Journal_de_bord_bug_+145_
Par : Pseudo supprimé
Genre : Inconnu
Status : C'est compliqué
Note :
Chapitre 22
22 : Mouvement 2
Publié le 19/08/13 à 01:11:24 par Pseudo supprimé
A mes pieds, sur un carré de toile plié, je venais de déposer une paire d'épais collants de femme, à côté, j'avais mis trois tampons périodiques, juste à droite, un tube de vaseline... Au rire de Lisa, je réalisai combien l'association de ces "accessoires" pouvait selon le contexte plonger son propriétaire dans l'eau glaciale et pégueuse de la confusion.
J'étais cramoisi, à la fois en proie à ce fou rire enfantin irrépressible et à la honte de n'avoir pas pensé au delà de mon point de vue. Ce fut le briquet, preuve tangible venue à ma rescousse qui me rendit l'assurance nécessaire pour prononcer : "oui, c'est mon matériel pour faire du feu... " évident !
Lisa, bien plus fine, ne changeait pas d'attitude et un soupçon d'ironie et d'incrédulité plissait volontairement son oeil gauche et accentuait sa commissure droite.
Elle ne put s'empêcher de dire un "Et les bas ? c'est pour faire monter la température ? je ne te connaissais pas ce talent..."
Je ne me sentis pas la force de rentrer dans ce combat verbal tant tout pouvait être avec et contre moi. Je laissais la rigolade gagner.
Chaque crise de rire drainait toutes ces sensations négatives jusqu'alors accumulées et nous en avions vraiment besoin.
Je crois que nous avons profité de ce moment de réelle détente jusqu'à la dernière seconde, ambiance brisée par l'écho de rafales d'armes automatiques tirées derrière nous, plus loin... vraisemblablement dans le camp.
Soudain refroidis, je vidai rapidement mes poches sous le regard maintenant tendu de Lisa.
En vrac devant nous, mes clefs, mon porte feuille, mon téléphone hors d'usage, ma frontale, des lacets de rechange, un couteau multifonctions, le nécessaire à feu, deux bas de nylon fort, une boussole topographique, deux vielles barres énergétiques au céréales et deux paquets de mouchoirs entamés.
Qu'avais-je donc fait le soir de l'évacuation ? je restais un moment incrédule.
Il me semblait avoir passé un long moment à suivre ma liste de procédure d'urgence. J'en étais sûr, j'avais scrupuleusement suivi un à un les points méthodiquement écrits... Il était inconcevable que le seul équipement emporté soit celui, ridiculement restreint, étalé à nos pieds. Où était mon équipement préparé si longtemps à l'avance ?
Avais-je perdu des choses durant tout ces événements ? oui à coup sûr... je ne pouvais pas en avoir emporté si peu. Même ma pochette, celle qui contenait une mini trousse médicale, une lampe loupe sifflet et qui ne me quittait jamais, manquait à l'appel. Sans doute aurais-je dû améliorer la fermeture des poches de ma veste, quel imbécile j'étais.
Ce n'était pas rien non plus. Lisa semblait plutôt rassurée à la vue de cet équipement minimal. Au moins, nous aurions le basique : éclairer, couper, chauffer.
Grâce à ce que nous avions pu prendre dans le camp, nous pouvions aussi nous protéger des intempéries avec la toile de tente et les couvertures, avec les longs morceaux de corde nylon tressée, nous avions aussi de quoi attacher.
La lumière maintenant oblique dorait notre cachette de feuilles. Le soir arrivait vite...et la pénombre et la nuit suivraient.
A partir de maintenant, tout devait être calculé. Rien ne serait plus fait sans raisons et sans avoir déterminé la séquence d'actions suivantes.
Il fallait aménager notre abri pour la nuit. Sans doute se préserver de la rosée matinale autant que d'une pluie d'un printemps si long à venir, se protéger des autres aussi.
J'allais chercher des branches mortes pour faire un toit sommaire sur lequel étendre la toile protectrice. Il ne fallait pas laisser de traces de notre passage et encore moins de notre occupation des lieux. Je ne coupais rien et laissais en place les pierres, la mousse et les feuilles mortes. Ce n'est que loin de notre tanière improvisée que j'allais avec soin ramasser les feuilles et les branches pour camoufler la toile.
