<h1>Noelfic</h1>

Le Cycle Des Calepins Oubliés


Par : Tacitus42

Genre : Science-Fiction , Action

Status : Terminée

Note :


Chapitre 21

The End?

Publié le 22/02/12 à 23:33:54 par Tacitus42

Livre 113.


III. Mémoires d’un ignare


1. The end ?


Où en étais-je au fait ?!

Ah oui : je me faisais beugler dessus parce qu’on avait pas mal merdé niveau « dommages collatéraux » (comme ils disent)…
Nous avons quand même pu sauver un petit millier d’innocents dans le tas : pas assez je suppose.
On ne sauve jamais que ce qu’on peut et on ne peut pas sauver le monde entier simplement par vœu de bonne volonté de toute façon.
Pour ceux qui en douteraient, j’irai vraisemblablement en enfer (et j’assume).

Mais la destruction du Treize est pour le moins la première erreur de calcul que le commandeur ait faite de sa vie (et il n’en a fait que trois en tout à ma connaissance : dont la dernière lui fut fatale malheureusement).

Et quelle erreur…

En fin de compte, je crois (et c’est triste) que nous serions peut-être arrivé à un résultat moins mauvais si nous avions tenté l’invasion du treizième secteur…
D’autant que nous avions l’appui des corporations sectorielles sur ce coup-là et que nos brigades d’interventions étaient pratiquement à égalité en nombre avec les guerriers de la citée treize.
Et nous avions des civils en réserve (ce qui n’était pas le cas de nos adversaires).
Avec une simple division auxiliaire (une ligue de plusieurs citée formée dans le primus sector pourquoi pas), on aurait facilement pu lui faire son affaire (à la manière de Khor).
C’aurait pris du temps, mais on aurait vraisemblablement épargné des tas de vies innocentes.

Quoique je me demande si Lilith ne les aurait pas simplement immolé sur l’autel de la folie au constat d’une défaite assurée : c’est, je pense, la seule raison qui poussa le commandeur à approuver la mission d’assassinat.

Avec des « si », on ne refait pas le monde de toute manière.

En définitive, on ne l’a même pas eue… L’objectif principal, la reine des reines :

Lilith !

Officiellement, l’affaire était réglée (tu penses) : certains dans l’état-major étaient pressés (et contents) d’enterrer l’affaire.
Les huiles ont donc fort diplomatiquement déploré l’incident fâcheux qui a conduit à l’anéantissement du treizième secteur en assurant au monde (ou ce qu’il en restait) que pareil évènement ne se répéterait pas…
« Jamais ! »…
(Il fallait du moins l’espérer même si rien n’était moins sûr).
Mais l’important était encore qu’elle y était restée (pensait-on)…

Officieusement, Victor avait les boules d’avoir la certitude qu’on ne retrouverait jamais le corps de Lilith (étant donné ce qu’il restait de la citée)…
Et amputé du luxe qu’était devenue la vérité (alors pourtant qu’elle dispense ses faveurs à bas prix en temps normal), il pensait bêtement qu’il ne pourrait plus jamais dormir en paix.

Comme je l’ai dit, le salaud était totalement parano.
(Même si comme d’hab, c’est lui qui avait raison).

Et vu que j’avais bien merdé moi-même mais que ce n’était non plus de ma faute, j’ai eu l’immense privilège du me farcir la protection de sa famille…
Non pas que j’ai conservé quelque grief que ce soit contre les Gretchencko : je les adore…
Simplement, j’avais un certain caporal du nom de Bramwell dans les basques (et je pleure encore ce bon vieux Furius : lui au moins ne pétait pas un mot).

Le pire je crois, c’est qu’il y a eu d’autres survivants qu’Haggis et moi-même avions contribué à enfermer…
Sujet qu’on n’a officiellement pratiquement pas évoqué (mais j’y reviendrai).

Les choses sont en tout les cas redevenues normales. On pouvait enfin parler de paix, de la vraie.

Pendant l’année qui succéda à ces évènements tragiques, les choses ont quand même tourné comme elles devaient. Une vraie démocratie à l’échelle mondiale et un Victor qui veillait aux grains (pour éviter que le train en marche ne déraille).
On en a même profité pour reprendre le contact avec les colonies de la lune et de Mars…
Enfin avec la lune surtout, parce qu’il faut toujours quarante minutes au minimum pour communiquer avec Mars : les pauvres colons doivent se sentir bien seuls depuis cent cinquante ans.

Pour le reste, les habitants de la lune s’étaient eux-mêmes dotés d’une citée dôme et d’une petite flottille que le soi-disant (et tout récemment promu) commandeur stellaire jalousait de manière éhontée…
D’autant que la lune a catégoriquement refusé l’intégration à la corporation des secteurs autonomes (ce qui était dans son droit du reste).

