Kaileena, l'Impératrice des Papillons
Par : SyndroMantic
Genre : Fantastique , Horreur
Status : Terminée
Note :
Chapitre 26
Le Palais des Zervaniste (2ème suite)
Publié le 26/09/10 à 19:28:06 par SyndroMantic
[au cas où c'te fic intéresse encore quelqu'un... ]
Quinze ans...
Je me sentis prise de vertige, et revenai lourdement à la réalité. Devant moi irradiaient une flopée de pâles étoiles diffuses dans l'air. Ma tête pesait sur un oreiller d'herbes piquant mes cheveux entremêlés. Pendant que je me réveillais, je vis le brouillard lumineux se désagréger dans mes yeux. Je les clignai plusieurs fois. Ma vue se clarifia et je pus enfin distinguer le vrai ciel face à mon regard miné. Une quantité de merveilleuses constellations brillait dans la nuit. Mais je me rendis bien vite compte à leurs mouvements que ce n'en étaient pas de véritables. Un souffle familier les faisait danser sur mon âme fatiguée. Je me relevai gauchement malgré une respiration pénible et me tint en équilibre, au bord du précipice où m'avaient laissée les sables. Ces derniers, que j'avais justement pris pour des astres, venaient à l'instant de me quitter, voguant hasardement parmi les herbes couchées, et s'étendant comme une nappe tissée de fil d?or sur ce lit végétal. Le sommeil est parfois un besoin qu'il faut stimuler par des artifices divers. Bien sûr, le mien n'était pas dû à une quelconque douceur de la terre sauvage. La vision que je venais de connaître avait nécessité une détente bien plus agréable de mes sens. Pour cela, les sables avaient su trouver l'origine même de notre passivité : le don de Rappel.
Le Palais des Zervanistes... Dihak, tu avais presque le même âge que moi... Zohak, ce que tu étais triste, lorsque je te vis... et Jehak, as-tu vraiment pu la tuer... ? Elle... Maman... Je sentis une crispation dans mes sinus, des larmes prêtes à couler, mais je les reniflai immédiatement. C'était trop idiot. A quoi bon s'apitoyer ? Tout cela n'était qu'un rêve. Et le parallèle qu'on en fait avec la réalité est toujours relativement confus, même lorsqu'il s'agit de souvenirs. Pourtant, j'étais sûre d'avoir déjà vécu cela. J'avais toujours grandi avec cette mémoire avortée, la berçant au fil de mes années pré-sablières. Zohak ne m'en avait jamais parlé, et maintenant que j'avais entrebâillé le couvercle, je comprenais pourquoi. Il me fallut un certain délai pour faire le point de ma nouvelle découverte. Du peu que j'en avais retenu à mon réveil, ma naissance fut l'un des événements le plus macabre de toute ma vie, et malgré cela tous les prêtres qui y avaient assisté paraissaient comme des coqs en pâte. Malgré une terreur générale presque physique, ni Jehak que j'avais longtemps connu, ni Enhak qui semblait le plus modéré, ni même Dihak vierge de toute corruption... aucun d'eux n'avait su instaurer la moindre parcelle de vertu dans cette horrible scène, et la dignité devait lors être inconnue. Ces hommes étaient inhumains, et précisément dans leur traitement des femmes. Pour autant, j'avais beau être moi-même une de ces femmes... c'était comme si j'appartenais aussi à ce monde. Comme si je me fascinais pour lui, lui qui m'avait fait naître quelque fût le reste sous cette nuit brumeuse.
Heureusement, le ciel avait bien changé, depuis. Celui que j'admirais maintenant n'avait jamais été aussi limpide. Les étoiles, que je pouvais enfin percevoir au milieu de leurs copies, avaient presque du mal à resurgir de cette vitre bleue. Car elle avait déjà acquis sa couleur, lorsque je me réveillai. L'horizon azuré était encore pire : l'aube était prête à y faire irruption. Moi qui avais eu de la peine à la voir retarder durant cette nuitée interminable, voilà que le jour m'effrayait plus que tout. C'était comme si le soleil avait remarqué la fraude que j'avais faite sur sa course. Le sentiment de foyer que j'avais retrouvé dans mon temple natal n'avait su effacer de mon esprit l'erreur qu'était ma capitulation aux sables. Cette culpabilité me rappela celle de me trouver en pleine jungle, à plusieurs kilomètres de mon lit sécurisé, et au sein duquel Zohak rageait peut-être déjà de ne pas me trouver. Il me fallait au plus vite rentrer chez moi. Celui du présent. Le digne et vertueux asile de ma survie. Je secouai ma tête un peu somnolente et couru hâtivement le long du versant ouest de la montagne.
