Metroid_Zero
Par : Pseudo supprimé
Genre : Inconnu
Status : C'est compliqué
Note :
Chapitre 2
Adolescence
Publié le 19/08/13 à 01:13:06 par Pseudo supprimé
Les yeux de la jeune fille s’ouvrent doucement. Dans la torpeur où elle se trouve, Justin ne perçoit pas vraiment ce qui se passe autour d’elle. Elle a le temps d’apercevoir un visage de vieillard ridé, l’air concentré, avant que l’obscurité ne revienne. Sa tête est le siège d’images se déplaçant à une allure folle, dans un kaléidoscope insupportable. Elle a l’impression de revoir tous les événements de sa jeune existence, avec en toile de fond l’horrible lueur douce de l’explosion du vaisseau de ses parents. Des larmes coulent sur ses joues, mais elle ne s’en rend pas compte : elle est retombée dans l’inconscience.
Le temps passe, et les instants d’éveil de Justin se font moins rares et plus prolongés. A chacun de ses réveils, elle voit ce même vieil homme, qui la regarde tantôt avec concentration, tantôt avec une expression de douceur paternelle. Elle se sent de plus en plus rassurée, et étrangement calme. Son hôte l’aurait-elle droguée ? Affolée par cette hypothèse, elle ouvre les yeux totalement, et retrouve une clarté d’esprit perdue depuis longtemps. En se levant de la table où elle est allongée, elle tourne la tête dans tous les sens. Sans s’expliquer pourquoi, elle a l’impression que sa perception des choses s’est affinée… N’y tenant plus, elle prononce ses premières paroles :
« Où suis-je ? Qu’est-ce qui m’est arrivé ?
- Allons, reste calme, mon enfant, fait une voix qu’elle croit connaître, une jeune fille convalescente doit essayer de récupérer avant de tenter autre chose…
- Mais je ne vous connais pas ! Qui êtes-vous, pourquoi êtes-vous là ?
- Calme-toi, je t’en prie, fais-moi confiance, je suis là pour t’aider… »
Mais l’adolescente, effrayée par l’inconnu et l’étrangeté de sa situation, perd le contrôle d’elle-même. Elle commence à s’agiter, se rend compte qu’elle est attachée à la table, n’y tiens plus et se met à hurler.
Aussitôt, sans crier gare, un changement s’effectue chez elle. Comme si on lui avait fait une injection de calmant, elle retrouve sa sérénité. Et pourtant, elle se sent très différente. Ses cinq sens sont exacerbés et elle a l’impression d’être dotée de nouvelles capacités. Elle émet la volonté de se libérer de ses liens, et ceux-ci se détachent immédiatement, cédant sous la force incroyable dont elle dispose. Mais elle se sent rapidement épuisée, et elle s’écroule au milieu de la pièce, sombrant à nouveau dans le coma…
« Alors, ça va mieux maintenant ?
- Que s’est-il passé ? …, articule Justin d’une voix pâteuse.
- Je vais t’expliquer, mais promets-moi d’être calme cette fois. De toute façon, vu les produits que je t’ai fait ingurgiter, je doute que tu aies envie de t’énerver.
- En effet, reconnaît la jeune fille, ressentant à ces mots l’atrophie qui a envahi ses muscles…
- Bien, sache tout d’abord que je me fais appeler Masanarus. J’ai oublié mon vrai nom depuis bien longtemps, et de toute façon, là où je vis, je n’ai plus besoin d’un véritable patronyme.
- Mais sur quelle planète sommes-nous ?
- Je n’en sais rien, elle n’est pas répertoriée sur les cartes spatiales. Mais cela me convient très bien : je ne suis jamais dérangé dans mes activités scientifiques, car personne ne connaît l’existence de cet endroit.
- Et comment suis-je arrivé ici, moi ?