Je ne crois pas que nous ayons demandé la même chose aux martiens vu qu’ils n’avaient aucune ville du genre : il s’agissait les concernant de sociétés articulées sur de simples villages hydroponiques.
(Les pauvres)…

Enfin, quoiqu’il en soit, le nouveau (et unique) commandeur stellaire venait en conséquence d’avoir comme nouvelle attribution l’Armada Spatial terrienne (et branlait donc que dalle vu que sa flotte comptait peut-être deux vedettes et un torpilleur, le vieux raffiot dont j’ai forcément dû parler : le Wotan).
Il a d’ailleurs pu concilier les fonctions de général d’une brigade d’infanterie et de commandeur de l’armada spatiale pendant trois ans facile. Après quoi, il a du céder sa place de général vu que sa flotte commençait à ressembler à quelque chose…
Conflit d’intérêt oblige : l’armada spatiale était l’entité militaire des corporations alors que la septième brigade d’intervention urbaine était issue du seul secteur premier…
Mais qu’on n’aille pas croire que la nouvelle escadrille appartint à tout le monde. Quand je dis qu’elle tenait ses ordres de l’état global, c’est surtout parce que chaque citée avait la possibilité d’affréter son bâtiment depuis la troisième mégapole. En conséquence, les citées les plus petites armaient des vedettes alors que le premier bâtiment de classe capitale allait battre pavillon québécois (si je puis dire) quelques années plus tard. Et même si le commandeur était sensé être prioritaire au niveau des ordres, des clauses illisibles dans le contrat de fabrication rendaient son autorité caduque sous certaines conditions bien précises (chose qui survint lors de Putsch de l’arsenal orbital).

Une partie du bloody battalion l’avait pourtant suivi dans pratiquement toutes ses pérégrinations : il lui était entièrement « affecté » pour sa protection (et celle de ses proches), sous son commandement direct qui plus est (bien qu’il demeura un contingent d’infanterie terrestre : autant pour le soi-disant conflit d’intérêt)…

Mais je crois pouvoir dire que cet imbécile de Victor pensait que son nouveau grade lui permettrait de finir ses vieux jours bien pénard et à l’abri de toutes emmerdes.

Gretchencko est mort (il faut le savoir) : il y a dix ans à peine, dans la destruction de la partie haute de l’arsenal orbital lors du siège exceptionnel de quelque chose qui s’appelait encore l’assemblée des secteurs autonomes.
Mais tout le monde sait ça bien évidemment (j’y reviendrai quand même).

Si je le dis c’est entre autre parce qu’il a appris la nouvelle peu après être redescendu sur Terre à la suite d’une session de cette même assemblée (environ neuf ans avant sa mort donc).
Il venait juste de revenir du secteur trois (situé près de l’équateur ou dessus, je ne saurais dire) quand on l’a plus ou moins tenu informé de nos déboires avec celle que tout le monde croyait morte.

Je suppute que ses yeux ont du s’ouvrir tout grand et qu’il s’est involontairement paré de son plus beau regard d’halluciné quand la nouvelle lui est parvenue.

Evy et moi étions alors occupés à sauver les miches de sa bourgeoise et de sa gamine dans une course-poursuite mémorable dans les rues du premier secteur : j’avais gardé mon unité portable dans ma poche pour que le commandeur puisse nous rattraper (au cas où).

Mais comme d’habitude, je commence par la fin.
Le truc, c’est qu’on y arrive en fait : il n’y a plus grand-chose à dire.

Si ce n’est que la souveraine du défunt Treize a lancé un assaut dans les règles contre la casa Gretchencko (bien qu’indirectement en fait).

C’était plus ou moins bien calculé en tout les cas.
Ils ont posé une charge simple au niveau de la porte principale de la maison d’à côté et ces enfoirés sont montés par le toit voisin (tuant les pauvres malheureux qui avaient eu le tort de demeurer à côté du commandeur).
Ils ont du employé une échelle ou un grappin (parce que la maison du commandeur était la plus haute du quartier) et tué un maximum de bodyguards (qui étaient bien moins nombreux cette fois-là : les guerres étaient finies).
Leur blitz devait techniquement, soit conduire à notre capture, soit nous obliger à sortir : j’ai préféré la seconde option (étant donné qu’elle nous laissait une marge de manœuvre plus grande).

Je me rappelle encore de la trivialité du ton que j’employai pour enjoindre dame Gretchencko et sa fille à descendre dans le garage. Le local était doté d’une porte faite d’une pièce de vingt centimètres d’épaisseur d’acier trempé qui s’enfonçait dans le sol sur commande… Un surveillant (qui a du mourir pour nous donner du temps) venait de nous prévenir de l’assaut en cours dans la demeure voisine dès qu’il a vu l’attroupement sur les écrans des capteurs donnant sur la rue.

