Je ne dormirai pas cette nuit
Par : Salmanzare
Genre : Réaliste , Sentimental
Status : Terminée
Note :
Chapitre 1
Publié le 28/09/17 à 00:38:59 par Salmanzare
C’était un soir de nostalgie rugueuse. On était déjà retombé dans cette période de lumière déclinante et prescriptions à tout va d’ampoules de Vitamine C. Allez Doc, allonge l’attirail, faut lutter contre la dépression hivernale. Moi cette saloperie venait de me cogner la gueule juste au sortir de ma réunion. J’avais bifurqué vers la machine à café pour pas retourner trop vite au bureau. Je l’avais pris très serré et sans sucre afin de me rappeler que j’aimais pas ça. Pas loin de là, je voyais la nana de l’accueil jouer avec une mèche de cheveux, les yeux dans le vague, à se dire sans doute qu’elle serait mieux ailleurs. Mais bon, là il était encore tôt et fallait qu’elle joue le jeu jusqu’à la fin. Je lui ai souri sans qu’elle le voit.
Je me suis rassis sagement à ma place. J’ai rangé quelques factures en écoutant l’ancien Renaud qu’était pas encore trop con alors. J’ai pensé à une rime qui un jour me servirait peut-être, je l’ai vite noté dans mon petit carnet. Puis je suis retourné à la paperasse. J’avais la nostalgie qui continuait à me chatouiller à mesure que l’heure avançait. Je sentais bien que j’étais plus très productif et que le dossier avancerait plus. De toute façon on arrivait au moment où les gens se sentaient impatient de se casser pour aller vivre leur vie de famille. Moi je trainais parce que j’avais pas vraiment d’endroit où rentrer. Et puis la vie de famille, ça semblait très brumeux.
Je suis resté seul un moment avec ma nostalgie sous le bras dans mon bureau enfin silencieux. A égrener les minutes comme on écosse un haricot. Lentement, sans plus vraiment réfléchir. Un bruit d’aspirateur a rempli l’espace. J’ai terminé le café froid fissa et éteint l’ordinateur avant d’esquisser un signe de tête à l’homme de ménage. L’heure de mettre les voiles.
Au bout du couloir, je suis retombé sur la nana de l’accueil qui semblait fatigué. Elle rangeait ses affaires dans son petit sac à main méthodiquement. C’était mignon à voir.
- Hey.
Elle a relevé les yeux vers moi sans un mot. Juste une tête de « qu’est-ce que tu me veux ? ».
- Tu te souviens de la première chose que je t’ai dite quand je t’ai rencontré ?
Noé a haussé les épaules. Comme je disais rien et qu’elle voyait que j’attendais quelque chose, elle a pris sur elle de répondre avec une pointe de lassitude bien sentie.
- Non... C’était quoi ?
- Bonjour je crois. Ou salut. Un truc dans le genre je pense.
Elle m’a regardé sceptique. Sans trop savoir quoi répondre. Je pense qu’elle se demandait surtout si j’étais pas juste con.
- Allez bonne soirée.
- A toi aussi.
Il était tard pour être encore dans la boite mais beaucoup trop tôt pour se coucher. Du coup trois SMS plus tard, j’ai rejoint les copains. Je me suis assis en bout de table pour pouvoir regarder toute la bande s’exprimer. C’était toujours Martin et Louise qui gueulaient les plus forts. Adam qui comptait les points et Hervé qui se marrait comme une baleine asthmatique. Ça faisait un bruit ! Mais le genre qu’on aime bien, ces temps-ci c’était un peu devenu la bande son de ma vie. Les gens de l’autre bout je les connaissais pas bien, mais au vu de la descente, pas de doute que je finirais par les aimer.
A côté de moi la peinture du mur était écaillée. Ça m’a bloqué. Alors entre deux verres, je grattais des morceaux pour les faire tomber. La politique c’est naze ? Un morceau de mur en moins. J’ai vu ce joli film slovaque sur la misère, c’est incroyable. Un autre morceau. Parfois je donnais un coup de pied discret pour les envoyer sous la banquette avant le barman se ramène. Je sais pas si j’aurais assumé devant lui de dépiauter sauvagement son rade.
