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Le Cycle Des Calepins Oubliés


Par : Tacitus42
Genre : Science-Fiction, Action
Statut : Terminée



Chapitre 24 : Point de Non Retour


Publié le 23/02/2012 à 16:04:02 par Tacitus42

4. Point de non retour.


Dana Gloria Marlo.

D.G. Marlo pour les intimes (ou simplement caporal pour les autres).

Il n’y a que moi qu’elle oblige à l’appeler Dana.

Et même si elle me saoule de temps à autres, je dois aussi admettre que je n’ai plus qu’elle comme amie (Pandora mise à part) : j’ai aussi tendance à croire qu’elle est la meilleure que j’ai comptée jusqu’aujourd’hui (ma femme hormis bien sûr)…
Enfin, il ne faudrait pas non plus qu’elle tombe sur ces quelques lignes (au risque de la voir me saouler deux fois plus).

On s’est d’ailleurs (ré)engagé (pour certains) en même temps.

Pour le reste, cette fille est un sacré cas quoiqu’on en dise.



La plupart des gens d’intelligence moyenne qui se frittent à un individu doté d’une meilleure constitution (et armé qui plus est), se barrent fissa dans le sens opposé (s’ils en ont la possibilité)…

Bin Dana, c’est l’inverse !

(Faut croire qu’elle a encore moins de neurone que moi en définitive).

Mais je dois quand même préciser que le gars venait de buter ses parents devant elle.

(Une erreur qui lui a coûté la vie)…



Que je vous explique…

Elle n’avait que dix-sept ans à l’époque.
Je déambulais tranquillement sur le même trottoir (histoire de me pourvoir en menues victuailles) quand je l’ai vue sortir d’un taxi : je m’en souviens pour les raisons que j’évoquerai sous peu et parce qu’avec le temps j’en suis venu à me dire que c’était la première fois qu’elle me reluquait à proprement parler.

Elle est sortie en dernière du véhicule alors que ses parents disparaissaient déjà dans une ruelle obscure qui demeurait sur ma gauche (laquelle était parfaitement perpendiculaire à l’avenue où nous nous trouvions)…

Dana, elle, me mâtait déjà sans aucune vergogne depuis l’angle, pendant au moins soixante seconde (c’est vous dire à quel point je lui ai tapé dans l’oeil)…
Elle me toisa ainsi du regard jusqu’à ce qu’elle entende un cri (qui devait nécessairement être celui de sa mère à en croire le timbre aigu)…

Dana elle-même a crié : après l’instant de surprise qui succéda à celui où elle se retourna (s’apercevant soudain avec effroi de ce qui était en cours).

J’arrivai moi-même tranquillement à hauteur du lieu dit au moment même où elle finissait de hurler pour prendre une bouteille de bière vide parmi les détritus jonchant le sol et de la briser contre le coin du mur à sa droite.

Je crois que le type a simplement cru qu’il avait fait le plus dur en plantant le père Marlo en premier (c’est en tout cas ce qu’on est en droit de supposer)…

Elle était occupée à égorger le malfrat qui venait d’occire ses deux parents quand j’attestais moi-même de l’étendue des dégâts.

Un tesson de bouteille contre un couteau de chasse : et c’est quand même elle qui a eu le dernier mot.



Dana…

Elle a contemplé avec affolement et stupeur son triste labeur, se rendant compte subitement qu’elle venait de tuer quelqu’un…
(Je crois qu’on peut dire qu’elle m’a immédiatement rappelé Katja Gretchencko d’une certaine manière).
Mais elle avait encore plus importent à faire que de s’inquiéter d’avoir souillé une conscience immaculée.

Elle s’est donc retournée vers ses pauvres parents dans l’espoir d’en sauver au moins un…

Peine perdue : le mort qui les avaient tués ne leur avait laissé aucune chance (il s’y connaissait certainement suffisamment de son vivant mais pas assez apparemment).
Elle essayait quand même des trucs inutiles comme remuer des mains inertes ou distribuer des claques (au lieu d’appeler les secours).
Elle encaissait mal le contrecoup : elle demeurait en état de choc depuis qu’elle avait pris le pouls du père.