Il y avait bien des gardes ennemis qui nous attendaient à l’extérieur (lesquels l’ont regretté d’ailleurs).

Ce coup-ci, c’était moi aux commandes…
Et je finassais bien moins au volant, qu’Haggis de son vivant…
D’autant que cette voiture était automatique…
C’était (jusqu’à ce jour) la fierté du commandeur : une voiture dotée d’une batterie à micro charges nucléaires. Rien à voir avec ces petites voiturettes électriques qu’il faut constamment recharger et qui n’atteignent jamais que le cent cinquante à l’heure en les poussant à fond.
Celle-ci faisait des pointes à trois cents (et plus si affinité) bien qu’on n’ait jamais pu la pousser au maximum en agglomération (forcément)…

Bramwell quant à lui, tenait lieu de servant à la mitrailleuse lourde ce qui l’obligeait parfois à passer une bonne partie de son corps à travers la vitre ouverte de sa portière (laquelle servit parfois de bouclier lorsque le sous-off l’ouvrait en ciblant les ennemis qui osèrent nous faire front).

Je dois quand même préciser que j’aurais préféré un tank ou un combi de flic, lesquels étaient blindés (bien que les vitres de celle-ci fussent pare-balles malgré tout).
Et si j’en fais mention c’est entre autre parce que je ne pouvais pas moi-même me targuer de pouvoir exploiter tout le potentiel de cette bagnole (étant néophyte en pilotage)… Mais c’était ça où user de cette saloperie de mitrailleuse lourde.
Comme je l’ai déjà dit (en mentionnant feu Harold le vieux), je n’aime pas ce genre de méthode (même si j’admets qu’elles sont efficaces).

Et puis surtout, il fallait bien que j’apprenne un jour à manipuler ce genre d’engin.

Il s’agissait d’un bon compromis entre une voiture sportive (sans être décapotable) et familiale (rapport à la place immense à l’intérieur) : quatre roues motrices qui plus est (même si je n’ai compris l’utilité de ce fait que peu après, au dehors tout du moins).
Enfin, c’est ce qu’assurait le commandeur.

Pour ma part (et si on me demandait mon avis), je vous dirais que la seule chose de bien avec cette caisse, c’était que le cockpit ainsi que le contenu du capot étaient, eux, bien protégés (histoire d’éviter l’emballement du moteur et une fusion des charges lors d’un accident par exemple) : à fortiori, la vraie menace viendrait de derrière ou des flancs (pas de devant).

Mais c’est vrai qu’elle avait l’air d’un vrai jouet : tout était tellement facile d’utilisation.
Je suppose que c’est la seule vraie raison qui m’a poussé à délaissé la mitrailleuse en fin de compte (mon côté glandeur congénital qui me reprend toujours).

C’est un de ces trucs dont les enfants rêvent un jour et que certains finissent par inventer une fois arrivés à l’âge adulte.

Ce petit bijou comme Victor l’appelait encore avant d’en retrouver l’épave (un moindre mal cela dit) ne nécessitait aucune de ces manœuvres de démarrages longues et pénibles à faire comme l’exigeait la vieille voiture qu’avait pilotée en son temps feu Hagerald dit le narcissique.

Les commandes s’effectuaient soit vocalement, soit par le biais de boutons logés dans le volant (qu’on pouvait se passer d’utiliser d’ailleurs)…
(Mais bon : fallait quand même faire semblant de travailler un minimum devant la femme de mon patron).

Il ne manquait plus qu’à dame Gretchencko de lancer l’ordre d’ouverture du sas, lequel devait s’enfoncer de manière presque instantanée.

Elle avait donc du décompter depuis trois pour me laisser le temps de m’organiser…

« Démarrage en trombe, puis à droite ! » dis-je alors qu’elle en était déjà à deux dans le compte à rebours.

Ce qu’il restait en secondes permit à la voiture d’assimiler l’ordre pour s’exécuter aussitôt (l’analyseur de syntaxe était, il faut le dire, particulièrement efficace).

Constatant que demeurait un obstacle, l’ordinateur de bord a de lui-même bloqué les roues antérieures pendant une fraction de seconde, faisant crisser celles de derrière avant que le tout ne fut propulsé comme une balle de fusil (lorsque la porte de garage eut fini de se rabattre).

Se faisant, deux hommes passèrent immédiatement par-dessus bords dans l’incompréhension totale alors qu’Evy donnait un tir de barrage dans notre sillage pour dissuader de toutes ripostes (et parce que j’avais bien précisé que la route était dégagée devant nous).

