La fissure et le corps bleu
Par : Salmanzare
Genre : Réaliste
Status : Terminée
Note :
Chapitre 1
Publié le 26/12/15 à 22:29:04 par Salmanzare
Chloé. Tu la connais Adam. Forcément. Je t’ai déjà évoqué son nom. Un contour insaisissable que tu devines dans le creux de moments oubliés. C’est une fulgurance. Quand elle revient, c’est toujours avec fracas. Ce sable terrible qui brûle sous tes pieds et s’insinue partout. Une journée à la mer pour des mois de chaussures ensablées alors que tu es loin du ressac. Ce cimetière de coquillage qui t’accompagne, marche à tes côtés : témoin fantôme d’une seule respiration. Ce sable te colle à la peau. Voilà ce qu’est Chloé. Des petits mots qu’on ne remarque pas de suite. Des mots qui amusent, presque, et invitent à une danse incertaine. Alors on se laisse porter par une mélodie un peu trop rapide. Et tu le sais, j’ai toujours aimé danser. Je ne résiste pas. Pas souvent en tout cas. Ses petits mots deviennent mes gros maux ; et moi je danse déjà.
Pas ce soir dit-elle. C’est une fin de discussion. Tu ne peux pas discuter avec Claire. Elle décide, tu opines. Elle porte mal son prénom. Ca aussi je te l’ai déjà dit. Ce n’est jamais clair avec elle. Son corps mort s’est déjà retourné pour bleuir. Son plaisir est numérique, il se quantifie en like et followers. Le doigt ne caresse plus que l’écran pour faire défiler des paillettes digitales. Je ne peux plus rivaliser et je ne me rappelle pas quand mon monde est devenu si binaire. Oui. Non. Non. Oui. Non. Non. Non. Non. Non. Les zéros s’alignent loin de mes yeux. Je sais bien que son corps ne se retournera plus cette nuit.
Chloé. L’étincelle qui saute le long de la paille. La flamme qui brûle la botte. La cendre dans tes poumons. Une vibration. Un message. Chloé. Venant de nul part. Je cherche. C’était quand la dernière fois ? Un an ? Un peu plus ? Ma faute ou la sienne ? Mutualisons nous la dérive ? Je prends. Adam, quand il s’agit de prendre les mauvaises décisions, je t’écoute. Et comme bien souvent tu as raison, je ne t’écoute plus. Chloé bruyante pour un message silencieux. Elle me demande comment je vais. Sobrement. Et moi je suis allongé à côté d’un corps qui bleuit. Et je sais que Chloé va disparaître aussitôt. Et pourtant ! Combien de temps avant la prochaine fois ? Six mois ? Un an ? Sa faute ou la mienne ? Adam, ce soir là, je ne t’ai pas appelé. J’ai répondu.
Au dessus du lit, il y a cette petite fissure. Je lui dis ça. Qu’elle m’obsède. Je sais pas depuis combien de temps elle est là. Mais maintenant elle m’obsède. Chaque soir quand je m’allonge et que le corps bleuit, je vois cette petite fissure. Chloé aime les mots. Elle veut en savoir plus. Que je lui décrive la fissure. Elle veut mes maux. Claire à côté s’endort, ronfle. Froide. Je me dis qu’un temps elle était princesse, qu’un temps elle brillait, qu’un temps nous étions sacré. Que maintenant je suis sacré con. Mais ça je le dis pas à Chloé. Je dis juste que la fissure est là. Au dessus de ma tête. Chaque soir. Et que je sais pas quand elle est apparue. Est-elle en train de grandir ? Devrais-je la combler ? Devrais-je la gratter. Y a cette fissure au dessus de moi. Elle lacère timidement le plafond de ma chambre.
Et je repense à Claire ce matin Adam. Elle a cette manie. Une manie que je supporte plus. Celle en montant dans la voiture, de toujours, toujours poser son sac à main sur moi. Toujours. Elle le pose pas sur la banquette arrière. Elle le pose pas à mes pieds. Non. C’est toujours sur moi. Comme si j’étais juste un putain de support au bordel qu’elle transporte. Mais ça je le dis pas à Chloé. Je lui dis juste qu’il y a une fissure. Et que la fissure m’obsède. Qu’elle me renvoie à ma vie. A mon travail un peu. Beaucoup en fait. Les choses se lézardent et je sais pas trop quoi en faire. Je lui dis pas que le corps bleuit toujours plus à côté de moi.