Que d'énergie pour rien quand j'y repense... à cette époque, je ne savais pas évaluer une situation et je la dépensais inconsidérément.
Quand notre cachette fut prête, Lisa refit mon pansement. Ce ne fut pas agréable, ni pour moi, ni pour elle. La sueur s'était mêlée aux fluides de la plaie pour former une croute molle qui s'était étalée sur toute l'étendue de la blessure. Un terrain de prédilection pour les germes infectieux. La magie des mains de femme avec les accessoires du kit médical firent merveille. Juste avant le crépuscule.
Au loin la machine du camp, continuait son sourd vrombissement, parfois complété par des coups de feu. Des rafales sporadiques au rôle certainement dissuasif.
La nuit était tombée et le froid apportait des odeurs de bois, de mousse, de champignon. Il y avait de l'humidité.
Dire que la nuit est calme est une douce folie. La nuit, c'est le royaume du bruit, le règne des fantômes animaux peu discrets. La forêt vit la nuit.
Lisa était tendue, sans cesse aux aguets elle sursautait à chaque cri ou bruit qu'elle localisait comme proche. Et je fus très touché de voir que mes explications, teintes de magie et de poésie, la rassurait. Souris, martres, chouettes... le bestiaire fantastique des bruyantes créatures invisibles était désormais notre ami.
Seuls dans ce petit abris, nous avions alors parlé, presque toute la nuit. Nous avions causé de nous, de notre passé surtout. Comme un besoin de mieux se connaître, sans jugements. Lisa m'avait parlé de sa maison de famille et son unique souhait était d'y aller vivre. J'étais invité.
Je ne connaissais pas vraiment l'endroit décrit mais Lisa m'y guiderait. Elle m'y emmènerait, quoi qu'il arrive. Son ton soudain grave m'avait marqué au point qu'aujourd'hui encore je me demande si j'ai vraiment compris le sens de ses paroles ce soir là.
Notre premier réveil fut dur. Il manquait des heures de repos et le sol incomplètement préparé nous avait rempli de douleurs. Mais c'est le bruit, ce bruit lointain de roulement grave et de détonations qui nous avait alors forcé à reprendre nos esprits. Les coups de feu étaient bien plus fréquents et les rafales tirées, trop irrégulières pour n'être "que" dissuasives. Nous étions même presque sûrs malgré la distance de discerner des cris affolés.
Avant que nous n'ayons pu bouger et sortir de notre cachette, nous avions entendu un bruit de course qui se rapprochait de nous. Immobiles, comme tétanisés, nous avions vu plus d'une dizaine de personnes passer à vive allure sans nous voir. Les plus rapides bondissaient entre les pièges végétaux et les plus lentes, s'arrêtaient régulièrement pour s'appuyer contre un arbre en se tenant les côtes, la respiration saccadée. C'était des fugitifs, comme nous. Des mots parfois nous parvenaient et " il ont tiré sur nous"... fut la seule phrase sans équivoques. Les bruits entendus ne mentaient donc pas.
Notre situation venait de changer... encore une fois.
De nouveaux fuyards étaient passés à quelque mètres de notre cachette. Et une femme hors d'haleine criait pour elle même "ils sont tous devenus fous..." tout en progressant de plus en plus difficilement entre les branches et les buissons. Aucun des fuyards n'avait de sac ni d'affaires... leur fuite avait dû être instantanée.
Je repassais mentalement en revue toutes les informations dont je disposais sur le plateau d'Elbon. Où étaient les zones à couvert, où trouver de l'eau, des vieilles granges, comment rester en dehors des sentiers trop visibles.
Si le camp se vidait, ce serait vers les directions "faciles". Mieux valait pour nous rester discrets et préférer la difficulté du terrain, l'utiliser comme alliée. Je venais de me souvenir des grottes. Très peu connues, dangereuses et quasiment invisibles, elles seraient un abri bien plus éloigné et sûr que ces bois désormais trop fréquentés.