Comme le temps file toujours, il emmène les gens avec lui. Et vers la fin, on était pas bien nombreux à rester autour de la table. Y a ce mec que je connaissais toujours pas qui m’a demandé pourquoi je mouftais pas des masses depuis le début de la soirée.
- J’aime bien écouter. Et puis je sais pas si ça a toujours un sens.
- Tu sais, on a pas forcément besoin que ça raconte vraiment quelque chose. Parfois, faut juste dérouler.
Ça m’a plu alors je lui ai offert une bière et je lui ai raconté une histoire sans sens et sans but. Juste pour occuper l’espace sonore, me rappeler du son de ma voix et chercher une mélodie. On s’est quitté sur le dernier métro. Comme j’ai la poisse, j’ai raté ma correspondance.
J’ai un peu déambulé au hasard à chercher un Noctilien qui pourrait m’amener chez un pote. Je me suis dit que c’était naze de vivre sans toit mais qu’au moins ça faisait voir le ciel. Eddy de Pretto chantonnait dans mes oreilles malgré la batterie qui menaçait de lâcher à tout moment. Je pensais combien Corbac me manquait. A ces amis qu’étaient plus là, ceux qui partiraient bientôt et ceux qui revenaient pas.
C’est là qu’une étoile rousse a fusé devant moi. Hurlant à plein poumons qu’elle voulait crever et que ça devait être maintenant et pas plus tard. Qu’il y avait urgence en la demeure ! Elle a remarqué que j’étais là.
- Tu viens mourir avec moi ?
Sans attendre ma réponse, elle s’est remise à marcher au milieu du boulevard Sébastopol à contresens. J’ai senti des picotements dans la nuque. Puis une décharge électrique qui m’a sorti de ma torpeur. Parce que c’est le genre de truc qui laisse pas indifférent. J’ai saisi la main de la rouquine suicidaire pour l’écarter de la route.
- Tu fais quoi Rouxie ?
- Je veux mourir ! Laisse-moi.
Mais j’ai gardé sa main bien fermement. Elle s’est mise à m’insulter dans une langue que je pigeais pas mais qui sonnait slave. Un flot qui s’arrêtait plus puis une gifle pour me faire réagir. J’ai regardé ses grands yeux verts qui me quittaient plus. Et la nostalgie m’a refilé un coup de pied dans le bide en deux-deux. Je me suis souvenu que le nord natal me manquait. Ces gueules cassées aux yeux clairs, c’est un truc qui manquait ici. Dans le coin, c’était bien plus sombre. Comme si Paname brumait ton regard.
Comme elle continuait à me frapper, j’ai décidé de remonter la rue deux pas devant elle.
- Très bien, j’ai dit ! Faut bien un moment pour tout. Allons mourir.
Je me suis retourné pour lui lancer le défi. Elle s’y attendait pas je crois mais elle s’est approchée. Alors on s’est remis à remonter le boulevard en se tenant la main ensemble entre les voitures qui klaxonnaient. Un mec nous a traité de connards. Elle m’a tiré vers le trottoir. C’est vrai qu’on devait passer pour des sacrés connards.
- Pourquoi tu veux mourir avec moi.
- Je veux pas. Mais peut-être que c’était le moment ?
- Mais t’es jeune encore.
- Toi aussi.
- Moi c’est pas pareil.
Je lui ai pas demandé pourquoi c’était pas pareil. J’avais peur d’en apprendre trop. Je repensais à Corbac. Je pensais à où je pourrais dormir plus tard et à la maladie qui me ronge chaque jour. Rouxie semblait enfin plus calme. Du coup j’ai rien dit de tout ça. J’ai pensé que le Chat devait être pas loin et qu’à rester là, il finirait par enfin me chopper. Fallait rester en mouvement.
- Rentre chez toi Rouxie.
- Toi aussi.
- J’ai pas de chez moi.
Finalement ça m’a échappé.
- Comment ça, elle a demandé inquiète.
- Je galère un peu mais rien de grave. Je vais aller taper chez un ami.
- Il est deux heures…
- On verra si j’ai de la chance.
- Donne ton portable, je vais appeler tes parents. Si ta mère savait ça.