- De la même manière que moi : par hasard. Mon vaisseau a eu une panne en plein saut spatial, il y a une vingtaine d’années. Je faisais partie d’une colonie de scientifiques envoyés vers le futur laboratoire de Ceres. L’accident a causé la mort de tout l’équipage. Heureusement pour moi, j’étais dans une partie du vaisseau qui n’a pas explosé, et à cette partie était reliée une capsule de sécurité. J’y suis entré, puis, je me suis placé en hibernation le temps que l’ordinateur retrouve une planète habitable. Finalement, j’ai été réveillé en arrivant ici et depuis, je suis coincé sur ce rocher perdu.
- Vous voulez dire que vous survivez ici tout seul depuis vingt ans ? Et que je suis la première personne que vous voyez depuis ce temps ?
- Oui… On trouve le temps moins long quand on est seul, du moment qu’on a des expériences scientifiques à faire et des conditions de vie acceptables. Cette planète est très confortable, elle ressemble assez à la Terre. Mais je pense qu’elle est très éloignée de notre planète d’origine, c’est pour cela qu’elle n’a jamais été détectée. Quant à savoir comment tu as fait autant de chemin en si peu de temps, je pense que ça s’explique facilement si je regarde l’état de la capsule dans laquelle tu es arrivée…
- …c’est à dire ? …
- Visiblement, elle a subi une déflagration électromagnétique, due sans doute à une forte explosion spatiale. Je pencherai pour celle du vaisseau auquel la capsule était attachée… Et vu l’âge que tu avais en arrivant…
- Attendez ! Est-ce que vous êtes en train de me dire…
- …que tu as passé trois ans ici, oui. Ton coma a été grave, tu étais grièvement blessée lorsque je t’ai récupérée. Alors je t’ai soignée, en espérant que tu te réveillerais un jour. Pas évident, vu le matériel dont je disposais, mais tu es enfin consciente.
- Merci… Je suis désolée d’avoir douté de vous.
- Ne te réjouis pas trop vite. Pour arriver à te remettre d’aplomb, j’ai dû tenter sur toi une opération spéciale. Finalement, ça s’est transformé en projet expérimental lorsque j’ai vu et analysé ton ordinateur de poche, celui qui fonctionne par la pensée. Cela m’a donné de nouvelles idées, et m’a permis de te sauver. Grâce à du matériel de récupération, j’ai pu créer une sorte de combinaison spéciale qui te maintient en vie.
- Quoi ? Que voulez-vous dire ?
- Je n’ai pas encore achevé tous les tests, tu t’es réveillée plus tôt que je ne le pensais, mais il me semble que cela fonctionne, si j’en juge par ta réaction d’hier matin.
- Quand je me suis évanouie ? Mais quel est le rapport ?
- Tu as eu une réaction de frayeur incontrôlée. Comme prévu, pour ne pas emballer le cœur, la combinaison s’est activée et t’a injecté un calmant. Puis tu sembles avoir voulu te mettre debout et tu as brisé tes liens sans problème, avant de t’écrouler, parce que tu ne sais pas encore contrôler toutes les possibilités que te donne ton armure. Ca viendra, crois-moi.
- Attendez, que je comprenne bien. Vous me dites, en résumé, que je suis tombée sur cette planète perdue il y a trois ans, que vous m’avez soignée en me confectionnant une combinaison fonctionnant par la pensée, et que je suis malgré tout coincée ici pour le restant de mes jours ?
- Presque. Je ne crois pas que tu restes ici bien longtemps. Je pense pouvoir te fabriquer un petit appareil avec les restes de ta capsule. Heureusement que ce genre d’appareil est solide, d’ailleurs, sinon je n’aurais sans doute jamais trouvé le moyen de partir d’ici. Avec le matériel que j’ai pu accumuler ici, je devrais pouvoir faire quelque chose… Mais avant tout, tu dois t’habituer à ta nouvelle manière de vivre. Bien des choses ont changé depuis que tu es tombée dans l’inconscience, il y a trois ans. Tu vas devoir t’habituer à ta nouvelle taille de jeune fille de 14 ans, et surtout à vivre en symbiose avec ta combinaison. Je t’aiderai, puis, je construirai le vaisseau le plus vite possible. Je ne pense pas avoir encore longtemps à vivre, je me fais de plus en plus vieux…
- Je vois… Merci en tout cas d’avoir fait tout ça pour moi. Mais d’ailleurs, je ne pense pas que ce soit gratuit. Qu’est-ce qui vous a décidé à faire autant d’efforts pour une inconnue ?