Comme je l’ai dit, il s’agissait d’une course-poursuite monumentale…
J’espère juste que ce con de caporal n’a pas buté de passants au passage.
Je ne le pense pas étant donné qu’il ne tirait que dans les tunnels (conformément à mes ordres qui étaient aussi d’économiser les munitions)…
Mais il aurait tout aussi bien pu dégommer la bagnole d’un innocent (vas savoir).

En fait, je crois surtout qu’il n’a réussi à toucher personne en définitive (à en croire le nombre d’ennemis qui ont réussi à nous retrouver).

Je n’ai pas réussi à les distancer suffisamment pour leur échapper (étant moi-même un novice en la matière).
Je me suis contenté de me rapprocher de la première sortie de la ville en empruntant le plus de voies secondaires possibles histoire d’éviter de mêler les innocents.
Je n’aurais peut-être pas du, étant entendu que la plupart des civils avaient encore des connaissances paramilitaires issues de l’ère précédent les guerres institutionnelles (presque à la manière des gens du Treizième secteur) : ils auraient peut-être pu nous donner un coup de main (mais tant pis)…

Des patrouilles mobiles ont toutefois tenté de nous porter assistance dans notre traversée.

Mais je crois (à notre grand dam) que ce sont les seuls véhicules que j’ai réussi à semer.

Enfin, du reste et de toute façon, notre position était connue : le Q.G. était au courant en temps réel de notre situation.

Pour le reste, il est possible de rallier les trois grands boulevards principaux par la périphérie, mais ça prend perpète.
Il y a bien des routes principales, mais elles n’ont que très peu de sections droites et sont desservies tout leur long par d’étroits accès annexes (qui finissent généralement en impasses mais pas toujours) : rien que des virages en épingles en perspective ou toutes conneries du genre, le schmilblick étant de toute façon conçu pour ne pas faciliter la vie aux véhicules quels qu’ils soient.

Mais nous au moins, nous pouvions nous targuer d’avoir un bon G.P.S. (qui fonctionnait pleinement puisque les panneaux du dôme étaient baissés) et un ordinateur de bord compétent.
En conséquence, ce petit jeu de cache-cache a bien duré une petite demi-heure dans les faubourgs du premier secteur après quoi, je suis sorti de la ville et on a réglé ça dans un petit patelin paumé dans le trou-du-cul du monde…
(Du moins d’apparence : je ne peux pas prétendre avec certitude qu’il n’y demeura pas l’un ou l’autre squatter à l’occasion).

Ca faisait une bonne quinzaine de minutes que je roulais littéralement sur les gentes…
Bin vi : tu penses bien qu’ils ont essayés d’allumer les pneus (en constatant que les balles ricochaient sur le capot), mais il a fallu des grenades à fragmentation tout de même pour crever ceux du flanc gauche (le côté qui porte poisse donc).

Dieu merci, la charge a explosé assez loin (et n’aurait pu tuer qu’un hypothétique piéton à la rigueur)…
Faut croire que les pneus ne se dégonflaient pas avec de simples balles (je crois que ça tient à une spécificité d’un des revêtements internes puisque j’ai appris depuis qu’un pneu était constitué de plusieurs couches de gomme).
Enfin, on avait eu le temps de nous baisser (ce qui est débile puisque les vitres étaient bullet proof à l’instar de la tôle qui apparaissait bien fragile) tandis que l’ordinateur de bord imprimait plus de vitesse (sous mes directives avisées) tout en virant à droite dans l’espoir d’absorber au mieux l’impact.

Mais en l’occurrence la roue arrière gauche (salement touchée, comme les portières a moitié défoncée) a fini par se faire la malle et l’ordinateur de bord commençait à me saouler à force de me recommander de stopper le véhicule dans les plus brefs délais.
D’autant que la roue avant gauche ne demandait qu’à faire pareille que son homologue postérieure (ce qui nous aurait foutu mal).

En demandant l’arrêt à la voiture, j’étais pourtant persuadé d’en avoir bien possédé un maximum.
Je ne me suis pas rendu compte tout ce temps que ces salauds nous avaient rabattus…
Et je n’ai rien vu venir à en croire le calme qui régnait quand nous sommes descendu du véhicule (qui comptait déjà quelques traces d’impact).

Il faisait grand vent dehors et la toison de nimbo-stratus qui recouvrait encore le ciel augurait une belle drache (comme je les aime).

Mon idée première était de nous éloigner le plus possible et de nous abriter dans l’une de ces anciennes tours (encore debout) que comptait la vieille ville.

