Symphony of Hollow
Par : Ravy~
Genre : Fantastique
Status : C'est compliqué
Note :
Chapitre 1
Au coeur de la Nuit
Publié le 27/01/17 à 10:24:31 par Ravy~
Il n'y avait plus un bruit sur le village valaque. La nuit était tombée depuis longtemps. Les hommes dormaient, assommés par le dur labeur qui les avaient éreinté dans la journée. Les femmes se reposaient après avoir géré tout le reste : enfants, ménage et de quoi sustenter ces messieurs fatigués de leurs besognes. Aurora était la dernière âme qui vive dans ce trou perdu. Elle ne dormait pas. Elle ne tremblait pas non plus. Elle craignait, juste. Elle craignait ce qui pouvait lui tomber ainsi dessus en pleine nuit, comme ça, en Novembre, quand les hautes montagnes de la Transylvanie se recouvrent doucement de neige et que le vent souffle, fort, si fort... qu'il en faisait trembler le ciel, et son âme avec. La lumière de sa lanterne perçait à peine l'épaisse couche de brouillard qui avait fondu ici. Le clocher était le seul lieu duquel on devait voir à peu près clair. Mais elle, elle était en bas, à veiller. Il fallait bien une âme décidée pour veiller sur les autres, n'est-ce-pas?
Une lourde fumée bleuâtre s'infiltra parmi le déluge de flocons qui s'invitait à ce cadre. Une fumée qui ne disait rien de bon à la soeur. Son coeur manqua un battement, son sang bouillonna et ne fit qu'un tour – ses jambes graciles la porteraient jusque la cordelette. Elle allait sonner les cloches.
Immédiatement, le silence fut rompu. Un chat miaula, mécontent qu'on le réveille, et la panique s'empara du village. Le petit trou paumé sentait maintenant la peur à plein nez. Les gens sortaient de leurs humbles masures. Les plus jeunes se terraient sous les lits, les plus vieux tremblaient de tous leurs vieux os. Ceux aptes à se battre s'armaient. Aurora s'empara de sa Bible, sa seule amie depuis un moment, et s'arma d'eau bénite. On est jamais trop protégé par le Seigneur.
Un fracas se fit entendre. Puis plus rien. Aurora respirait lourdement sans même s'en rendre compte. La peur rongeait son intestin. Le stress grimpait sur son échine, tel une araignée. Au fond d'elle, elle voulait hurler, elle voulait courir et partir...Mais sa mission divine n'était-elle pas de mettre fin au règne de ces sales bêtes? Ne lui faisait-on donc pas confiance pour cela? N'était-elle pas l'envoyée de Marie et de son fils; le fruit de ses entrailles, béni par la grâce du Tout-Puissant? Ni une ni deux, elle donna une forte impulsion à ses membres qui se résignaient à bouger. La force de sa foi, voilà ce qui allait les dégourdir. Elle défonça avec force la porte de l'église et s'élança. Si Dieu pouvait seulement lui donner un peu de confiance...Mais non, notre Seigneur qui est aux cieux n'en faisait qu'à sa tête. Le fracas s'expliqua, quand à lui, enfin. Devant elle, une porte éventrée par quelque chose. Elle n'osait même pas imaginer la taille de la bête. Le bruit du bois craqué lui avait déjà provoqué une assez grande frayeur comme ça.
Entrer dans la maison? Aurora y songea, avant d'entendre dans ce vacarme la plainte d'un enfant qu'on étouffe, courte mais absolument affreuse. Tant pis, elle ne pouvait à en juger par ce cri plus rien ici. Elle partit sur la route pavée de vieilles pierres branlantes. Sa robe noire indiquant son statut de nonne ferait peut-être peur aux monstres, qui sait? Elle jetait des regards inquiets aux alentours. Elle devait être attentive au moindre son, mais en un rien de temps le silence s'était déchiré pour laisser place à un brouhaha insoutenable. Sur la place, un être se tenait seule. S'arrêtant dans sa course, elle se rendit à la rencontre de cette personne voûtée. Pour elle, sans nul doute était-ce un ancien que sa famille avait laissé derrière en tentant la fuite.
