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Marie


Par : Salmanzare
Genre : Sentimental
Statut : Terminée



Chapitre 1 : Marie


Publié le 17/08/2010 à 23:15:51 par Salmanzare

[c]Marie[/c]


Marie me fascine, assise alanguie sur le canapé rougeoyant, jambes croisées renfermant le trésor convoité. Le café crème déverse sa fumée volatile, et fait disparaître les traits de la Belle par enchantement. Me l'enlevant déjà un peu plus, seul l'émeraude étincelant et le rouge carmin restent perceptible. La succube me nargue du haut de son donjon imaginaire, sourire évanescent me renvoyant dans l'enfer de l'oubli éternel. A jamais le secret restera dit son corps interdit. Et la poitrine qui ne cesse de se soulever fait grandir mon obsession, me donne l'envie d'arracher les atours protecteurs et me blottir dans ses seins pour y mourir de plaisir.

Marie me dégoûte ! Hétaïre sans scrupules. Elle est ma Jézabel me menant droit à ma perte sous le joug de l'amour trompeur. Elle refuse de me répondre, se moque de moi puis m'ignore. Je l'aime autant que je la déteste cette femme de petite vertu ! Me tuant sans relâche avec un acharnement dépassant l'entendement dans ma lente destruction. Elle sait que je l'aime ! Je le sais. Elle le sait. Et pourtant ! Catin chimérique qui humilie mon amour tragique. Elle est ma perdition. Je le sais aussi. Et pourtant ! Je me jette à ses bras, prêt à me damner pour l'un de ses baisers. Elle m'ignore silencieusement. L'amour est au cœur de la haine !

Tous l'ont possédé devant mes yeux incrédules. Niant chaque instant les faits relatés et mutilant mon imagination, je tronque chaque instant mes souvenirs pour la parfaire. J'idéalise pour survivre, je fuis pour m'assouvir. Je lance l'anathème sur mon âme déjà meurtrie. Je deviens l'Homme fragmenté, l'éclat de conscience cherchant délivrance dans les recoins du corps estropié.

Marie m'obsède. Sa moue immuable m'assassine à chaque refus. Je me terre dans le coin de la pièce pour ne plus y penser. Elle le sait la Belle que je ne peux lui résister, que je resterais esclave de chacune de ses volontés tout en sachant que jamais mes doigts n'effleureront son dos. Marie rit, cascade cristalline qui me transperce. Je pose les mains sur mes oreilles pour ne plus rien entendre, pour m'évader loin des mes pensées. Marie me fixe amusée. Elle aime jouer de moi. M'accabler de ses reproches. Ma muse s'amuse et m'abuse douloureusement.

Marie chante pour apaiser mes tourments. Elle est belle sa voix virevoltante qui pénètre mon coeur. Elle me remplit de toute part et me fait un instant oublier mon dégoût de moi même dans sa plainte mélodique. Elle en deviendrait presque mienne dans sa douce mélopée. Et soudain elle improvise un nouvel air, une nouvelle pensée, plus triste qu'à l'accoutumé. Une poésie amère qui s'échappe des lèvres vermeilles.

Je m'endors doucement bercé par sa musique lancinante. Le café crème refroidit, laissant réapparaître son visage cruellement innocent, sa poitrine blême et sa fraîcheur enfantine. Femme fatale, vision onirique de mes songes maudits. Je l'emporte dans mon sommeil, seule victoire éphémère dont je maudirai l'existence au réveil. La nuit est le cadavre de mes espérances, la haine est au cœur de l'amour ! Je sais que si j'échoue encore, je périrais au lever du soleil.

Marie continue de me fixer. Silencieuse à présent, nue dans une vérité non dissimulée. C'en est insupportable. Je ne veux pas. Je ne peux pas. La fumée n'est plus et Marie s'offre là toute entière. Supplice de Tantale ! Elle se dérobe sans cesse à mes envies.

- Chante Marie ! Chante

Elle m'ignore. Silencieuse. Marie ne veux plus chanter. Je n'entends plus sa voix. Je l'ai perdu définitivement. Je me suis perdu.

Je pleure adossé contre le mur, le couteau entre les mains, et le regard abimé sur le canapé qui n'en finit plus de rougeoyer...


Le soleil sera mon infortune.


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