Au fond du café, parmi le mobilier,

_Bonsoir. Est-ce que cette place est libre ?
_Mille fois pardon. Évidemment, elle est libre. Excusez moi, excusez mes pieds, ils ont la fâcheuse tendance de se hisser au rang prestigieux des humains.
_En société, c’est fâcheux.
_Néanmoins, c’est de ma faute, entièrement. Jamais je n’aurais dû entamer le dialogue avec eux. Asseyez vous, je vous en prie.
_Merci bien.

Si les voix des philosophes ont échoué à briser la posture du dormeur, la demoiselle qui s’est glissée jusqu’à lui y parvient en quelques mots. Les deux bottes présomptueuses quittent ainsi les hauteurs, sans questions, et le postérieur encore frais du dehors récolte de la place.

_Quelle manière insolite vous avez d’entamer la conversation. Les pieds ! J’ai connu plus attrayant.
_Mille excuses. Vous m’excusez ?
_Comme cette fâcheuse manie que vous avez de me vouvoyer.
_C’est une maladie que l’on contracte par ici, et que vous avez d’ailleurs.
_Par ricochets.
_Tutoyons-nous alors. C’est plus dans notre ère.
_Disons dans notre tranche d’âge.
_Oui. Car c’est vrai, tu es jeune.
_J’ai vingt cinq ans. Je m’appelle Anna. Enchantée.
_Raymond. J’en ai vingt sept.

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