Rebecca se lava la bouche, et vida le tube de dentifrice de son « hôte ». Oh, celui-ci avait été assez délicat en comparaison de ses autres clients. Il n'en restait pas moins que du sperme reste du sperme, peu importe de quel pénis il pouvait bien provenir.

Elle récupéra les 45€ laissé là sur la table de nuit, et regarda d'un air livide l'homme qui somnolait sur le lit ; un homme qui avait la cinquantaine mais qui était déjà vieux. Inoffensif, mais à l'air si fatigué, et si... pathétique.
L'orgasme l'avait vidé, tant au sens littéral que figuré.
Est-ce que tous les hommes sont soumis à leurs instincts primaires, en quête de cul dès que la première occasion se présentait ? C'est la question que s'était toujours posée Rebecca.

Comme beaucoup de filles de son âge et de sa situation, elle avait été battue par un père alcoolique, et sa mère absente tachait d'achever le travail en la détruisant psychologiquement, comme pour relâcher sa frustration après avoir ressenti l'impuissance physique face à une masse de 100 kilos, imprévisible et qui malgré l'alcool était doté d'une force dévastatrice pour son anorexique de mère. A la première occasion, elle prit le minimum vital et s'enfuit de chez elle. Elle erra dans tout Paris, avant de découvrir à quel point il était facile pour une fille de 14 ans de gagnait sa vie à Pigalle, ou dans d'autre coins plus ou moins bien famés. Bien sûr, comme toutes les prostituées, elle s'était dans un premier temps refusée dans un soucis « de fierté et respect pour son corps » à ce genre de pratique. Mais la faim et le froid ont vite fait de faire accomplir les actes les plus abjects à l'être le plus respectable. Elle connut le racket, les chambres d'hôtel miteuses, les rouages de coups par de vielles harpies doyenne de leurs professions et jalouse de ses atouts, les fréquentations douteuses, la drogue... Mais elle parvenait à survivre.

4 ans passés dans le monde de la prostitution ne semblait pas avoir fanée sa beauté naturelle. En réalité, lorsque elle se maquillait pour cacher les bleus sur son visage, lorsque elle se coiffait pour faire plaisir à un client plus exigeant de par son porte-monnaie, et lorsqu'elle s'habillait de façon extrêmement féminine et sensuelle pour plaire à un homme la payant pour un rendez-vous galant factice, elle était resplendissante ; trop belle pour faire partie de ce monde de débauche, trop détruite pour prétendre appartenir à n'importe quel autre univers.

Mais elle était là, belle et forte.

Elle sortait de l'appartement de son client, et se connecta aux ordinateurs du cybercafé « Cyber-Inn » de la rue se situant en face pour gérer son site d'Escort en ligne. Malgré sa marginalisation de la société contemporaine, Rebecca avait su prendre le virage du sexe 2.0 avec une facilité déconcertante, aussi ridiculement hypocrite le monde d'Internet fut-il.