- Bonne déduction. En effet, j’ai une requête à te faire. A toi de voir si tu veux l’accomplir pour moi, je ne serai sans doute pas là pour le savoir. Mais au moins, je partirai en paix avec moi-même. Avant de partir pour Ceres, j’ai été contacté par des pirates de l’espace qui voulaient faire pression sur moi pour bénéficier du fruit de certaines de mes expériences. Je n’ai jamais cédé, et ils n’ont pas hésiter à massacrer ma femme et mes deux fils pour me forcer à collaborer avec eux. Jamais je ne pourrai leur pardonner. J’aimerais donc que, quoi que tu décides de faire à l’avenir, tu tentes de mettre des bâtons dans les roues à ces bandits.
- Comptez sur moi. Je n’aime pas ces pirates non plus.
- Je sais. Je n’ai pas seulement adapté l’armure à ta morphologie, j’ai aussi tenté de comprendre ce qui t’était arrivé. En quelque sorte, j’ai lu dans tes pensées grâce à ce merveilleux ordinateur portable que tu avais encore sur toi en arrivant. Et je sais ce qui est arrivé avant que tu tombes ici. C’est pourquoi je place tous mes espoirs en toi.
- J’ai une dette envers vous, Masanarus. Je vous promets donc de me montrer digne de votre requête. Je vous promets de combattre les pirates de l’espace, aussi longtemps que je vivrai. Alors dites-moi tout de suite : que puis-je faire avec cette armure ?
- Je vais te montrer… »
Les jours suivants, Justin apprend à se servir de sa combinaison. Le principe de base en est simple : l’armure est omni-évolutive, ce qui lui permet de s’adapter à l’environnement de son propriétaire. Ainsi, elle grandira avec Justin, et pourra convertir n’importe quelle source d’énergie en matière pour confectionner de nouveaux appareils et armes. Elle peut analyser tout être vivant, et en retirer de l’énergie après sa mort. Elle contient des réserves d’oxygène auto-recyclé, et peut répondre à tous les besoins du corps de son détenteur. De plus, elle permet à l’utilisateur de recevoir les données stockées dans son esprit de manière directe. Par ce moyen, le professeur Masanarus a déjà doté le cerveau de Justin de nombreuses connaissances scientifiques et linguistiques.
En revanche, il est difficile de maîtriser toutes les possibilités de cette merveille. En particulier, la jeune Bailey a du mal à ne pas déclencher l’apparition de son armure en cas de peur ou d’émotion violente. Tout l’art, Masanarus le lui a expliqué, est de se concentrer sur l’apparition de l’armure, invisible en temps normal. Le cerveau de l’adolescente est en effet relié à la source d’énergie de l’armure et au processeur de l’ancien ordinateur mental de la famille Bailey. En recevant l’ordre de se déployer, la puce active une micro réaction de fusion nucléaire froide qui fournit une énergie démentielle, capable de se convertir en matière selon le principe antique : e=mc².
Après quelques semaines d’entraînement, Justin est capable de nouvelles prouesses acrobatiques, et peut tirer à très courte portée avec son arme. Il lui faudrait plus d’énergie pour développer ses capacités, mais elle est très satisfaite de ces résultats encourageants. Jamais elle ne s’est sentie aussi en forme, et un projet de vengeance envers les pirates de l’espace commence à germer dans son esprit.