Mais alors qu'elle s'approchait de la personne en question, alors même qu'elle tendit sa main vers elle, cette personne lui agrippa avec une force que jamais n'aurait eu un blessé. En deux ou trois mouvements, elle se retrouva face contre terre, faisant une rencontre violente avec les dalles usées. Elle entendit une sorte de "ffcht" et un hurlement a vous glacer le sang. Son nez commençait à la piquer et un mince filet s'en échappa. Elle se releva péniblement et se retourna. La personne avait disparu. Et le coin de sa Bible était fumant. Elle se rapprocha de l'emplacement précis où se trouvait, il y a quelques instants, son opposant qui l'avait fait lamentablement valsé à quelques mètres. Et vit une poudre grisâtre à la place de celle-ci. Elle n'en avait en fait jamais vu avant. Elle se hasarda à la toucher, à y passer la main comme pour bien comprendre ce qu'il s'était passé. C'était fin, mais froid. Des cendres, plus fraîches qu'une pelletée de neige. Il ne restait de cette personne encapuchonnée que des cendres.
Alors cette fois, pour Aurora, il n'y avait plus de doute possible. Cette attaque était celle des vampires. Malheureusement pour le village, elle avait beau avoir été formée, elle n'avait jusque là jamais mené de combat contre les bêtes qui peuplent la nuit. Se connaissances étaient rudimentaires, tout au plus, et elle ne se savait pas meneuse, bien au contraire.
L'affolement était palpable. Cet humble village qui n'avait pas connu ce genre d'attaque auparavant n'était pas près. Les gens qui tentaient de fuir n'avaient même pas l'once d'une force d'opposition. Au fond d'Aurora, la rage se mit alors à bouillir. Comment ces créatures osaient-elles venir troubler la quiétude de ces lieux? Pour qui se prenaient-ils, ces suppôts de Satan? Il fallait agir contre eux. Mais que faire? Aurora n'était qu'une novice du haut de ses minables, pathétiques petits dix-sept printemps.
Tant pis. N'écoutant que sa bravoure, elle repartit sur le sentier qui jalonnait le petit village. La peur au ventre, peut-être. Mais l'envie d'en découdre avec ces soiffards, ces impies, aussi. Enfonçant son coude dans une porte, elle entra dans une humble masure, à l'image de la bourgade. En chantier. Et comme la porte céda facilement, il semblait que c'était déjà trop tard. La pièce principale était saccagée. La puanteur de la mort, l'odeur âcre du sang... Elle rendit sa collation. Toute entière. C'était absolument affreux, comme une bourbe, une masse ingrate. Elle ne voulait même pas imaginer mais c'était plus fort qu'elle et déjà, elle se fit une représentation de cadavres; de tas de cadavres qui pourrissaient, se vidaient, n'étaient plus que des amas organiques ignobles...
Tout indiquait que les jeux étaient déjà faits. Le grincement de la porte la fit déglutir de frayeur. Une ombre se dessina sur le mur.
-Bonsoir, ma soeur... souffla doucement l'homme qui lui faisait maintenant face.
Elle fut un instant paralysée par la peur. Une créature somptueuse... Un homme, plus grand qu'elle, des cheveux flamboyants, des yeux perçants, se tenait face à elle. Du sang, du sang sur ses mains élégantes, du sang sur son armure, partout, projeté comme une giclée de peinture fraîche, du sang sur sa joue, sur son visage digne d'une statue, du sang dans ses cheveux... de la chair dans sa main, entre ses ongles, du sang sur son teint de cire, des cadavres près de lui. Et la lumière de la Lune, qui faisait briller ses pupilles insistantes, ténébreuses..Effrayantes autant que puissantes. Elle réprima une grimace et mit une main à sa hanche. Là où elle pensait avoir conservé une fiole d'eau bénite. Sans plus y réfléchir, elle déboucha sa fiole et en lança à la face de son ennemi. Mais c'était oublier que les buveurs de sang avaient le geste rapide, et elle en fit les frais. Il évita allègrement son attaque, en ricanant. Cette bête osait se moquer d'elle. Cette chose infâme. Et c'en était déjà trop pour elle. Sa Bible allait lui rendre un grand service. Elle tâta son autre hanche mais au bout de la chaînette... Il n'y avait plus rien. Voilà qu'elle avait perdu sa Bible en chemin. Sans doute à cause de la route pavée. Il ne lui restait presque plus une goutte de sa sainte eau et il y avait ce monstre. Qui se jouait d'elle comme un chat se joue d'une souris avant de lui briser la nuque.