Bien vite, je débarquai sur la plage, à coté des falaises. Au loin, j'aperçus mon banc de cocotiers et me rappelai les noix que j'y avais laissées. Mon ventre commençait déjà à se tortillait de soif et de faim. Faim de déjeuner. Faim de respirer à nouveau. Faim d'avenir. Et faim d'encore quelque chose de plus... Au rythme de mes pas engagés, je contemplais le sable qui s'étendait sur la lagune. Quelle magnifique couleur... J'aurais presque voulu m'y blottir et dormir éternellement. Qu'importe l'envahissante mer qui s'acharnait nuit et jour sur sa frêle nature. Les pieds enracinés dans son velours, je me sentais à l'abri de tout. Rien ne pouvait m'atteindre. Et, chose incroyable : je pus même affronter le regard des flots sans vaciller un instant. J'étais "guérie". Encore une bonne nouvelle dont j'aurais volontiers fait part à Zohak, autour du délicieux repas qu'il allait bientôt me préparer. A condition pour cela qu'il eut soupçonné si ce n'était juste une fois que je pusse souffrir d'un quelconque mal-être. Peut-être verrait-il cependant un changement dans mon humeur, lorsqu'il m'emmènerait plus tard à la pêche... C'est étrange, la manière dont certaines situations du quotidien peuvent prendre une toute autre allure, selon la certitude qu'on a de leur approche. Il est vrai que maintenant, cette question pour moi ne se pose plus.
Je me penchai et m'emparai d'une coquille fragile. Je la fêlai sur un rocher et en ingurgitai son breuvage. Puis, tout en buvant, je continuais de marcher vers notre refuge. 5 heures 17. Zohak dormait probablement toujours comme un loir. Lui qui était si peureux, il était loin de pouvoir affronter le périple que j'avais moi-même vécu. Après tout, étant donné toutes ces années passées sous le même toit, le lien qui nous unissait m'autorisait un certain esprit de compétitivité vis-à-vis de nos deux parcours. Nous étions les deux mêmes naufragés des zervanistes. Les deux mêmes exilés. Lui aussi n'était plus à sa place. De plus, son bannissement était vraisemblablement beaucoup plus douloureux, compte tenu de toutes les expériences qu'il avait pu vivre avec ses frères. Toutefois, il semblait d'après ma vision que mes impressions étaient justifiées, à propos du rejet à son encontre de la part de ses camarades. Apparemment, pas un seul n'avait témoigné d'une quelconque sympathie pour lui et d'autres étaient près de tentations criminelles. Je n'avais pas compris quelle pouvait être cette "affaire" dont il était coupable, ni de quel Reihak il s'agissait. Et tout cela m'intriguait. J'avais envie de connaître enfin la raison de tout ce qui avait pu ponctué les rapports de Zohak avec ses compères. Le pourquoi de sa démarcation envers son ancienne fonction.
Je regagnai le campement vingt-trois minutes plus tard. Je m'introduis dans le trou de la palissade et avançai sur la pointe des pieds au milieu des restes de la veille. Comme je l'avais souhaité, Zohak ronflait dans un constant sommeil profond, pendant que je contournais sa couche. Je m'accroupis précautionneusement dans mes draps, savourant par avance le toucher de mon oreiller moelleux, digne de ce nom. Allongée sur mon matelas, je songeais à nouveau à cette incroyable aventure que je venais de vivre, et m'en remémorais avidement les faits. Il y avait encore d'autres points d'interrogation que je voulais éradiquer. Je n'avais pas saisi tout le sens de leur conversation. Quel deuil Jehak devait-il faire ? Quelles étaient les fautes dont on accablait Zohak ? Quelle était l'origine de leur endémique rivalité ? Et par-dessus tout, il y avait une chose que j'aurais voulu voir m'être expliquée :
Qu'est-ce que pouvait bien être un "pédaufile" ?