Un soir, elle rentre au laboratoire de Masanarus après s’être entraînée en extérieur. Mais une surprise désagréable l’attend : le professeur est allongé sur le sol, sans vie, épuisé par une vie trop longue et des derniers efforts trop intenses… Retenant ses larmes, Justin ressent néanmoins de la colère. Une fois encore, elle perd un être cher, comme si elle était destinée à rester seule, toujours, face à l’adversité… Ne contrôlant plus ses émotions, elle provoque l’apparition de son armure. Instantanément, un hologramme est déclenché dans la pièce, et le professeur apparaît.
« Désolé de devoir te parler par cet intermédiaire, Justin, mais je n’ai pas pu faire mieux, déclare l’apparition.
« Si ce message est diffusé, c’est que je suis mort, mais ce n’est pas le peine de t’apitoyer sur mon sort. Mon œuvre est achevée. Au moment où j’enregistre ce message, ton appareil est terminé. Je vais passer les jours qui viennent à l’améliorer, mais il est en état de marche de toute façon. Pour l’utiliser, tu n’auras qu’à mentacharger les données stockées sur la console du vaisseau. Le reste ira tout seul.
« Je voulais te dire… que je suis fier de toi. Je place tous mes espoirs en toi, et tu le mérites. Ne sois jamais abattue par la solitude, quoi qu’il arrive. Tout comme pour moi, ta destinée est d’être seule, et la vie m’a appris qu’il valait mieux parfois être seul qu’entouré d’ennemis…
« Encore un conseil. Lorsque tu seras partie d’ici, n’ôte ton armure que si tu es bien sûre des conséquences. Souviens-toi que pour tout le monde, la famille Bailey est décimée. Alors garde ton identité secrète et aide-toi de l’armure pour cela. Tu pourras prendre un pseudonyme, et rallier la Terre pour mener ta vie comme tu l’entends. Rappelle-toi que ta combinaison est essentiellement réalisée pour le combat et la survie en milieu hostile. A toi de voir quelle voie tu voudras suivre, mais le groupe des chasseurs de prime de la Fédération me semble adapté à de telles capacités. C’est plus discret, on ne cherche généralement pas l’origine d’un chasseur…
« Encore merci pour l’espoir que tu as fait naître en moi. Je mourrai l’âme en paix. Bonne chance, Justin… »
Bouleversée, mais excitée par la nouvelle vie qui va commencer pour elle, la jeune Bailey entre dans le vaisseau, un petit appareil ocre dont l’aspect évoque étrangement le casque de la combinaison. Sur la console, elle trouve un orifice dans lequel elle introduit le bout de son bras armé. Immédiatement, un flot d’information envahit son cerveau. Après quelques secondes, elle connaît parfaitement le fonctionnement de l’appareil, et elle ne perd pas un instant pour le mettre en marche. Au bout de quelques minutes, elle est dans l’espace, pour la première fois depuis trois ans…
« Une fois encore, je fuis un univers auquel je commençais à m’habituer… Et je vais devoir me faire à un autre mode de vie. Peu importe, je serai digne de Masanarus. Et pour commencer, je vais décider de mon nouveau nom. Je me dois de rendre hommage au créateur de la combinaison… Voyons voir, un nom, un prénom… Pas d’identifiant pour le sexe, conservons le mystère… Prenons les lettres de «masanarus »… Voilà : Samus Aran. Désormais, c’est le nom par lequel on me connaîtra… et par lequel les pirates trembleront. »
Farouchement déterminée, l’adolescente programme le saut spatial vers la Terre. Le vaisseau analyse les données entrées, les compare à celle qu’il a déjà en mémoire, puis l’univers semble se distordre autour de l’engin, avant de se condenser en un simple point que Samus franchit immédiatement, traversant les parsecs en un instant.
Alors que le croissant bleu de la planète apparaît sur l’écran, Justin repense à son étrange destin. Le hasard a voulu qu’elle mène une vie aventureuse. Qui sait ce qui l’attendra dans les innombrables zones d’ombre de la galaxie ? La perspective de le découvrir fait frissonner Justin, de peur, mais aussi de plaisir. Curieuse destinée, vraiment. Mais elle s’y pliera, et elle deviendra le plus craint des chasseurs de prime.