-Cela est amusant, n'est-ce pas? Vous-même jouez avec nous, parfois...Mais maintenant que vous amis les tueurs ne sont plus...Qu'allez-vous faire, ma soeur? Prier votre Dieu? Et que fera t-il? Il va vous maudire en échange de votre foi? Vous êtes d'un pathétique.
Il étouffa un rire, visiblement en train de se payer sa tête. Aurora manqua de jurer.
-Que croyez-vous? Que nous avons voulu être ce que nous sommes? Tous autant que nous sommes? Nous avons servi Dieu comme vous le faites, et regardez le résultat! Quelle récompense. Comment? Ce n'est pas une récompense? ..Bien sûr que non. C'est une bénédiction, ma soeur, une bénédiction.
-En aucun cas, monsieur. Vous êtes unes erreur de la Nature, et c'est Satan que vous servez. Qui voudrait d'une telle... bénédiction?
-Ceux qui, madame, ne sont pas assez idiots pour tomber dans les affres de la passion de Dieu. Vous croyez qu'en le priant vous le soutenez? Qu'il donnera vie à vos désirs? Qu'il vous fera toucher la vérité? Foutaise!
Aurora approcha machinalement sa main de la fiole d'eau bénite. Sans que son geste soit contrôlé. Sans même qu'elle y prête attention.
-Ne l'ouvrez pas. Nous ne faisons que discuter, après tout. N'est ce pas?
-Je n'ai rien à dire à un monstre!
-Au contraire, mademoiselle... Vous avez tout à apprendre des "monstres" dont vous parlez. Nous ne sommes rien de plus que des hommes et des femmes que votre Dieu a renié parce qu'ils lui ont demandé une seule petite requête.
-Vous mentez. Dieu est bon.
-Vous le croyez encore? Comme vous êtes naïve. Vous croyez que Dieu est bon? Alors même que les villageois se font tuer ici-même?
-Ce n'est pas Dieu qui vous envoie.
-Si Dieu vous protégeait, cela ferait longtemps que votre village aurait été sauvé. Et vous avec!
Aurora n'avait pas prévu que la discussion s'arrêterait là. Le vampire lui sauta dessus, ce à quoi elle répondit par un coup de pied. Il étouffa un cri mais sa force était surhumaine. Sa bouche puait le sang frais et la décomposition entremêlée. De la chair. De la chair entre ses dents si blanches.
Il la retint contre le sol, tandis que sa fiole lui glissa des mains. Les siennes étaient rougies de ses crimes, ses ongles sortis comme les griffes d'un prédateur. Ses yeux cherchaient à l'entraîner dans la folie, à n'en pas douter. Elle se débattu autant qu'elle le pouvait mais à coté de ce monstre à la force surhumaine, elle n'avait, elle, qu'une force de mouche. Ses coups de pieds, ses mouvements pour sortir de son emprise ne servaient à rien. Elle hurla à l'aide, tandis qu'il ne put qu'en rire. Sadique, il lui retira sa coiffe d'un geste aussi rapide que précis. Geste ultime qui mit Aurora dans tous ses états. Intérieurement, elle ragea, si bien que la force lui revint. Enfin Dieu avait entendu son appel!
Elle éjecta le monstre, qui s'écrasa contre un mur, faisant tomber la bibliothèque. Aurora ouvrit sa fiole, qu'elle lança vers lui. Mais une fois de plus, il échappa au jet et se jeta sur elle. La force de tout un corps la projeta contre un mur. Sa tête la première entra en collision, si bien qu'elle en fut assommée d'une traite. Et tout s'assombrit. Un choc, puis plus rien.
