans un vrai combat ?
Je me relève et donne un grand coup de pied dans la porte qui s'ouvre à la volée et manque de se détacher de ses gonds. J'entre, lame secrète prête à se déployer, et me retrouve face à non pas deux, mais trois gardes. Ils me regardent avec un air ébahi, ce qui est assez comique, je dois avouer. Puis je plante ma lame dans la gorge du premier. Le deuxième s'élance vers moi en meuglant et en brandissant un tonfa électrifié. Je l'esquive sans difficultés avec un pas sur la droite. Je m'élance vers le troisième, lui donne un coup de poing dans le ventre pour le plier en deux, tire mon grappin dans sa jambe, fais une roulade sur son dos avant de tirer sur le câble. Il fait une pirouette absurde et se cogne violemment la tête sur le sol. Le deuxième se dirige à nouveau vers moi, mais je lui tire une lame fantôme dans la tête. Le grappin se détache et retourne à mon poignet, aux côtés de ma lame secrète. Je plante cette dernière dans le cœur du troisième garde pour l'achever.
Enfin, je peux souffler, et j'en profite pour regarder la pièce dans laquelle je suis. À ma droite, un grand panneau de contrôle se trouve sous plusieurs écrans collés au mur. Je les regarde et trouve les boutons que je cherchais. Avec un petit sourire, je porte la main à mon oreille et active mon émetteur.

-Ombre, j'appelle dans un murmure. Ombre, tu m'entends ? Ici Sabre.
-Je suis là, répond-elle après quelques secondes de silence.
-Tu en es où ?
-J'ai nettoyé le rez-de-chaussée, on pourra fuir par-là, explique-t-elle. J'approche du bureau de Lairn. Et toi ?
-Je suis au troisième, devant un panneau de contrôle. Étage nettoyé aussi. Et j'ai la possibilité de saboter les machines.
-Ah oui ? Comment ça ?
-À ton avis, qu'arriverait-il si toute une partie du mécanisme s'arrêtait brusquement ? je demande avec un léger sourire.
-Ça ferait des dégâts. Et ça pourrait même finir par exploser, si tu te débrouilles bien. Fais ça, et retrouve-moi ensuite au bureau de Lairn, compris ?
-Reçu. À tout de suite.

J'éteins l'oreillette et entreprends de désactiver quelques leviers par-ci par-là. J'en vois un qui indique « Malum ». Aucune idée de ce que c'est, mais je le désactive quand même en haussant les épaules. Dans une petite minute, la moitié du mécanisme s'arrêtera, et la production des drones sera... Légèrement compromise. Je me dirige vers la porte pour trouver un chemin jusqu'au premier étage.
Et soudain, cette terrible migraine revient. Mais elle est plus violente que la précédente. J'ai l'impression que mes yeux vont exploser. J'ai des flashs incessants, même avec les mains appuyées sur mon visage, et je me retrouve vite à terre en hurlant. Heureusement, la machinerie en bas n'est pas encore désactivée, si bien que personne ne m'entend. Je sens des larmes chaudes déborder de mes yeux. Le sang accélère dans mes tempes, si vite que j'ai l'impression qu'il va exploser. C'est comme si un millier d'aiguilles me transperçaient le crâne. Puis, progressivement, tout s'arrête. J'arrête de crier, et après quelques secondes, je ne ressens plus aucune douleur. Plus rien, à part une furieuse envie de vomir. Ce qui ne tarde pas à arriver.
Je tente de me relever en tremblant. Je crois que mes genoux sont encore trop faibles pour soutenir mon poids, alors je m'appuie contre le mur et respire profondément, les yeux fermés. Je pose fébrilement la main sur la poignée de la porte, mais j'attends de me sentir mieux pour l'ouvrir. Mon cœur retrouve lentement un rythme normal. Encore quelques secondes, et c'est comme s'il ne s'était rien passé. Au premier étage, j'aperçois à travers les murs une dizaine de silhouettes rouges éparpillées, ainsi qu'une dorée entourée de trois autres rouges plus loin. Mon instinct me souffle qu'il s'agit de ma cible. Sans réfléchir, je tire mon grappin juste au-dessus d'une fenêtre et saute par-dessus la rambarde de la passerelle.

Je me protège des débris de verre tandis que mon corps éclate la vitre. Je me rattrape dans une roulade et me relève à la hâte en regardant autour de moi, légèrement sonné. Je distingue une ombre bleue parmi la dizaine de rouges qui se sont mis en mouvement à ma droite. Ombre, le mot est bien choisi, car je sais qu'il s'agit d'elle. J'ouvre discrètement la porte. Devant moi se trouvent trois soldats de la BAR qui observent avec appréhension Ombre se battre. Je tire mon grappin dans le mur en face de moi, au niveau de leur cou, fais une glissade dans leur dos et, avant qu'ils aient le temps de se retourner, je tire violemment sur le câble. Des craquements satisfaisants m'indiquent que j'ai réussi à me débarrasser des trois gardes d'un coup. Je jette un œil à Ombre : elle s'occupe de trois autres gardes assez facilement. Il m'en reste deux, que je tue assez facilement avec ma lame secrète. Décidément, c'est à se demander si mes épées servent à quelque chose. Alors que le corps du deuxième tombe au sol, Ombre se débarrasse de son dernier opposant. Elle se dirige vers moi en rengainant sa dague.

-Sabre, tout va bien ?

Je n'ai pas le temps de répondre que ses yeux s'arrondissent de surprise. Je ne sais pas ce qu'il y a sur mon visage, mais ça doit faire peur. Elle s'approche, pose une main sur mon visage et essuie quelque chose avec son pouce.

-Tu as refait une crise, hein ? demande-t-elle d'une voix douce.
-Oui... Comment tu as deviné ?
-Tu avais une larme de sang sur la figure.
-Oh. Ça devait être flippant.
-Pas plus que d'habitude, si ça peut te rassurer, dit-elle dans un petit rire.

Je lui pousse l'épaule en faisant semblant d'être énervé. Mais je ne peux m'empêcher de rire avec elle. C'est fou comme ça peut nous faire décompresser de la mission. La mission. Je reprends vite mon sérieux, et Ombre fait de même. Nous avons quelque chose à finir. Je dégaine mes épées – je compte bien m'en servir cette fois – tandis qu'elle dégaine sa dague et l'essuie sur un garde de la BAR.

-On associe souvent cette larme à la fin des crises, explique-t-elle. Maintenant, avec un peu d'entraînement, tu arriveras à contrôler la Vision d'Aigle à volonté... Et sans douleur.
-Heureux de l'apprendre. Je n'avais pas très envie d'avoir ces crises jusqu'à la fin de mes jours.
-Bref, allons-y.

Elle passe devant moi et je la suis jusqu'à la porte du bureau de Lairn. Notre combat n'a pas dû passer inaperçu, et je pense que les gardes d'élite nous attendent de pied ferme. Ombre et moi nous regardons avec appréhension, puis elle finit par hocher la tête. Tout en resserrant mon emprise sur mes épées, j'enfonce la porte d'un coup de pied.

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