Ce dernier avait été frappé dans le dos au niveau du cœur (et s’était écroulé sur la porte d’entrée de ce qui devait être le domicile familial). La mère avait été aussi été touchée mais sous le sein : comme je l’ai précisé plus haut, elle a vraisemblablement eu le temps de voir la mort venir.

Le mec pensait se barrer avec les portefeuilles quand il s’est aperçu avec un certain désarroi que la famille Marlo comptait un troisième membre.
Enfin, je pense qu’il pensait pouvoir gérer (jusqu’à ce qu’il prenne le bout de verre en travers de la carotide).

C’est moi qui ait appelé une ambulance en définitive : ceux de l’hôpital de Notre Dame de machin chose (parce que les nôtres auraient mis perpète avant d’arriver)…
Ce genre d’acte d’humanité ne me ressemble guère surtout quand on sait qu’il ne fut pas le seul de la journée.

A dire vrai et à la voir pleurer sur la dépouille de ses parents, j’ai eu de la peine.

Pas parce que ses proches étaient morts et qu’elle allait demeurer seule dans un monde résolument hostile : mais parce qu’elle avait eu le malheur de les venger…
Et à fortiori qu’elle allait se manger des représailles légales dont elle n’avait même pas idée (quand bien même elle fût dans son droit : puisqu’elle pensait vraisemblablement protéger ses parents).

Et puis aussi (et à cause d’elle), moi aussi je risquais des emmerdements : un témoin à charge ou à décharge n’est pas plus à l’abri des lubies d’un soi-disant représentant des forces de l’ordre (c’est le système tel qu’il est devenu qui veut ça).

Comme je l’ai dit, elle était encore sous le choc. Elle ne pouvait pas se rendre compte…

Elle avait encore le bout de verre en main quand je me suis approché…
J’aurais du la tirer par la manche : nous n’avions plus beaucoup de temps devant nous…
Mais j’avais dans l’idée qu’elle aurait fait un mauvais amalgame (et elle avait encore le tesson dans sa main droite).

Je me suis bien gardé de parler toutefois : je ne vois pas ce qui aurait pu la réconforter de toute manière…
Pour le reste, elle m’a entendu arriver à ma démarche mesurée : je lui ai juste tendu une main (la dextre pour être tout à fait précis).

Elle m’a confessé par la suite qu’elle ne savait pas elle-même pourquoi elle s’en était saisie spontanément.
Elle n’avait pas d’autre famille que son père et sa mère : les grands parents sont morts durant l’ère précédente à l’institution du premier bastion.

Dana pleurait encore, mais il n’y avait plus rien à faire pour les sauver : les secours allaient prendre le relais du reste (et ils connaissaient leur affaire mieux que les deux pauvres pecnots perdus que nous étions)…
Il fallait qu’elle pense au moins à sa peau (ou au salut de la mienne).
Ses parents auraient compris (voir approuvé).

C’est pourquoi nous nous sommes inscrits dans l’heure dans les brigades d’interventions urbaines.

Comme tout le monde le sait : le seul moyen d’échapper aux affres de l’armée, c’est encore d’être dans l’armée.

Nous sommes donc présentés au premier poste de district que nous avons trouvé.
Il n’y avait pas foule aux bureaux d’enrôlement (comme on peut facilement s’y attendre du reste).
Outre nous deux, il n’y avait qu’un seul type (qui nous précédait devant l’office des inscriptions).

L’homme, qui se tenait tant bien que mal devant nous, était passablement éméché et se plaignait du fait d’être seul (sa demoiselle l’ayant éjecté sans motif valable et comme un mal propre). Il avait apparemment fait la bringue pour oublier…

Paraîtrait qu’il s’enrôlait suite à un pari perdu (fait sous l’emprise de l’alcool comme il nous le confia par la suite).
Et je demeure persuadé encore aujourd’hui que c’est le seul motif valable pour s’engager.

