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Le jour où je suis devenu prof !


Par : Salmanzare
Genre : Sentimental
Statut : Terminée



Chapitre 4


Publié le 02/07/2009 à 17:33:21 par Salmanzare

C'est en lisant GTO qu'étais venu ma vocation de professeur. Mais j'étais loin d'imaginer que c'était aussi dur que ça d'occuper des élèves pendant deux heures. Je m'en étais tiré finalement en leur donnant un exercice de présentation, le support n'était pas imposé. Et cette liberté justement semblait, pour la plupart des élèves, handicapante. Mal à l'aise, il ne savait pas s'il valait mieux faire un texte de français ou dessiner. Le libre arbitre est souvent pénible à assumer et mes élèves en faisaient les frais.

J'avais finalement regagné mon bureau, et observait mes élèves en regardant distraitement leur présentation. La plupart était profondément banale, rien d'amusant à les lire. Mais certaines se distinguaient par une touche d'humour ou même de folie parfois.

Comme celle d'Ulric Emon, un élève qui semblait plus mature que la plupart des autres élèves par son apparence. Dans sa fiche, je constatais avec amusement sa passion pour son ordinateur. Il lui avait même donné le nom de déesse. J'avais connu plus jeune quelques geeks, mais pas à ce point. Il racontait que déçu par la génération féminine actuelle, il avait décidé de créer son Intelligence Artificielle qui correspondrait à ses critères.

Je jetais un oeil sur Ulric. Celui-ci étais assis au milieu de la classe. Sa texas entre les mains, il pianotait nerveusement sur les touches, laissant parfois échapper un juron. J'aurais du me douter qu'il ferait une présentation « informatique ».

Celle d'Élie me frappa aussi. Dans sa fiche de présentation, il faisait l'éloge d'un parti communiste utopique. Dénonçant les faiblesses du régime actuelle et se lamentant contre un PCF mort. Il donnait ses idées en mettant plein de ferveur et s'emballant un peu trop par instant. Un élève communiste est de plus en plus rare de nos jours.

Je repoussais le tas de feuilles pour me concentrer sur les élèves. Je regardais ma montre, il ne restait déjà plus qu'une heure à tenir. Ce ne serait pas si difficile que ça finalement.

- Monsieur ? On doit vous rendre à la fin de l'heure.
- C'est le but en effet.
- Pas de délai supplémentaire ?
- Tu sais Jaeger, je te demande quelque chose de court. Pas de m'écrire un pavé sur ta vie.
- Pavé césar ! Cria un élève, provoquant alors l'hilarité de son voisin.
- C'est une racl' ce type Monsieur ! Enchérit l'autre.

Je regardais, ainsi que le reste de la classe, les deux élèves. Ne sachant pas comment réagir, je me préférais me taire. Sans doute un délire obscur que je ne pouvais comprendre. Mais bon, je ne semblais pas seul dans ce cas.

- Restez calme et concentrez vous sur votre travail.

Je soupire, j'ai choisi un métier avec des vacances. Du temps libre pour vivre peinard, et je commence à me rendre compte que finalement il y a un piège là-dessous. Je me disais bien que c'était trop beau pour être vrai.

- Jack ?

Ah, enfin une qui m'appelle par mon prénom. Ça me fait plaisir. C'est une jeune fille aux yeux noisettes, plutôt fine mais sûre d'elle même. En jupe, ce qui devient rare chez les lycéennes. Elle le porte bien, elle a les jambes pour. Diable, voilà que ça me reprend ! Je préfère ne plus y penser, c'est un élève. On ne touche pas aux élèves ! On m'a répété cette phrase des centaines de fois lorsque j'ai tenté le concours.

- Margaux c'est ça ?
- En effet. Je voulais savoir quand nous allons faire les élections des délégués.
- Je n'ai rien à voir avec ça. Vous avez un prof principal pour régler ce genre de chose.
- En même temps, je regarde la fiche avec l'emploi du temps et juste à côte de votre nom c'est marqué prof principal !

Je me jette sur la fiche et lis mon nom. En effet, je suis leur professeur principal. C'est pas possible, je suis pas au courant. C'est quoi ce délire. Y a erreur sur la personne. Et pourtant. Je tords mes mains nerveusement.

- Hem ! Oui, donnez moi une minute : je reviens dans un instant.

Je passe la porte de la classe et me dirige vers le bureau du directeur. Il va falloir tirer ça au clair, je n'ai jamais postulé pour être prof principal. Je ne suis même pas certain d'en être capable.

***************************

Pendant ce temps, la classe s'agite.

- Et bien, il me semble que cette année nous allons avoir un pseudo-prof, dit calmement Pierre.

Celui-ci griffonne un petit cahier. Une fois la phrase achevée, il libère sa queue de cheval et secoue la tête.

- Laissons lui une chance. Il a l'air gentil ce prof, tente doucement Ceyla. D'habitude, les profs de français sont au bord de la retraite et incontinent. Et puis, en plus il est pas trop mal.

La jeune fille a un regard perçant. Ses cheveux châtains font ressortir ses yeux verts avec délicatesse.

- Ça reste un prof ! s'exclame Florent. Depuis quand on trouve un prof mignon.
- C'est sûr que toi, ça doit pas t'arriver souvent qu'une fille te trouve mignonne, rétorque alors Ceyla. Je suis certaine que derrière tes gros airs de Monsieur Muscle se cache un frustré impuissant !
- Taggle, sale racl' de kikoo !
- Même un singe semble plus intelligent que toi. On parlera le jour où tu comprendras ce que veux dire le mot français.