Quinze ans...
Je me sentis prise de vertige, et revenai lourdement à la réalité. Devant moi irradiaient une flopée de pâles étoiles diffuses dans l'air. Ma tête pesait sur un oreiller d'herbes piquant mes cheveux entremêlés. Pendant que je me réveillais, je vis le brouillard lumineux se désagréger dans mes yeux. Je les clignai plusieurs fois. Ma vue se clarifia et je pus enfin distinguer le vrai ciel face à mon regard miné. Une quantité de merveilleuses constellations brillait dans la nuit. Mais je me rendis bien vite compte à leurs mouvements que ce n'en étaient pas de véritables. Un souffle familier les faisait danser sur mon âme fatiguée. Je me relevai gauchement malgré une respiration pénible et me tint en équilibre, au bord du précipice où m'avaient laissée les sables. Ces derniers, que j'avais justement pris pour des astres, venaient à l'instant de me quitter, voguant hasardement parmi les herbes couchées, et s'étendant comme une nappe tissée de fil d?or sur ce lit végétal. Le sommeil est parfois un besoin qu'il faut stimuler par des artifices divers. Bien sûr, le mien n'était pas dû à une quelconque douceur de la terre sauvage. La vision que je venais de connaître avait nécessité une détente bien plus agréable de mes sens. Pour cela, les sables avaient su trouver l'origine même de notre passivité : le don de Rappel.
Le Palais des Zervanistes... Dihak, tu avais presque le même âge que moi... Zohak, ce que tu étais triste, lorsque je te vis... et Jehak, as-tu vraiment pu la tuer... ? Elle... Maman... Je sentis une crispation dans mes sinus, des larmes prêtes à couler, mais je les reniflai immédiatement. C'était trop idiot. A quoi bon s'apitoyer ? Tout cela n'était qu'un rêve. Et le parallèle qu'on en fait avec la réalité est toujours relativement confus, même lorsqu'il s'agit de souvenirs. Pourtant, j'étais sûre d'avoir déjà vécu cela. J'avais toujours grandi avec cette mémoire avortée, la berçant au fil de mes années pré-sablières. Zohak ne m'en avait jamais parlé, et maintenant que j'avais entrebâillé le couvercle, je comprenais pourquoi. Il me fallut un certain délai pour faire le point de ma nouvelle découverte. Du peu que j'en avais retenu à mon réveil, ma naissance fut l'un des événements le plus macabre de toute ma vie, et malgré cela tous les prêtres qui y avaient assisté paraissaient comme des coqs en pâte. Malgré une terreur générale presque physique, ni Jehak que j'avais longtemps connu, ni Enhak qui semblait le plus modéré, ni même Dihak vierge de toute corruption... aucun d'eux n'avait su instaurer la moindre parcelle de vertu dans cette horrible scène, et la dignité devait lors être inconnue. Ces hommes étaient inhumains, et précisément dans leur traitement des femmes. Pour autant, j'avais beau être moi-même une de ces femmes... c'était comme si j'appartenais aussi à ce monde. Comme si je me fascinais pour lui, lui qui m'avait fait naître quelque fût le reste sous cette nuit brumeuse.
Heureusement, le ciel avait bien changé, depuis. Celui que j'admirais maintenant n'avait jamais été aussi limpide. Les étoiles, que je pouvais enfin percevoir au milieu de leurs copies, avaient presque du mal à resurgir de cette vitre bleue. Car elle avait déjà acquis sa couleur, lorsque je me réveillai. L'horizon azuré était encore pire : l'aube était prête à y faire irruption. Moi qui avais eu de la peine à la voir retarder durant cette nuitée interminable, voilà que le jour m'effrayait plus que tout. C'était comme si le soleil avait remarqué la fraude que j'avais faite sur sa course. Le sentiment de foyer que j'avais retrouvé dans mon temple natal n'avait su effacer de mon esprit l'erreur qu'était ma capitulation aux sables. Cette culpabilité me rappela celle de me trouver en pleine jungle, à plusieurs kilomètres de mon lit sécurisé, et au sein duquel Zohak rageait peut-être déjà de ne pas me trouver. Il me fallait au plus vite rentrer chez moi. Celui du présent. Le digne et vertueux asile de ma survie. Je secouai ma tête un peu somnolente et couru hâtivement le long du versant ouest de la montagne.