Paraît aussi qu’il s’appelait Archibald Samson, mais que tous ses potes (qu’il a perdus en devenant flic) l’appelaient Archy.
Enfin, c’était en tout cas ce qu’il disait au seul type chargé des inscriptions.
Son indicatif, c’est « Psy’ko Boy »… Un jeu de mot nase qui combinait psychopathe et cow-boy (un truc qu’on ne peut trouver marrant qu’avec deux grammes d’alcool dans le sang).

Il y a deux parties à l’examen d’admission à l’armée : pour devenir private, j’avais déjà du en passer un (facilement), mais pour devenir sous-off, il m’en fallait un autre.

Dieu merci, Dana n’était pas encore majeure à cette époque…
Bien que son cul appartint désormais légalement à l’armée, elle n’avait pas encore le droit d’officier (dix-huit ans minimum pour officier).

Elle avait devant elle deux possibilités : entrer dans l’académie militaire (et continuer son cursus par le biais des structures militaires) ou tenter le brevet en solo un an plus tard.
Et heureusement pour moi, elle a opté pour la seconde.
Sinon, j’aurais très certainement fini de faction devant une quelconque porte comme un vulgaire troufion (et j’ai déjà donné, merci).

Je le dis parce qu’on a pu réviser ensembles la partie théorique de l’examen (étant donné que j’avais droit moi-même à un délai d’un an pour me remettre à jour : me recycler comme ils disent).
Paraît que je serais resté seconde classe sinon (quelque furent mes résultats aux tests d’aptitudes pratiques : mes premières notes débloquaient certes l’accès au grade de sergent-major mais il me fallait la partie théorique qui allait avec si je voulais obtenir le titre en entier)…

J’ai bien assisté à plusieurs cours de rattrapage à l’académie mais c’était vraiment trop technique pour moi…

J’ai donc surtout galéré sous l’instruction de Pandora un an durant, avec le soutien de Dana qui - pour le coup - créchait chez moi…
Une erreur sans nul doute que je paye chèrement encore aujourd’hui.

Mais elle n’aurait pas pu racheter la maison de ses parents à l’Etat de toute façon et vu que je pouvais lui éviter de finir dans la rue…

Quoiqu’il en soit, sans son aide, je n’aurais jamais eu mes galons de sergent-major (rapport à mes notes théoriques qui étaient d’ailleurs limites)…
Parce que Pandora est bien gentille, mais elle entrave que dalle en matière d’enseignements.

Ce n’est pas que je veuille critiquer, mais à part me gueuler dessus pour des erreurs de calculs minimes, elle ne savait pas faire grand-chose au niveau de la dispense de vraies explications (et ce malgré le fait que tout le savoir que j’ai acquis alors dépendait essentiellement d’elle).

Nota bene : Pandora est d’accord sur le fait que je sois un ignare fini (pour rester polie)…
Soit !

Quand bien même je sus lire (ce qui était loin d’être le cas de tous mes contemporains et même si j’ai du me recycler à ce sujet aussi), j’ai du apprendre les bases de trucs comme les mathématiques ou la physique.

Je dois ajouter qu’à l’inverse de Pandora, Dana usait de force patience avec moi…
Et il en fallait (parce que j’ai encore la migraine quand on me parle de trucs du genre formules de Simpson).

Y a bien que les probabilités ou je m’y retrouve plus ou moins (rapport au balck jack : un bon pote m’a appris toutes les manières de compter), au poker ou même à la belotte (tout le monde s’en fout, mais j’aime bien la belotte)…

Enfin, il ne faut pas trop me parler d’arrangements ou de combinaisons non plus parce que je commence à caler (surtout dès qu’on y ajoute les matrices).

Mais grâce à Dana (et n’en déplaise à Pandora : lesquelles s’entendaient pourtant à merveille du reste), j’ai compris un tas de trucs…

Un tas de trucs inutiles (mais un tas de trucs quand même).



Pour lors, un an, ce n’était pas du luxe : que ce soit pour moi ou pour D.G. Marlo.

Si je peinais avec la théorie, elle aurait peut-être eu du mal au niveau pratique…
Mais moins que prévu aux vues de ses talents qui étaient indéniables, voir innés (quelque soit le domaine d’ailleurs).