La mère Gretchencko était fébrile et il y avait de quoi : on s’est vite rendu compte qu’on était cernés de toutes parts.
Une chance qu’ils aient voulu les Gretchencko vivants : ça les obligeait à prendre des risques et à descendre de leur véhicule.

L’un d’eux s’arrêta pratiquement à nos pieds alors que nous entrions dans le premier de ces buildings en ruine.
Je n’avais eu que le temps de décharger le contenu d’une cartouche de chevrotine dans l’interstice de la portière avant (qui venait de s’entrouvrir).
Bramwell usa aussi de sa mitrailleuse, ne clôturant la marche que le temps d’achever mon travail.

Nous avons essuyé des tirs sporadiques pendant quelques temps : lorsque nous avions le malheur d’emprunter des allées vitrées des étages inférieurs notamment (parce qu’on n’avait pas le choix pour atteindre la cage d’escalier la plus proche).
Mais on s’en est tiré sans problème : Bramwell pouvait offrir un feu nourri en riposte, si nécessaire (ce qui nous assurait un passage sans trop de mal)…
D’autant qu’ils nous voulaient vivants comme je l’ai précisé.

Les ascenseurs étaient hors d’usage ce qui était plutôt bon pour nous : j’ai pu disséminer quelques pièges façon Tobiack puisque j’avais toujours mes deux grenades thermiques (au cas où) et qu’Evy en conservait quelques unes lui-même (pour imiter son supérieur sans doute).

On les entendait sauter au fur et à mesure que nous progressions dans les escaliers. Il nous arrivait de traverser un étage entier (pour arpenter une portion de chemin plane et ainsi reprendre un peu notre souffle sans avoir à nous arrêter) jusqu’à un autre accès menant lui aussi à d’interminables enchaînements de marches.

A cet effet, je me dis que l’un ou l’autre groupe aurait pu tenter l’interception en prenant les cages situées de l’autre côté du bâtiment (anticipant de facto notre course « à plat ») mais « bizarrement », la chose n’advint pas.

Les dits accès étaient illuminés dans toutes leur hauteur par les vitres en grande partie brisées de petites fenêtres disposées à chaque pallier : elles étaient trop petites (pensais-je) et nous étions trop hauts pour être pris pour cible désormais.

Et je n’ai pas compris en entendant pourtant plusieurs fois le bruit des monceaux de verre se brisant en contrebas…

Mais il a bien fallu que nous nous arrêtions : nous étions simplement arrivés au dernier niveau… Il n’y avait qu’un seul accès qui menait au toit : nous pouvions nous y réfugier en dernier recours mais je n’y tenais pas (parce qu’on pouvait toujours nous allumer depuis les bâtiments voisins dont l’un ou l’autre étaient plus hauts que le nôtre).

Il n’y avait pas trente-six solutions : ce coup-ci, nous étions acculés dans la pièce qui servait d’anti-chambre entre nous et le niveau d’évacuation…
J’avais depuis longtemps demandé un hélicoptère. Ils avaient ma position bordel : c’était facile…

Ces cons à l’état-major ont fait semblants de se planter de building. Mais c’est une chance pour nous en fin de compte, puisque l’hélico s’est mangé une roquette pour sa peine et s’est rétamé avant même d’avoir pu atterrir sur le toit d’en face (resquiant in pacem comme je dis toujours).

Oui, parce qu’il y avait quand même un certain nombre de fenêtres qui nous permettaient de visualiser l’évolution de la situation dans pratiquement toutes les directions des points cardinaux (ce qui n’était pas si mal pour un dernier retranchement).

Par l’intercom, on nous a plus ou moins fait comprendre qu’il n’y aurait pas un deuxième hélico de secours (pas tant qu’on ne serait pas certain que l’artillerie légère aurait été anéantie).
Des renforts étaient cependant dépêchés tant bien que mal pour nous appuyer…



Bandes de brêles !

C’était le charabia habituel qui voulait gentiment dire : « crève dans ta merde ! »

Evy et moi nous tenions de part et d’autre d’une porte qui donnait sur une salle dont le flanc extérieur était une baie vitrée. C’était la seule pièce qui donna sur un étroit corridor (qui faciliterait le combat rapproché) et à l’escalier qui menait au toit (dans son prolongement direct).

Cet abruti de Bramwell a jugé bon de laisser l’un de ses deux semi-automatiques à dame Gretchencko.
Il était chargé bien sûr, mais ce débile a cru bon de sous-entendre que le flingue était surtout pour en finir dignement dans le cas où nous aurions échoué dans notre tâche.

Et dame Gretchencko était supposée faire quoi avec la petite Katja ?
Cet animal venait presque de demander à une mère de tuer sa fille.