Bien vite, je débarquai sur la plage, à coté des falaises. Au loin, j'aperçus mon banc de cocotiers et me rappelai les noix que j'y avais laissées. Mon ventre commençait déjà à se tortillait de soif et de faim. Faim de déjeuner. Faim de respirer à nouveau. Faim d'avenir. Et faim d'encore quelque chose de plus... Au rythme de mes pas engagés, je contemplais le sable qui s'étendait sur la lagune. Quelle magnifique couleur... J'aurais presque voulu m'y blottir et dormir éternellement. Qu'importe l'envahissante mer qui s'acharnait nuit et jour sur sa frêle nature. Les pieds enracinés dans son velours, je me sentais à l'abri de tout. Rien ne pouvait m'atteindre. Et, chose incroyable : je pus même affronter le regard des flots sans vaciller un instant. J'étais "guérie". Encore une bonne nouvelle dont j'aurais volontiers fait part à Zohak, autour du délicieux repas qu'il allait bientôt me préparer. A condition pour cela qu'il eut soupçonné si ce n'était juste une fois que je pusse souffrir d'un quelconque mal-être. Peut-être verrait-il cependant un changement dans mon humeur, lorsqu'il m'emmènerait plus tard à la pêche... C'est étrange, la manière dont certaines situations du quotidien peuvent prendre une toute autre allure, selon la certitude qu'on a de leur approche. Il est vrai que maintenant, cette question pour moi ne se pose plus.
Je me penchai et m'emparai d'une coquille fragile. Je la fêlai sur un rocher et en ingurgitai son breuvage. Puis, tout en buvant, je continuais de marcher vers notre refuge. 5 heures 17. Zohak dormait probablement toujours comme un loir. Lui qui était si peureux, il était loin de pouvoir affronter le périple que j'avais moi-même vécu. Après tout, étant donné toutes ces années passées sous le même toit, le lien qui nous unissait m'autorisait un certain esprit de compétitivité vis-à-vis de nos deux parcours. Nous étions les deux mêmes naufragés des zervanistes. Les deux mêmes exilés. Lui aussi n'était plus à sa place. De plus, son bannissement était vraisemblablement beaucoup plus douloureux, compte tenu de toutes les expériences qu'il avait pu vivre avec ses frères. Toutefois, il semblait d'après ma vision que mes impressions étaient justifiées, à propos du rejet à son encontre de la part de ses camarades. Apparemment, pas un seul n'avait témoigné d'une quelconque sympathie pour lui et d'autres étaient près de tentations criminelles. Je n'avais pas compris quelle pouvait être cette "affaire" dont il était coupable, ni de quel Reihak il s'agissait. Et tout cela m'intriguait. J'avais envie de connaître enfin la raison de tout ce qui avait pu ponctué les rapports de Zohak avec ses compères. Le pourquoi de sa démarcation envers son ancienne fonction.
Je regagnai le campement vingt-trois minutes plus tard. Je m'introduis dans le trou de la palissade et avançai sur la pointe des pieds au milieu des restes de la veille. Comme je l'avais souhaité, Zohak ronflait dans un constant sommeil profond, pendant que je contournais sa couche. Je m'accroupis précautionneusement dans mes draps, savourant par avance le toucher de mon oreiller moelleux, digne de ce nom. Allongée sur mon matelas, je songeais à nouveau à cette incroyable aventure que je venais de vivre, et m'en remémorais avidement les faits. Il y avait encore d'autres points d'interrogation que je voulais éradiquer. Je n'avais pas saisi tout le sens de leur conversation. Quel deuil Jehak devait-il faire ? Quelles étaient les fautes dont on accablait Zohak ? Quelle était l'origine de leur endémique rivalité ? Et par-dessus tout, il y avait une chose que j'aurais voulu voir m'être expliquée :
Qu'est-ce que pouvait bien être un "pédaufile" ?
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