Tu sais, Claire ronfle et Chloé ronronne. Enfin j’imagine. Pour Chloé je veux dire. Claire aimerait sans doute pas que je lui parle. Je lui dirais demain probablement et elle râlera certainement. J’aime pas lui mentir. Je suis pas trop bon à ce jeu. Je sais pas quoi en faire de cette fissure donc, du corps bleu et de mes angoisses aussi. Tout ça pour une étincelle qui va s’en ira plus vite qu’elle n’est apparue. Chloé au début de la nuit. Pour savoir si je vais bien. Un an après la dernière rencontre. Son ombre danse sur le mur, la fissure s’élargit et ma tête suit. Où est-elle cette nuit ? Dans quel vin trempe-t-elle ses lèvres ce soir, quel bar a ses faveurs, quelle est sa ferveur ? A côté d’un corps bleu, je ne peux que l’imaginer rougeoyante. Tu comprends Adam ? L’étincelle flamboyante dans la fissure inquiétante ?
Je ferme les yeux et la fissure disparaît. Elle n’existe plus. J’envoie le téléphone sur le côté. Et je me colle contre Claire pour la prendre dans mes bras. Je me dis que je vais la réchauffer et que le bleu de son corps s’en ira. Je me dis que la fissure est toute petite. Demain je mettrais un peu de plâtre dessus et les angoisses pourront bien aller se faire foutre. Merde ! Je vais pas me prendre la tête pour un sac à main sur mes genoux. Tu vois Adam. Je sais que Chloé au réveil ne sera déjà plus qu’un grain de sable dans ma chaussure, qu’elle réapparaitra pas avant des mois. Et encore ! Je sais tout ça. Je sais que Claire sera là dans mes bras. Et je sais que les fissures se bouchent. Alors je serre Claire.
Mais Claire grogne. Claire me dit que je suis trop chaud et que je prends trop de place. Trop de place où Claire ? Trop de place dans le lit ? Trop de place dans la chambre ? Trop de place dans ta vie ? Trop chaud pour ton cœur bleui ! Une autre vibration, une autre tentation. Chloé me dit que les fissures sont belles. Que les fissures révèlent ! Moi j’ai juste mon plafond qui se craquèle au dessus de ma tête. Tout va s’effondrer Adam. Je sais pas pourquoi je t’ai pas appelé ce soir là. T’aurais eu les mots sans doute. Et moi j’aurais pas écouté. Mais t’aurais été là. Chloé me dit bonne nuit et qu’on se revoit bientôt. Claire ronfle de nouveau. La fissure au dessus de moi. Les cauchemars cette nuit là.
Le réveil ? Chloé plus là. Forcément. Pas étonnant. Le message de l’année sans doute. Peut-être lors de son prochain ennui au coin d’un bar j’aurais le droit à une nouvelle craquelure. Et Claire ? Je lui ai dit. Elle a râlé. Elle aime pas que je lui parle tu sais. Même si c’est une fois l’année. Fin de la discussion. Elle décide, tu opines. On a pris la voiture et son sac à main s’est retrouvé sur mes genoux. J’ai levé les yeux pour la regarder. Elle me regardait même pas. J’ai rien dit. Comme d’habitude, je l’ai mis sur la banquette arrière. Comme d’habitude. J’ai pas rebouché la fissure.
Fallait-il ?
Pas ce soir dit-elle. C’est une fin de discussion. Tu ne peux pas discuter avec Claire. Elle décide, tu opines. Elle porte mal son prénom. Ca aussi je te l’ai déjà dit. Ce n’est jamais clair avec elle. Son corps mort s’est déjà retourné pour bleuir. Son plaisir est numérique, il se quantifie en like et followers. Le doigt ne caresse plus que l’écran pour faire défiler des paillettes digitales. Je ne peux plus rivaliser et je ne me rappelle pas quand mon monde est devenu si binaire. Oui. Non. Non. Oui. Non. Non. Non. Non. Non. Les zéros s’alignent loin de mes yeux. Je sais bien que son corps ne se retournera plus cette nuit.
Chloé. L’étincelle qui saute le long de la paille. La flamme qui brûle la botte. La cendre dans tes poumons. Une vibration. Un message. Chloé. Venant de nul part. Je cherche. C’était quand la dernière fois ? Un an ? Un peu plus ? Ma faute ou la sienne ? Mutualisons nous la dérive ? Je prends. Adam, quand il s’agit de prendre les mauvaises décisions, je t’écoute. Et comme bien souvent tu as raison, je ne t’écoute plus. Chloé bruyante pour un message silencieux. Elle me demande comment je vais. Sobrement. Et moi je suis allongé à côté d’un corps qui bleuit. Et je sais que Chloé va disparaître aussitôt. Et pourtant ! Combien de temps avant la prochaine fois ? Six mois ? Un an ? Sa faute ou la mienne ? Adam, ce soir là, je ne t’ai pas appelé. J’ai répondu.