(Ce Bramwell, j’te jure)…

Mais je ne pouvais que me douter du fait que ce geste découlait inconsciemment de la façon dont est morte son Irina. Il est resté traumatisé lui aussi, je crois (même si ça n’a rien à voir avec moi).

Pour le reste, nous aurions pu nous poster dans le large couloir par lequel on accédait (dans l’autre sens) à la pièce qui nous était contiguë : mais Evy n’avait plus de munitions pour sa mitrailleuse lourde (il avait pratiquement tout usé pour protéger nos arrières lors de notre ascension).
Nous nous y serions faits rapidement débordés.
Il ne restait plus qu’à attendre l’ennemi quel qu’il fut ainsi qu’une mort plus que probable (qui arriverait tôt ou tard avec l’un d’eux).

Mais je n’avais pas encore compris que la faucheuse nous donnait un coup de main depuis tout ce temps…
Jusqu’à l’audition du fracas sourd de ce qui restait de la verrière feuilletée immédiatement suivi d’un cri qui venait de déchirer l’air…

En penchant lentement ma tête en travers de l’arcade dénuée de toute porte, je pus constater que le premier type qui était parvenu jusqu’à nous venait de s’écrouler, se tortillant dans tous les sens, vraisemblablement pris de convulsions suite à la balle qui l’avait atteint en plein cœur…
Preuve que La Mort Gretchencko se faisait vieux (il touchait la tête en générale sinon).

L’endroit où se trouvait le commandeur n’était pas bien dur à localiser : d’autant qu’un hovercraft était perché en haut d’un building à un moins d’un kilomètre de nous (bien qu’il en fut des plus proches : mais ils n’étaient pas assez hauts pour lui je présume).
On voyait facilement l’appareil depuis la baie…

Il a détourné son hovercraft dès qu’il a su : il tenait notre position de par une liaison avec le Q.G. grâce au traceur de mon unité portable comme je m’y attendais.
Et si le salaud s’est planqué si loin, c’est qu’il devait se douter qu’il y avait des R.P.G. dans la donne….
Lequel a pourtant nécessairement du se faire neutraliser au préalable parce qu’on n’a pas eu de problème avec un quelconque lance-roquette : où alors il n’avait qu’une seule ogive en réserve (vas savoir).

Cinq cent à six cent mètres, en hauteur : c’était amplement suffisant pour ce qu’il avait à faire.
Surtout que personne n’a du/ pu entendre venir l’aéroglisseur (personne n’entend jamais venir un aéroglisseur).

Des tirs à une distance d’un demi-kilomètre, par grand vent…
Et la pluie qui commençait à tomber ne l’a pas empêché d’atteindre ses cibles.
Ce salopard faisait mouche à chaque fois.

Il y avait environ quinze mètres entre nos deux portes : elles étaient l’une en face de l’autre.
Le commandeur tirait donc sur des cibles en mouvement de profile.

Je relevais fréquemment mon arme pour tenter un embryon d’attaque dès que l’un ou l’autre des gens de Lilith avait le malheur de franchir le premier seuil…
Mais j’étais contraint de la rabattre aussitôt en constant qu’il ne parvenait jamais à moins de trois mètres du nôtre.

Victor ne visait plus la tête : on entendait à chaque fois au moins un cri ou un râle d’agonie.
Morgenstern ne pouvait plus se permettre de faire preuve de pitié : pas quand la vie de sa famille était en jeu.

D’une œillade rapide je pus attester que la mère tenait la fille dans ses bras, le pistolet bringuebalant dangereusement dans une main qui le tenait trop mal et risquait le départ d’un coup involontaire…
Mais à dire vrai, seule la femme du commandeur affichait sa peur.
Entre deux tirs de son père, je ne pu qu’attester du calme dont faisait preuve la gamine.

(Elle a tout hérité de Victor je pense, même si elle est aussi mauvaise cuisinière que sa mère)…

Et ce n’est pas qu’elle ne comprenait pas ce qui se passait : c’est même elle qui rassurait sa pauvre mère larmoyante (en pensant sans doute à tout ce qu’il adviendrait si nous devions jamais faillir dans notre tâche).

Le vieux Victor a tué douze d’entre nos ennemis de cette manière (par paquets de trois parfois), mais il en avait déjà abattu plusieurs dans les escaliers (sans compter ceux qui se sont mangés nos grenades).

Je suppose qu’il tirait toujours en priorité sur le type en queue de peloton comme c’était son habitude : pour que ceux devant ne s’aperçoivent de rien (afin donc d’éliminer le groupe petit à petit sans qu’ils aient pu tenter quoique ce soit pour se prémunir).
Je suppose que c’est dans les cages qu’il a du avoir les servant à l’artillerie légère.