Ses yeux reflétant la lueur bleue du berceau de l’humanité, elle enclenche la commande d’accélération, s’approchant de la station spatiale Aleph 1, le point d’attache de tout vaisseau se dirigeant vers le siège de la Fédération Galactique…
Le temps passe, et les instants d’éveil de Justin se font moins rares et plus prolongés. A chacun de ses réveils, elle voit ce même vieil homme, qui la regarde tantôt avec concentration, tantôt avec une expression de douceur paternelle. Elle se sent de plus en plus rassurée, et étrangement calme. Son hôte l’aurait-elle droguée ? Affolée par cette hypothèse, elle ouvre les yeux totalement, et retrouve une clarté d’esprit perdue depuis longtemps. En se levant de la table où elle est allongée, elle tourne la tête dans tous les sens. Sans s’expliquer pourquoi, elle a l’impression que sa perception des choses s’est affinée… N’y tenant plus, elle prononce ses premières paroles :
« Où suis-je ? Qu’est-ce qui m’est arrivé ?
- Allons, reste calme, mon enfant, fait une voix qu’elle croit connaître, une jeune fille convalescente doit essayer de récupérer avant de tenter autre chose…
- Mais je ne vous connais pas ! Qui êtes-vous, pourquoi êtes-vous là ?
- Calme-toi, je t’en prie, fais-moi confiance, je suis là pour t’aider… »
Mais l’adolescente, effrayée par l’inconnu et l’étrangeté de sa situation, perd le contrôle d’elle-même. Elle commence à s’agiter, se rend compte qu’elle est attachée à la table, n’y tiens plus et se met à hurler.
Aussitôt, sans crier gare, un changement s’effectue chez elle. Comme si on lui avait fait une injection de calmant, elle retrouve sa sérénité. Et pourtant, elle se sent très différente. Ses cinq sens sont exacerbés et elle a l’impression d’être dotée de nouvelles capacités. Elle émet la volonté de se libérer de ses liens, et ceux-ci se détachent immédiatement, cédant sous la force incroyable dont elle dispose. Mais elle se sent rapidement épuisée, et elle s’écroule au milieu de la pièce, sombrant à nouveau dans le coma…
« Alors, ça va mieux maintenant ?
- Que s’est-il passé ? …, articule Justin d’une voix pâteuse.
- Je vais t’expliquer, mais promets-moi d’être calme cette fois. De toute façon, vu les produits que je t’ai fait ingurgiter, je doute que tu aies envie de t’énerver.
- En effet, reconnaît la jeune fille, ressentant à ces mots l’atrophie qui a envahi ses muscles…
- Bien, sache tout d’abord que je me fais appeler Masanarus. J’ai oublié mon vrai nom depuis bien longtemps, et de toute façon, là où je vis, je n’ai plus besoin d’un véritable patronyme.
- Mais sur quelle planète sommes-nous ?
- Je n’en sais rien, elle n’est pas répertoriée sur les cartes spatiales. Mais cela me convient très bien : je ne suis jamais dérangé dans mes activités scientifiques, car personne ne connaît l’existence de cet endroit.
- Et comment suis-je arrivé ici, moi ?
- De la même manière que moi : par hasard. Mon vaisseau a eu une panne en plein saut spatial, il y a une vingtaine d’années. Je faisais partie d’une colonie de scientifiques envoyés vers le futur laboratoire de Ceres. L’accident a causé la mort de tout l’équipage. Heureusement pour moi, j’étais dans une partie du vaisseau qui n’a pas explosé, et à cette partie était reliée une capsule de sécurité. J’y suis entré, puis, je me suis placé en hibernation le temps que l’ordinateur retrouve une planète habitable. Finalement, j’ai été réveillé en arrivant ici et depuis, je suis coincé sur ce rocher perdu.
