Le restaurant était vide, normal il avait réservé la salle pour une occasion très spéciale, il allait enfin lui demander sa main, elle est tellement belle dans sa robe de soirée pourpre, il n'en revient pas, elle est assise en face de lui prête à accepter de devenir sa fiancée alors qu'il y a même pas 6 mois, il n'osait même pas aller lui adresser la parole dans ce même restaurant.

Malheureusement les vieux démons finissent toujours pas vous rattraper et ce restaurant vide était une opportunité parfaite pour une embuscade, tout s'est passé en un éclair la porte d'entrée s'est ouverte dans un grand fracas, il eut juste le temps de reconnaitre le premier homme qui fit irruption pour réaliser, comprendre, il pris sa fiancée par la main, l'emmène vers la porte de service au moment ou un coup de feu retentit.

Il ressentit une vive douleur vite atténuée par la montée d'adrénaline et la poussa vers la porte au moment ou la bouteille de champagne qui contenait la bague qui était posée sur le bar à coté de la porte se brisait, le bijou vola comme au ralenti et elle le vit, ses yeux se remplirent de larmes tandis qu'il refermait la porte derrière elle en lui disant de la fermer à clé et de prendre la fuite.



"Il va bien falloir que tu te réveilles un jour l'ami!"

Marc ouvrit un œil, puis les deux, il ne sentait aucune douleur ni fatigue, il ne sentait rien à vrai dire, il se redressa et contempla les alentours, autour de lui tout était étrangement calme et reposant, l'herbe sur laquelle il reposait était verte, tondue, entretenue, il était au milieu d'une grande colline entourée d'une immense forêt, si grande qu'il ne pouvait voir où elle s'arrêtait. Seulement quelque chose clochait, il manquait une chose importante pour que tout cela ait un sens...

" Je... on est où là?

- Eh bien vraisemblablement sur une colline entourée d'une forêt qui s'étend à perte de vue mon gars.

- Je vois bien mais OH MON DIEU QUE VOUS EST-IL ARRIVÉ?

- Oh l'accident bête, je n'ai pas voulu faire le mort devant un ours et maintenant eh bien... je suis mort."

L'homme qui se tenait devant Marc n'était pas beau à voir, il avait le bras en charpie et son visage était marqué par trois entailles profondes dont une qui traversait son œil, mis à part ça, il avait l'air d'un bûcheron à l'ancienne, sa chemise à carreaux rouges rentrées dans son jean et sa carrure massive montraient que ce n'était pas le genre de gars contre qui on aurait envie de se battre à la sortie d'un bar. Il avait la mine grisâtre et dénuée de vie mais dégageait malgré tout quelque chose de chaleureux.

"Tu vas continuer longtemps à me dévisager? Ça devient un peu gênant pour moi...

- Oh désolé.

- Y a pas d'mal j'm'appelle Igor (il roulait les "R" à l'allemande) et toi, qui es-tu comment t'arrivé là?

- Marc, mais à part d'une lumière blanche, je ne me souviens pas de grand chose.

- Ah oui, la loupiote blanche, t'es un nouveau mort, ne t'en fais pas ça va te revenir les souvenirs, ou peut être pas, quel est ton projet d'décès Marc?

- Je ne sais pas...

- Eh bien vu que t'as rien à fichtre tu pourrais m'donner un p'tit coup d'main, j'dois trouver c'foutu grand arbre mais ça fait bien des décennies que je tourne en rond dans c'te maudite forêt, c'est ça mon projet, trouver le plus grand arbre et lui faire la peau, s'ti pas un beau projet ça?

- Certainement, tu viens de quelle année pour parler comme ça?

- Je suis parti du monde des vivants l'20 octobre 1879, j'm'en souviens comme si c'était hier, j'ai passé le test du score d'la bonne dame et on m'a refilé s'te quête bon dieu, mais ça doit faire bien 3-4 ans que je cherche, pas moyen d'le trouver s'foutu arbre.

-150 ans.

-Pardon?

-ça fait 150 ans que vous cherchez votre arbre, sauf votre respect.

- Répète moi ça?! 150 piges?!"

Igor s’asseyait, le souffle coupé par cette nouvelle. Il répétait encore et encore "150 ans, j'me suis fait abusé ma parole". Marc alla s'asseoir à coté de lui, contemplant l'horizon en se demandant pourquoi tout cet environnement sonnait autant faux.

"j'ai mesuré chaque arbre, comparé encore et encore, le temps passe donc aussi lentement ici? Je ne le trouverais jamais ce foutu arbre...

- Vous avez rencontré du monde en 150 ans Igor?

- Non mon gars, t'es l'premier que j'croise, mais faut dire qu'à part c'te forêt et la colline, j'ai pas exploré plus loin. 150 ans bon sang...

- Admettons que votre arbre n'existe pas, peut être que votre projet à un sens caché, vous avez passé votre vie à couper des arbres non?

- C'est bien ça gamin, dans ma famille on était bûcheron de génération en génération, enfin jusqu'à moi, l'pauvre vieux Igor est mort sans avoir eu de descendance.

- Et cet arbre, il se trouve forcément dans cette forêt?

- Eh bien, l'intitulé du projet c'était de trouver le plus grand arbre de toute la mortalité.

- Et selon vous il se trouve forcément dans cette forêt?

- ... j'ai été largué ici mon gars, je m'suis dis que c'était forcément là.

- Vous vous êtes mis vous même des frontières Igor, vous êtes mort, vous pouvez faire tout ce que vous voulez, aller où bon vous semble, pourquoi vous êtes vous obstiné à trouver un arbre pour le couper, vous n'avez même pas de hache ou de scie avec vous...

- ...

- Eh bien Igor, je vous écoute, que voulez vous vraiment faire?

- T'es doué toi, j'ai coupé des arbres toute ma vie, j'ai connu uniquement ça...

- Peut être y a-t-il autre chose, quelque chose que votre mort vous permettra d'accomplir.

- Comme trouver une bonne p'tite femme à moi?

- Peut être bien Igor, c'est vous qui décidez de votre après vie."

Une étincelle apparut dans les yeux d'Igor, d'un bond il se leva et prit Marc dans ses bras, il le fit virevolter dans les airs e le fit tourner autour de lui en dansant et en chantant.

"Tu m'plais bien toi, ça fait pas longtemps que t'es là et tu m'redonnes de l'espoir, j'commençais à m'sentir mal ici, dis moi où tu veux aller et j'te suis mon pote, (il commença à chanter) être mort c'est pas la mort, le décès c'est vraiment l'pied! L'bon vieux Igor s'était trompé, mais l'grand Marc l'a éclairé Wouhou! Où allons nous maintenant Ô grand Marc?

- Traversons cette forêt et continuons jusqu'à ce que l'on trouve quelque chose ou quelqu'un.

-Ça me vas! Allons y Marc le nouveau mort!"

Et Igor partit avec Marc sur ses talons en route vers la forêt. Marc savais ce qui clochait ici, il n'y avait aucun bruit, pas de vent, pas de cris d'oiseaux, d'animaux de la forêt, partout régnait un silence de mort, et cette nouvelle vie en temps que décédé ne prévoyait rien qui vaille si ils ne trouvaient personne, mais Marc était surtout préoccupé par cette perte de mémoire, il ne se souvenait de rien si ce n'est quelques flashs d'une salle morne et d'une femme moche. Ils pénétrèrent dans la forêt bien décidés à comprendre ce nouveau monde si dénué de vie.