Florent se lève. Le poing serré, prêt à frapper Ceyla. Le regard mauvais, il a un sourire de prédateur collé au lèvres.

- Tu vas voir si je suis impuissant !

Camille, qui juste là fredonnait une chanson semble se rendre compte de la situation. Elle décroise les jambes et se tourne vers Florent. Le regard malicieux, elle plaît à cette brute et elle le sait. Elle n'hésite pas à en jouer. Elle le transperce du regard, puis dit d'un voix douce :

- Si tu la touches, c'est toute la classe que tu te mets à dos !

Florent peste et s'assoit de nouveau. Il n'ose rien faire. Il serait stupide de se faire remarquer le premier jour. Mais cette garce ne perd rien pour attendre selon lui.


*************************

Je déboule dans le bureau. Oubliant de frapper à la porte.

- J'ai un problème Monsieur le Directeur !
- Oui, Jack. Vous avez oublié de frapper.
- Je suis désolé. Je refais l'entrée ?
- Non, c'est bon.

Le directeur a un rire léger.

- Je suis prof principal !
- Oh, c'est moi qui suis désolé. J'ai oublié de vous prévenir. Je suis confus. Lorsque le professeur qui devait assurer cette fonction a vu les élèves qui composaient la classe, il a rendu les armes dirons-nous.
- Pourquoi ?
- Disons que nous avons réuni ces élèves ensemble pour ne pas ralentir les autres classes. Ces élèves ont des problèmes avec l'autorité, des problèmes de famille, sont asociaux.
- Et vous les avez mis tous ensemble ! Mais c'est de la folie.
- J'étais contre cette idée. Mais je ne suis que le directeur d'étude. Le grand chef au dessus moi a décidé pour nous tous. Il a dit « je ne laisserai pas des fruits pourris toucher les autres ».
- Il parle d'élèves ! Mais c'est un connard ce type !
- Hum ! Je suis d'accord avec vous mais je ne peux rien faire. Lorsque les professeurs ont vu la classe, ils on tous refusé de la prendre en charge. La réputation de ces élèves ayant vite atteint le lycée. Il n'y avait plus que vous.
- Mais je n'en suis pas capable.
- Si vous tenez un an avec eux. Vous avez votre ticket d'enseignement. Je suis désolé... Je vous aiderais du mieux que je peux si c'est en mon pouvoir. Je n'ai qu'une chose à dire, méfiez vous du directeur. Il fera tout pour virer ces élèves, et méfiez vous du CPE : c'est sa femme.

Je ne réponds pas. J'ai l'impression d'avoir été piégé en beauté. Je suis professeur principal d'une classe à problème.

Je rentre dans la classe encore plus nerveux qu'avant. Va falloir que j'assure un max. Que je relise GTO...

Il y a de la tension dans l'air. Je remarque que quelques tables sont renversées. Deux élèves sont debout, au milieu de la pièce. Les poings serrés, prêt à se taper dessus. Je fais un effort pour me souvenir de leur nom. Il y a Florent et Kevin. D'ailleurs, la lèvre de celui-si saigne légèrement.

- Asseyez vous maintenant, je viens de crier.

Ils me regardent mais ne bougent pas.

- Vous savez tout maintenant. On a plus besoin de la jouer élèves sérieux. Ni faire semblant qu'on s'aime tous. On est traité comme des moins que rien Monsieur. On est rien pour cet établissement. Alors laissez tomber. Votre cours, on s'en tamponne l'oreille avec une babouche. On pourrait jouer la comédie mais à quoi bon. On est rien ici. Alors pourquoi se donner la peine de faire semblant. Je vais vous donner un conseil : cassez vous ! Ça vaudra mieux pour vous. On comprendra, on vous en voudra pas. Manque de chance, vous êtes tombés sur la mauvaise classe !

Je regarde cet élève médusé. Il s'appelle Sergei si je me souviens bien. Fils d'un ambassadeur russe. J'ai beau chercher, personne ne m'a préparé pour affronter ce genre de situation.

Je suis sauvé par la cloche qui sonne.

- Rendez moi votre devoir.

Un par un ils passent devant moi. Posent une feuille puis sortent sans un mot.

Seul Ulric reste.

- Vous avez une texas sur vous ?
- Non pourquoi ?
- Pour que je puisse vous transmettre mon devoir.
- Tu me montreras ça demain alors.
- Vous avez vraiment l'intention de revenir ?
- Je suis prof. Pas une tapette qui baisse les bras à la première difficulté.
- Vous ne tiendrez pas une semaine.
- On verra ça.
- Vous me la rendrez demain ! dit-il en posant sa texas sur la pile de feuilles. Vous en faîtes pas, j'en ai d'autre chez moi.

Ulric sourit puis sort de la classe. Mince, je m'attendais pas à ce que le métier de prof soit si dur.


Ai-je fait le bon choix ? Je ne sais pas. Je ne sais plus.

Qu'aurait fait Onizuka à ma place ?

Il se serait battu ! Alors bat toi ! Les laisse pas tomber ces jeunes. Ils ont besoin de toi, ils ont besoin que quelqu'un arrive à croire en eux.

Il faut que je tienne !


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