- Vous voulez dire que vous survivez ici tout seul depuis vingt ans ? Et que je suis la première personne que vous voyez depuis ce temps ?
- Oui… On trouve le temps moins long quand on est seul, du moment qu’on a des expériences scientifiques à faire et des conditions de vie acceptables. Cette planète est très confortable, elle ressemble assez à la Terre. Mais je pense qu’elle est très éloignée de notre planète d’origine, c’est pour cela qu’elle n’a jamais été détectée. Quant à savoir comment tu as fait autant de chemin en si peu de temps, je pense que ça s’explique facilement si je regarde l’état de la capsule dans laquelle tu es arrivée…
- …c’est à dire ? …
- Visiblement, elle a subi une déflagration électromagnétique, due sans doute à une forte explosion spatiale. Je pencherai pour celle du vaisseau auquel la capsule était attachée… Et vu l’âge que tu avais en arrivant…
- Attendez ! Est-ce que vous êtes en train de me dire…
- …que tu as passé trois ans ici, oui. Ton coma a été grave, tu étais grièvement blessée lorsque je t’ai récupérée. Alors je t’ai soignée, en espérant que tu te réveillerais un jour. Pas évident, vu le matériel dont je disposais, mais tu es enfin consciente.
- Merci… Je suis désolée d’avoir douté de vous.
- Ne te réjouis pas trop vite. Pour arriver à te remettre d’aplomb, j’ai dû tenter sur toi une opération spéciale. Finalement, ça s’est transformé en projet expérimental lorsque j’ai vu et analysé ton ordinateur de poche, celui qui fonctionne par la pensée. Cela m’a donné de nouvelles idées, et m’a permis de te sauver. Grâce à du matériel de récupération, j’ai pu créer une sorte de combinaison spéciale qui te maintient en vie.
- Quoi ? Que voulez-vous dire ?
- Je n’ai pas encore achevé tous les tests, tu t’es réveillée plus tôt que je ne le pensais, mais il me semble que cela fonctionne, si j’en juge par ta réaction d’hier matin.
- Quand je me suis évanouie ? Mais quel est le rapport ?
- Tu as eu une réaction de frayeur incontrôlée. Comme prévu, pour ne pas emballer le cœur, la combinaison s’est activée et t’a injecté un calmant. Puis tu sembles avoir voulu te mettre debout et tu as brisé tes liens sans problème, avant de t’écrouler, parce que tu ne sais pas encore contrôler toutes les possibilités que te donne ton armure. Ca viendra, crois-moi.
- Attendez, que je comprenne bien. Vous me dites, en résumé, que je suis tombée sur cette planète perdue il y a trois ans, que vous m’avez soignée en me confectionnant une combinaison fonctionnant par la pensée, et que je suis malgré tout coincée ici pour le restant de mes jours ?
- Presque. Je ne crois pas que tu restes ici bien longtemps. Je pense pouvoir te fabriquer un petit appareil avec les restes de ta capsule. Heureusement que ce genre d’appareil est solide, d’ailleurs, sinon je n’aurais sans doute jamais trouvé le moyen de partir d’ici. Avec le matériel que j’ai pu accumuler ici, je devrais pouvoir faire quelque chose… Mais avant tout, tu dois t’habituer à ta nouvelle manière de vivre. Bien des choses ont changé depuis que tu es tombée dans l’inconscience, il y a trois ans. Tu vas devoir t’habituer à ta nouvelle taille de jeune fille de 14 ans, et surtout à vivre en symbiose avec ta combinaison. Je t’aiderai, puis, je construirai le vaisseau le plus vite possible. Je ne pense pas avoir encore longtemps à vivre, je me fais de plus en plus vieux…
- Je vois… Merci en tout cas d’avoir fait tout ça pour moi. Mais d’ailleurs, je ne pense pas que ce soit gratuit. Qu’est-ce qui vous a décidé à faire autant d’efforts pour une inconnue ?