Et comme à l’époque, nous étions pratiquement inséparables, je lui rendais la pareille au niveau de ses conseils en dispensant les miens lorsque je l’emmenais bosser sur mes affaires…
C’était la moindre des choses après tout.
Mais il fallait surtout qu’elle s’endurcisse un max, parce qu’une fois lâchée dans la fosse aux lions, il m’aurait été difficile de lui venir en aide…

Oui : à l’époque, je pensais déjà à notre future « séparation » (comme elle l’appelle non sans force mélancolie) …
Ce qui était loin d’être son cas à elle (mais je ne m’imaginais pas qu’elle pourrait s’attacher à ce point-là : je suis fautif et sans doute trop naïf).

Mais je suis le premier à dire que cette garce apprend vite. Elle a pu sembler sensiblement effarouchée au début, mais ça s’est vite tassé.

Elle fumait déjà : je suppose que ça datait de bien avant notre rencontre…
Et faut croire que distribuer les prunes a toujours été dans sa nature.

Il n’y a pas à tortiller du cul : mis à part quelques détails à rectifier, elle savait instinctivement se battre.

Pour le reste, elle n’a pas mis longtemps à apprendre comment fouiner : ce qui reste le plus important techniquement pour un futur représentant de l’ordre (même si tout le monde s’en cogne à l’heure actuelle).
J’étais moi-même autodidacte en la matière : mais tous ce que je savais, elle l’a non seulement appris mais peut-être même innové (d’autant que je n’aime pas parler alors, qu’elle, est dotée d’un charisme incroyable).
Il n’y a qu’au combat où j’ai conservé le dessus (sera-ce parce qu’elle ne donne pas le meilleur d’elle-même ?).
J’ai d’ailleurs tendance à croire qu’on se vaut l’un, l’autre…

Nota bene : certains machos iraient jusqu’à croire que je ne vaux pas tripette au combat (bin, ils ont torts)…

Mais j’aurais du voir venir le hic quand elle a opté pour le grade de caporal alors même que ses points aux exams lui donnaient droit d’office à celui de major (ce qui n’est pas fréquent).

« Manque d’assurance » pensais-je naïvement alors : tu parles !!

J’ai compris quand il a fallu qu’on se sépare « temporairement » (comme elle précise toujours avec un brin de nostalgie dans la voix)…
Et je passe volontairement certains détails plus ou moins peu glorieux à mettre à son actif (mais j’y reviendrai sûrement).

Avec le recul, je me rends compte de certaines de ses tentatives totalement vaines pour essayer de m’aguicher…
D’autant que mon appartement est prévu pour une seule personne (seule raison pour laquelle je ne suis pas encore à la rue comme le reste de mes concitoyens : le loyer est encore modéré)…
Pour l’anecdote, je dormais par terre (dans un sac de couchage) et je crois qu’elle n’osait simplement pas me demander de la rejoindre (sinon, j’aurais tout de suite compris).

Je me rappelle d’elle pratiquement en tenue d’Eve sortant du coin douche et laissant maladroitement tomber son seul vêtement d’un air faussement gêné.

Mais il faut l’avouer : c’est vrai qu’elle est franchement bien gaulée.

Des trucs dans le genre auraient pourtant du me mettre la puce à l’oreille.

Elle m’a plus ou moins avoué le truc à demi-mot quand je l’ai plus ou moins chassée de chez-moi (dès qu’elle a réussi ses classes et donc qu’elle a eu accès aux quartiers de notre caserne : puisqu’elle avait déjà trouvé un moyen pour qu’on serve dans la même unité).

J’ai spontanément répondu par la négative ce qui a eu pour effet de la faire s’effondrer à mon grand désarroi. Faire pleurer une damoiselle me fend le cœur à chaque fois pour dire la vérité.
J’ai donc tenté la voie diplomate…
Et je me rends compte aujourd’hui que je n’aurais pas du.

J’aurais du laisser courir. Elle aurait eu mal un bon coup mais elle s’en serait vite remise.
Au lieu de ça, elle a tendance à insister maintenant.

