Depuis plusieurs mois je n'ai plus goût à rien, je ne dors plus, je ne vis plus. Je me regarde dans le miroir mais je ne vois rien, je ne suis plus que l'ombre de moi même tourmenté par mes propres démons, attendant patiemment que la mort vienne me chercher. Peut être est-elle timide, peut être que la mort ne veut pas de moi.
Je devrais peut être songer à forcer le destin, si elle ne veut pas venir, ce sera à moi d'aller vers elle.

Elle, je ne connais pas son prénom et je ne veux pas le connaitre, cette fille ne m'intéresse pas, les autres non plus d'ailleurs. Aujourd'hui le sourire des filles me laisse indifférent, je préfèrerais les voir se noyer dans un chagrin infini. Je la regarde, d'un oeil vide. Ses cheveux noirs, ses yeux gris, ses petites mains et son sourire... Elle ne m'intéresse pas. Elle en aime un autre, mais son amour n'est pas sincère, il ne l'a jamais été.

Je suis réveillé par des bruits de klaxons transperçant les murs de ma chambre, il est 14h. Les klaxons se font de plus en plus fort, ils se rapprochent. Je jette un regard furtif par l'étroite fenêtre. C'est un mariage, les gens rient et klaxon a tout va, ils ont l'air heureux. Je les regarde passer les uns après les autres attendant que ce vacarme finisse, les enterrements sont tellement plus beaux et silencieux.
Comme tout les jours avant de me lever j'allume la musique, j'écoute ces hommes déverser leurs émotions les plus profondes au rythme des mélodies angoissantes. Je bois leurs paroles les unes après les autres: "I look inside myself and see my heart is black", ces paroles résonnent dans ma tête. Je me met à rêver d'un monde meilleurs où toutes formes de souffrance n'auraient pas leurs places. Dans ce monde, je la vois Elle avec ses cheveux noirs, ses yeux gris, ses petites mains et son sourire, sauf que cette fois, son sourire serait sincère. Je sens une larme couler le long de ma joue, je ne la retiens pas, je la laisse mourir. J'aurai tellement aimé être cette larme.

Les jours passent et se ressemblent, je discute avec Elle. Je ne suis pas bavard alors je me contente de l'écouter. Elle semble triste, Elle cherche du réconfort dans mes paroles. Elle veut être aimée, avoir le monde à ses pieds. Mais à cet instant elle ne contrôle rien, tout s'effondre autour d'elle, elle ne croit plus en rien, elle se déteste. Tout semble si noir quand tu te sens seul. Je voudrais lui dire à quel point ce monde est beau et que sa douleur n'a pas lieu d'être, mais je ne veux pas lui mentir. Je voudrais lui dire à quel point elle est belle, mais je n'y arrive pas. J'ai peur de l'aimer. Les gens ont peur de leurs émotions, ils essaient de les cacher, de les ignorer. Ils ont peur de la réalité, ils ont peur d'être confrontés à leur propre réalité.
Je l'écoute, je partage son malheur. Les filles tristes sont tellement belles et sincères.

Je m'allonge à coté d'elle, j'ai beaucoup de choses à lui dire, mais pourtant aucun son ne sort de ma bouche. Elle pose délicatement sa tête sur mon épaule pour y trouver le peu de réconfort que j'ai à lui donner, je voudrais que cet instant soit éternel. Je la regarde partir, aspirée par la nuit, elle ne se retourne pas, comme si elle abandonnait un animal blessé. J'aurai aimé regarder une dernière fois ses cheveux noirs, ses yeux gris, ses petites mains et son sourire. Elle en aime un autre, mais son amour n'est pas sincère et il ne le sera jamais.

FIN