Au dessus du lit, il y a cette petite fissure. Je lui dis ça. Qu’elle m’obsède. Je sais pas depuis combien de temps elle est là. Mais maintenant elle m’obsède. Chaque soir quand je m’allonge et que le corps bleuit, je vois cette petite fissure. Chloé aime les mots. Elle veut en savoir plus. Que je lui décrive la fissure. Elle veut mes maux. Claire à côté s’endort, ronfle. Froide. Je me dis qu’un temps elle était princesse, qu’un temps elle brillait, qu’un temps nous étions sacré. Que maintenant je suis sacré con. Mais ça je le dis pas à Chloé. Je dis juste que la fissure est là. Au dessus de ma tête. Chaque soir. Et que je sais pas quand elle est apparue. Est-elle en train de grandir ? Devrais-je la combler ? Devrais-je la gratter. Y a cette fissure au dessus de moi. Elle lacère timidement le plafond de ma chambre.
Et je repense à Claire ce matin Adam. Elle a cette manie. Une manie que je supporte plus. Celle en montant dans la voiture, de toujours, toujours poser son sac à main sur moi. Toujours. Elle le pose pas sur la banquette arrière. Elle le pose pas à mes pieds. Non. C’est toujours sur moi. Comme si j’étais juste un putain de support au bordel qu’elle transporte. Mais ça je le dis pas à Chloé. Je lui dis juste qu’il y a une fissure. Et que la fissure m’obsède. Qu’elle me renvoie à ma vie. A mon travail un peu. Beaucoup en fait. Les choses se lézardent et je sais pas trop quoi en faire. Je lui dis pas que le corps bleuit toujours plus à côté de moi.
Tu sais, Claire ronfle et Chloé ronronne. Enfin j’imagine. Pour Chloé je veux dire. Claire aimerait sans doute pas que je lui parle. Je lui dirais demain probablement et elle râlera certainement. J’aime pas lui mentir. Je suis pas trop bon à ce jeu. Je sais pas quoi en faire de cette fissure donc, du corps bleu et de mes angoisses aussi. Tout ça pour une étincelle qui va s’en ira plus vite qu’elle n’est apparue. Chloé au début de la nuit. Pour savoir si je vais bien. Un an après la dernière rencontre. Son ombre danse sur le mur, la fissure s’élargit et ma tête suit. Où est-elle cette nuit ? Dans quel vin trempe-t-elle ses lèvres ce soir, quel bar a ses faveurs, quelle est sa ferveur ? A côté d’un corps bleu, je ne peux que l’imaginer rougeoyante. Tu comprends Adam ? L’étincelle flamboyante dans la fissure inquiétante ?
Je ferme les yeux et la fissure disparaît. Elle n’existe plus. J’envoie le téléphone sur le côté. Et je me colle contre Claire pour la prendre dans mes bras. Je me dis que je vais la réchauffer et que le bleu de son corps s’en ira. Je me dis que la fissure est toute petite. Demain je mettrais un peu de plâtre dessus et les angoisses pourront bien aller se faire foutre. Merde ! Je vais pas me prendre la tête pour un sac à main sur mes genoux. Tu vois Adam. Je sais que Chloé au réveil ne sera déjà plus qu’un grain de sable dans ma chaussure, qu’elle réapparaitra pas avant des mois. Et encore ! Je sais tout ça. Je sais que Claire sera là dans mes bras. Et je sais que les fissures se bouchent. Alors je serre Claire.
Mais Claire grogne. Claire me dit que je suis trop chaud et que je prends trop de place. Trop de place où Claire ? Trop de place dans le lit ? Trop de place dans la chambre ? Trop de place dans ta vie ? Trop chaud pour ton cœur bleui ! Une autre vibration, une autre tentation. Chloé me dit que les fissures sont belles. Que les fissures révèlent ! Moi j’ai juste mon plafond qui se craquèle au dessus de ma tête. Tout va s’effondrer Adam. Je sais pas pourquoi je t’ai pas appelé ce soir là. T’aurais eu les mots sans doute. Et moi j’aurais pas écouté. Mais t’aurais été là. Chloé me dit bonne nuit et qu’on se revoit bientôt. Claire ronfle de nouveau. La fissure au dessus de moi. Les cauchemars cette nuit là.
Le réveil ? Chloé plus là. Forcément. Pas étonnant. Le message de l’année sans doute. Peut-être lors de son prochain ennui au coin d’un bar j’aurais le droit à une nouvelle craquelure. Et Claire ? Je lui ai dit. Elle a râlé. Elle aime pas que je lui parle tu sais. Même si c’est une fois l’année. Fin de la discussion. Elle décide, tu opines. On a pris la voiture et son sac à main s’est retrouvé sur mes genoux. J’ai levé les yeux pour la regarder. Elle me regardait même pas. J’ai rien dit. Comme d’habitude, je l’ai mis sur la banquette arrière. Comme d’habitude. J’ai pas rebouché la fissure.
Fallait-il ?
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