Elle a toujours accès à mon appart, raison pour laquelle je travaille pratiquement toujours (même si je n’aime pas ça : c’est toujours mieux que de l’avoir tout le temps sur le dos).
Je ne dors pratiquement pas (ou sur un banc de temps à autres). Je peux facilement me passer de sommeil en fait (ce qui est assez rare pour être souligné).

Mais bizarrement, je ne l’ai jamais vue essayer de profiter de mes jours de « crises ».

Et si elle a toujours un pied dans mes quartiers, c’est entre autre parce qu’elle et Pandora sont copines comme cochonnes (c’est le cas de le dire)…



Un jour, alors que je rentrai après trois jours d’affilées de boulot (que ce soit légal ou en privé), je suis pratiquement tombé sur un de leur petit jeu…

Ma femme a du rire en voyant ça : moi, ça commence à me gonfler en fait.

Paraît que tous les êtres humains passent par là à un moment ou à un autre : c’était du moins ce que prétendait ma femme (qui eut bien du mal à se retenir à la chose pendant les trois ans de notre prime séparation et à contrecœur croyez-le bien).
On a tous quelque chose à cacher (paraît-il)

Note : En ce qui me concerne, c’est comme pour le sommeil sinon d’avantage : je me passe totalement de la chose (c’est assez rare pour le souligné aussi). Je n’ai d’ailleurs jamais trompé ma dame : je suis toujours à la lettre la doctrine de Grégoire VII en matière de chasteté.

Et si je ne les ai pas surpris en plein action, c’est parce que les senseurs du couloir ont annoncé mon arrivée : j’ai même failli exploser le verrou électronique de la porte pour rentrer chez-moi (preuve que Pandora avait quelque chose à se reprocher).

J’aurais du capter en voyant passer l’androïde dans le couloir, au sortir de l’ascenseur. La question qui vient, c’est « qu’est-ce qu’un robot fout dans mon building ? » : on n’avait pas encore le copiste à l’époque (et les gens capables de se payer un androïde ne sont pas légion par les temps qui courent encore à ce jour).

Mais il n’avait rien de suspect pour lors (pas même l’appendice hydraulique qu’elles ont nécessairement du jeter par-dessus le balcon parce que je ne l’ai pas trouvé avec le reste).

J’aurais du piger quand Dana m’a accueilli à bras ouverts, pour ensuite s’enfuir comme une voleuse en me gratifiant d’un simple baiser sur la joue au passage (seule familiarité que je lui concédai : par faiblesse sans doute).

Je ne l’aurais pas même remarqué si je n’avais pas mis le pied dessus.

J’ai juste attester qu’un des pavés du planché (fait d’un plastoc spécial) se redressait légèrement sous le poids de mon panard (quand je le posais sur un de ses coins). Dana n’avait vraisemblablement pas eu le temps de recoller correctement le machin (ou plus certainement la colle n’a pas eu le temps de prendre).

Il faut savoir que la structure sous le planché est en partie creuse, voir alvéolée (comme dans une ruche quoi : plus personne ne sait ce qu’est une ruche) : paraît que c’est plus résistant comme ça (bien plus que si c’était bêtement plein à ce que Pandora m’a dit : ça permet d’économiser le matériau qui plus est).

Mais je sais ça surtout parce que certains s’en servent depuis toujours pour planquer le fruit de la contrebande.

Je n’ai réellement compris que lorsque je suis tombé sur la peau rembourrée qui se trouvait dessous et qui servait vraisemblablement de revêtement pour un automate sexuel…
Si, si : on voyait fort bien le bout sensé recouvrir l’organe pneumatique qui tenait lieu de…

Enfin, vous voyez quoi.

Le dit revêtement en simili cuir rose pâle était planqué sous la dalle en question.
Le problème n’est pourtant pas là (je m’en contrefous en l’occurrence : Dana fait ce qu’elle veut de son corps et j’ai vu bien pis qui plus est).