- Bonne déduction. En effet, j’ai une requête à te faire. A toi de voir si tu veux l’accomplir pour moi, je ne serai sans doute pas là pour le savoir. Mais au moins, je partirai en paix avec moi-même. Avant de partir pour Ceres, j’ai été contacté par des pirates de l’espace qui voulaient faire pression sur moi pour bénéficier du fruit de certaines de mes expériences. Je n’ai jamais cédé, et ils n’ont pas hésiter à massacrer ma femme et mes deux fils pour me forcer à collaborer avec eux. Jamais je ne pourrai leur pardonner. J’aimerais donc que, quoi que tu décides de faire à l’avenir, tu tentes de mettre des bâtons dans les roues à ces bandits.
- Comptez sur moi. Je n’aime pas ces pirates non plus.
- Je sais. Je n’ai pas seulement adapté l’armure à ta morphologie, j’ai aussi tenté de comprendre ce qui t’était arrivé. En quelque sorte, j’ai lu dans tes pensées grâce à ce merveilleux ordinateur portable que tu avais encore sur toi en arrivant. Et je sais ce qui est arrivé avant que tu tombes ici. C’est pourquoi je place tous mes espoirs en toi.
- J’ai une dette envers vous, Masanarus. Je vous promets donc de me montrer digne de votre requête. Je vous promets de combattre les pirates de l’espace, aussi longtemps que je vivrai. Alors dites-moi tout de suite : que puis-je faire avec cette armure ?
- Je vais te montrer… »
Les jours suivants, Justin apprend à se servir de sa combinaison. Le principe de base en est simple : l’armure est omni-évolutive, ce qui lui permet de s’adapter à l’environnement de son propriétaire. Ainsi, elle grandira avec Justin, et pourra convertir n’importe quelle source d’énergie en matière pour confectionner de nouveaux appareils et armes. Elle peut analyser tout être vivant, et en retirer de l’énergie après sa mort. Elle contient des réserves d’oxygène auto-recyclé, et peut répondre à tous les besoins du corps de son détenteur. De plus, elle permet à l’utilisateur de recevoir les données stockées dans son esprit de manière directe. Par ce moyen, le professeur Masanarus a déjà doté le cerveau de Justin de nombreuses connaissances scientifiques et linguistiques.
En revanche, il est difficile de maîtriser toutes les possibilités de cette merveille. En particulier, la jeune Bailey a du mal à ne pas déclencher l’apparition de son armure en cas de peur ou d’émotion violente. Tout l’art, Masanarus le lui a expliqué, est de se concentrer sur l’apparition de l’armure, invisible en temps normal. Le cerveau de l’adolescente est en effet relié à la source d’énergie de l’armure et au processeur de l’ancien ordinateur mental de la famille Bailey. En recevant l’ordre de se déployer, la puce active une micro réaction de fusion nucléaire froide qui fournit une énergie démentielle, capable de se convertir en matière selon le principe antique : e=mc².
Après quelques semaines d’entraînement, Justin est capable de nouvelles prouesses acrobatiques, et peut tirer à très courte portée avec son arme. Il lui faudrait plus d’énergie pour développer ses capacités, mais elle est très satisfaite de ces résultats encourageants. Jamais elle ne s’est sentie aussi en forme, et un projet de vengeance envers les pirates de l’espace commence à germer dans son esprit.
Un soir, elle rentre au laboratoire de Masanarus après s’être entraînée en extérieur. Mais une surprise désagréable l’attend : le professeur est allongé sur le sol, sans vie, épuisé par une vie trop longue et des derniers efforts trop intenses… Retenant ses larmes, Justin ressent néanmoins de la colère. Une fois encore, elle perd un être cher, comme si elle était destinée à rester seule, toujours, face à l’adversité… Ne contrôlant plus ses émotions, elle provoque l’apparition de son armure. Instantanément, un hologramme est déclenché dans la pièce, et le professeur apparaît.