Ce qui la ramena à elle fut le retour du silence, et surtout l'odeur pestilentielle qui lui chatouillait les narines, juste au dessus de son visage.
Et puis la douleur. On lui serrait la gorge comme un enfant l'aurait fait avec une poupée de chiffon.
-Et maintenant, que comptes-tu faire? murmura l'homme à la crinière de feu, tous crocs dehors.
Elle ne sut quoi répondre. Des larmes angoissées perlèrent sur son visage couvert de poussières, de cendres et du sang qui avait coulé de son nez. La Lune, elle, disparut derrière un épais nuage.
Une lourde fumée bleuâtre s'infiltra parmi le déluge de flocons qui s'invitait à ce cadre. Une fumée qui ne disait rien de bon à la soeur. Son coeur manqua un battement, son sang bouillonna et ne fit qu'un tour – ses jambes graciles la porteraient jusque la cordelette. Elle allait sonner les cloches.
Immédiatement, le silence fut rompu. Un chat miaula, mécontent qu'on le réveille, et la panique s'empara du village. Le petit trou paumé sentait maintenant la peur à plein nez. Les gens sortaient de leurs humbles masures. Les plus jeunes se terraient sous les lits, les plus vieux tremblaient de tous leurs vieux os. Ceux aptes à se battre s'armaient. Aurora s'empara de sa Bible, sa seule amie depuis un moment, et s'arma d'eau bénite. On est jamais trop protégé par le Seigneur.
Un fracas se fit entendre. Puis plus rien. Aurora respirait lourdement sans même s'en rendre compte. La peur rongeait son intestin. Le stress grimpait sur son échine, tel une araignée. Au fond d'elle, elle voulait hurler, elle voulait courir et partir...Mais sa mission divine n'était-elle pas de mettre fin au règne de ces sales bêtes? Ne lui faisait-on donc pas confiance pour cela? N'était-elle pas l'envoyée de Marie et de son fils; le fruit de ses entrailles, béni par la grâce du Tout-Puissant? Ni une ni deux, elle donna une forte impulsion à ses membres qui se résignaient à bouger. La force de sa foi, voilà ce qui allait les dégourdir. Elle défonça avec force la porte de l'église et s'élança. Si Dieu pouvait seulement lui donner un peu de confiance...Mais non, notre Seigneur qui est aux cieux n'en faisait qu'à sa tête. Le fracas s'expliqua, quand à lui, enfin. Devant elle, une porte éventrée par quelque chose. Elle n'osait même pas imaginer la taille de la bête. Le bruit du bois craqué lui avait déjà provoqué une assez grande frayeur comme ça.
Entrer dans la maison? Aurora y songea, avant d'entendre dans ce vacarme la plainte d'un enfant qu'on étouffe, courte mais absolument affreuse. Tant pis, elle ne pouvait à en juger par ce cri plus rien ici. Elle partit sur la route pavée de vieilles pierres branlantes. Sa robe noire indiquant son statut de nonne ferait peut-être peur aux monstres, qui sait? Elle jetait des regards inquiets aux alentours. Elle devait être attentive au moindre son, mais en un rien de temps le silence s'était déchiré pour laisser place à un brouhaha insoutenable. Sur la place, un être se tenait seule. S'arrêtant dans sa course, elle se rendit à la rencontre de cette personne voûtée. Pour elle, sans nul doute était-ce un ancien que sa famille avait laissé derrière en tentant la fuite.
Mais alors qu'elle s'approchait de la personne en question, alors même qu'elle tendit sa main vers elle, cette personne lui agrippa avec une force que jamais n'aurait eu un blessé. En deux ou trois mouvements, elle se retrouva face contre terre, faisant une rencontre violente avec les dalles usées. Elle entendit une sorte de "ffcht" et un hurlement a vous glacer le sang. Son nez commençait à la piquer et un mince filet s'en échappa. Elle se releva péniblement et se retourna. La personne avait disparu. Et le coin de sa Bible était fumant. Elle se rapprocha de l'emplacement précis où se trouvait, il y a quelques instants, son opposant qui l'avait fait lamentablement valsé à quelques mètres. Et vit une poudre grisâtre à la place de celle-ci. Elle n'en avait en fait jamais vu avant. Elle se hasarda à la toucher, à y passer la main comme pour bien comprendre ce qu'il s'était passé. C'était fin, mais froid. Des cendres, plus fraîches qu'une pelletée de neige. Il ne restait de cette personne encapuchonnée que des cendres.