Comme je l’ai dit, tout le monde passe par-là un jour ou l’autre (moi hormis apparemment).
Et même si elles pouvaient faire ça ailleurs…



Quoique « non », en fait…

Le faire chez moi revenait à que dalle (rapport à une chambre d’hôtel qui coûte bonbon même actuellement) sans compter le fait que Dana n’avait plus de chez-elle (d’autant que je suis jamais sensé y être : chez-moi)…
C’était aussi plus facile pour Pandora qui contrôlait le bidule et...

Enfin, passons…

Non, le problème, c’est qu’on voyait clairement le visage représenté sur le masque aux cheveux de nacre (ou presque).
Il y avait même la balafre qui coupe mon visage en deux de la joue gauche jusqu’au début du front (en passant par la ride du lion et évitant les yeux : j’ai eu du bol ce jour-là).

Elle avait du la faire à la main : on voyait clairement la nature de la coupure qui n’aurait jamais pu être une sorte de défaut d’usinage (même si Pandora aurait pu se le permettre : elle aurait pris un risque de plus pour rien je suppose)…
Je présume que Dana voulait que ça soit le plus réaliste possible.

Je ne lui ai rien dit, rien reproché (que pouvais-je bien dire).
C’est mon problème je crois : je n’ai pas su établir des limites.

Mais je suppose que je suis vache puisque comme je l’ai dit, j’ai vu pire…

….

Enfin, non !
(Mais c’est vrai que ça me fait chier : c’est de ma faute après tout).

Nota bene : si, j’ai vu pire en fait : un jour je suis tombé par hasard sur deux moines en plein effort ou presque…
Enfin, un moine et un novice de quatorze ans pour être exact : je suppose que ça, c’est pire.
L’ecclésiaste, qui comptait parmi mes connaissances (un type plutôt sympa malgré ce détail : et puis il n’a jamais forcé personne à ce que je sais), se flagellait en conséquence pour pénitence…
Mais j’en suis venu à croire, le connaissant, que cette partie-là lui plaisait tout autant que la fornication en elle-même.
Pour info, aux jours d’aujourd’hui, même si la chasteté ou l’abstinence ne sont plus nécessairement de mise, la sodomie est toujours interdite au Vatican.

Beaucoup se demandent encore comment se fait-ce que je ne succombe pas à ce simple instinct qui se voudrait naturel : ma femme notamment m’en tenait rigueur, parce que c’était elle qui devait me solliciter et jamais l’inverse (à l’exception d’une fois).

Il faut donc que je vous entretienne d’une simple et inutile anecdote (survenue bien avant ma puberté)…

La première fois que j’ai vu quelque chose essayer de se faire quelque chose, c’était un bâtard (un chien donc) montant une truie dans une porcherie : c’est dire si je suis resté traumatisé…
(Oui, je sais : au vue de ce qu’à connu Lilith, c’est franchement limite mais j’ai toujours tendance à tout ramener à moi de toute façon).

Le propriétaire de la porcherie, le père Gontran (un brave homme au demeurant) m’expliqua placidement le but de la manœuvre (en omettant cependant de m’expliquer qu’il ne sortirait rien de cette union).
Mon esprit s’est aussitôt perdu avec effroi en conjectures quant au fruit hypothétique de ces frasques animalières et je n’appris que bien plus tard qu’elles étaient stériles par nature.
(J’étais vraiment très jeune je dois dire et bien que ce ne fut pas la seule raison de mon appréhension perpétuelle quant à la fornication, c’est tout du moins la première).

D’ailleurs, jusqu’à ce que j’épouse ma femme (après le mariage, pas à sa rencontre qui n’advint que quelques temps plutôt), je pensais que la copulation n’était digne que des cochons…

Ma belle a éclaté de rire - tu penses - quand je lui ai raconté l’anecdote de la porcherie du père Gontran (en vue - espérais-je - de lui expliquer mes réticences à la pratique de la chose : la peur de m’engager venait aussi de cette raison à l’instar de bien d’autres de mes contemporains). Et tout en essayant de contenir son hilarité (mais en n’y parvenant pas) elle m’a précisé que c’était une bonne synthèse des rapports hommes/ femmes.