« Désolé de devoir te parler par cet intermédiaire, Justin, mais je n’ai pas pu faire mieux, déclare l’apparition.
« Si ce message est diffusé, c’est que je suis mort, mais ce n’est pas le peine de t’apitoyer sur mon sort. Mon œuvre est achevée. Au moment où j’enregistre ce message, ton appareil est terminé. Je vais passer les jours qui viennent à l’améliorer, mais il est en état de marche de toute façon. Pour l’utiliser, tu n’auras qu’à mentacharger les données stockées sur la console du vaisseau. Le reste ira tout seul.
« Je voulais te dire… que je suis fier de toi. Je place tous mes espoirs en toi, et tu le mérites. Ne sois jamais abattue par la solitude, quoi qu’il arrive. Tout comme pour moi, ta destinée est d’être seule, et la vie m’a appris qu’il valait mieux parfois être seul qu’entouré d’ennemis…
« Encore un conseil. Lorsque tu seras partie d’ici, n’ôte ton armure que si tu es bien sûre des conséquences. Souviens-toi que pour tout le monde, la famille Bailey est décimée. Alors garde ton identité secrète et aide-toi de l’armure pour cela. Tu pourras prendre un pseudonyme, et rallier la Terre pour mener ta vie comme tu l’entends. Rappelle-toi que ta combinaison est essentiellement réalisée pour le combat et la survie en milieu hostile. A toi de voir quelle voie tu voudras suivre, mais le groupe des chasseurs de prime de la Fédération me semble adapté à de telles capacités. C’est plus discret, on ne cherche généralement pas l’origine d’un chasseur…
« Encore merci pour l’espoir que tu as fait naître en moi. Je mourrai l’âme en paix. Bonne chance, Justin… »
Bouleversée, mais excitée par la nouvelle vie qui va commencer pour elle, la jeune Bailey entre dans le vaisseau, un petit appareil ocre dont l’aspect évoque étrangement le casque de la combinaison. Sur la console, elle trouve un orifice dans lequel elle introduit le bout de son bras armé. Immédiatement, un flot d’information envahit son cerveau. Après quelques secondes, elle connaît parfaitement le fonctionnement de l’appareil, et elle ne perd pas un instant pour le mettre en marche. Au bout de quelques minutes, elle est dans l’espace, pour la première fois depuis trois ans…
« Une fois encore, je fuis un univers auquel je commençais à m’habituer… Et je vais devoir me faire à un autre mode de vie. Peu importe, je serai digne de Masanarus. Et pour commencer, je vais décider de mon nouveau nom. Je me dois de rendre hommage au créateur de la combinaison… Voyons voir, un nom, un prénom… Pas d’identifiant pour le sexe, conservons le mystère… Prenons les lettres de «masanarus »… Voilà : Samus Aran. Désormais, c’est le nom par lequel on me connaîtra… et par lequel les pirates trembleront. »
Farouchement déterminée, l’adolescente programme le saut spatial vers la Terre. Le vaisseau analyse les données entrées, les compare à celle qu’il a déjà en mémoire, puis l’univers semble se distordre autour de l’engin, avant de se condenser en un simple point que Samus franchit immédiatement, traversant les parsecs en un instant.
Alors que le croissant bleu de la planète apparaît sur l’écran, Justin repense à son étrange destin. Le hasard a voulu qu’elle mène une vie aventureuse. Qui sait ce qui l’attendra dans les innombrables zones d’ombre de la galaxie ? La perspective de le découvrir fait frissonner Justin, de peur, mais aussi de plaisir. Curieuse destinée, vraiment. Mais elle s’y pliera, et elle deviendra le plus craint des chasseurs de prime.
Ses yeux reflétant la lueur bleue du berceau de l’humanité, elle enclenche la commande d’accélération, s’approchant de la station spatiale Aleph 1, le point d’attache de tout vaisseau se dirigeant vers le siège de la Fédération Galactique…
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