Alors cette fois, pour Aurora, il n'y avait plus de doute possible. Cette attaque était celle des vampires. Malheureusement pour le village, elle avait beau avoir été formée, elle n'avait jusque là jamais mené de combat contre les bêtes qui peuplent la nuit. Se connaissances étaient rudimentaires, tout au plus, et elle ne se savait pas meneuse, bien au contraire.
L'affolement était palpable. Cet humble village qui n'avait pas connu ce genre d'attaque auparavant n'était pas près. Les gens qui tentaient de fuir n'avaient même pas l'once d'une force d'opposition. Au fond d'Aurora, la rage se mit alors à bouillir. Comment ces créatures osaient-elles venir troubler la quiétude de ces lieux? Pour qui se prenaient-ils, ces suppôts de Satan? Il fallait agir contre eux. Mais que faire? Aurora n'était qu'une novice du haut de ses minables, pathétiques petits dix-sept printemps.
Tant pis. N'écoutant que sa bravoure, elle repartit sur le sentier qui jalonnait le petit village. La peur au ventre, peut-être. Mais l'envie d'en découdre avec ces soiffards, ces impies, aussi. Enfonçant son coude dans une porte, elle entra dans une humble masure, à l'image de la bourgade. En chantier. Et comme la porte céda facilement, il semblait que c'était déjà trop tard. La pièce principale était saccagée. La puanteur de la mort, l'odeur âcre du sang... Elle rendit sa collation. Toute entière. C'était absolument affreux, comme une bourbe, une masse ingrate. Elle ne voulait même pas imaginer mais c'était plus fort qu'elle et déjà, elle se fit une représentation de cadavres; de tas de cadavres qui pourrissaient, se vidaient, n'étaient plus que des amas organiques ignobles...
Tout indiquait que les jeux étaient déjà faits. Le grincement de la porte la fit déglutir de frayeur. Une ombre se dessina sur le mur.
-Bonsoir, ma soeur... souffla doucement l'homme qui lui faisait maintenant face.
Elle fut un instant paralysée par la peur. Une créature somptueuse... Un homme, plus grand qu'elle, des cheveux flamboyants, des yeux perçants, se tenait face à elle. Du sang, du sang sur ses mains élégantes, du sang sur son armure, partout, projeté comme une giclée de peinture fraîche, du sang sur sa joue, sur son visage digne d'une statue, du sang dans ses cheveux... de la chair dans sa main, entre ses ongles, du sang sur son teint de cire, des cadavres près de lui. Et la lumière de la Lune, qui faisait briller ses pupilles insistantes, ténébreuses..Effrayantes autant que puissantes. Elle réprima une grimace et mit une main à sa hanche. Là où elle pensait avoir conservé une fiole d'eau bénite. Sans plus y réfléchir, elle déboucha sa fiole et en lança à la face de son ennemi. Mais c'était oublier que les buveurs de sang avaient le geste rapide, et elle en fit les frais. Il évita allègrement son attaque, en ricanant. Cette bête osait se moquer d'elle. Cette chose infâme. Et c'en était déjà trop pour elle. Sa Bible allait lui rendre un grand service. Elle tâta son autre hanche mais au bout de la chaînette... Il n'y avait plus rien. Voilà qu'elle avait perdu sa Bible en chemin. Sans doute à cause de la route pavée. Il ne lui restait presque plus une goutte de sa sainte eau et il y avait ce monstre. Qui se jouait d'elle comme un chat se joue d'une souris avant de lui briser la nuque.