A nouveaux des bruits de course se rapprochaient. Un petit groupe d'hommes venait de passer devant nous. Ils avaient des sacs et semblaient beaucoup moins affolés que les fugitifs précédents, presque organisés... l'un d'eux avait un fusil d'assaut en main.
J'étais cramoisi, à la fois en proie à ce fou rire enfantin irrépressible et à la honte de n'avoir pas pensé au delà de mon point de vue. Ce fut le briquet, preuve tangible venue à ma rescousse qui me rendit l'assurance nécessaire pour prononcer : "oui, c'est mon matériel pour faire du feu... " évident !
Lisa, bien plus fine, ne changeait pas d'attitude et un soupçon d'ironie et d'incrédulité plissait volontairement son oeil gauche et accentuait sa commissure droite.
Elle ne put s'empêcher de dire un "Et les bas ? c'est pour faire monter la température ? je ne te connaissais pas ce talent..."
Je ne me sentis pas la force de rentrer dans ce combat verbal tant tout pouvait être avec et contre moi. Je laissais la rigolade gagner.
Chaque crise de rire drainait toutes ces sensations négatives jusqu'alors accumulées et nous en avions vraiment besoin.
Je crois que nous avons profité de ce moment de réelle détente jusqu'à la dernière seconde, ambiance brisée par l'écho de rafales d'armes automatiques tirées derrière nous, plus loin... vraisemblablement dans le camp.
Soudain refroidis, je vidai rapidement mes poches sous le regard maintenant tendu de Lisa.
En vrac devant nous, mes clefs, mon porte feuille, mon téléphone hors d'usage, ma frontale, des lacets de rechange, un couteau multifonctions, le nécessaire à feu, deux bas de nylon fort, une boussole topographique, deux vielles barres énergétiques au céréales et deux paquets de mouchoirs entamés.
Qu'avais-je donc fait le soir de l'évacuation ? je restais un moment incrédule.
Il me semblait avoir passé un long moment à suivre ma liste de procédure d'urgence. J'en étais sûr, j'avais scrupuleusement suivi un à un les points méthodiquement écrits... Il était inconcevable que le seul équipement emporté soit celui, ridiculement restreint, étalé à nos pieds. Où était mon équipement préparé si longtemps à l'avance ?
Avais-je perdu des choses durant tout ces événements ? oui à coup sûr... je ne pouvais pas en avoir emporté si peu. Même ma pochette, celle qui contenait une mini trousse médicale, une lampe loupe sifflet et qui ne me quittait jamais, manquait à l'appel. Sans doute aurais-je dû améliorer la fermeture des poches de ma veste, quel imbécile j'étais.
Ce n'était pas rien non plus. Lisa semblait plutôt rassurée à la vue de cet équipement minimal. Au moins, nous aurions le basique : éclairer, couper, chauffer.
Grâce à ce que nous avions pu prendre dans le camp, nous pouvions aussi nous protéger des intempéries avec la toile de tente et les couvertures, avec les longs morceaux de corde nylon tressée, nous avions aussi de quoi attacher.
La lumière maintenant oblique dorait notre cachette de feuilles. Le soir arrivait vite...et la pénombre et la nuit suivraient.
A partir de maintenant, tout devait être calculé. Rien ne serait plus fait sans raisons et sans avoir déterminé la séquence d'actions suivantes.
Il fallait aménager notre abri pour la nuit. Sans doute se préserver de la rosée matinale autant que d'une pluie d'un printemps si long à venir, se protéger des autres aussi.
J'allais chercher des branches mortes pour faire un toit sommaire sur lequel étendre la toile protectrice. Il ne fallait pas laisser de traces de notre passage et encore moins de notre occupation des lieux. Je ne coupais rien et laissais en place les pierres, la mousse et les feuilles mortes. Ce n'est que loin de notre tanière improvisée que j'allais avec soin ramasser les feuilles et les branches pour camoufler la toile.
Que d'énergie pour rien quand j'y repense... à cette époque, je ne savais pas évaluer une situation et je la dépensais inconsidérément.