J’ai eu envie de me marrer à l’idée que la rouquine incendiaire soit celle qui veuille appeler mes parents pour leur expliquer ma condition. Elle a tenté de récupérer mon téléphone dans ma poche mais j’ai fait un pas en arrière en tenant ses mains.
- Je peux pas t’accueillir chez moi, elle a dit dans un souffle.
- Ça tombe bien, je te le demande pas.
- Appelle ton ami.
- Plus tard, là il doit dormir.
- Je peux pas t’héberger.
Et dans le creux de ses mots, je devine qu’il y a un garçon qui doit l’attendre dans son lit. Que ramener un étranger après avoir voulu se foutre en l’air ne sonne pas comme la meilleure idée. Maintenant qu’elle va mieux, je lui dis que j’aimerais bien la revoir. Elle dit qu’elle aussi. On sait que c’est faux mais on fait semblant d’y croire. Juste histoire de faire durer la rencontre encore quelques instants. Parce qu’à frôler la mort, on s’est senti vivant chacun. C’est pas un truc qu’on pourra repartager, on le sent bien. J’ai lâché ses mains après sa promesse de rentrer.
- Je voulais pas mourir tu sais, elle dit avant de disparaître dans son Uber.
Pis j’ai vu un bus apparaître au coin de la rue. C’était forcément un signe. J’ai couru pour l’attraper, cogné à la vitre et le chauffeur a décidé d’être cool. Je l’ai remercié.
Je suis allé m'affaler vers le fond. En relevant la tête, j’ai vu une petite brune juste devant moi. Elle aussi semblait avoir vécu tout ce qu'il y à vivre. Le regard empreint d'une nostalgie sans pareille où on se dit que maintenant on attend la fin. Et puis des paillettes plein les joues entre les coulées de larmes. Encore une. Sa tête posée contre le carreau à chercher les étoiles sans même se rendre compte qu’elle les a sur les joues. J'ai hésité à lui parler et lui demander d'où elle venait. J’ai fermé ma gueule pour pas briser le moment. Parfois, c’est mieux de pas connaître l’histoire.
En sortant du bus, j’ai levé la tête pour tenter de les voir à mon tour. Y a pas si longtemps que ça, j’en avais offert une à une amie. Je me suis rappelé que Paname grisait tout et que parfois ça devenait difficile de se souvenir qu’elles sont encore là au-dessus de nous.
J’ai marché jusque chez Adam. Sans musique parce mon téléphone avait décidé de rendre les armes avant moi.
La clef était sous le paillasson, j’ai ouvert doucement et je me suis faufilé sans un bruit dans le lit. C’était cool d’avoir un ami présent.
J’ai sorti de ma poche un crayon et j’ai dessiné une petite étoile à côté de l’oreiller.
Je me suis rassis sagement à ma place. J’ai rangé quelques factures en écoutant l’ancien Renaud qu’était pas encore trop con alors. J’ai pensé à une rime qui un jour me servirait peut-être, je l’ai vite noté dans mon petit carnet. Puis je suis retourné à la paperasse. J’avais la nostalgie qui continuait à me chatouiller à mesure que l’heure avançait. Je sentais bien que j’étais plus très productif et que le dossier avancerait plus. De toute façon on arrivait au moment où les gens se sentaient impatient de se casser pour aller vivre leur vie de famille. Moi je trainais parce que j’avais pas vraiment d’endroit où rentrer. Et puis la vie de famille, ça semblait très brumeux.
Je suis resté seul un moment avec ma nostalgie sous le bras dans mon bureau enfin silencieux. A égrener les minutes comme on écosse un haricot. Lentement, sans plus vraiment réfléchir. Un bruit d’aspirateur a rempli l’espace. J’ai terminé le café froid fissa et éteint l’ordinateur avant d’esquisser un signe de tête à l’homme de ménage. L’heure de mettre les voiles.
Au bout du couloir, je suis retombé sur la nana de l’accueil qui semblait fatigué. Elle rangeait ses affaires dans son petit sac à main méthodiquement. C’était mignon à voir.
- Hey.
Elle a relevé les yeux vers moi sans un mot. Juste une tête de « qu’est-ce que tu me veux ? ».
- Tu te souviens de la première chose que je t’ai dite quand je t’ai rencontré ?