Elle était vierge à l’époque (j’ai pu l’attester par la suite de manière très claire lors de nos premiers ébats) : elle pouvait donc se permettre de dénigrer ses semblables…
J’étais plutôt content en fait (et soulagé) : je croyais qu’elle avait compris d’elle-même où je voulais en venir et me félicitais d’avoir trouvé une femme d’une pareille intelligence…
(On omettra de préciser à quel point je pouvais être stupide, merci).

Je n’ai donc pas cru bon de poursuivre dans mon propos.

Mais son air enjoué a vite disparu quand elle a du me convaincre d’aller plus loin dans notre relation.
Nous avons d’ailleurs failli ne pas consommer notre union pour cette même raison. Mais bien que pucelle, elle aurait trouvé un truc quelconque pour m’obliger de toute manière (elle trouvait toujours).
Et sentant sans doute la promesse d’une nuit d’amour lui échapper, elle m’a sorti un de ces baratins à deux balles sur la vie, ses tenants et ses aboutissants.

Je crois que si elle n’avait pas conclu ses diatribes par la leçon pratique, je suppose qu’elle serait restée sur sa faim (et aurait pu dormir tout du moins).

Mon opinion n’a pourtant que sensiblement varié depuis lors (même si je besognais fréquemment ma dame à sa demande : surtout parce qu’il est facile de s’y complaire en fait).

Et j’imagine ma femme en train de se marrer de là où elle est en lisant l’entièreté de ce passage…
D’autant que, comme je l’ai dit, elle était bien plus obsédée que moi par la « bagatelle » (comme certains l’appellent).

Oui : pour ceux qui en douteraient encore, ma femme est mon sujet de conversation favori.

Dana dit souvent que je ressemble un peu au personnage principal interprété par un certain Peter Folke (ou Falke je sais plus) d’une série policière datant du vingtième siècle: paraît que je suis toutefois vachement plus mignon, plus jeune (bien que j’en doute), plus grognon et avec un regard nettement plus flippant (toujours selon Dana).
Rien à voir en somme : le seul parallèle, c’est que ma femme me parlait souvent…
Ca et le fait d’être flic évidemment (même si me concernant il s’agit d’une police exclusivement militarisée).
Parce que sinon, il avait toujours la chance d’avoir sa bourgeoise, lui.



Dana n’était plus dans mon appart quand je suis tombé sur la simili peau du joujou sexuel de luxe…
Et je suppose que Pandora l’a immédiatement informée de ma trouvaille via son unité portable parce qu’elle m’a plus ou moins lâché les basques pendant plusieurs jours…

(Je me dis quelque part que ce n’était pas plus mal en fait : ça me faisait des vacances en quelque sorte).

Mais même si elle s’est effacée un petit temps, Dana est vite revenue à la charge.

Le problème étant qu’elle rebondit très, « très » vite (et elle me rabâche toujours la même sérénade dans le but d’aller plus loin en définitive).

A dire vrai, j’en voulais surtout à Pandora…

Pour deux raisons : d’abords parce qu’elle a du pirater une usine de fabrication d’androïde (et donc, que ça risquait de se voir même si elle m’assurait que c’était sans conséquence)…
Mais surtout parce qu’elle avait oublié que nous avions combattu ensembles le même ennemi…

Et que la chose nous a suffisamment imprégnés pour que nous nous gardions bien d’y mêler d’autres personnes :
Inconsciemment, nous risquons de faire du mal.

J’ai omis de vous dire qu’il y a une autre raison pour laquelle je travaille autant : pour éviter de penser à vide (comme en ce moment par exemple : mais vous ne verrez vraisemblablement qu’une seule de mes trois facettes principales avec de la chance).

Il m’arrive de faire des crises…
Seule Pandora y a jamais assisté (parce que je ne les avais pas du vivant de mon épouse) et je me garde bien d’en faire grand cas à un quelconque médecin.