Et au bout du compte, il y eut un blanc. Un long moment d’accalmie : quelque chose qui dura plusieurs minutes et qui annonçait la fin des hostilités.

On pouvait être certain que Lilith demeurait derrière le mur : elle attendait le bon moment sachant pertinemment qu’il n’y en avait plus, qu’elle était fichue quoiqu’elle fasse…
Elle aurait pu rebrousser chemin, mais Gretchencko l’aurait sans doute cueillie dans les escaliers : mais cela ne ressemblait pas à la souveraine du défunt Treize.
Je présume qu’elle se donnait du courage pour une mort qu’elle voulait digne : elle a donc tout de même finit par risquer le tout pour le tout dans une ultime charge.
(Mais Victor ne l’entendait pas ainsi)…

Un seul coup qui transperça ses deux jambes mit fin à sa course : un tir de maître au niveau des cuisses au moment où elles se juxtaposent lors de l’effort (même si je crois que c’était du bol en l’occurrence).

Elle était au centre de la pièce, au milieu de ses hommes.
Nous n’avions plus qu’à attendre qu’elle dépose d’elle-même les armes ou qu’elle se vide de son sang (ce qui pouvait prendre longtemps).
Je dois dire qu’on est resté un peu bêtes, Evy et moi, attendant un énième et ultime hypothétique candidat au suicide (lequel ne vint pas : tous ce qui restait d’hommes à Lilith étaient passé avant elle)…
Treize corps dans la pièce : je me rends compte qu’ils seraient morts de toute manière même s’ils avaient pu correctement se regrouper (surtout parce qu’on ne pouvait passer la porte qu’un par un).



Et j’ai failli faire une bourde monumentale quand j’ai entendu les pas derrière nous. J’ai même manqué de cibler l’entrejambe (dans un tir réflexe à la Furius) avant de me raviser (Dieu merci : ça femme m’aurait tué sinon)…
Mais j’ai du attendre de le voir entièrement (arrivant via le petit escalier) pour ôter tout doute.

Comme je l’ai dit, on n’entend pas un hovercraft venir (même à l’extérieur).

Gretchencko a mis une poignée de minutes à peine pour nous rejoindre par la toiture.

Et dans la mince coursive, l’émoi était palpable.
Victor qui enserrait fort ses deux parents a bien du verser une larme et sa fille s’est lâchée aussi pour le coup (ça devait être la première fois qu’elle voyait chialer son paternel).
Même Bramwell en a épongé quelques unes à l’aide de sa manche droite (toujours rapport à Irina je pense).

Mais Lilith était toujours là. Je me demande encore pourquoi est-ce qu’elle n’a pas rampé jusqu’à nous et tenté d’en flinguer un maximum durant la pause câlin comme je l’appelle encore.
Parce qu’elle aurait eu une chance d’en choper pas mal dans le tas vu qu’ils avaient tous les yeux rivés du mauvais côté.

Il n’y a que moi qui suis entré pendant que les proches se serraient encore les uns contre les autres…
Elle avait toujours son arme à la main (et moi la mienne).

J’ai hésité à retirer ma cagoule comme c’était l’us avant 2166 devant quelqu’un dans un quelconque bâtiment. Mais je ne l’ai pas fait.
Si je le dis, c’est parce qu’une chose m’a frappé avant la mort de la reine Lilith : quelques paroles prononcées alors même que sa blessure au niveau des poumons n’allait pas tarder à se commuer en ce qui sembla être un pneumothorax (à en croire son dernier rictus).

Mais la blessure en question n’était pas faite encore. Il a fallu que les autres me rejoignent. Ce qu’ils firent avant que je n’ai eu le temps d’entièrement la désarmée : elle se laissait pourtant faire assez docilement.
Elle n’aurait rien pu tenter de toute façon.

La mère et la fille Gretchencko, plus circonspectes demeuraient toutefois sous l’arcade tandis que je venais de prendre sa dernière arme…
Et prenais un peu de recul, paré de la mienne.

Lilith était à deux longueurs de bras du premier macchabée et à fortiori d’un bon bras et demi de son flingue : raison pour laquelle j’avais jugé inutile de tous les désarmés (mais j’aurais du).

Pour une raison que j’ignore, elle a préféré essayer de se saisir d’un des leurs (plus loin) que d’une de ses armes quand elle les avait encore à portée de main…
(Peut-être n’en voulait-elle qu’à la famille de Victor : je n’étais qu’un subalterne après tout).

« Ne faites pas… » Tentais-je placidement à l’adresse de la reine déchue : c’était inutile, ça ne menait nulle part.
Je n’avais même pas envie de faire usage de mon arme. C’eut été bas, humainement (mais j’aurais du à posteriori).