Noé a haussé les épaules. Comme je disais rien et qu’elle voyait que j’attendais quelque chose, elle a pris sur elle de répondre avec une pointe de lassitude bien sentie.
- Non... C’était quoi ?
- Bonjour je crois. Ou salut. Un truc dans le genre je pense.
Elle m’a regardé sceptique. Sans trop savoir quoi répondre. Je pense qu’elle se demandait surtout si j’étais pas juste con.
- Allez bonne soirée.
- A toi aussi.
Il était tard pour être encore dans la boite mais beaucoup trop tôt pour se coucher. Du coup trois SMS plus tard, j’ai rejoint les copains. Je me suis assis en bout de table pour pouvoir regarder toute la bande s’exprimer. C’était toujours Martin et Louise qui gueulaient les plus forts. Adam qui comptait les points et Hervé qui se marrait comme une baleine asthmatique. Ça faisait un bruit ! Mais le genre qu’on aime bien, ces temps-ci c’était un peu devenu la bande son de ma vie. Les gens de l’autre bout je les connaissais pas bien, mais au vu de la descente, pas de doute que je finirais par les aimer.
A côté de moi la peinture du mur était écaillée. Ça m’a bloqué. Alors entre deux verres, je grattais des morceaux pour les faire tomber. La politique c’est naze ? Un morceau de mur en moins. J’ai vu ce joli film slovaque sur la misère, c’est incroyable. Un autre morceau. Parfois je donnais un coup de pied discret pour les envoyer sous la banquette avant le barman se ramène. Je sais pas si j’aurais assumé devant lui de dépiauter sauvagement son rade.
Comme le temps file toujours, il emmène les gens avec lui. Et vers la fin, on était pas bien nombreux à rester autour de la table. Y a ce mec que je connaissais toujours pas qui m’a demandé pourquoi je mouftais pas des masses depuis le début de la soirée.
- J’aime bien écouter. Et puis je sais pas si ça a toujours un sens.
- Tu sais, on a pas forcément besoin que ça raconte vraiment quelque chose. Parfois, faut juste dérouler.
Ça m’a plu alors je lui ai offert une bière et je lui ai raconté une histoire sans sens et sans but. Juste pour occuper l’espace sonore, me rappeler du son de ma voix et chercher une mélodie. On s’est quitté sur le dernier métro. Comme j’ai la poisse, j’ai raté ma correspondance.
J’ai un peu déambulé au hasard à chercher un Noctilien qui pourrait m’amener chez un pote. Je me suis dit que c’était naze de vivre sans toit mais qu’au moins ça faisait voir le ciel. Eddy de Pretto chantonnait dans mes oreilles malgré la batterie qui menaçait de lâcher à tout moment. Je pensais combien Corbac me manquait. A ces amis qu’étaient plus là, ceux qui partiraient bientôt et ceux qui revenaient pas.
C’est là qu’une étoile rousse a fusé devant moi. Hurlant à plein poumons qu’elle voulait crever et que ça devait être maintenant et pas plus tard. Qu’il y avait urgence en la demeure ! Elle a remarqué que j’étais là.
- Tu viens mourir avec moi ?
Sans attendre ma réponse, elle s’est remise à marcher au milieu du boulevard Sébastopol à contresens. J’ai senti des picotements dans la nuque. Puis une décharge électrique qui m’a sorti de ma torpeur. Parce que c’est le genre de truc qui laisse pas indifférent. J’ai saisi la main de la rouquine suicidaire pour l’écarter de la route.
- Tu fais quoi Rouxie ?
- Je veux mourir ! Laisse-moi.
Mais j’ai gardé sa main bien fermement. Elle s’est mise à m’insulter dans une langue que je pigeais pas mais qui sonnait slave. Un flot qui s’arrêtait plus puis une gifle pour me faire réagir. J’ai regardé ses grands yeux verts qui me quittaient plus. Et la nostalgie m’a refilé un coup de pied dans le bide en deux-deux. Je me suis souvenu que le nord natal me manquait. Ces gueules cassées aux yeux clairs, c’est un truc qui manquait ici. Dans le coin, c’était bien plus sombre. Comme si Paname brumait ton regard.
Comme elle continuait à me frapper, j’ai décidé de remonter la rue deux pas devant elle.