-Cela est amusant, n'est-ce pas? Vous-même jouez avec nous, parfois...Mais maintenant que vous amis les tueurs ne sont plus...Qu'allez-vous faire, ma soeur? Prier votre Dieu? Et que fera t-il? Il va vous maudire en échange de votre foi? Vous êtes d'un pathétique.
Il étouffa un rire, visiblement en train de se payer sa tête. Aurora manqua de jurer.
-Que croyez-vous? Que nous avons voulu être ce que nous sommes? Tous autant que nous sommes? Nous avons servi Dieu comme vous le faites, et regardez le résultat! Quelle récompense. Comment? Ce n'est pas une récompense? ..Bien sûr que non. C'est une bénédiction, ma soeur, une bénédiction.
-En aucun cas, monsieur. Vous êtes unes erreur de la Nature, et c'est Satan que vous servez. Qui voudrait d'une telle... bénédiction?
-Ceux qui, madame, ne sont pas assez idiots pour tomber dans les affres de la passion de Dieu. Vous croyez qu'en le priant vous le soutenez? Qu'il donnera vie à vos désirs? Qu'il vous fera toucher la vérité? Foutaise!
Aurora approcha machinalement sa main de la fiole d'eau bénite. Sans que son geste soit contrôlé. Sans même qu'elle y prête attention.
-Ne l'ouvrez pas. Nous ne faisons que discuter, après tout. N'est ce pas?
-Je n'ai rien à dire à un monstre!
-Au contraire, mademoiselle... Vous avez tout à apprendre des "monstres" dont vous parlez. Nous ne sommes rien de plus que des hommes et des femmes que votre Dieu a renié parce qu'ils lui ont demandé une seule petite requête.
-Vous mentez. Dieu est bon.
-Vous le croyez encore? Comme vous êtes naïve. Vous croyez que Dieu est bon? Alors même que les villageois se font tuer ici-même?
-Ce n'est pas Dieu qui vous envoie.
-Si Dieu vous protégeait, cela ferait longtemps que votre village aurait été sauvé. Et vous avec!
Aurora n'avait pas prévu que la discussion s'arrêterait là. Le vampire lui sauta dessus, ce à quoi elle répondit par un coup de pied. Il étouffa un cri mais sa force était surhumaine. Sa bouche puait le sang frais et la décomposition entremêlée. De la chair. De la chair entre ses dents si blanches.
Il la retint contre le sol, tandis que sa fiole lui glissa des mains. Les siennes étaient rougies de ses crimes, ses ongles sortis comme les griffes d'un prédateur. Ses yeux cherchaient à l'entraîner dans la folie, à n'en pas douter. Elle se débattu autant qu'elle le pouvait mais à coté de ce monstre à la force surhumaine, elle n'avait, elle, qu'une force de mouche. Ses coups de pieds, ses mouvements pour sortir de son emprise ne servaient à rien. Elle hurla à l'aide, tandis qu'il ne put qu'en rire. Sadique, il lui retira sa coiffe d'un geste aussi rapide que précis. Geste ultime qui mit Aurora dans tous ses états. Intérieurement, elle ragea, si bien que la force lui revint. Enfin Dieu avait entendu son appel!
Elle éjecta le monstre, qui s'écrasa contre un mur, faisant tomber la bibliothèque. Aurora ouvrit sa fiole, qu'elle lança vers lui. Mais une fois de plus, il échappa au jet et se jeta sur elle. La force de tout un corps la projeta contre un mur. Sa tête la première entra en collision, si bien qu'elle en fut assommée d'une traite. Et tout s'assombrit. Un choc, puis plus rien.
Ce qui la ramena à elle fut le retour du silence, et surtout l'odeur pestilentielle qui lui chatouillait les narines, juste au dessus de son visage.
Et puis la douleur. On lui serrait la gorge comme un enfant l'aurait fait avec une poupée de chiffon.
-Et maintenant, que comptes-tu faire? murmura l'homme à la crinière de feu, tous crocs dehors.
Elle ne sut quoi répondre. Des larmes angoissées perlèrent sur son visage couvert de poussières, de cendres et du sang qui avait coulé de son nez. La Lune, elle, disparut derrière un épais nuage.
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