Un d’entre eux avait diagnostiqué une schizophrénie avec dédoublement de personnalité : je n’avais fait que lui parler, demander conseil pour simplement savoir.
Il a voulu me prescrire un traitement…

Mais j’étais alors assez haut gradé pour l’envoyer paître tout simplement.
Depuis, Je me tiens le plus loin possible de tout autre toubib…
Jusqu’à récemment j’avais d’ailleurs toujours une excuse à deux balles pour me soustraire à la visite médicale…
Et même si je suis sensé en voir un annuellement, je me garde bien de lui dire ce que je vois.

Parce que même s’il m’arrive fréquemment de lutter contre des démons (raison pour laquelle je me barricade derrière ces quatre murs : raison pour laquelle je dois garder cet appartement), j’ai le loisir de voir ma femme de temps à autre.
Et je ne tiens en aucun cas à prendre quoique ce soit qui puisse la faire disparaître (soi-disant que je serais malade et quand bien même cela ferait fuir de facto les abominations qui me tourmentent).

C’est le résultat d’un perpétuel combat que j’ai toujours gagné jusqu’à présent : comme je l’ai déjà dit.
Incubo : le cauchemar autant que le démon ou le démon dans le cauchemar pour être précis.
Un monstre qui avait encore un nom à l’époque où je le défis pour la première fois…
Mais comme j’ai pu le constater avec les dernières paroles de Lilith, il en prend apparemment bien d’autres si c’est son bon plaisir, voyageant de conscience en conscience, ressurgissant par le biais des instincts les plus obscures (sinon archaïques), s’amusant de ses victimes autant que de ses avatars.
Pandora (bien qu’étant une unité robotique) en a aussi souffert : elle le sait.

En conséquence, nous nous devons de faire vœu de solitude autant que possible.

Enfin : à l’époque, j’étais plus ou moins de mauvaise foi en sermonnant ma vieille comparse de la sorte, si l’on considère que c’est moi qui ait introduit Dana chez nous (après tout).

Mais je ne le fus que parce que je soupçonnais Pandora d’être à l’origine de ce type de jeu débile : elle a prouvé par le passé qu’elle était capable de choses du même style.

Pour le reste, Dana n’est pas obsédée, elle est « sensiblement » érotomane (ce n’est pas pareil).
En fait, pour tout vous dire, elle a bien moins de problèmes que moi (à ce que je sais).

J’ai toujours tendance à croire que ça lui a passé en fin de compte, d’autant qu’elle me lâche plus ou moins les basques à présent.

Depuis que j’ai passé la dernière visite médicale d’ailleurs…
J’avais jusque-là réussi à éviter les visites annuelles : mais paraît qu’il en faut au moins une tout les cinq ans. J’aurais cru qu’elle se serait précipitée sur le médecin pour la tuer directement avant qu’elle ne me voie (puisque nous devions défiler à poil, façon bovins sur un marché).
Mais rien...
Par ailleurs, j’ai réussi à ne me faire ausculter que par un robot médical : par pudeur diront certains bien que ce soit surtout pour honorer le souvenir de ma dame en l’occurrence (puisque personne depuis elle ne m’a jamais vu totalement nu).

Les fichiers ont (paraît-il) disparu (ce qui m’a laisser perplexe quand on m’en a informé).

Mais Pandora m’a avoué par la suite qu’elle était à l’origine du piratage là encore.
Et pour le coup, je ne peux que saluer cette initiative.

Je dois avouer que ça m’arrange dans un certain sens (vu que de toute façon, j’ai été signalé présent : je n’ai donc pas à repasser un quelconque test pour des bourdes internes au département médical).

Ce genre de truc en de mauvaises mains peut être létal qui plus est.
Il faut savoir que le rapport comprenait (entre autre) une prise de sang : mon bagage génétique devenait de facto potentiellement connu (en dépit du serment d’Hippocrate qui est facilement caduque si l’on sait oindre la bonne main).
Et Pandora m’a assuré que la chose demeurait théoriquement dangereuse.
Paraît que les confréries oubliées du treizième secteur étaient capables de tuer un seul homme par le biais de maladies sélectives : des virus qui ne touchaient que des sujets cibles, précisément à cause de l’unicité d’ADN.

Enfin…


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