- Très bien, j’ai dit ! Faut bien un moment pour tout. Allons mourir.
Je me suis retourné pour lui lancer le défi. Elle s’y attendait pas je crois mais elle s’est approchée. Alors on s’est remis à remonter le boulevard en se tenant la main ensemble entre les voitures qui klaxonnaient. Un mec nous a traité de connards. Elle m’a tiré vers le trottoir. C’est vrai qu’on devait passer pour des sacrés connards.
- Pourquoi tu veux mourir avec moi.
- Je veux pas. Mais peut-être que c’était le moment ?
- Mais t’es jeune encore.
- Toi aussi.
- Moi c’est pas pareil.
Je lui ai pas demandé pourquoi c’était pas pareil. J’avais peur d’en apprendre trop. Je repensais à Corbac. Je pensais à où je pourrais dormir plus tard et à la maladie qui me ronge chaque jour. Rouxie semblait enfin plus calme. Du coup j’ai rien dit de tout ça. J’ai pensé que le Chat devait être pas loin et qu’à rester là, il finirait par enfin me chopper. Fallait rester en mouvement.
- Rentre chez toi Rouxie.
- Toi aussi.
- J’ai pas de chez moi.
Finalement ça m’a échappé.
- Comment ça, elle a demandé inquiète.
- Je galère un peu mais rien de grave. Je vais aller taper chez un ami.
- Il est deux heures…
- On verra si j’ai de la chance.
- Donne ton portable, je vais appeler tes parents. Si ta mère savait ça.
J’ai eu envie de me marrer à l’idée que la rouquine incendiaire soit celle qui veuille appeler mes parents pour leur expliquer ma condition. Elle a tenté de récupérer mon téléphone dans ma poche mais j’ai fait un pas en arrière en tenant ses mains.
- Je peux pas t’accueillir chez moi, elle a dit dans un souffle.
- Ça tombe bien, je te le demande pas.
- Appelle ton ami.
- Plus tard, là il doit dormir.
- Je peux pas t’héberger.
Et dans le creux de ses mots, je devine qu’il y a un garçon qui doit l’attendre dans son lit. Que ramener un étranger après avoir voulu se foutre en l’air ne sonne pas comme la meilleure idée. Maintenant qu’elle va mieux, je lui dis que j’aimerais bien la revoir. Elle dit qu’elle aussi. On sait que c’est faux mais on fait semblant d’y croire. Juste histoire de faire durer la rencontre encore quelques instants. Parce qu’à frôler la mort, on s’est senti vivant chacun. C’est pas un truc qu’on pourra repartager, on le sent bien. J’ai lâché ses mains après sa promesse de rentrer.
- Je voulais pas mourir tu sais, elle dit avant de disparaître dans son Uber.
Pis j’ai vu un bus apparaître au coin de la rue. C’était forcément un signe. J’ai couru pour l’attraper, cogné à la vitre et le chauffeur a décidé d’être cool. Je l’ai remercié.
Je suis allé m'affaler vers le fond. En relevant la tête, j’ai vu une petite brune juste devant moi. Elle aussi semblait avoir vécu tout ce qu'il y à vivre. Le regard empreint d'une nostalgie sans pareille où on se dit que maintenant on attend la fin. Et puis des paillettes plein les joues entre les coulées de larmes. Encore une. Sa tête posée contre le carreau à chercher les étoiles sans même se rendre compte qu’elle les a sur les joues. J'ai hésité à lui parler et lui demander d'où elle venait. J’ai fermé ma gueule pour pas briser le moment. Parfois, c’est mieux de pas connaître l’histoire.
En sortant du bus, j’ai levé la tête pour tenter de les voir à mon tour. Y a pas si longtemps que ça, j’en avais offert une à une amie. Je me suis rappelé que Paname grisait tout et que parfois ça devenait difficile de se souvenir qu’elles sont encore là au-dessus de nous.
J’ai marché jusque chez Adam. Sans musique parce mon téléphone avait décidé de rendre les armes avant moi.
La clef était sous le paillasson, j’ai ouvert doucement et je me suis faufilé sans un bruit dans le lit. C’était cool d’avoir un ami présent.
J’ai sorti de ma poche un crayon et j’ai dessiné une petite étoile à côté de l’oreiller.
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