Quand notre cachette fut prête, Lisa refit mon pansement. Ce ne fut pas agréable, ni pour moi, ni pour elle. La sueur s'était mêlée aux fluides de la plaie pour former une croute molle qui s'était étalée sur toute l'étendue de la blessure. Un terrain de prédilection pour les germes infectieux. La magie des mains de femme avec les accessoires du kit médical firent merveille. Juste avant le crépuscule.
Au loin la machine du camp, continuait son sourd vrombissement, parfois complété par des coups de feu. Des rafales sporadiques au rôle certainement dissuasif.
La nuit était tombée et le froid apportait des odeurs de bois, de mousse, de champignon. Il y avait de l'humidité.
Dire que la nuit est calme est une douce folie. La nuit, c'est le royaume du bruit, le règne des fantômes animaux peu discrets. La forêt vit la nuit.
Lisa était tendue, sans cesse aux aguets elle sursautait à chaque cri ou bruit qu'elle localisait comme proche. Et je fus très touché de voir que mes explications, teintes de magie et de poésie, la rassurait. Souris, martres, chouettes... le bestiaire fantastique des bruyantes créatures invisibles était désormais notre ami.
Seuls dans ce petit abris, nous avions alors parlé, presque toute la nuit. Nous avions causé de nous, de notre passé surtout. Comme un besoin de mieux se connaître, sans jugements. Lisa m'avait parlé de sa maison de famille et son unique souhait était d'y aller vivre. J'étais invité.
Je ne connaissais pas vraiment l'endroit décrit mais Lisa m'y guiderait. Elle m'y emmènerait, quoi qu'il arrive. Son ton soudain grave m'avait marqué au point qu'aujourd'hui encore je me demande si j'ai vraiment compris le sens de ses paroles ce soir là.
Notre premier réveil fut dur. Il manquait des heures de repos et le sol incomplètement préparé nous avait rempli de douleurs. Mais c'est le bruit, ce bruit lointain de roulement grave et de détonations qui nous avait alors forcé à reprendre nos esprits. Les coups de feu étaient bien plus fréquents et les rafales tirées, trop irrégulières pour n'être "que" dissuasives. Nous étions même presque sûrs malgré la distance de discerner des cris affolés.
Avant que nous n'ayons pu bouger et sortir de notre cachette, nous avions entendu un bruit de course qui se rapprochait de nous. Immobiles, comme tétanisés, nous avions vu plus d'une dizaine de personnes passer à vive allure sans nous voir. Les plus rapides bondissaient entre les pièges végétaux et les plus lentes, s'arrêtaient régulièrement pour s'appuyer contre un arbre en se tenant les côtes, la respiration saccadée. C'était des fugitifs, comme nous. Des mots parfois nous parvenaient et " il ont tiré sur nous"... fut la seule phrase sans équivoques. Les bruits entendus ne mentaient donc pas.
Notre situation venait de changer... encore une fois.
De nouveaux fuyards étaient passés à quelque mètres de notre cachette. Et une femme hors d'haleine criait pour elle même "ils sont tous devenus fous..." tout en progressant de plus en plus difficilement entre les branches et les buissons. Aucun des fuyards n'avait de sac ni d'affaires... leur fuite avait dû être instantanée.
Je repassais mentalement en revue toutes les informations dont je disposais sur le plateau d'Elbon. Où étaient les zones à couvert, où trouver de l'eau, des vieilles granges, comment rester en dehors des sentiers trop visibles.
Si le camp se vidait, ce serait vers les directions "faciles". Mieux valait pour nous rester discrets et préférer la difficulté du terrain, l'utiliser comme alliée. Je venais de me souvenir des grottes. Très peu connues, dangereuses et quasiment invisibles, elles seraient un abri bien plus éloigné et sûr que ces bois désormais trop fréquentés.
A nouveaux des bruits de course se rapprochaient. Un petit groupe d'hommes venait de passer devant nous. Ils avaient des sacs et semblaient beaucoup moins affolés que les fugitifs précédents, presque organisés... l'un d'eux avait un fusil d'assaut en main.
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