Et j’allais presque lui tirer dans le bras coupable quand on a entendu une détonation venant de derrière au moment même où Lilith, rampant tant bien que mal, mettait la main sur l’arme d’un de ses défunts valets.
En tournant ma tête et une partie de mon buste, je me suis rappelé que madame Gretchencko disposait encore de l’arme de ce con de caporal…

Mais c’est sa fille qui en fit usage...
Elle avait l’un des deux Pacificators de Bramwell encore fumant à la main.



Elle s’est aussitôt mise à pleurer de tout son être sans pour autant laisser tomber le semi-automatique, mais se recroquevillant lentement avec force sanglots jusqu’à demeurer à genoux, le pistolet à ses côtés maintenant déposé.

Elle avait instinctivement voulu tuer quelqu’un qui en voulait à sa famille pour des raisons obscures. Mais le contrecoup d’une conscience pourtant déjà bien faite ne pouvait être que plus sévère en raison de son jeune âge…

C’est pour ça que j’aurais du tirer en premier : pour éviter à la petite d’avoir à meurtrir d’elle-même son âme d’enfant jusque-là innocente alors que j’étais un vrai soldat, alors que c’était là mon labeur à moi.

Je me suis souvent maudit de ma pitié (et me suis aussi souvent ravisé : être un inhumain soldat n’est pas mieux en tous les cas qu’un simple guerrier).
Mais je n’ose pas imaginer ce que devait penser Victor de lui-même après ce fait…

Il avait pour lors les yeux grands ouverts : un regard horrifié comme s’il avait lui-même fauté. Et il savait trop bien ce que ce genre d’acte entraîne.
Moralement surtout mais légalement aussi ensuite…
Et il ne voulait en aucun cas voir sa fille perdre une seule minute de sa vie pour avoir voulu protéger ses parents : Officiellement, c’est d’ailleurs le commandeur qui a tué Lilith.

Mais il demeurait pour lors en état de choc tout comme sa femme qui tenait ses deux mains devant sa bouche en signe d’incrédulité.

Même Evy venait de réaliser son erreur : il passa une main sur son crâne, enlevant au passage son béret d’un air hébété (pour autant que j’ai pu en juger derrière sa cagoule).

Pour info et même si tout le monde s’en cogne, Bramwell a reçu un blâme de la part de son supérieur hiérarchique pour raison indéterminée (et à été dégradé au rang de seconde classe façon Samson ou presque)…
Mais j’aurais plutôt du lui mettre un pain dans sa tronche pour la peine (façon Dana… « Ou presque »).

Lilith était de flanc quand elle a encaissé l’impact : la balle a du traverser les deux poumons en fin de compte, lesquels se remplissaient de sang à voir combien elle pouvait en régurgiter et comment elle peinait à respirer.

Elle affichait pourtant une expression qui se rapprochait de la satisfaction.
Elle était bien la seule à pouvoir sourire en pareil moment…
Et je ne crois pas que ce fut parce que la gamine avait prouvé qu’elle pouvait (se) défendre (toute seule)…

« Vedere te fuit meam maximam gaudiam... »

Elle a presque craché involontairement ces paroles entre deux reflux de sang.

Lilith venait de parler mais je ne pouvais comprendre : inconsciemment je ne voulais pas comprendre, pas avant qu’elle ne rajoute trois mots...

J’ai pourtant ouï dire cette phrase mot pour mot de la bouche même du mignon de l’Incube, il y a bien longtemps de cela, alors que je lui faisais rendre gorge…

Je l’ai entendue deux ans après la mort de la souveraine du treizième, là aussi au cours d’un combat…
Des mots annonçant un sacrifice que mes proches doivent honorer tôt ou tard.
Ici, la meurtrissure de l’âme d’une enfant (si ce n’est pas la mort de son père qui advint six ans après ces faits).

« Meus carus Guidus… »

Je suis moi-même pratiquement sans voix : tel était la teneur de la phrase que j’avais adressée à Ulrich avant le début de notre dernier affrontement…
Bien qu’à l’époque (et dans le contexte) c’était une question de répartie, mais j’aurais tout aussi bien pu en user pour la reine du treizième tant je fus surpris.
Aucun mot ne parvint à s’extirper de ma bouche.

La première question qu’on est en droit de se poser est de savoir d’où une illettrée comme Lilith a pu apprendre le latin (même s’il s’agissait d’un latin de cuisine en l’occurrence).
La deuxième étant de savoir d’où elle tenait mon surnom.

Faut croire que tout le monde connaît mon putain de diminutif (surtout ceux qui veulent la peau de mes proches en général)…

Et à fortiori, ils doivent savoir le prénom qui va avec.

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